Le philosophe Michel Serres dénonce dans un entretien à La Dépèche repris également par le Télégramme de Brest le CARACTERE DE CLASSE de l’actuelle politique linguistique des « élites françaises » : la SUBSTITUTION systématique du tout-anglais patronal à la langue de notre pays… et de la francophonie internationale.
Faut-il que l’offensive générale du tout-anglais patronal contre le français soit grave pour qu’un honorable académicien puisse ainsi « prendre de gauche » certains partis « progressistes » qui restent de glace devant le déferlement du « tout-anglais » au seul avantage de l’ « élite mondialisée » et au seul détriment des CLASSES POPULAIRES ?
Michel Serres : «Je lance un appel pour faire la grève de l’anglais»
L’anglais, la langue de la classe dominante
« La classe dominante n’a jamais parlé la même langue que le peuple. Autrefois ils parlaient latin et nous, on parlait français. Maintenant la classe dominante parle anglais et le français est devenu la langue des pauvres ; et moi je défends la langue des pauvres ».
Une langue de la communication est-elle nécessaire ?
« J’en ai marre que la SNCF nous fasse des «smiles». J’en ai plein le dos de cette affaire. Je suis d’accord qu’il y ait une langue de communication, il y en a toujours eu une. Autant ce genre de choses commence à mettre la langue française en péril et c’est dramatique. Il y a plus de mots anglais sur les murs de Toulouse qu’il y avait de mots allemands pendant l’occupation. Par conséquent qui sont les collabos ? »
A-t-on des moyens de résister ?
« C’est-à-dire que ça dépend de vous, ça dépend de nous. Ce que je voudrais moi, c’est inviter les Français à faire la grève, chaque fois qu’une publicité sera en anglais on n’achète pas le produit, chaque fois qu’un film ne sera pas traduit dans le titre, on ne rentrera pas dans la salle de cinéma. On ne rentre pas dans un shop, on entrera dans une boutique. Et dès lors que les publicitaires et les commerçants auront 10 % de moins de chiffre d’affaires, ne vous en faites pas, ils reviendront au Français. Voilà, c’est pour ça que je demande qu’on fasse la grève ».
belle analyse
Il manque une contreproposition permettant l’intercommunication nécessaire et indispensable, en particulier pour la politique intraeuropéennes.
Voyez les propositions de Eŭropo Demokratio Esperanto
http://www.e-d-e.org/
Albert Jacquard disait à peu près la même chose que Michel Serres, d’une autre façon.
Nous sommes nombreux à avoir, dans notre jeunesse, cru à cette vertu de l’anglais comme moyen de partager nos expériences, nos savoirs, nos émotions avec le monde entier. Je relate ces débuts de mon expérience linguistique dans un article de cette édition participative en lien ci-dessous (« Comment devenir polyglotte sans en avoir eu l’intention »):
http://blogs.mediapart.fr/edition/rencontres-avec-l-esperanto/article/170910/comment-devenir-polyglotte-sans-vraiment-en-
Mais depuis cette époque, une prise de conscience progressive s’est faite chez moi, j’ai découvert au fil des années comment (et pourquoi) nous en sommes arrivés là, comment l’anglais a conquis « le monde » (c’est-à-dire celui des « élites » internationales et des classes supérieures et moyennes-supérieures).
Finalement, ce que je me dis, c’est: « ILS NOUS ONT BIEN EUS! ».
Ce « ils » désigne non pas le peuple des Etats-Unis, ou celui de la GB, mais leurs dirigeants, par exemple Churchill, qui dès 1943 voyait dans le « basic english » une langue à implanter un peu partout afin de véhiculer la « bonne parole » de l’axe Londres-Washington.
Pourtant, plus de 50 ans après la conférence anglo-américaine de Londres de 1961, dont un important volet (sinon le volet majeur) était de mettre en place les stratégies pour imposer l’anglais au monde, l’inadéquation de cette langue avec les buts proclamés commence à se percevoir.
