CONFÉRENCE SUR LES QUESTIONS INTERNATIONALES, 4 ET 5 MAI 2013
Intervention des communistes algériens à la rencontre internationaliste organisée par le Pôle de Renaissance Communiste en France
L’aggravation de la crise du système capitaliste, l’exacerbation de son agressivité au plan international, de ses interventions militaires meurtrières pour le contrôle des sources d’énergie, ses attaques redoublées contre les conquêtes sociales et politiques de la classe ouvrière, placent le mouvement communiste devant des responsabilités historiques immenses.
La disparition du camp socialiste après la victoire de la contre-révolution en URSS a créé un rapport des forces international défavorable. Mais cette situation n’a pas fait et ne peut pas faire disparaître les contradictions fondamentales du capitalisme qui avaient conduit en octobre 1917 à la victoire du prolétariat russe et, après la deuxième guerre mondiale, à la constitution du camp socialiste. Le renforcement de l’exploitation de la classe ouvrière, inhérent aux lois du mode de production capitaliste, produit et produira inévitablement les conditions de l’accentuation de la lutte des classes entre la bourgeoisie et la classe ouvrière et de la prise de conscience de plus en plus de travailleurs.
Les peuples qui ont vécu le socialisme sont en train de faire l’expérience de la perte de leurs conquêtes sociales et politiques, matérielles et culturelles, de la dégradation de leur situation par suite de la restauration des rapports d’exploitation. Ils commencent à faire la comparaison entre la sécurité et la dignité que le socialisme leur assurait et les « bienfaits » que leur a apportés le monde capitaliste impitoyable dominé par une poignée de loups jamais rassasiés: misère et déchéance, incertitudes et peur du lendemain, racisme, obscurantisme et affrontements ethniques, etc.
De même, les peuples des pays anciennement colonisés font la différence entre la possibilité qu’ils avaient du temps de l’existence de l’Union soviétique de tenir tête aux pays impérialistes et leur situation d’aujourd’hui où ils subissent les injonctions à se plier aux désirs des multinationales et de leurs Etats impérialistes, les ingérences et les interventions militaires quand ils tentent de défendre leur indépendance.
Les conséquences de la disparition du camp socialiste ne doivent pas être vues sous le seul angle du recul des idées communistes et de l’évolution défavorable du rapport des forces. Les travailleurs et les peuples assimilent peu à peu les leçons de l’histoire. Ils se rendent compte qu’ils se sont laissés duper par la réaction. L’avant-garde révolutionnaire apprend elle aussi en tirant les enseignements de ses propres erreurs. Elle voit notamment à quels résultats ont conduit sa sous-estimation des capacités de la réaction à s’adapter, à poursuivre ses menées subversives d’infiltration de l’Etat socialiste avec le soutien de l’impérialisme, l’abandon de la dictature du prolétariat, au nom de la proclamation erronée que l’Etat était déjà devenu l’Etat du peuple tout entier, l’idéalisation de la coexistence pacifique avec le système impérialiste, les conséquences de la violation des lois de l’édification planifiée du socialisme, etc.
Dans la plupart des pays, les contradictions de classe ont atteint un haut degré d’acuité. La classe ouvrière est la plus durement touchée par la crise. Mais les autres couches sociales non-monopolistes ne sont pas non plus épargnées par ses conséquences. Les affrontements de classe sont appelés à s’intensifier. Le mouvement communiste a la possibilité de surmonter les reculs qu’il a subis ces 20 dernières années. Il peut contrecarrer avec succès les effets de la propagation à grande échelle des différentes formes de l’opportunisme qui ont affaibli la combativité de la classe ouvrière dans de nombreux pays: défaitisme, esprit de résignation, négation du caractère socialiste de l’expérience de l’URSS, tendance très forte à la collaboration de classe sous les prétextes les plus divers, d’un pays à l’autre, rejet de la conception historique du marxisme-léninisme et de ses prévisions quant à la nécessité de l’abolition du capitalisme, de l’instauration du pouvoir de la classe ouvrière et de l’avènement de la société socialiste.
