1993 (Balladur), 95 (Juppé), 2003 (Fillon 1), 2007 (Fillon 2), 2010 (Sarkozy), 2012 (Hollande en rajoute une louche)… les gouvernants « français » s’acharnent sur les retraites par répartition mises en place en 46 par le ministre communiste Ambroise Croizat, celui-là même qui a fondé la Sécu, les comités d’entreprise et le Code du travail et les conventions collectives…
A l’arrière-plan, ce que les dirigeants confédéraux CFDT (bien sûr !) et de la CGT (hélas !) évitent de trop dire à leurs mandants, les Accords européens de Barcelone de 2002, signés par Chirac et par Jospin, qui prévoient de « porter à 67 ans en moyenne l’âge de départ à la retraite dans l’UE . Et la RFA de Merkel et du SPD envisage désormais de passer à… 69 ans ! SI CA CONTINUE, en fait de retraite des seniors, ce sera la retraite des MORTS !
Allons-nous longtemps laisser les états-majors euro-formatés MENAGER la maudite UE et le maudit euro en nous amusant avec l’introuvable « Europe sociale », ou allons-nous enfin engager la lutte pour que notre pays sorte, avant d’ « y rester » avec tous ses acquis sociaux, du quadruple carcan de l’euro, de l’UE, de l’OTAN et du capitalisme ?
Pour sauver nos retraites, il faut sortir de l’UE, sortir de l’euro, sortir de l’OTAN et du capitalisme !
Nous livrons ci-dessous quelques extraits de l’analyse de la spécialiste en droit européen Magali Pernin, que vous pourrait retrouver en totalité sur son blog dans une note datant de 2013 que nous reproduisons ci-après..
L’influence de l’Union européenne dans la réforme des retraites
L’étude du « Six-Pack » (réforme de la gouvernance économique) votée par le Parlement européen fin 2011 m’a éclairée sur un point que je soupçonnais, mais dont je n’avais pas mesuré l’étendue: l’influence de l’Union européenne dans la réforme des retraites.
L’Union européenne n’a jamais acquis la compétence institutionnelle nécessaire pour intervenir dans le domaine de la protection sociale, qui reste la « chasse gardée » des États membres. Selon le principe de subsidiarité, chaque État membre reste maître de la conception, de la gestion et du financement de son système de sécurité sociale.
Pour autant, depuis le début des années 90, on note une influence croissante du droit communautaire sur l’évolution du système de retraite français. Cette intervention, promouvant largement le système par capitalisation, prend appui sur deux axes:
la réglementation des institutions privées de retraite professionnelle,
la gouvernance économique commune
Les récentes recommandations de la Commission européenne sur le programme de stabilité français laissent désormais à penser que la simple « influence » se transforme peu à peu en exigences de réformes conformes aux vues européennes.
En effet, dans ses recommandations du 29 mai 2013, les commissaires européens demandent à la France de « prendre des mesures d’ici à la fin de l’année 2013 pour équilibrer durablement le système de retraite en 2020 au plus tard, par exemple en adaptant les règles d’indexation, en augmentant encore l’âge légal de départ à la retraite et la durée de cotisation pour bénéficier d’une retraite à taux plein et en réexaminant les régimes spéciaux, tout en évitant une augmentation des cotisations sociales patronales« .
La réglementation des institutions privées de retraite professionnelle
Le 6 juin 2003, l’Union européenne adopte définitivement une directive destinée à encadrer les institutions de retraite professionnelle (I.R.P.). Celle-ci, ne concernant ni les institutions de sécurité sociale, ni les institutions fonctionnant par répartition, marque l’aboutissement de plusieurs années de travail de la Commission et de la Cour de justice pour faire étendre aux I.R.P. les bénéfices du marché unique et de la libre concurrence. Par la mise en place d’un cadre commun, elle vise notamment le développement transfrontaliers des prestations de retraites privées.
Deux éléments indirects découlant de cette directive nous intéressent: d’une part, la promotion de la capitalisation comme renfort des systèmes traditionnels par répartition, et d’autre part, la reconnaissance de la définition en piliers de la protection sociale.
Vous pouvez retrouver tous ces éléments dans l’article de Gaël Coron « Retraite par capitalisation et Union européenne: retour sur la directive I.R.P. ».
La définition en piliers de la protection sociale
Afin d’étendre aux I.R.P. les bénéfices du marché unique et de la libre concurrence, la retraite professionnelle doit être assimilée à un produit financier.
Pour ce faire, les dirigeants européens ont développé une grille d’analyse permettant de distinguer système par répartition et système par capitalisation, afin de faire de ce dernier un objet qui relève de la compétence communautaire (au même titre que les produits d’assurance par exemple).
