« Les étoiles du gauchisme, de la CFDT et de la social-démocratie qui, en Mai 68, tentaient de « prendre de gauche » le PCF et la CGT, crièrent au « désaveu de la base » quand la grève continua à Billancourt après les pourparlers de Grenelle. Ancien secrétaire général du syndicat CGT de Renault-Billancourt (notre camarade Roger Silvain avait aussi d’importantes responsabilités à la CGT-Renault), Aimé Halbeher rétablit les faits dans la déclaration ci-dessous.
Où sont aujourd’hui les étoiles gauchistes évoquées ci-dessus ? L’ « Obs » fait sa dernière Une sur « Mao, le plus grand criminel de l’histoire » (merci pour Hitler et bravo pour le respect manifesté par l’Obs à l’égard du peuple chinois !) alors qu’en 68 et dans les années qui suivirent, par haine du PCF et de la CGT, Jean Daniel (alors patron de l’Obs) et ses acolytes encensaient la « Révolution culturelle » et portaient aux nues un certain maoïsme français, notamment les prétendus « spontanéistes ». Le Parti « socialiste » de Mitterrand (qui se nommait alors la FGDS), qui voulait « prendre le pouvoir » en 68 (souvenons-nous de l’épisode irresponsable du stade Charléty alors que les chars gaullistes de Massu sur Paris) rampe devant le MEDEF, l’OTAN et l’Arabie saoudite.
Quant aux dirigeants de la « Gauche prolétarienne » – que nous ne confondons pas avec les jeunes militants de base qui sacrifièrent souvent leurs études, voire leur vie, pour « faire la révolution » -, les plus connus d’entre eux sont devenus des figures de proue grassement rémunérées du camp bourgeois : devenu le grand penseur du MEDEF, Denis Kessler appelle à liquider les acquis du CNR. Feu André Glucksmann s’est mué en porte-flingue idéologique de Reagan et des euromissiles Pershing. Benny Lévy n’a pas tardé à rallier l’Etat colonialiste israélien. Enfin, Serge July et son journal « Libé » sont emblématiques de cette génération d’intellos arrivistes, gauchistes quand c’était à la mode, néolibéraux quand « le vent d’Ouest l’eut emporté sur le vent d’’Est », mais continûment anticommunistes, antisoviétiques et antijacobins. Ne parlons pas de Cohn-Bendit, le douteux boutefeu de service en 1968, qui est devenu le héraut de l’UE pilotée par Berlin, ni de Saint Rocard qui, avant d’engager la France dans la croisade de Bush 1er contre l’Irak en 1991, tançait le PCF de Jacques Duclos et signait un livre appelant à la guerre civile révolutionnaire, épisode pudiquement tu par presque tous les médias lors de « l’hommage national » qui vient de lui être dédié…
Changeons de pays sinon d’époque : quelques années plus tard, c’est un certain Jose Manuel Barroso, qui se lança en politique dans les rangs du maoïsme étudiant, histoire de prendre de gauche le PC portugais et de diviser les forces progressistes durant la « Révolution des Œillets ». Ce fringant « révolutionnaire » devint par la suite le n°1 de l’UE néolibérale avant d’entrer tout récemment dans le directoire de Goldman-Sachs : il n’y a que la première trahison qui coûte !
« Les faits sont têtus » et la « maladie infantile du communisme » dénoncée par Lénine dans son opuscule contre le gauchisme, est souvent associée, à notre époque, à la maladie sénile du capitalisme frappé de pourrissement historique…
Quant aux militants franchement communistes, malgré la mutation-liquidation du PCF « euro-constructif » et les lourdes dérives du « syndicalisme rassemblé » qui l’ont accompagnée, qu’ils soient ou non membres du PRCF, qu’ils aient ou non conservé leurs positions d’alors sur l’URSS et sur la Chine, ils sont invariablement restés DU MEME COTE DE LA BARRICADE SOCIALE, du côté des travailleurs en lutte pour changer le monde. Car résister, c’est aussi et d’abord, TENIR LA DISTANCE.