Bien sûr, l’anglais est utile dans certaines situations, mais cela concerne très peu le PEUPLE, qui n’a guère les moyens de voyager, et à qui pourtant cet apprentissage est imposé à raison de milliers d’heures.
Or, en matière de communication entre peuples du monde, il existait depuis 1887 une langue auxiliaire pleinement fonctionnelle (facile, puissante et équitable), mais surtout GEOPOLITIQUEMENT NEUTRE. Certains l’ont surnommé « la danĝera lingvo » (la langue dangereuse).
Les syndicalistes de l’entre-deux guerres se l’enseignaient mutuellement; elle fut combattue par Staline et Hitler, et malgré cela elle a continué de vivre et depuis une dizaine d’années connaît un magnifique regain grâce à l’internet et l’alter-mondialisme.
J’ai mis en lien l’adresse de mes pages personnelles, mais on aura intérêt à lire également ces deux billets sur Mediapart:
—D’un siècle à l’autre, les oppressions se ressemblent (du 15 juin 2011)—
http://blogs.mediapart.fr/blog/dominique-couturier/150611/dun-siecle-lautre-les-oppressions-se-ressemblent-et-aujourdhui-
et Histoire résumée et critique de la concurrence anglais-espéranto (du 6 octobre 2010)
http://blogs.mediapart.fr/blog/dominique-couturier/061010/histoire-resumee-et-critique-de-la-concurrence-anglaisesperanto
Car si la colère de Michel Serres est nécessaire, elle risque hélas de rester stérile tant que plus de la moitié de la population n’aura pas compris qu’à l’usage « impérialiste » d’une langue, il est INDISPENSABLE d’opposer une langue qui remplisse mieux, plus efficacement et plus largement la fonction de « Lingva franca ». Cette langue, c’est l’espéranto, peu visible en Occident, mais qui est soutenue par la Chine, et se développe dans un certain nombre de pays « émergents » comme l’Inde ou le Brésil…
Comme dirait le journal Fakir: « A la fin c’est nous qu’on va gagner ».
Correction (accord au féminin!): » Certains l’ont surnommée « la danĝera lingvo » (la langue dangereuse). » ;-)
Précision:
J’ai dit que l’espéranto est « géopolitiquement neutre » car son usage lui-même n’est pas (ou pas forcément) « neutre ».
En effet, si on trouve quantité de gens qui l’utilisent juste pour se faire des copains un peu partout dans le monde (usage convivial apolitique), une large partie de ses locuteurs en fait aussi un outil d’émancipation sociale, dont l’usage permet de discuter aussi bien avec des militants politiques états-uniens ou japonais que coréens, espagnols, iraniens, russes, pakistanais, africains, sud-américains etc… Certains ouvrages politiques ou historiques, traduits en espéranto, peuvent toucher des espérantophones d’un peu partout.
ex: « Abolo de la laboro (La) Bob Black » (l’abolition du travail)
Civila malobeemo(la)H. T. Thoreau trad. B. McCafferty (la désobéissance civile)
Ĉu ili diras al ni la veron ? neimagebla perforto Kolektiva verko trad. F. Toubale
(Nous disent-ils la vérité? La violence inconcevable)
Ĉu militista nacidefendo estas kredebla ? J. Lasserre trad. R. Laval
(La défense nationale militaire est-elle crédible ?)
Imaga dialogo Marks/Bakunin M. Cransto trad. (dialoge imaginaire Marx-Bakounine)
Etc etc..
A ce sujet de l’émancipation humaine par l’espéranto, on peut lire le Manifeste de Prague, adopté en 1996
http://blogs.mediapart.fr/edition/rencontres-avec-l-esperanto/article/240910/emancipation-humaine-le-manifeste-de-prague
Et pour les plus curieux je rappelle l’accueil de mes pages personnelles
http://onagrino.ouvaton.org (lien aussi sur mon nom) et mon blog de Médiapart
http://blogs.mediapart.fr/blog/dominique-c