C’est tantôt l’Argentin Milei qui fait sa campagne présidentielle en brandissant partout une tronçonneuse (!) destinée à tailler à l’aveugle les budgets publics. « Vroum, vroum, a plus Éducation nationale argentine ! »…
C’est Liz Truss promettant carrément, quand elle était Première ministre britannique, de déclencher le feu atomique sur la Russie « sans hésitation, cela dût-il conduire à l’anéantissement général« .
Avant elle, dans les années 1980, on eut Ronald Reagan, ex-figure de proue du maccarthysme à Hollywood qui, devenu entretemps le président des USA, vaticinait constamment en public contre l' »Empire du mal » (= l’URSS dans son petit cerveau de cow-boy de série B) en promettant aux Soviétiques la « Bataille d’Armaghedon ». Le même individu avait pris pour slogan électoral, en 1984, les trois lettres « E.R.A.! » (« Elect Reagan Again » ou… « Eliminate Russians Atomically!« , au choix)…
Ce fut aussi le très rationnel (en apparence!) Mitterrand qui, gagné par l’atlantisme flamboyant des années Thatcher-Reagan, prêtait une oreille attentive au « nouveau philosophe » anticommuniste André Glucksmann. Cet affectueux papa d’un autre belliciste osait en effet écrire dans un livre de 1984 intitulé La Force du vertige que les « valeurs occidentales » valaient bien que l’on prît le risque de « périr irradié avec l’enfant que (l’on) aime dans un échange de Pershing et de SS 20« , Il fallait ce qu’il fallait, voyez-vous, pour échapper à « la Sibérie planétaire » du « soviétisme » qui nous guettait alors, comme on l’a vu en 1989… À noter que le même forcené théorique en était encore, en 1970, à célébrer la Grande Révolution culturelle prolétarienne maoïste…
Aujourd’hui c‘est Picsou Trump qui s’excite comme un p’tit fou avec ses droits de douane et ses « sanctions » héritées de Biden comme ferait un sale gosse qui jouerait au mikado en faisant trembler la table de jeu… Le même subtil personnage, qui n’a jamais dû parcourir un livre au-delà de la page 2, déclare en outre aux journalistes bourgeois confondus qu’il veut au plus tôt annexer le Panama, le Groenland et le Canada… Et pourquoi pas demain, la Corse, le Vatican, et la Principauté de Monaco?
Mais le pire de tous, c’est encore – au pays de Descartes s’il vous plait! – un certain président fort détesté à domicile qui, rêvant les yeux ouverts de devenir Empereur du belliqueux État fédéral européen en gestation, brûle de dépêcher un corps expéditionnaire français en Ukraine, de prendre ainsi le risque insensé d’une conflagration majeure avec les Russes et, en fait de « défense des intérêts existentiels français », de transformer l’ainsi-dit « parapluie nucléaire français » (conçu par de Gaulle pour « couvrir » le seul territoire national) en un paratonnerre attirant prioritairement sur la France les inarrêtables Orechniks russes!
Face à ce déluge d’irrationalité (et il faudrait ajouter à la liste Starmer, Ben Johnson, Zelensky et von der Leyen…), des commentateurs ordinairement avisés comme le courageux colonel suisse Jacques Baud et bien d’autres croient nous et se rassurer en rappelant que le rapport de forces militaires franco-russe est si déséquilibré à l’avantage de Poutine qu’une guerre avec l’armée russe serait une folie suicidaire; si bien que, en toute logique, sa probabilité est quasi-nulle. Et en effet, qu’y aurait-t-il de plus inconcevablement irrationnel et immoral qu’une guerre nucléaire dont on sait d’avance qu’elle s’achèverait dans le grand cimetière, si ce n’est de l’espèce humaine (avec en prime l’ultime extinction du vivant dans son ensemble !), du moins des habitants de l’Hexagone?
Seulement voilà, MM. les « rassuristes » et autres géostratèges un peu trop « raisonnables »: non seulement l’irrationnel a le mauvais goût d’exister en (géo-)politique ainsi qu’en bien des domaines, non seulement il y a sur Terre de très sottes grenouilles élyséennes désireuses d’envahir la Russie au prix d’une Bérézina puissance N, mais il se trouve que la raison dialectique se rit du rationalisme plat : en effet, la vraie rationalité ne consiste pas à nier l’existence de l’irrationnel dans le champ politico-militaire mais à en déceler méthodiquement les racines de classe à notre époque de capitalisme-hégémonisme particulièrement putréfié et dégénératif.
Cela bien sûr, les géopolitistes qui ignorent l’analyse marxiste s’exerçant à l’aune des antagonismes de classes sont totalement dans l’incapacité conceptuelle de le saisir. Et pour cause, car ils sont affligés d’un point aveugle qui, surtout quand ces Messieurs, fort intelligents pourtant, ont un peu trop longtemps servi l’OTAN, ressassé des clichés antisoviétiques sur le « danger communiste », avalé les niaiseries sur l’ « Europe de la paix »: en un mot, ils ont trop longtemps joui des avantages que procure le service étoilé des États capitalistes, ce qui leur interdit de prendre la mesure de l’extrême putréfaction du système capitaliste « moderne ». Or il y a longtemps que celui-ci n’a plus rien à voir avec les Lumières et les révolutions démocratiques bourgeoises qui lui ont ouvert la voie au XVIIIe siècle: déjà Lénine affirmait en 1916 que « l’impérialisme n’est autre à notre époque que le capitalisme financier, le capitalisme agonisant et putréfié, la réaction sur toute la ligne« ; et dès 1914, Jean Jaurès déclarait que « le trust organisé pour l’extermination, tel est le dernier mot du capitalisme « moderne« ! »…
Eh bien nous y voilà: le capitalisme-impérialisme actuel, qui plus est dans son actuelle phase hégémoniste où une « DZ Mafia » d’impérialistes planétaires prétend continuer d’accaparer la richesse du monde (cela s’appelle l’unilatéralisme euro-atlantique !), est parvenu à la phase hyperexplosive de l’exterminisme: cela signifie que le maintien sur Terre d’un système capitaliste hyperprédateur suçant jusqu’à la moelle le travail humain et les ressources naturelles devient tendanciellement incompatible avec le maintien de la vie humaine, voire avec celui de la vie tout court sur notre petite planète recuite. Quoi d’étonnant alors si les personnages agités et pénétrés d’Hubris qui règnent sur le mode de production capitaliste de plus en plus obsolète et foutraque sont alors de plus en plus à son image? Aujourd’hui, tel ou tel dirigeant du gang euro-américain peut encore occasionnellement reculer un peu, « faire des deals »… provisoires, voire attendre des jours meilleurs pour attaquer l’un après l’autre la Chine, la Russie ou l’Iran, bref tenter de diviser l’Eurasie alliée au Sud global qui devient plus forte de jour en jour; mais sur le fond, les grands manitous du suprématisme occidental ne peuvent tout bonnement pas concevoir qu’il leur faudra bientôt céder la place aux peuples redevenus souverains, voire au grand rebond planétaire de l’Internationale communiste et ouvrière…