La première mention des trois sources distinctes de retraites (cf. trois piliers) se trouve dans un document interne, datant du 9 octobre 1990: « l’achèvement du marché intérieur dans le domaine des retraites privées ». Elle se retrouve inchangée dans la directive I.R.P. dans son considérant n°9.
Les trois piliers sont:
le régime de sécurité sociale (régime de base)
le régime complémentaire lié à un emploi ou une profession
le système de retraite individuelle privé.
Cette division de la retraite en piliers à travers un premier pilier légal par répartition et un deuxième pilier professionnel par capitalisation permet ainsi une répartition des compétences: aux États, la gestion du premier, aux instances européennes, la régulation du second.
Aussi, tout en reconnaissant les difficultés que pose l’emploi de cette distinction, la Commission affirme à la fois qu’elle est présente « en principe » partout en Europe et qu’elle servira de base à la définition du champ de compétence communautaire. Cet élément est particulièrement important quant on analyse l’influence du droit communautaire en France. En effet, la définition communautaire ne permet pas de prendre en considération l’originalité du système de retraite « à la française ».
On peut déduire de cette dernière que les régimes de base n’ont pas de caractère professionnel, alors que le système français reste largement marqué par une gestion corporatiste des régimes par répartition.
De même, la définition communautaire ne permet pas de prendre en considération la gestion française des régimes complémentaires: obligatoires et gérés par répartition pour certains (exemple: AGIRC et ARRCO), facultatifs et par capitalisation pour d’autres. Si les premiers sont considérés comme « accidentels » et donc comme partie prenante du premier pilier (CJCE, Pistre et Poucet, 17.02.1993), les seconds ne peuvent échapper au principe de libre concurrence (CJCE, FFSA, 16.11.1995).
La promotion de la capitalisation
Malgré cette immixtion du droit de la concurrence dans de nouveaux domaines liés aux retraites, les défenseurs du texte pourront toujours indiquer à juste titre que les États nationaux restent libres de fixer les termes de l’équilibre entre répartition et capitalisation.
Il reste que cette directive constitue une promotion du système par capitalisation.
D’une part, la commission a d’ailleurs vendue celle-ci aux États, non pas seulement en s’attachant à la nécessité d’achever le marché intérieur, mais en s’appuyant sur des motifs exogènes: la démographie, les déficits publics et le marché du travail. Aidée par un discours catastrophique sur les régimes par répartition et par un contexte boursier porteur, la directive présente ainsi la capitalisation comme un renfort aux systèmes de sécurité sociale.
D’autre part, les défenseurs du textes ont bien évidemment à l’esprit que la directive « va créer des incitants au développement des fonds de pension » et des assurances-vie, puisqu’elle s’attache à renforcer leur efficacité. Seuls, « les systèmes par répartition, par définition, ne sont pas tenables à 20 ans » (Entretien DG Marché intérieur, 2001).
[…]
Les engagements successifs des États
En mars 2000, lors du Sommet de Lisbonne, le Conseil définit l’objectif de porter d’ici 2010 le taux d’emploi moyen total à 70% de la population et à 60% pour les femmes. Cet objectif est complété lors du Sommet de Stockholm (2001) par la volonté de relever le taux d’activité des travailleurs âgés de plus de 55 ans à 50 %.
En mars 2002, les conclusions du Sommet du Barcelone mettent l’accent sur la nécessité pour le Conseil de « continuer d’examiner la viabilité à long terme des finances publiques dans le cadre de son exercice annuel de surveillance, en particulier à la lumière des défis que pose le vieillissement de la population en termes de budget ».
Aussi, les États se sont entendus pour « réduire les incitations individuelles à la retraite anticipée » et « intensifier les efforts destinés à offrir aux travailleurs âgés davantage de possibilités de rester sur le marché du travail » (par les mécanismes de retraite progressive).
Surtout, lors du Sommet de Barcelone, les États se sont engagés à chercher « d’ici 2010 à augmenter progressivement d’environ cinq ans l’âge moyen effectif auquel l’activité professionnelle cesse dans l’Union européenne ».
La lutte contre les déficits comme prétexte à la capitalisation
Aussi, pour réduire leur déficit public et respecter le plafond de 3% du PIB, les États membres ont été contraints de diminuer les dépenses dans un des domaines où elles étaient les plus élevées : les politiques de retraites. C’est donc tout naturellement que la surveillance multilatérale, instituée par le Traité de Maastricht et approfondie par le pacte de stabilité et de croissance (P.S.C.), porte sur la question des retraites.
A ce titre, le Conseil Ecofin a obtenu en 2000 qu’une partie des Grandes Orientations de Politiques Économiques (G.O.P.E.) soit spécifiquement consacrée aux enjeux financiers du vieillissement.
Le Conseil Ecofin de juillet 2001 a aussi adopté une obligation pour les États d’inclure des projections de l’impact à long terme des évolutions démographiques dans les programmes présentés par les États dans le cadre du P.S.C.
