CONFÉRENCE SUR LES QUESTIONS INTERNATIONALES, PARIS 4 ET 5 MAI 2013
V. Kapuralin était mandaté par la Coordination des Partis Communistes et Ouvriers de l’ex-Yougoslavie, à la conférence du PRCF sur les questions internationale, Paris, 4-5 mai 2013
Je vous salue au nom du Parti Socialiste Ouvrier de la Croatie en son nom propre ; en même temps je possède la légitimité de vous saluer au nom de la coordination du Comité des partis communistes et ouvriers, composés des cinq partis qui existent sur le territoire de l’ex-Yougoslavie.
L’escalade de la violence en cours dans le monde, commencée depuis les années quatre-vingt-dix du dernier siècle par des changements géopolitiques d’importance énorme, conduite par les forces débridées du capitalisme, est très différente des interventions et des agressions ayant eu lieu aussitôt après la deuxième guerre mondiale. Auparavant, ces agressions ont été téléguidées par les Etats-Unis, tandis que les Nations-Unies jouaient plus ou moins le rôle pour lequel elles avaient été créées. Avec la débâcle du socialisme dans l’Europe de l’Est, pendant les années quatre-vingt-dix du siècle passé, les interventions se font selon de nouvelles règles, avecdles technologies nouvelles et sous des formes nouvelles. Tout a commencé par la Première guerre du Golfe persique, une agression brutale des Etats-Unis contre l’Irak.
Cela s’est poursuivi en 1999 avec l’agression de dimension jamais connue contre la Yougoslavie et puis cela a débouché sur le dépeçage du territoire d’un Etat souverain, contrairement à tous les usages internationaux. En 2001 a suivi l’agression de l’Afghanistan, laquelle dure encore, et en 2003 a eu lieu la Deuxième guerre du Golfe, ç’est-à-dire la poursuite de la guerre contre l’Irak. En 2011 mené par les forces du centre capitaliste developpé, avec en tête les Etats-Unis, l’UE et les institutions monétaires, ces forces ont détruit la Libye, un pays socialement assez équilibré. Le crime de son chef, M. El Khadafi, était qu’il avait lutté avec succès, pendant quarante ans, contre les exploiteurs étrangers qui voulaient s’approprier le pétrole libyen, grâce auquel la Libye pouvait enrichir le pays, développer l’emploi et permettre l’instruction, la santé et les logements gratuits sur fond d’autodétermination du pays. De cette manière, Khadafi avait accompli les deux critères de la stratégie de la défense des intérêts nationaux et il avait donc mérité d’être anéanti !
– parce qu’il s’opposait au contrôle illimité des impérialistes sur les resources mondiales.
– parce qu’il avait bafoué l’ordre impérialiste mondial de la dictature du capital ainsi que les ainsi-dénommés « droits de l’homme » par le développement d’un socialisme sémi- tribal comme une alternative spécifique de la Libye.
Dans la même perspective, on prolonge l’agonie du peuple irakien, on cherche le prétexte pour attaquer l’Iran. Très dangereux pour la paix dans le monde est le conflit de l’Armée syrienne légitime avec les insurgés, les mercenaires des divers courants, financés et approvisionnés par les centres du pouvoir impérialiste. La raison pour laquelle en Syrie nous n’avons pa la répétition du scénario libyen, c’est que la Russie et la Chine se sont opposées avec décision, ce qui n’était pas le cas lors de l’agression contre la Yougoslavie et la Libye.
Dans tous ces cas, on assiste au conflit flagrant pour les territoires des autres, par un procédé connu et déjà vu, on fait tomber le pouvoir existant et on réalise un nouvel ordre des assujettis, un protectorat dans lequel le nouveau gouvernement, complètement soumis aux nouveaux patrons, permet l’exploitation des ressources, de l’infrastructure et des territoires acquis au cours de la compétition stratégique.
L’exemple de cela peut être l’intervention militaire du gouvernement français «socialiste» au Mali, ex-colonie française, pour pouvoir exploiter les ressources minérales très riches de ce pays et avec la tendance très prononcée pour restaurer la domination néocoloniale en Afrique.
Toutes ces agressions aboutissent à l’accroissement des victimes civiles par rapport aux cibles militaires et aux destructions des infrastructures : ils appellent cela les «dégâts collatéraux».
Les paramètres, par lesquels les invasions depuis les années 90 différent de celles de la période précédente, sont très clairs. Même si les Etats-Unis décident où, qui et quand attaquer, ils ne prennent plus le rôle principal dans ces attaques. Ils ne sont plus seuls à attaquer et ils tâchent de rejeter le fardeau de la guerre et des victimes sur leurs partenaires et sur les traîtres de la nation agressée. Une dimension nouvelle représente l’introduction des sujets nouveaux, comme l’OTAN et l’UE. Pendant toutte cette période, le rôle des Nations-Unies est neutralisé, et il est remplacé par celui de l’OTAN. Et pourtant l’intervention brutale en Libye a été, formellement rendue possible par l’ONU ; dans ce cas-là, elles ont cessé d’être le sujet de la paix et sont devenues le sujet de l’agression, parce que elles étaient d’accord avec l’agresseur.
