Vaclav Havel et Kim-Jong-Il sont morts le même jour. La manière dont sont traités ces deux décès en dit long sur l’idéologie dominante, ensemble des idées conformes aux intérêts de la classe dominante à savoir de la bourgeoisie, détentrice des grands moyens de production, d’échange et de communication. Idéologie dominante qui, au moyen des médias aux mains du capital et du gouvernement, exerce une hégémonie idéologique sur toute la société.
Ainsi V. Havel est présenté comme un combattant de la liberté, une icône de la révolution de velours, un Européen convaincu, un démocrate exemplaire, un résistant au totalitarisme communiste.
Ainsi Kim-Jong-Il est il présenté comme un dictateur sanguinaire, un fauteur de guerre, un corrompu mégalomane, un paranoïaque dangereux.
Pourquoi ces traitements….contrastés, pour utiliser un euphémisme ?
Parce que l’un, Havel, était un grand bourgeois au service des intérêts de la bourgeoisie et l’autre, Kim, un homme luttant contre ces mêmes intérêts. L’un est un ami, l’autre un ennemi du capitalisme. L’un doit être encensé, quels que soient ses défauts, l’autre discrédité quelles que soient ses qualités ; l’un a droit à une hagiographie, l’autre à la calomnie. Et la machine à créer du consensus se met en marche : télés, radios, journaux (de droite ou de la fausse gauche pareillement), tous nous délivrent le même conte à endormir les consciences, à camoufler les vérités dérangeant l’ordre capitaliste établi.
Que devrait-on tirer comme conclusion de ce traitement médiatico-politique, idéologique, de ces deux morts ?
La vérité des faits est totalement niée. L’histoire de chacun, de chaque pays, ses traditions culturelles, sociales, ignorés : contre quoi et contre qui ces deux hommes ont-ils lutté ? Vous n’en saurez rien. Qui a appuyé leurs combats ? Vous n’en saurez rien. Quels furent les résultats concrets de leurs politiques ? Vous n’en saurez rien. Dans quel contexte économique, culturel, social ces deux acteurs de la politique internationale ont-ils agit ? Vous n’en saurez rien.
Ce que vous saurez c’est qu’il y avait un gentil, un cow-boy, blanc, anticommuniste et européiste, pro américain, – il a même approuvé la guerre en Irak – , et un méchant, un vilain Peau-Rouge, ou plutôt jaune, fourbe, qui face aux menaces pesant sur son pays a tenté comme de Gaulle de construire une dissuasion atomique qui ne menace personne et qu’étranglé économiquement, il a tenté de résister comme il le pouvait.
Certes il y aurait à dire sur l’éclatement antidémocratique de la Tchécoslovaquie sous le règne de V. Havel et sur l’entreprise actuelle qui consiste à interdire la Jeunesse communiste KSM et le PCBM : sans doute au nom de la « liberté universelle » ? quant au désintéressement de Havel, sachons seulement que la famille de cet homme, qui possédait de grands biens en Tchécoslovaquie avant la révolution de 1948, a retrouvé tous ses biens après la CONTRE-révolution de velours. Qui donc y a perdu sinon la classe ouvrière tchèque, redevenue valet d’armes des monopoles capitalistes allemands ?
Certes il y aurait à dire sur le socialisme coréen* dont nous ne partageons pas forcément toutes les conceptions (en particulier la direction dynastique du Parti) en relation avec son histoire tragique, la pression militaire incroyable dont il est l’objet depuis 50 ans, et sa culture millénaire marquée par les traditions confucéennes. Rappelons pour le moins ceci : depuis cinquante ans, ce n’est pas la Corée du nord qui a stationné ses troupes surarmées, appuyées par des sous-marins atomiques, à proximité de Washington. C’est au contraire Washington qui stationne ses troupes en Corée du sud, qui – avec le soutien du régime capitaliste ultra-autoritaire et anti-ouvrier du Sud – , refuse toutes les tentatives de réunification (selon le principe « un Etat deux systèmes ») et qui aurait sûrement déjà fondu sur la Corée comme il a fondu sur l’Irak si les faucons de Washington ne redoutaient pas les réactions de la Chine et de la Russie…
Mais de cela pas un mot : la vérité n’intéresse pas ceux qui nous gouvernent, seuls les mensonges qui leurs permettent de continuer à gouverner et à s’enrichir comptent. Nous n’aurons droit, nous vulgaire populo, qu’à un conte, une « storytelling » * pour notre édification idéologique : rien qui ressemble à une analyse critique, sérieuse, complète, voire de classe pour les plus hardis ou inconscients des rapports de forces.
Bref si vous voulez savoir qui sont ces deux hommes éteignez vos télés, ne lisez ni « Le Monde », ni « Le Figaro », fermez « France Inter » ou « Europe1 » et lisez, tient pourquoi pas…. « Initiative Communiste » !
AM 19 décembre 2011.
* Car ils ont théorisé sur les bobars qu’ils nous font avaler : le storytelling est l’application de procédés narratifs dans la technique de communication pour renforcer l’adhésion du public au fond du discours. On le trouve parfois traduit en français par communication narrative. C’est une méthode en développement dans les domaines de la stratégie, du marketing et de la communication)