Le 5 juillet dernier le peuple Grec était invité à voter au référendum proposé par le gouvernement Syriza.
Le vote s’est porté majoritairement en faveur du refus du mémorandum imposé par les institutions de l’Union Européenne. La presse a même relayé une victoire massive du NON avec 61,31 % des votes exprimés, traduisant ce vote comme une volonté du peuple de sortir de l’U€. Il convient cependant de relativiser cette victoire du NON au regard du pourcentage de votants qui n’a pas dépassé les 62,5 %. Autrement dit, 37,5 % des Grecs ne sont pas allé voter. A cela s’ajoutent les quelques points de votes blanc. Près de 40% des Grecs ont refusé de s’exprimer POUR ou CONTRE le référendum imposé par la Troïka, sans que cela soit d’ailleurs vraiment analysé… Ces 40% de Grecs avaient-ils estimé que quelque soit le résultat du référendum, leurs intérêts seraient une fois de plus mis à mal ? Combien parmi eux étaient déjà convaincus que seule une sortie de l’U€ pouvait permettre une véritable réorientation de la politique gouvernementale ?
Chacun sait ce qu’il est advenu des suites de ce référendum. Le gouvernement Syriza, faute d’avoir élaboré sérieusement un plan alternatif de sortie de l’U€, s’est retrouvé étranglé par la Banque Centrale Européenne qui a poursuivi, en la renforçant, sa politique de restriction monétaire, contribuant ainsi à ralentir un peu plus l’économie du pays. En l’espace de quelques jours, l’Eurogroupe a repris la main et inversé le rapport de force qui lui avait échappé le court instant du référendum. La finance a conservé le pouvoir qu’elle exerce depuis des années sur le peuple Grec ; et ce avec le soutien d’une large majorité des partis qui siègent au parlement européen, notamment ceux de la Gauche Européenne prise dans ses propres contradictions .
La Grèce en est désormais clairement rendue à l’état de colonie de l’Empire. Les 85 milliards de prêt, comme précédemment, ne vont servir qu’à régler les dettes antérieures, c’est à dire à permettre aux banques et aux financiers de poursuivre leurs opérations spéculatives. Sans que les problèmes de fond ne soient aucunement réglés, les souffrances du peuple Grec vont encore s’amplifier. Celles d’une partie des autres peuples de l’U€ aussi. La crise de l’U€ va se poursuivre. Catastrophe économique et sociale pour les citoyens travailleurs Grecs, cet épisode est aussi un puissant révélateur politique de la nature profondément fascisante de l’ordre juridique et monétaire de l’Union Européenne. Comme l’écrit l’économiste Cédric Durand, « L’expérience grecque démontre que, sur ce chemin, il n’y a pas d’autre choix que la rupture avec les institutions européennes néolibérales et la reconquête de la souveraineté démocratique sur les monnaies nationales ».
Après avoir appelé à refuser le référendum proposé par le gouvernement Syriza, la Confédération Européenne des Syndicats a quant à elle invité les responsables politiques de l’U€ à faire preuve de responsabilité pour éviter que la Grèce ne sorte prochainement de l’Union Européenne : « Des solutions doivent être trouvées pour garder la Grèce dans la zone Euro et dans l’Union européenne ». A l’unisson des institutions de l’Union Européenne, la CES fixe avant tout comme principal objectif que la Grèce demeure sous le joug totalitaire des institutions antidémocratiques de l’U€. La majeure partie des grandes confédérations syndicales françaises en sont signataires.
Ce vendredi 14 août, la Vouli, le parlement Grec, a approuvé le nouveau plan d’aide financière et le plan d’austérité qui va avec. Le projet présenté par le gouvernement Syriza a été adopté grâce à une majorité parlementaire obtenue avec les voies des partis de l’opposition, que le peuple Grec avait rejeté en janvier 2015, et ayant appelé à voter OUI au référendum le 5 juillet dernier pour faire valider le tout nouveau mémorandum imposé par Bruxelles. 47 des 149 députés de Syriza n’ont pas suivi le gouvernement, lequel n’a donc plus de majorité pour poursuivre sa politique. De nouvelles élections devraient donc avoir lieu d’ici quelques mois. Six mois après avoir été démocratiquement élu, les perspectives de survie du gouvernement Grec sont pour le moins improbables.
Pendant ce temps, le PAME, association de plusieurs organisations syndicales grecques adhérentes de la Fédération Syndicale Mondiale, appelait le 13 août à la plus large mobilisation des travailleurs Grecs, pour faire barrage à ce troisième mémorandum.
En France, les politiques d’austérité ne cessent de s’accélérer, à coup de puissantes réformes structurelles, telles qu’exigées par l’U€ et reprises à leur compte par les gouvernements qui y soumettent leur peuple. Parmi ces réformes, la loi Macron a été promulguée il y a quelques jours… et déjà le gouvernement travaille à l’élaboration de la deuxième couche en réponse à la feuille de route de Bruxelles : http://www.bastamag.net/Apres-
Ici comme en Grèce, les mêmes politiques produisent les mêmes effets : l’enrichissement de l’oligarchie industrielle et financière, et l’appauvrissement des citoyens et travailleurs. Aujourd’hui en Grèce, comme hier en Irlande, en France, aux Pays Bas, les résultats des référendums sont bafoués dès lors que leur résultat ne convient pas aux classes dirigeantes.
Mais alors, que faire, et comment faire ? Seules de puissantes mobilisations sociales et citoyennes dans chaque pays, portant clairement sur l’exigence de recouvrer la souveraineté populaire et l’indépendance nationale, donc de sortir du carcan de l’Union Européenne, de l’Euro (et par la même occasion du FMI, de l’OMC, de l’OTAN), pourront contribuer à bâtir des solidarités internationales entre les peuples, permettant rompre avec la servitude de la dette et d’inverser le cours actuel d’une histoire qui pourrait bien mener l’Europe à un nouveau conflit armé, au bénéfice principal de l’impérialisme Nord Américain. Un jour, la colère prendra peut-être le pas sur la peur…
« La fédération [européenne] devra posséder le pouvoir négatif d’empêcher les États individuels d’interférer avec l’activité économique […] Une fédération signifie qu’aucun des deux niveaux de gouvernement [fédéral et national] ne pourra disposer des moyens d’une planification socialiste de la vie économique ».
Friedrich von Hayek, 1939, économiste libéral, fondateur de la Société du Mont-Pélerin.
Hayek, F., « The Economic Conditions of Interstate Federalism » (1939), in Individualism and Economic Order, University of Chicago Press, Chicago, 1948.
source : http://www.frontsyndical-classe.org/2015/08/solidaires-du-peuple-grec-contre-l-oligarchie-et-contre-la-dictature-europeenne.html