Nous venons d’apprendre le décès du camarade Roger Silvain, cette figure de proue de la grande CGT ouvrière de classe et de masse qui fut longtemps un pilier du Front syndical de classe et un membre éminent du Comité central du PRCF et qui demeura membre de son comité de parrainage avant d’être amené par l’âge à se retirer de toute activité militante.
Fils d’ouvrier et métallo typique de cette classe ouvrière parisienne dont il possédait la gouaille, le verbe haut, le contact direct et l’humour cinglant, Roger Silvain avait adhéré très jeune à la CGT et au PCF dont il devint rapidement une figure centrale chez Renault, dans la grande usine de Billancourt, à côté de son cher camarade Aimé Halbeher. Etant donné le rôle central et hautement symbolique de Renault-Billancourt, où le PCF et la CGT étaient fortement organisés, dans les combats ouvriers et antifascistes de la guerre puis de l’après-guerre, Roger dut porter sur ses larges épaules, avec la section communiste de l’usine et celle de la CGT, la responsabilité d’une bonne partie du conflit historique de mai 1968 qui se traduisit par de grandes avancées, notamment salariales, pour tous les salariés de France. C’est en effet sur le site de Billancourt, Place Nationale, à une époque où l’internet n’existait pas et alors que 9 millions de salariés en grève paralysaient le pays et les transmissions, que Georges Séguy, alors secrétaire général de la CGT et principal négociateur des accords de Grenelle avec Henri Krasucki, venait périodiquement rendre compte devant l’AG des grévistes, les votes des Renault ayant un grand retentissement auprès des prolétaires de tout le pays.
À la même époque, et dans les années qui suivirent, Roger et ses camarades durent endurer à la fois les tentatives de répression patronale et les agressions et menaces constantes des groupes gauchistes dont certains allaient jusqu’à menacer de mort les dirigeants communistes et cégétistes. Roger a vécu douloureusement certains épisodes de ce conflit dans le conflit car il était fondamentalement resté un ouvrier parmi les ouvriers et il ne voyait pas sans tristesse profonde se déployer un anti-cégétisme primaire et un anticommunisme faussement « de gauche » qui, derrière les références à la Révolution culturelle chinoise, n’avait d’autre effet que de caricaturer le marxisme-léninisme tout en dévoyant l’engagement et le désintéressement bien réel d’une partie de la jeune classe ouvrière.
En 1981, Roger devint, avec d’autres camarades, l’un des administrateurs salariés de Renault. Il gardait un souvenir pour le moins mitigé de l’époque mitterrandienne où, avec l’accord de « ministres communistes » servant de caution au pouvoir, de pseudo-nationalisations vidées de leur sens par le pouvoir « socialiste » et privées de toute dynamique d’intervention prolétarienne véritable n’avaient d’autre sens que de préparer la destruction du produire en France industriel, et avec lui, le déclassement massif du prolétariat rouge de France avec en particulier la casse de la machine-outil dont Renault-Billancourt était un haut lieu. C’est d’ailleurs sous le gouvernement Rocard que la direction CGT de l’usine fut méthodiquement réprimée et décapitée, Roger, soutenu par le PCF et par la CGT d’alors, jetant toutes ses forces dans la défense des « 9 de Billancourt » puis dans la tentative de sauver le site de sa fermeture programmée en proposant la production de la « Neutral », un nouveau véhicule populaire conçu de A à Z, hors cadre patronal, par les ingénieurs et par les ouvriers de l’usine eux-mêmes.
Après avoir initialement subi sans protestation publique les abandons idéologiques à répétition du PCF, puis les tout débuts de la « mutation » social-démocrate et européiste du PCF pilotée par Hue et avoir enduré, parallèlement, les dérives euro-réformistes de la direction confédérale de la CGT, Roger avait quitté le PCF. Il adhéra d’abord au groupe « Communistes » de Rolande Perlican, puis, constatant que ce groupe s’enfermait dans le sectarisme, il avait rejoint le PRCF en contactant son vieux compagnon communiste du 92, le camarade Jean-Pierre Hemmen, vice-président du PRCF. Élu membre de la direction nationale du PRCF, Roger soutien chaleureusement la création de la JRCF. Il s’engagea ensuite à fond dans la création, avec d’autres syndicalistes membres et non-membres du PRCF, du Front syndical de classe qui militait à contre-courant, en subissant souvent les pires attaques et calomnies, pour remettre la CGT de plus en plus euro-dérivante et inféodée à la CES sur les rails gagnants du combat de classe et de masse. À plusieurs reprises le camarade Silvain prit la parole, en tant que président du FSC, au stand du PRCF dans le cadre de la fête de l’Huma et il serait sans doute heureux de voir aujourd’hui que nombre de bases syndicales, d’UL et de Fédérations CGT se tournent à nouveau vers la Fédération Syndicale Mondiale, vers le syndicalisme rouge et de terrain, sans crainte de susciter l’ire somme toute réjouissante des caciques euro-réformistes qui rêvent d’arrimer définitivement la CGT au pseudo-syndicalisme CONTRE-réformiste et jaunissant de la CFDT et de la CES maastrichtienne.
Roger, ton combat pour le syndicalisme de lutte de classes continue et, tôt ou tard, il triomphera dans l’intérêt du monde du travail, de la jeunesse et de la nation. À ses parents, à ses compagnons de lutte, à tous ceux qui ont connu ce camarade, rugueux parfois, mais toujours attachant et direct, le PRCF adresse ses condoléances les plus fraternelles. Honneur à notre camarade Roger Silvain!
Georges Gastaud, secrétaire national du PRCF, syndicaliste de lutte.