Cher camarade,
ta critique des positions abstentionnistes concernant les européennes me semble fausse.
En résumé tu amalgames le refus de cautionner cette élection supranationale au vieux slogan gauchiste « élections piège à cons ».
Mais a) souviens-toi que le PCF était contre l’élection européenne au suffrage universel avant 1976 parce qu’elle viserait nécessairement, -et ce fut effectivement le cas-, à donner une façade démocratique à la construction d’un Etat supranational. Le PCF s’est rallié à cette élection au moment même où il prenait son virage catastrophique, précurseur de la « mutation », vers « l’eurocommunisme »: au même moment il engageait sa rupture avec le marxisme-léninisme, notamment avec la conception marxiste de l’Etat. Et depuis, d’élection en élection, le PCF n’a bien entendu rien « infléchi du dedans » en Europe; en revanche l’Europe l’a, lui, infléchi du dedans jusqu’à lui faire répudier, avec le marxisme-léninisme et la lutte pour le socialisme, l’attachement traditionnel des communistes à l’indépendance nationale.
b) on ne peut pas faire comme si le VIOL du 29 mai n’avait pas eu lieu avec la parfaite complicité du parlement européen qui a validé le traité de Lisbonne. Voter comme si de rien n’était en juin, c’est accepter de valider ce viol.
c) il y a une différence majeure entre les élections nationales (y compris, jusqu’à un certain point, les régionales tant que nous n’avons pas des régions transfrontalières pour lesquelles je n’irai certainement pas voter) et l’élection européenne: c’est la validation du cadre supranational. Si tu votes, tu valides le cadre dans lequel tu votes. L’élection présidentielle est encore, jusqu’à preuve du contraire, nationale. Cela dit, la question de son boycott peut elle aussi se poser dans certaines conditions, souviens-toi du « bonnet blanc blanc bonnet » de Duclos.
d) en outre, notre peuple comme la majorité des autres peuples d’Europe a mieux compris les choses que ses politiciens: à chaque élection européenne il vote un peu moins encore que la fois précédente. L’enjeu, pour ceux qui comme nous veulent SORTIR la France de l’UE pour provoquer un affrontement de classes continental à l’initiative des peuples, est de transformer cette méfiance spontanée en REJET POLITIQUE CONSCIENT, en ACTE MILITANT et citoyen en le liant aux luttes sociales qui montent dans le pays. Cette politisation est possible.
Elle aiderait à transformer le non, encore réformiste à « la » constitution européenne, qui laissait libre la voie à un traité bis, en NON A TOUTE EUROPE SUPRANATIONALE; et elle gênerait les euro-réformistes de tous poils qui continuent de vendre le mot d’ordre mensonger, proprement social-impérialiste de « l’Europe sociale ».
e) et cela dans un contexte où la délégitimation du pouvoir sarkozyste et de sa pseudo-opposition « socialiste » (le FMI de DSK est à l’origine de la baisse des salaires des fonctionnaires dans le monde entier, voir les directives FMI à l’Irlande!) est un élément central de la lutte contre la fascisation galopante de notre pays et de l’UE.
f) comment croire une seconde que la mise en place d’une liste PCF/NPA/PG puisse en quoi que ce soit faire opposition à l’eurofascisation? En 2005, le PRCF et d’autres groupes belges, allemands, accompagnés du PC de Grèce, ont manifesté à Strasbourg puis à Bruxelles contre le rapport Lindblad qui voulait criminaliser le communisme sur tout le sous-continent (des projets encore plus graves sont en cours d’adoption au parlement européen). Or seul les eurodéputés grecs ont reçu nos camarades, parmi lesquels des vétérans de la Résistance qui avaient fait 500 km de voiture dans la journée, Wurtz et Cie ont refusé de nous recevoir et le NPA ex-LCR n’a même pas répondu aux courriels du PRCF lui proposant d’agir SUR SES BASES contre ce rapport et contre la criminalisation de la JC tchèque. Si on interdisait le NPA, je signerais pour lui comme j’ai signé contre l’invalidation de Schivardi, mais pour ces gens on peut taper sans fin sur les communistes léninistes, c’est pas grave, comme dit Buffet « nous avons dépassé cela » et comme ajoute Besancenot, histoire de montrer patte blanche aux médias qui le promeuvent sans fin, « l’URSS était une caricature sanglante ».
Voilà pourquoi un comité populaire pour l’abstention populaire regroupant des forces progressistes très diverses pourrait dessiner dans ce pays une toute autre alternative que celle qui se prépare autour d’Aubry (fille de l’eurocrate en chef Delors) et de ses porteurs d’eau électoraux de l’ex-gauche plurielle.
g) il ne sert à rien d’implorer les chefs de la gauche antilibérale de s’entendre et même s’ils le faisaient ils se disputeraient dès le lendemain de l’élection alors qu’ils sont tous d’accord pour « vendre » le mensonge de la réorientation progressiste de l’UE: car avec la liquidation du PCF marxiste et le décalage à droite du PS, il ne peut qu’y avoir compétition féroce entre les « recompositeurs » Buffet, Besancenot, Mélenchon (ouvertement fédéraliste) pour diriger le futur « parti socialiste de gauche » qui occupera l’espace du PS d’Epinay avant 81 pour faire comme le PS de Mitterrand s’il arrive au pouvoir: il faut un vrai PC en France pour qu’à la rupture de droite s’oppose une vraie rupture progressiste, intégrant les dimensions sociale, antifasciste, patriotique, pacifique, démocratique, progressiste, de la transformation sociale pour rassembler 80% de notre peuple contre les monopoles capitalistes qui liquident notre pays. Les
demi-mesures, l’ « alter » mondialisme, « l’alter » européisme, « l’alter syndicalisme » sont des impasses qui nous amèneront le FASCISME (naturellement sous de nouvelles formes mais avec le même contenu: matraque pour le peuple et interdiction des communistes).
Bien cordialement à toi. G.G.