La nouvelle vague des agressions dont on parle est très différente de celles du passé, par un emploi absurde des armements, et ces armes-là laissent l’environnement contaminé pour longtemps. Cela détermine le capitalisme comme un ordre destructif.
La technologie du mal appliqué par l’impérialisme mène à l’anéantissement de la souveraineté des états et des nations, donne la possibilité à des sujets singuliers de décider de la vie ou de la mort des individus et de peuples entièrs. L’essentiel aujourd’hui dans l’application de la violence se réduit à la question: qui peut et qui ne peut pas assassiner !
Bien sûr, les régimes qui disposent de la licence pour assassiner sont les pays de la soi-disant «démocratie occidentale». Ces régimes tirent ce droit de leur propre notion de la liberté et cela leur permet d’employer la violence. On a vu des gens assassinés dans leur lit, en pyjama, et tout cela est devenu un jeu vidéo, pour un public bien choisi. Comme cela, le monde réel devient la poursuite d’une histoire de cinéma, où seul l’agent secret 007 dispose d’une licence pour tuer.
La crise dure déjà depuis cinq ans; elle menace les ouvriers et les citoyens dans l’U.E. et ne manifeste aucun signe de diminution. L’endettement et le chômage sont en augmentation et les acquis des travailleurs sont réduits. Certains pays, comme la Grèce, l’Espagne et le Portugal, sont écrasés et mis sous une pression au-delà du supportable. L’Allemagne feint d’avoir surmonté la crise, mais elle cache la vérité sur la situation de ses couches sociales dominées.
Il y a plusieurs arguments pour ne pas accepter l’explication des cercles impérialistes dominants, qui affirment le caractère strictement financier et monétaire de la crise.
Premièrement : elle dure trop pour être seulement une crise financière. S’il s’agissait seulement de cela, elle aurait déjà été surmontée.
Deuxièmement : il ne s’agit pas d’absence d’argent, parce qu’on a de l’argent plus que jamais. Seulement, on ne l’utilise pas comme au Venezuela de Chavez ou dans la Libye de Khadafi, c’est-à-dire pour le bien des larges masses des citoyens, mais la plus-value atterrit dans les poches de la ploutocratie avec, à leur tête, les puissantes institutions financières. Alors, au vu de tous les indicateurs, nous sommes en droit de tirer la conclusion qu’il s’agit d’une crise globale du système.
Avec la disparition des socialismes dans l’Europe de l’est s’est perdue l’énergie dont tirait sa force le mouvement syndical et ouvrier de l’Occident européen. La restructuration de l’économie, avec toujours plus de place pour les services dans la division du travail, a des conséquences négatives sur la conscience révolutionnaire des salariés. L’augmentation du chômage, la diminution des actifs, l’augmentation des précaires parmi les travailleurs, le renouvelement des contrats de travail à court terme, causent une insécurité permanente parmi les travailleurs et conduisent à la diminution du nombre de travailleurs organisés. Les réseaux sociaux et les actions spontanées, quelques fois très massives, ne suffisent pas pour remplacer la conscience et la solidarité ouvrière, laquelle est aujourd’hui à un niveau bien plus bas qu’au siècle précédent. Dans ces conditions, nous avons des exemples de renforcement des groupes extrémistes et même fascistes.
Parce que la critique et l’autocritique font partie de la gauche révolutionnaire, nous devons admettre, en regardant la vérité droit dans les yeux, que nous avons beaucoup de responsabilités dans la situation dans laquelle nous nous sommes trouvés. La discorde qui se manifeste partout, la rivalité, les ambitions personnelles, la fragmentation et l’atomisation de la gauche, la multiplication des partis comportant un nombre de membres réduit, les manifestations de l’opportunisme, les dérives social-démocrates et l’abandon de la voie révolutionnaire nous donnent un appui incertain et peu sérieux des larges masses. Comme cela, nous agissons pour notre propre ruine et nous aidons nos ennemis de classe. La condition sine qua non pour un mouvement en avant exige de surmonter les divisions existantes en prenant appui sur la raison de la classe. Le capitalisme est arrivé au terme de sa mission historique, il ne peut pas donner de réponses aux besoins de l’humanité et il cause des crises sociales, toujours plus profondes, politiques et aussi écologiques. Avec tout cela, il apparaît comme un système destructif. L’analyse de ce caractère destructif nous oblige à déplacer notre action de la sphère essentielle à la sphère existentielle.
SI L’HUMANITÉ N’ARRIVE PAS À ANÉANTIR LE CAPITALISME, C’EST ELLE QUI SERA ANÉANTIE PAR LE CAPITALISME !