Les lecteurs d’Initiative Communiste le savent : l’armée américaine entraine des milices nazies en Ukraine. Plusieurs centaines de militaires de l’armée régulière américaine sont ainsi ouvertement présents – et armés – en Ukraine (quand on attend toujours la moindre preuve de l’implication de l’armée russe dans le Donbass….). Pourtant cela ne fait guère la une des journaux, bien au contraire. Y aurait il le même silence si des soldats russes formaient des soldats mexicains ? poser la question c’est y répondre !
Le 21 mai 2015, la radio France Culture pour son émission « culture monde » de Florient Delorme consacré aux marchés des armements dans le monde recevait : Yves Boyer, directeur adjoint de la Fondation pour la recherche stratégique et professeur à l’école Polytechnique. Où le décalage entre ce qu’explique Yves Boyer (que personne ne pourrait accuser d’agent de Poutine ou de bolchévique !) et la propagande belliqueuse déversées par les médias à grande écoute éclate d’une façon saisissante malgré les efforts du journaliste :
Florien Delorme : yves Boyer depuis le 5 mars dernier et jusqu’au 31 octobre prochain des officiers américains ont la charge d’entraîner des soldats ukrainiens dans la région de Lvov. Par ailleurs la Grande Bretagne a également envoyé des formateurs sur place, le Canada ont l’a dit tout à l’heure a été le premier pays à prendre cette décision en décembre 2014. Mais là, s’agit il véritablement de former à l’utilisation des armes en particulier, peut être qu’il s’agit de manifester d’avantage un soutien vis-à-vis de Kiev face à Moscou ?
Yves boyer : Alors là ça c’est une question extrêmement intéressante et on va se concentrer si vous le permettez sur l’attitude canadienne. L’attitude canadienne c’est celle évoquée par le premier ministre stephen harper qui a décidé qu’il y aurait des formateurs canadiens jusqu’en mars 2017 en Ukraine.
Si on regarde ce que fournie le canada (30 000 pantalons,30 000 manteaux, 70 000 rangers gore tex, des formateurs pour la neutralisation des explosifs, pour la police militaire, pour la formation médicale et logistique) On voit qu’en terme militaire ce n’est pas très hard. Alors pourquoi ? parce qu’il y a des élections fédérales au Canada le 19 octobre prochain et il y a au Canada la 3e minorité ukrainienne au monde après l’ukraine et la russie. Le parti de M Harper en perte de vitesse essaye d’attirer des électeurs de cette communauté. C’est autant une décision géopolitique que de politique intérieur et l’on voit bien dans la campagne que le parti de M Harper a cherché à ridiculiser Justin Trudeau en disant mais comment parlerait il à Poutine. Moi je sais parler à Poutine, je parle fort. Et là c’est la séduction non
seulement de l’electorat d’origine ukrainienne mais également d’origine d’europe centrale. Donc je pense que c’est cela qui est l’explication principale de la présence des canadiens.FD : Dans quelle mesure l’envoi de formateurs en Ukraine a peut être également pour but d’envisager par la suite de faire plus, c’est à dire d’envoyer du matériel militaire à Kiev ? Cela a été très débattu aux USA, et puis finalement c’est le statut quo, on fait rien en tout cas pour le moment
YB : Il y a plusieurs éléments dans votre question. le premier élément, vous avez tout à l’heure dit que les formateurs américains canadiens voir britannique allaient former les milices d’autodéfense de Maidan. Mais c’est quoi ces milices? C’est le bataillon Azov, c’est des néo-nazis! Et cela pose un problème au Canada. Et vous avez suivi l’affaire de Valentina Lizitza cette pianiste qui a été exclu de l’orchestre symphonique de Toronto, parce que elle même d’origine ukrainienne avait dit « attention, il y a quand même des néo-nazis ». Donc on revient dans le débat intérieur canadien, est ce qu’il faut soutenir des mouvements, dont il est avéré qu’ils sont clairement néonazis. Ca c’est la première chose. La deuxième chose c’est l’envoi d’arme. Alors l’envoi d’armes pour faire quoi ? pour inciter les autorités de Kiev à reprendre l’offensive dans le Donbass? Mais s’il y a une reprise de l’offensive dans le Donbass, là on va vers des rivages extrèmement dangereux et complexes. C’est à dire que les Russes ne laisseront pas passer et le conflit va s’accélérer et s’accentuer avec des proportions qui sont incalculables.
FD: Comment du coté de la Russie, on voit l’arrivé de ces instructeurs?
YB : Je reviens un instant en arrière si vous voulez bien. C’est la garde nationale dont vous avez parlé. Vous n’avez pas parlé de l’armée ukrainienne qui a vraiment un gros problème. C’est à dire que les ukrainiens essayent de rebâtir une armée et ils font appel à la conscription mais il y a de plus en plus de déserteurs. les gens ne veulent pas aller se battre dans le Donbass. la Garde Nationale c’est une armée composée pour beaucoup d’entre eux de volontaires politiques. Ce sont des galiciens et ils veulent la mort des russes. Et réciproquement d’ailleurs.FD: Effectivement, il faut rappeler que la Garde Nationale c’est une entité qui est très récente puisqu’elle a été crée en mars 2014 lors de la crise en Crimée.
YB : Et derrière cela, il faut rappeler qu’il y a un certain nombre de personnages qui sont fort peu recommandables en raison de leurs prises de position antisémites et néonazie, il faut l’avouer.
FD: Je repose la question : comment la Russie voie l’arrivée de ces instructeurs américains ?
