De nos jours les actualités brulantes et les scandales se succèdent avec une telle vitesse que le scandale d’hier est aussitôt écrasé par celui du lendemain qui finit enterré par le suivant tant est si bien que le drame en mer qui a tant émoustillé les médias « mainstreams » et qui a tenu en haleine l’opinion publique est d’ores est déjà en train de passer au stade d’archives historiques poussiéreuses dont plus personne ne veut parler. Peut-être que le problème se trouve là…
L’avantage de cette hyper consommation et de cet hyper gaspillage de l’information par l’industrie médiatique c’est que nous pouvons nous accorder un temps de réflexion à froid sur le sujet à tout juste un peu plus d’une semaine du drame. Presque au même moment de ce drame se produisait une autre tragédie, le 15 juin. Un navire surchargé de migrants faisait naufrage dans les eaux territoriales de Grèce dont près d’une centaine de noyés et des centaines de blessés, ce qui en fait l’un des pires drames en Méditerranée depuis les dernières années.
Qu’est ce qui rend si proches ces deux drames ? A première vue pas grand-chose si ce n’est la proximité des dates et qu’ils ont eu lieu en mer, cependant la tragédie classique du Titanic nous a appris qu’on ne juge pas un iceberg à sa partie visible. Il nous appartient de regarder au-dessous du niveau de la mer pour avoir une vue complète du tableau.
Face à ces drames la réaction primaire est la première chose qui ressort et de la quelle on se doit de s’éloigner. D’un côté les réactions des xénophobes et autres obsédés de la question de l’immigration vont se réjouir de la mort et de la souffrance des naufragés du navire passeur tout en pleurant abondamment la poignée de milliardaires engloutis avec leur sous-marin. De l’autre côté la typique réaction gauchiste sera exactement … le contraire… réjouissances à propos des « sales riches » écrasés par l’implosion du submersible à quelques 3800 mètres de profondeur et le deuil pour les migrants noyés tout en dénonçant l’injustice du système médiatique qui jetterai davantage les projecteurs sur les milliardaires disparus que sur les migrants en croyant avoir là découvert la preuve de l’injustice du capitalisme. Comme si la solution serait de mettre sous tous les feux des projecteurs les drames des migrants où simplement de tous les accueillir les bras ouverts en leur offrant un job à 800 balles par mois dans une boîte de sous-traitance bien heureuse d’exploiter de la main d’œuvre immigré au lieu de devoir respecter le droit du travail français.
Toutes ces prétendues solutions sont en réalités bien confortables pour le système capitaliste et font partie de sa dialectique interne, ses oppositions internes non antagoniques, c’est-à-dire qui ne le menace nullement. D’un côté les fachos avides de pouvoir réformer l’UE en bon « patriotes » europeistes qu’ils sont, pour construire des murs et des nids de mitrailleuses sur les plages du Sud, d’un autre côté les béni oui oui petit bourgeois et autres gauchistes universitaires qui militent pour des ONG au service du capital financier, de l’utopie des sans frontières, et en réalité des réseaux d’exploitation des migrants dont ils ne sont que la partie souriante, l’autre étant les passeurs responsables des noyades de milliers d’être humains. Arrêtons deux secondes la naïveté du nouveau-né qui découvre l’eau chaude en termes politiques, quelle est la véritable différence entre un navire de passeur et celui d’une ONG d’aide humanitaire ? Aucune sauf pour le logo et le fait que le premier est officiellement illégal et le second non.
Les deux participent au même système qui est la traite de la main œuvre immigrée dont l’objectif est de constamment écraser les salaires, et tous les droits sociaux, vers le bas chez nous tout en garantissant le pillage des ressources des pays du Sud. On ne résout pas le problème de l’immigration en s’attaquant aux migrants mais en s’attaquant aux racines du système qui organise leur traite. Le capital financier, les réseaux de passeur, l’instabilité des pays qui bordent la mer méditerranée à cause des agressions et coup d’Etat orchestrés par l’impérialisme étasunien, etc.