L’affrontement de classe se déroule tous les jours. Sous la pression idéologique énorme de la bourgeoisie, la classe ouvrière, trahie par la social-démocratie et les opportunistes, démoralisée par ses défaites, a tendance à ne pas inscrire dans ses préoccupations politiques l’objectif du socialisme maintenant. Mais la bourgeoisie se charge d’aiguiser les contradictions en profitant de son affaiblissement pour lui reprendre tout ce qu’elle avait arraché dans un contexte international plus favorable aux idées communistes. Moins la classe ouvrière résiste aux assauts des capitalistes et plus ces derniers multiplient leurs attaques pour la ramener loin en arrière, à des conditions sociales d’extrême paupérisation. La mise en concurrence à l’échelle mondiale des travailleurs de différents pays a pour effet de faire baisser les salaires et de hausser au maximum leur taux de profit.
Il arrivera inévitablement que la classe ouvrière ne supportera plus les privations, les pertes de salaires, le recul de l’âge du départ à la retraite, la détérioration de la qualité des soins, etc. L’explosion révolutionnaire à venir ne surprendra que ceux qui auront avalé les fables de la propagande réactionnaire sur les capacités du capitalisme à assurer le bien-être de tous et l’irréalisme du communisme.
Déjà on voit comment le mouvement ouvrier et populaire relève la tête pour exprimer son opposition aux plans de rigueur, au démantèlement des conquêtes sociales.
En Algérie, passés les temps d’hébètement provoqués par la violente attaque des partisans du capitalisme contre le secteur public économique et les acquis sociaux des travailleurs, les nouvelles générations de prolétaires se battent pour arracher des augmentations de salaires, réduire la pression sauvage des patrons.
Cette situation, à l’échelle mondiale comme à l’échelle de chaque pays, exige des communistes qu’ils intensifient leurs efforts idéologiques en direction de la classe ouvrière pour lui montrer qu’elle a suffisamment de capacité et de force pour reprendre l’initiative dans la lutte pour le renversement de l’ordre capitaliste. Ce travail de clarification politique et idéologique est étroitement lié à la nécessité pour les communistes de déployer en permanence toute leur énergie pour s’enraciner au sein de la classe ouvrière. Du fait même des contradictions internes du système capitaliste, de sa tendance à s’appuyer sur une aristocratie ouvrière pour maintenir la classe ouvrière sous le joug de l’esclavage salarié, même une simple lutte comme celle de la défense de l’emploi menacé par une délocalisation est inconcevable sans un travail idéologique pour démasquer le sale travail des opportunistes dans les syndicats et dans les partis de « gauche » visant à pousser à la collaboration de classe, à la résignation sous les coups de la bourgeoisie. Les travailleurs sont inévitablement amenés à constater que leur lutte pour des revendications matérielles qui semblent très terre à terre comme la défense de l’emploi, des sources de vie de l’ouvrier, de la préservation de cet immense acquis civilisationnel du développement des forces productives dans les vieux pays capitalistes, ne peut mener à aucun résultat si elle n’est pas associée à des changements sociaux et politiques radicaux. La popularisation du mot d’ordre de la nécessité du passage à la révolution socialiste, au contrôle des moyens de production par la classe ouvrière, de la conquête du pouvoir est à l’ordre du jour. Il ne peut exister d’autre voie pour mettre fin à une destruction aussi régressive du fruit du travail de générations d’ouvriers, d’ingénieurs, d’intellectuels et de savants.
Comme l’indiquaient Marx, Engels et Lénine le mouvement révolutionnaire d’émancipation de la classe ouvrière ne peut avancer que s’il mène en permanence le combat sur les fronts de la lutte économique, de la lutte politique et de la lutte idéologique.
La situation se caractérise par un recul politique et idéologique du mouvement ouvrier et, en même temps, par un accroissement gigantesque de ses effectifs à l’échelle mondiale, du fait de l’extension en profondeur et en largeur du capitalisme. Il en résulte que la lutte idéologique requiert en ces moments une attention particulière chez les communistes. Il faut réfuter de façon méthodique et offensive tous les pseudo arguments mis en avant par les propagandistes de la bourgeoisie, par la social-démocratie, par les opportunistes, pour semer le doute aux sein des exploités sur la justesse et la possibilité de renverser le système capitaliste, de construire une société socialiste fondée sur la socialisation de la propriété des grands moyens de production.
Quand les idées s’emparent des masses, elles deviennent des forces matérielles, disait Marx.