YB : Ecoutez elle l’a voit d’une façon, peut être, avec un petit sourire en coin. « So what? » « cela va aboutir à quoi, vous allez former des gens des bataillons Azov etc. Eet puis qu’est ce que cela va faire? vous pensez que vous allez reprendre les combats? vous vous trompez. » Je pense que c’est là aussi l’illustration qu’à Washington il y a des débats au sein de l’administration Obama entre les néo-cons (incarnés par Victoria Nuland et l’ambassadeur américaine en Ukraine Geoffrey Pyatt) et une partie qui est « beaucoup plus modérée » et qui recherche les voies et moyens de discuter avec les Russes. Afin de trouver une solution pour sortir l’Ukraine de la situation dans laquelle elle se trouve. La visite récente de John Kerry à Sotchi c’est tout de même l’illustration de cette dualité qui existe au sein de l’administration Obama entre les néo-cons qui veulent faire tomber les Russies et les autres qui sont tout de même beaucoup plus réalistes. Faire tomber la Russie, il ne faut pas l’oublier, c’est faire tomber la Chine. C’est vraiment le « grand échiquier » du 21e siècle. Quel est l’hegemon qui peut s’opposer, qui va s’opposer aux USA, c’est la Chine. on le voit bien avec les mesures prises par les chinois dans le domaine financier, monétaires etc. Cela porte atteinte à l’hégémonie américaine. Si vous faites tomber la Russie, vous bloquez la Chine avec une double mouvement de pivot, avec la dimension maritime et avec la dimension continentale vous faites tomber l’Ukraine et vous faites tomber la Russie.
FD: Si on se place du coté de Kiev, on comprend aussi que l’enjeu pour Kiev c’est les armes qu’il pourrait y avoir derrière car voilà l’une des grandes lacunes de l’armée ukrainienne c’est qu’elle manque considérablement d’armes, de moyens. Vous parliez des hommes, on peut aussi parler des moyens.
YB: Mais elle a des moyens, simplement elle était confronté à des gens du Donbass qui savaient se battre, et soutenus par les Russes qui savaient très bien se battre. Ce n’est plus une question de moyens, c’est une question de détermination, de capacité à commander, de capacité à connaître…
FD:… Ce que dit Kiev c’est aussi que l’on manque d’armes légères, que l’on manque d’armes de précision, d’armes électroniques, de missiles anti-char…
YB: Cela c’est franchement de l’hypocrisie, car il s’agit de tirer de plus en plus les européens, les américains à s’engager en Ukraine, mais à s’engager réellement ! Et cela personne ne veut le faire
FD : mais vous ne pensez pas que tout cela est lié à une réalité historique. Il faut se rappeler le memorandum de Budapest en 1994, qui garantie l’Ukraine dans ses frontières contre le démantellement de ses dispositifs nucléaires.
YD. l’Ukraine cela n’a jamais existé, il y a 2 ukraines. Il y a l’ukraine russes, orthodoxe et il y a l’ukraine polonaise. Et ces deux parties n’ont jamais réussie à vivre ensemble. Et là on a l’illustration de cette difficulté du vivre ensemble qui fait qu’aujourd’hui, on a une impossibilité des gens de Kiev à trouver les voies et moyens pour se raccorder à ceux du Donbass. Ils ont coupé les vivres, ils ont coupé les pensions, On a tout coupé. On les déclare terroristes! Mais qu’est ce que c’est que cela, ce ne sont pas des terroristes ! On bombarde la population et on l’appelle terroriste! C’est quand même scandaleux. Alors d’un autre coté c’est vrai que Kiev peut s’estimer être potentiellement menacé par la Russie. Du coté des occidentaux, il faut trouver une voie délicate…
FD:… Potentiellement menacé, menacé par la Russie tout court. La Crimée une fois encore la Russie c’était engagée précisément à respecter les frontières de l’Union Eu, euh de l’Ukraine. En annexant la Crimée, alors bien sûr elle a ses arguments, le précédent du Kosovo, on connaît cela très bien. mais malgré tout, elle a balayé d’un revers de main un engagement qu’elle avait pris il y a 20 ans. [où le journaliste rame une nouvelle fois pour remettre au premier plan les éléments de langage du bourrage de crane de l’OTAN et l’Axe euro-atlantique]
YD : Les engagements, cela vaut pour ce que ça vaut. Il ne faut pas les sacraliser. Le droit international est fondamental, mais l’Histoire est faites que d’une succession de révision de traités et de réinterprétations. En ce qui concerne la Crimée, je vous rappelle que l’opération s’est déroulée avec un seul mort, ce qui signifie bien que du coté de la Crimée on était d’accord et que cela a été déclenché par ce qu’à Kiev, on a voulu supprimer l’usage et l’enseignement du russe comme langue nationale. C’était une révision du pacte nationale liant les différentes ukraines les unes avec les autres. A partir du moment où il y a rupture, il ne faut pas s’étonner qu’en face, il y ai eu réaction
FD : En tout cas c’est bien d’entendre cette parole, parceque l’on dit parfois que les médias sont parfois un petit peu trop anti-russes, anti poutine etc. Nous on essaye d’avoir des paroles un petit peu équilibrées, c’est l’exemple que voila on essaye de faire cette effort.
Où l’on retrouve l’argument habituelle. 24h pour le bourreau avec la une des journaux et sur tous les médias, 5 minutes pour la victime à 10h du matin en semaine sur une chaîne de radio relativement confidentielle… c’est celà le soit disant pluralisme du système capitaliste. Et encore, il ne serait pas étonnant que ce M Boyer ne soit plus invité aussi facilement… Et où l’on entend sur France Culture, une nouvelle démonstration que l’Axe Euro-Atlantique, que l’Europe sème la guerre en Europe, et menace la paix mondiale
Pour la Paix, il faut briser les chaines de l’Union Européenne Atlantique, il faut sortir de l’UE, de l’euro et de l’OTAN.
Contente d’avoir des nouvelles qui ne soient pas de l’intox. Merci.