Qui plus est-il est inconcevable que la France puisse exercer une quelconque souveraineté sur ses frontières et leur gestion dans le cadre de la dictature de l’entité européiste (UE) dont le directoire nommé « commission européenne », de plus en plus ressemblant à un Reich-Komissariat, interdit formellement aux Etats membres tout contrôle de leurs frontières sauf autorisation exceptionnelle express du régime. On ne pourra donc jamais sortir de cet enfer sans rompre d’abord avec la dictature européiste, corolaire de l’OTAN.
En ce qui concerne le drame de l’Oceangate, il nous faut dépasser la simple haine de classe, qui trouve toutes ses justifications mais qui nous empêche de voir le tableau complet. En effet l’ignorance du milieu maritime semble obscurcir l’esprit de certains. Tout comme ceux qui se réjouissent des orques qui cassent les safrans des voiliers en mer d’Espagne. Faut-il leur rappeler que les milliardaires ne circulent pas en bateau à voile qui valent le prix d’un camping-car ? Sauf bien sûr les « verts ».
En réalité parmi les victimes figure l’un des cofondateurs du projet Stockton Rush et l’un des éminents scientifique spécialiste du Titanic. Les trois autres étaient effectivement d’authentiques capitalistes en manque de sensations fortes privilégiées. Cependant on peut douter qu’ils aient voulu sciemment se suicider. Le projet étant en phase de test. Le sous-marin n’était qu’un prototype. Continuons avec quelques données du problème.
David Lochridge, ancien responsable sécurité d’OceanGate, affirme avoir été licencié en janvier 2018 après avoir « soulevé des problèmes de sécurité importants concernant la conception expérimentale et non testée du Titan ».[1]
Plus récemment James Cameron le réalisateur vedette étasunien et fan d’exploration sous-marine, s’est dit « frappé par la similitude de la catastrophe du Titanic, où le capitaine a été averti à plusieurs reprises de la présence de glace devant son navire et a pourtant foncé à pleine vitesse dans un champ de glace par une nuit sans lune et beaucoup de personnes sont mortes ».
« Pour nous, il s’agit d’une tragédie très similaire, où les avertissements n’ont pas été pris en compte. Le fait que l’accident se produise sur le même site, avec toutes les activités de plongée qui se déroulent dans le monde entier, est tout simplement stupéfiant. C’est vraiment surréaliste », a-t-il conclu.
Le roman semble déjà écrit. En fait c’est même pire, Netflix a déjà annoncé un documentaire choc sur la disparition du Titan, alors même que les restes n’ont pas étaient complètement découverts et l’enquête ne fait que commencer. Pendant ce temps les médias profitaient de l’occasion pour remplir des marges d’audience juteuse sur l’attente morbide de ce que tout le monde savait déjà, à savoir la mort des cinq passagers et la destruction du submersible. Il ne manquerait plus qu’une nouvelle entreprise ne se monte rien que pour aller visiter les restes du sous-marin « découvrez la tragédie du Titanic 2.0 », « billets limités ». Histoire de relancer l’intérêt pour « l’attraction » on ferait imploser un nouveau sous-marin et on vendrait déjà les billets pour le suivant avant même que le précédent ait coulé au fond de l’océan.
Le capitalisme tardif et décadent tend à transformer absolument toute activité humaine et même jusqu’au gênes du corps humain en des marchandises. Tous les domaines de l’univers matériel doivent être immédiatement transformés en marchandises, en biens ou services échangeables. Matériels ou immatériels.
La logique du système est le profit maximum par-dessus tout autre chose. Ce qui devait être une activité réservée à la recherche scientifique et aux institutions publiques devient du tourisme de luxe. Mais même pour des VIP, on verra à rentabiliser l’activité à « moindres frais ». Quelques petites failles structurelles, 4000 mètres de profondeur, la pression de la disparition prochaine de l’épave et le tour est joué !
Dans ce cadre les capitalistes peuvent devenir des victimes de leur propre système, littéralement. La nécessité du communisme pour émanciper le genre humain ne se limite pas aux travailleurs, nous en avons maintenant un exemple plus que concret.
[1] https://www.bfmtv.com/economie/les-passagers-sont-en-danger-un-cadre-d-ocean-gate-licencie-avait-alerte-l-entreprise-en-2018_AD-202306210159.html