Le socialisme est toujours à l’ordre du jour. Par conséquent, le réarmement idéologique est une des plus grandes tâches que les communistes aient à accomplir pour accumuler les forces indispensables à la rupture révolutionnaire avec le capitalisme. Ou les prolétaires de tous les pays et les peuples dominés par l’impérialisme parviennent à assimiler cette vérité, à reprendre confiance dans leurs forces et à s’unir pour abattre le capitalisme, ou leur situation va empirer. Si la riposte des exploités et des opprimés tarde à s’organiser ou manque de force, non seulement leur condition va continuer à se détériorer, mais les impérialistes ivres de leurs succès dans leur course pour le partage et le repartage du monde, mèneront inévitablement l’humanité tout entière vers des destructions massives dépassant de loin les horreurs et la cruauté des deux guerres mondiales, du fascisme, des massacres colonialistes.
Nous devons lutter sans baisser les bras contre la falsification de l’histoire de la lutte pour l’édification du socialisme. Nous devons montrer ce que ce système a apporté aux travailleurs, malgré les conditions négatives de l’encerclement sur l’économie et la vie quotidienne des peuples des anciens pays socialistes, la supériorité militaire et matérielle du capitalisme, les conséquences effroyables des guerres, les retards hérités, les erreurs dans la construction d’un type inédit de société dont les lois objectives ne peuvent être découvertes que dans la pratique sociale, dans le cours même de son développement économique et social. Nous devons travailler d’arrache-pied pour réfuter les mensonges sur Cuba, sur la République démocratique et populaire de Corée, etc. Les idéologues et les valets de la bourgeoisie dans les médias, les universités et les syndicats, ont réussi pour le moment à faire peur par leur propagande mensongère à de nombreux travailleurs. Ils leur ont fait admettre que le socialisme « serait pire » et qu’il n’y a donc pas d’alternative. Il n’est cependant pas dans le pouvoir de la bourgeoisie, même si sa domination économique et idéologique est considérable, d’empêcher les lois du développement historique de s’accomplir, les lois de la lutte des classes de mener à une situation révolutionnaire. L’expérience de la lutte des classes a montré que la classe ouvrière arrive, dans les moments où la crise atteint son paroxysme, à se délivrer des flots de mensonge déversés par les exploiteurs, à briser les barrières de la résignation, à se convaincre qu’elle doit se lancer à l’attaque pour réaliser ses aspirations sociales et politiques, « qu’elle n’a rien à perdre que ses chaînes ». Mais l’évolution de la conscience sociale ne se fait jamais de façon spontanée. Les travailleurs ne tireront de leçons de l’expérience de leurs luttes que si la jonction se fait entre la classe ouvrière et le parti marxiste-léniniste qui lui apporte l’éclairage indispensable à une lutte victorieuse. La prise de conscience se fait alors dans les situations objectivement pré-révolutionnaires de façon accélérée.
Parmi les thèmes que nous devons combattre sans concession, citons l’idée que le socialisme ne peut vaincre dans le contexte de la mondialisation. L’opportunisme de droite fait passer au sein des travailleurs l’idée qu’ils sont désarmés devant une situation qui les dépasse, qu’ils ne peuvent plus espérer une amélioration de leur situation mais doivent seulement se contenter de solution représentant un moindre mal grâce à des négociations « responsables » entre partenaires sociaux, avec la bourgeoisie et sous l’arbitrage de la sociale-démocratie. Ce thème est ressassé partout, dans les pays capitalistes qui ont atteint le stade impérialiste, comme dans les pays dominés économiquement.
Les opportunistes de gauche répètent de leur côté les vieux thèmes trotskistes de l’impossibilité de faire la révolution dans un seul pays, qu’il faut attendre que ses conditions murissent partout et en même temps dans le monde. Ils rejettent les enseignements de Lénine, la loi du développement inégal, la théorie du maillon faible de la chaîne impérialiste. Ils méconnaissent le formidable potentiel de mobilisation que la classe ouvrière, classe révolutionnaire, car la plus exploitée, crée grâce à son alliance avec les couches petites-bourgeoises qui vivent de leur travail. Ces courants opportunistes contribuent, sous une phrase de gauche, à la criminalisation de l’expérience de l’URSS qu’ils présentent comme une expérience étrangère à l’idée du socialisme, capitulant honteusement devant le dénigrement orchestré par les idéologues de la bourgeoisie et les pressions des couches petites-bourgeoises instables. Tout cela ne sert qu’à justifier leur refus de se battre pour les nationalisations révolutionnaires, pour le socialisme, y compris dans des pays où les prémisses matérielles du socialisme sont réunies depuis longtemps, comme les pays impérialistes. Ne parlons même pas d’un pays comme l’Algérie où ils se limitent à dénoncer les méfaits de « l’ultra-libéralisme » sans appeler la classe ouvrière à s’organiser dans un parti révolutionnaire pour abattre dans son pays le pouvoir de la bourgeoisie.
