Conformément à sa longue tradition de dérobade et de contrefaçon politiques, la droite française (ex-UNR, UDR, UD-Vème, RPR, UMP…) envisage de se rebaptiser « les Républicains ». Elle accaparerait et usurperait ainsi la référence à la nation (avec un logo bleu-blanc-rouge) et le qualificatif de républicains, qui appartient en droit à tous les amis de Marianne, du bonnet phrygien et de ses valeurs historiques. Il est vrai que le MEDEF breton s’est déjà paré sans honte du « bonnet rouge » des révoltés bretons en lutte contre la monarchie…
Ce changement de nom est malencontreux du point de vue de la clarté politique : reconnaissons en effet que le sigle UMP convenait parfaitement à la formation de Sarkozy, ce valet friqué de Bruxelles et du MEDEF. Il suffirait de l’assumer pleinement en le traduisant comme il sied « Union Maastrichtienne Patronale ».
En réalité, ce que veut faire Sarkozy, c’est à la fois confisquer l’héritage républicain – lui l’ennemi acharné de la « Sociale », de la souveraineté nationale et des libertés républicaines, lui le serviteur zélé de l’OTAN et de l’aristocratie du fric – et stimuler l’américanisation de notre pays, de son vocabulaire et de sa vie politiques : en effet, dans le pays que chérit « Sarko l’Américain », le parti de la droite dure se nomme, à contre-emploi… les « Républicains ». Belle allégeance à l’Oncle Sam derrière le coup de chapeau apparent à Marianne-la-Rouge…
Bien entendu, le PS se récrie, bien qu’il n’ait guère plus de titre que Sarkozy à faire valoir sur le terrain des conquêtes républicaines lui qui, du pacte Valls-MEDEF à la loi Macron en passant par le flicage généralisé d’internet, ne cesse de démolir notre héritage progressiste issu de la Révolution jacobine et du CNR. L’hypocrisie est à son comble chez un Manuel Valls qui, au lendemain de l’élection de Sarko en 2007, appelait le PS à changer de nom et proposait à la social-démocratie française totalement déprolétarisée et dénationalisée (comme en Italie où les mutants renégats de l’ex-PCI sont devenus le « PD » admirateur de… Kennedy pour le plus grand malheur des travailleurs transalpins) de se rebaptiser « partito démocratico ».
Ainsi la boucle mortelle de l’américanisation serait-elle bouclée : de la bipolarisation factice sur fond de Parti Maastrichtien Unique au tout-anglais se substituant tous azimuts au français, la dissolution de la France dans l’Union transatlantique (dite TAFTA) deviendrait irréversible car en votant, l’électeur bien-pensant « choisirait » forcément de voter « démocrate » ou de voter « républicain »… comme « aux States ». On pourrait d’ailleurs faire une belle économie d’échelle au niveau mondial : il suffirait au fond de ne plus voter désormais qu’aux States dont les « french republicans » et les « french democrats » ne seraient évidemment plus que les succursales exotiques…
En tout cas que les incorrigibles bolcheviks que nous sommes avaient grandement raison quand, dès les années 70/80, ils s’opposaient à l’abandon systématique du vocabulaire marxiste par le PCF en pleine « modernisation ». Héritage de mots, héritage d’idées : comme l’avait vu Gramsci, linguiste et militant communiste, toute évolution sensible du langage est indicative de l’évolution de l’hégémonie politico-culturelle et de ses rapports de forces internes.
C’est pourquoi nous, militants du PRCF, continuerons de nous dire FRANCHEMENT communistes, léninistes, militants de la classe ouvrière et de la révolution socialiste. Alors que toute la société française dérive vers la droite et que l’extrême droite elle-même a usurpé le nom du glorieux Front national pour l’indépendance de la France créé pendant la guerre par le PCF clandestin, l’heure est plus que jamais à l’emploi des mots justes, sans lesquels il n’est pas de résistance victorieuse.