GG pour www.initiative-communiste.fr
Hommage à Georges Séguy : Aimé Halbeher secrétaire en 1968 de la CGT Boulogne-Billancourt rétablit les faits !
En mai 1968 Aimé Halbeher est le jeune secrétaire de la section syndicale CGT de Renaul- Billancourt. Dans les médias, chez les journalistes et les détracteurs de la CGT la chose est entendue : » G. Séguy s’est fait hué par les travailleurs à l’ile Seguin ». A force de le répéter depuis plus de 50 ans ils ont fini par y croire … ou faire semblant. C’est qu’il s’agit d’abord d’instiller le doute et de dénigrer la principale centrale syndicale de ce pays et de l’affaiblir ! Notre ami et camarade Aimé Halbeher rétablit donc les faits. Les falsificateurs tiendront-t-ils compte de cette mise au point comme le voudrait le respect des faits et de la réalité ? – Origine de l’article : >http://www.frontsyndical- classe.org…]
Notre camarade G. Seguy nous a quittés. Son décès provoque la plupart du temps des réactions positives et élogieuses à son égard mais aussi des calomnies inadmissibles. En tant que secrétaire général du syndicat CGT à l’usine Renault-Billancourt en 1968, je tiens à rétablir la vérité sur l’une des nombreuses falsifications de l’histoire qui sont encore reprises par des médias, hommes politiques ou historiens. Elle concerne l’attitude de la CGT et de son secrétaire national G Seguy durant la grande grève qu’à connu la France en mai et juin 1968.
Selon eux, G. Seguy serait venu le 27 mai 1968 chez Renault à Billancourt à la fin des discussions de Grenelle pour appeler à la reprise du travail. Il aurait été hué et sifflé par les grévistes.
Cette grève a concerné 9 millions de salariés. Elle fut victorieuse et elle modifia le rapport des forces social pendant de longues années en faveur des salariés qui en profitèrent pour augmenter le nombre d’acquis sociaux obtenus en 1968.
La première moisson des succès notamment l’augmentation générale des salaires de 10% (+ 35% pour le SMIC), la réduction du temps de travail sans perte de salaire, la reconnaissance du droit syndical dans les entreprises, le paiement des jours de grève, etc… s’est concrétisé au cours des discussions de Grenelle réunissant le 26 et 27 mai les centrales syndicales ouvrières, le gouvernement gaulliste et les dirigeants du patronat.
Lorsque les discussions se sont terminées, il est environ 6h du matin. Je suis informé par les radios du constat des discussions. Nous avions convoqué la totalité des salariés de l’usine à un rassemblement dans l’Ile Seguin pour les informer de ces résultats et décider ensemble de la conduite à tenir concernant notre grève avec occupation qui dure depuis 10 jours. A l écoute des résultats, j’apprécie leurs portées positives pour des millions de salariés notamment dans les PME mais aussi le tremplin qu’ils nous offrent chez Renault pour imposer l’ouverture des discussions sur la plate forme revendicative votée le 17 mai par 25000 salariés lors de leurs décisions d’engager une grève générale avec occupation.
Je prends contact avec mes camarades de la direction du syndicat qui sont unanimes pour estimer que les salariés qui occupent l’usine, eux aussi informés par leurs radios dans les piquets de grève, pensent que le constat de Grenelle avec ses importants acquis mais aussi ses insuffisances ne répondent pas, loin s’en faut, aux exigences formulées par le personnel de Renault Billancourt lors de leur décision d’engager la grève générale.