Cette position fait d’eux des agents de diffusion du pessimisme et de l’inaction au sein de la classe ouvrière, des auxiliaires objectifs de la soumission au statu quo capitaliste. Sur le plan de l’organisation, la phrase de gauche est axée sur le rassemblement dans un « grand front de gauche ». Elle sert seulement à séduire la masse des travailleurs les moins expérimentés et les moins instruits sur le plan idéologique pour les éloigner de la compréhension de la nécessité de construire un parti révolutionnaire qui regroupe les éléments les plus avancés de la classe ouvrière, un parti organisé sur la base des principes du centralisme démocratique, un parti qui se prépare dans les luttes de tous les jours à former une armée de militants éprouvés et dévoués à la cause de l’émancipation de la classe ouvrière, conscients et convaincus, disciplinés et résolus à changer la société, capables d’entraîner derrière eux l’immense majorité des exploités et des couches laborieuses dans le grand combat pour prendre le pouvoir et abattre le régime capitaliste d’exploitation, d’oppression, de pillage et de guerre. Notre conception du front s’inspire des leçons tirées des luttes animées par le mouvement communiste algérien durant des décennies. Il ne peut se réaliser un front solide pour briser les menées impérialistes, effectuer les transformations révolutionnaires dans la perspective stratégique du socialisme sans un parti marxiste-léniniste, ancré dans la classe ouvrière et la paysannerie pauvre, fort et influent. Ce front ne peut mobiliser de larges masses que si le parti communiste en constitue le cœur et la colonne vertébrale.
Il n’y aura de progrès sur la voie de la conquête politique de la majorité des travailleurs à l’idée de se préparer à des processus révolutionnaires que si la lutte idéologique est menée sans concession contre les conceptions confusionnistes réfutées maintes fois par le socialisme scientifique et les enseignements de la Commune de Paris, de la Grande Révolution Socialiste d’Octobre, sur la nécessité de la prise du pouvoir par la classe ouvrière et de ses alliés, de l’expropriation des capitalistes. Ces vieilles conceptions ressurgissent sous de nouvelles variantes prétendument modernes. C’est sous cet angle que toutes les tactiques prônées ça et là doivent être examinées et critiquées sans pour autant mettre dans le même sac les tenants rusés de la collaboration de classe et ceux qui adhèrent de bonne foi, par inexpérience ou sous le poids de la propagande bourgeoise, à différentes variantes du socialisme utopique pré-marxiste, tel que le « socialisme du 21 ème siècle ».
Il est donc clair que la lutte de classe pour le renversement du capitalisme doit être menée à l’intérieur de chaque pays et à l’échelle internationale.
Dans notre pays ce combat présuppose sur le plan idéologique l’anéantissement de l’idée propagée dans les milieux progressistes par l’opportunisme de droite, depuis plus de 20 ans, de la soi-disant nécessité d’attendre patiemment que le capitalisme ait fini de développer complètement les forces productives avant de poser la question du socialisme. Les possibilités économiques de l’Algérie sont telles, en dépit de la régression qui l’a affectée par suite de l’application des injonctions du FMI, que nous pouvons affirmer que c’est le socialisme qui assurera le plein développement des forces productives pour la satisfaction des besoins sociaux des travailleurs.
Ce combat suppose un grand effort de clarification pour montrer également qu’à notre époque, époque du passage au socialisme, les travailleurs de différents pays peuvent envisager de construire avec succès le socialisme en développant entre eux des rapports de coopération et d’entraide mutuelles, en mettant en commun leurs capacités productives et leurs connaissances scientifiques, en rapprochant grâce à cela leurs niveaux de développement.
Vive l’internationalisme prolétarien !
Renforçons notre union pour abattre le capitalisme et l’impérialisme son stade dernier et suprême !