Il y avait des débats au Forum Social de la fête de l’Huma et notamment l’intervention du secrétaire général de la CGT Thierry Lepaon. Quelle ne fut pas ma surprise de lire dans l’Huma du 15 septembre le compte rendu de son intervention. Concernant la mobilisation des travailleurs, Lepaon veut utiliser deux leviers. Le premier concerne l’engagement des militants et le second l’unité syndicale.
A croire que le secrétaire général de la CGT est confiné dans son bureau de Montreuil et a sur les oreilles un casque anti-luttes. Que font les organisations confédérés ( UL-UD) ? Pour répondre à la question comment mobiliser les travailleurs, il suffit de faire le tour des journaux locaux et d’internet pour lire que chaque mois il y a en France de nombreuses luttes qui se mènent : de mars à septembre 2014 plus d’une centaine d’entreprises ont été touchées par des grèves ou manifestations. Services publics (Postes, transports, hôpitaux, Pompiers) restaurations, commerce, industries. Tous les corps de métiers sont touchés par la colère des travailleurs.
Concernant la stratégie, Lepaon voit « une possibilité d’unité syndicale ». Il s’appuie pour le démontrer, sur les actions communes menées au niveau européen par les syndicats français dans le cadre de la CES. Voilà ce qu’écrivait à propos de l’Europe son prédécesseur Henri Krasucki :
» La Confédération européenne des syndicats (CES) fait un constat de situation qui n’est pas différent du nôtre. Ce qui manque, c’est l’action. Elle critique mais se prête à la mise en œuvre de l’intégration telle que l’imposent capitalistes et gouvernements. » Krasucki
De fait, la CES accompagne systématiquement au sein l’UE les contre-réformes. A tel point qu’elle propose non pas de s’opposer au GMT (TTIP / TAFTA) mais de « l’adapter ». On se souvient à ce sujet des organisations de gauche défendant en 2005 un plan B plutôt que le rejet de toute constitution européenne, permettant ainsi la mascarade et la violation du vote du peuple souverain avec l’adoption du traité de Lisbonne. L’expérience de ces dernières années nous instruit pourtant que de l’échec patent pour les travailleurs d’une telle stratégie.
La Commission Européenne impose à marche forcée et sous la pression permanente des marchés et de l’Euro (la BCE étant de fait indépendante des peuples mais sous le contrôle directe des marchés financiers et du patronat) toujours de nouvelles directives de privatisation, de libéralisation, toujours plus de suppressions des droits et protection des travailleurs, toujours plus de concurrences entre les peuples. Et la CES et le PGE continue de défendre cette construction européenne qui est l’arme de destruction massive du Capital contre les travailleurs.
Comment défendre Alstom, la SNCF, Air-France, le service public de l’énergie, la SNCM par exemple sans rompre avec l’UE et l’euro alors que ces structures sont au cœur de l’offensive contre les services publics, contre nos droits , nos salaires et nos emplois ?
Comment stopper la désindustrialisation sans sortir de cette UE et de cet euro qui organisent et promeuvent les délocalisations et le démantèlement du complexe industriel de notre pays pour le profit immédiats des Mittal, Bouygues & Cie ?
Oui la situation politique est extrêmement grave, c’est pourquoi il est plus que temps que les militants à quelques organisations qu’ils appartiennent renouent en grand avec les traditions de lutte frontale qui ont marqué l’histoire du mouvement social et ouvrier et qui ont permis d’obtenir les grandes conquêtes comme en 1936, en 45 ou en 1968.
En particulier, les militants et les structures de la CGT conscientes des enjeux et restées fidèles aux principes de classe de la grande Dame ont un rôle essentiel dans la conjoncture que nous connaissons.
Il doit être dit haut et fort que cela ne va pas dans nos organisations, que le bilan des 20 dernières années doit être fait, que l’orientation décidée alors au nom de la modernisation, de l’adaptation aux évolutions du monde du travail dans un moment de désarroi idéologique a de fait tourné le dos aux exigences du combat de classe livrant les travailleurs aux appétits de revanche des classes dominantes et aux entreprises de démantèlement des conquêtes chèrement acquises.
Exprimons donc tout cela plus haut et plus fort et de plus en plus nombreux car c’est à une réorientation majeure qu’il faut aboutir !
Dans les périodes les plus noires, notre peuple a su trouver les voies du rassemblement démocratique, du Front populaire ou de la Résistance ; nul ne doute que nous saurons nous montrer aussi dignes et résolus que ceux qui nous ont précédés !
Pour le PRCF, la coordination des secteurs en luttes et des syndicalistes de classe de tout le pays est nécessaire. Les luttes sociales doivent s’accompagner du combat contre les guerres impérialistes. Il ne suffit pas de vouloir éteindre le feu du chômage et de la pauvreté chez soi et de laisser allumer le feu de la guerre chez les autres. Une défaite historique est à craindre pour le mouvement ouvrier si cela ne s’opère pas et si nous continuons d’espérer une « rectification » de la part des états-majors euroformatés.
La lutte des travailleurs pour la satisfaction de leur revendication doit aussi s’accompagner de la revendication de sortie de l’Euro, de l’UE, de l’OTAN et du capitalisme.
Jo Hernandez
- Ancien secrétaire syndical CGT production thermique EDF de 1968 à 1995
- Responsable du secteur Lutte du PRCF.