Quelques exemples parmi d’autres :
Nous demandions que pas un revenu mensuel ne soit inférieur à 1000 frs par mois dans le groupe Renault or, malgré son augmentation de 35 %, le salaire minimum mensuel en France, après Grenelle, atteindra 650 frs
Nous exigions la suppression des contrats provisoires (déjà du CDD !), la suppression des sanctions anti grève sur les primes, la suppression des déclassements en cas de changements de poste et du système de salaire liés à la machine.
Autant de questions très sensibles pour des milliers d’employés et d’ouvriers.Ce n’est pas à Grenelle que l’on pouvait régler cela mais à Billancourt !
Le rassemblement a lieu à 9h du matin. J’apprends que G. Séguy viendra rendre compte du constat de Grenelle avec Benoit Frachon aux 25000 salariés présents. Il n’était évidemment pas question pour eux d’appeler les salariés de Renault à cesser ou poursuivre leur grève.
En les attendant je suis chargé par la direction du syndicat CGT de l’usine, et en accord avec la CFDT et FO de présenter brièvement les principaux résultats de Grenelle que nous connaissions mais surtout de fustiger la direction de l’usine et le gouvernement qui refusent d’ouvrir les discussions. En conséquence, je propose au vote des travailleurs la poursuite de la grève reconductible avec occupation aussi longtemps que ces négociations ne se seront pas tenues.L’immense majorité des salariés présents acclame et vote la poursuite de la grève.
G. Séguy apprend cette décision lors de son arrivée en voiture à Billancourt.
Par conséquent la poursuite de la grève s’est décidée avant l’arrivée de G. Seguy.
Cette décision n’a pas concerné le résultat de Grenelle mais l’obstination de la direction et du gouvernement à refuser toute discussion. Les grandes entreprises, notamment dans l’automobile, Renault, Peugeot, Citroën ne négocieront que vers le 20 juin 1968.
G. Séguy avec B. Frachon présentent aux salariés de Renault les conditions dans lesquelles se sont déroulées les discussions et déplorent au passage, que contrairement à 1936, l’unité syndicale a cruellement fait défaut. G. Séguy précise qu’aucun accord signé n’est intervenu. Il s’agit d’un constat de discussion qu’il faut améliorer dans chaque entreprise.
Il présente les acquis sociaux obtenus sous les applaudissements nourris et les revendications insuffisamment satisfaites ou totalement insatisfaites sous les huées adressées au patronat et au gouvernement.
G Séguy déclare : « il appartient aux travailleurs en France de se prononcer démocratiquement sur la suite à donner à leur grève comme vous venez de le faire tout à l’heure ». En tout cas ajoute t-il, « cette grande et magnifique grève appartient aux travailleurs. Comme nous n’avons pas donné de mot d’ordre de grève générale, il n’est pas question pour nous d’appeler à une quelconque reprise du travail ».
Pour ce qui est de la suite de la grève à Renault-Billancourt, à Cléon, Le Mans, Flins, Sandouville, il faudra attendre 33 jours de grève pour aboutir à un constat de fin de grève chez Renault améliorant sensiblement les résultats de Grenelle .La reprise du travail fut votée par bulletin à 75 %.
Je crois pour en terminer que ceux qui à droite ou dans la mouvance « gauche caviar » tentent depuis près de 50 ans de salir l’action exemplaire de G. Séguy, feraient mieux de saluer celui qui, avec B. Frachon, a su, dès le début de la grève de mai 68, lui donner un contenu auto gestionnaire et démocratique.
Cette ligne syndicale nationale fut un rempart remarquable face aux tentatives classiques du patronat, de la droite ou de la gauche réformiste d’ourdir des provocations, des tentatives de récupérations pour déposséder la classe ouvrière de la direction de ses grèves et manifestations.
Ce fut encore le cas récemment lors des journées d’action contre la loi El Khomri. Mais la vigilance et l’opiniâtreté des dirigeants de la CGT ont su mettre en échec les instigateurs de provocations et conserver l’énorme sympathie de l’opinion à leur mouvement.
Aimé HALBEHER – Le 19 Août 2016