Lors des dernières élections au royaume uni, le parti conservateur obtient semble-t-il la majorité absolue des sièges aux Communes.
Un mot sur le mode de scrutin uninominal à un tour: L’électeur doit choisir un candidat parmi plusieurs. On compte alors le nombre de voix obtenues par chaque candidat. Celui qui recueille le plus de voix (majorité relative) remporte les élections : résultat vous pouvez avoir la majorité des sièges sans avoir la majorité des voix. Tous les dispositifs électoraux bourgeois cachent ainsi des perles démocratiques….
Reste qu’il faudra étudier ce que donne cette victoire en voix.
Nous pouvons cependant tirer à chaud quelques indications : nos deux têtes de gondole, le conservateur Cameron et le travailliste Miliband, ont certes des différences mais les Britanniques ont du avoir du mal à différencier, ailleurs que dans les marges, de réels clivages entre les deux postulant à la location du 10 Downing Street.
La mutation du parti travailliste traditionnel, la rupture avec ses liens avec les Trade-unions (le mouvement syndical), son atlantisme et son adhésion totale à l’UE qui en font un parti bourgeois centriste, a finalement affaibli le parti « rénové » c’est-à-dire muté par Tony Blair. A force de se « recentrer », se droitiser les parti sociaux-démocrates perdent leur raison d’être et leur espace sociologico-politique. Manuel Valls devrait y songer, de même que Renzi en Italie. Car figer et verrouiller un jeu politique à deux partis bourgeois implique, comme aux États-Unis, un substrat idéologique, social, politique bref une histoire qui n’est pas celle de la France, de l’Italie ou même de la Grande-Bretagne.
Le conservateur avait même un atout dans sa manche: un projet de référendum sur l’appartenance de la Grande-Bretagne à l’Union Européenne. Certes cette promesse embarrasse Cameron, les milieux d’affaires sont vent debout contre une telle perspective, mais cela n’a pu que jouer favorablement aux yeux des électeurs britanniques.
Autre aspect à souligner, le fait que l’Écosse, qui était un bastion travailliste, ait basculé du côté du SNP indépendantiste, celui raflant la quasi totalité des sièges de cette région privant ainsi le parti travailliste d’une soixantaine de sièges.
Il faudra encore donc étudier de prêt les votes par régions et par classes sociales pour avoir une véritable ideé des rapports de forces politiques en Grande-Bretagne. Ces élections ne règlent rien dans un pays brisé par le Thatchérisme et une arrogante domination de classe et son cortège d’inégalités inouïes, le pays où le duc de Westminster, Gerald Grosvenor, possède autant (7,9 milliards de livres, soit 9,4 milliards d’euros) que les 10% de ses concitoyens les plus pauvres.Les cinq familles les plus riches du Royaume-Uni possèdent autant que les 12,6 millions de Britanniques les plus pauvres. Leur richesse cumulée, 28,2 milliards de livres (33,7 milliards d’euros) correspond au patrimoine des 20% de la population du pays au bas de l’échelle sociale.
«La Grande-Bretagne est en train de devenir une nation profondément divisée, où une riche élite voit ses revenus s’envoler tandis que des millions de familles n’arrivent pas à joindre les deux bouts, commente Ben Phillips, directeur de l’action publique à l’association caritative Oxfam*. Ce n’est pas un signe de réussite économique mais un échec. Loin d’être inévitable, c’est le résultat de choix politiques qui peuvent être modifiés.» – En effet.
AM
* chiffres du Figaro 17/03/2014.