En 2005, lors de la réforme du volet préventif et correctif du P.S.C., sont introduites deux dispositions relatives aux retraites. La première dispose que toutes les évaluations des politiques nationales par le Conseil et la Commission « prennent dument en considération la mise en œuvre de réformes des retraites consistant à introduire un système à piliers multiples avec un pilier obligatoire financé par capitalisation ». La seconde assouplit l’application des sanctions pour les États ayant un déficit excessif mais mettant en œuvre une telle réforme.
Le « Six-Pack » (dernière réforme à ce jour de la gouvernance économique) est venu de nouveau appuyer sur la réforme des systèmes de retraite:
le programme de stabilité remis par les États devra comporter des « informations relatives aux passifs implicites liés au vieillissement »
le rapport remis au Conseil par la Commission en cas de déficit excessif tiendra compte de « tout passif implicite lié au vieillissement démographique »
toutes les évaluations effectuées par la Commission et le Conseil « prennent dument en considération », non plus seulement la mise en oeuvre de réformes des retraites consistant à l’introduction de la capitalisation, mais également « le cout net pour le pilier géré par les pouvoirs publics », ainsi que « les caractéristiques de l’ensemble du système de retraite […] en examinant notamment s’il inscrit une viabilité à long terme sans accroitre les risques pour la position budgétaire à moyen terme ».
Mais désormais, plus qu’un élément permettant de garantir l’équilibre des comptes publics, la réforme des retraites est devenue le symbole d’une nécessaire harmonisation des systèmes sociaux européens. On se souvient encore des propos d’Angela Merkel qui estimait que « dans des pays comme la Grèce, l’Espagne, le Portugal on ne parte pas à la retraite plus tôt qu’en Allemagne, que tous fassent un peu les mêmes efforts, c’est important ».
Une influence communautaire majeure qui disparaît dans le débat politique français
Ainsi, devant l’introduction croissante du droit communautaire dans la question des retraites et la nécessaire harmonisation européenne des systèmes sociaux, on ne peut que s’interroger du silence français à ce sujet.
L’an dernier, lors de la réforme des retraites en France, un point qui peut paraître anecdotique est pourtant lourd de sens. Durant l’examen du texte de réforme par les parlementaires, le Sénat est venu supprimer une mention relative au nouveau Comité de pilotage des régimes de retraite qui disposait que celui-ci est chargé de suivre « les conditions dans lesquelles s’effectuent(…) la progression du taux d’emploi des personnes de plus de cinquante-cinq ans pour atteindre en 2018 la moyenne des États membres de l’Union européenne ». Doit-on y voir le souhait de cacher l’influence communautaire dans la réforme?
En effet, alors que l’on assiste régulièrement à des débats passionnés des deux partis majoritaires sur une réforme qu’ils ont portée l’un comme l’autre au sein des instances européennes, ce silence ne peut être qu’une volonté délibérée de maintenir l’illusion d’un clivage droite-gauche sur une question qui fait pourtant consensus. [NDLR, il n’y a effectivement pas de clivage droite gauche entre la droite dure qu’est l’UMP et la droite complexée qu’est le PS, tout deux principales composante du Parti Masstrichien Unique…]
Pour preuve (si les éléments ci-dessus ne vous ont pas encore convaincu), la résolution Parlement européen du 20 octobre 2010 sur la crise financière, économique et sociale (recommandations concernant les mesures et initiatives à prendre).
Celle-ci dispose – en son paragraphe 77 – que le Parlement considère que « le financement des pensions ne peut être entièrement laissé au secteur public, mais doit reposer sur des systèmes à trois piliers, comprenant des régimes de retraite publics, professionnels et privés, dûment garantis par une réglementation et une surveillance spécifiques destinées à protéger les investisseurs« .
[…]
Très récemment (le 21 mai 2013) , les eurodéputés ont approuvé une résolution portant « sur une stratégie pour des retraites adéquates, sûres et viables ».
Dans cette dernière, ils invitent les Etats, conformément à l’avis de la Commission, à « constituer des pensions professionnelles complémentaires par capitalisation« .Les Etats sont également invités par les députés à réformer le premier pilier (répartition) en tenant compte « de l’évolution de l’espérance de vie« . Ces derniers recommandent aux Etats « de bannir toute fixation d’âges pour un départ obligatoire à la retraite afin de permettre aux personnes qui le peuvent et qui le souhaitent de choisir de continuer de travailler au-delà de l’âge légal de départ à la retraite » et critiquent les systèmes de retraite anticipée, considérés comme inefficaces pour réduire le chômage.Les Etats sont également invités à développer les systèmes d’épargnes-retraite complémentaires privées.Enfin, plusieurs dispositions sont relatives au réexamen de la directive IRP dont nous avons parlé plus haut et sur lequel il conviendra de se pencher plus attentivement.