DAECH – par Yves Letourneur
« Que répondre à un homme qui vous dit qu’il vaut mieux obéir à Dieu qu’aux hommes,
et qui en conséquence est sûr de mériter le ciel en vous égorgeant ? ». VOLTAIRE
Ils sont vêtus de noir, ils sont vêtus de nuit,
Voués à mettre à mort ce que leur interdit
De vivre tout l’obscur de leur foi sépulcrale
Pour qui Paris blasphème, étant la capitale
Du libre écrit, des arts, de la danse et du vin ;
Des femmes, dont la chair offusque le divin
Tel que ces ténébreux, en proie à leur mirage,
S’en sont haineusement fait la sinistre image,
Dans l’attente de jouir au paradis d’Allah
Des plaisirs qu’ils se sont refusé ici-bas.
Ils sont vêtus de noir, ils sont vêtus de nuit
Et l’Ombre du Chaos à chaque pas les suit.
Leur cible : une terrasse où se prélasse un verre ;
Un concert où du rock joyeusement libère
Le corps de ses tabous, l’esprit de ses carcans
En un lieu qui pour eux trouve rime à Satan ;
Un stade en liesse osant exhiber le théâtre
Des vils adorateurs d’un ballon idolâtre.
Ils sont vêtus de noir, ils sont vêtus de nuit,
Hissant un étendard qui menace et maudit.
Nouveaux Torquemada d’un Dieu totalitaire
Voulant régénérer l’ensemble de la Terre
Ils rêvent d’un retour contre les mécréants,
Y compris dans leur peuple, y compris dans leurs rangs,
D’un Khalifat vengeur des plaies de leur Histoire
Dont ils fantasment par ignorance la gloire,
Fiers d’être les Croisés à rebours de leur temps
Qu’incarnent à leurs yeux les bombes de l’Otan
Et la France opposant l’ Ombre de ses Lumières
A l’absolu du Croire, au règne des prières.
Ils sont vêtus de noir, ils sont vêtus de nuit,
Le jour quand il les voit aussitôt s’assombrit.
Ils prennent à leur piège un jeunesse avide
Dont ils savent combler habilement le vide
Existentiel au sein d’un univers marchand,
Leur offrant l’idéal truqué d’un combattant
Qui devient le héros d’une lutte héroïque
Contre l’impiété d’un Occident inique.
Ils tuent, tuant en eux leur propre humanité
En faisant de leur mort une fraternité
Glorieuse avec tous les martyrs de leur Cause ;
En allant jusqu’au bout de cette apothéose
Leur offrant aussitôt paradisiaquement
Le miel d’un au-delà de pur enchantement.
Ils sont du religieux le noyau fanatique
Toujours prêt à renaître et toujours pathétique,
Servant à cautionner les pires exactions
Dont les buts matériels se voilent d’onctions.
L’impérialisme en est la matrice profonde
Qui voit en ce miroir hideux sa geste immonde,
Sa réplique guerrière et son propre armement
Non moins que la fureur de son acharnement.
L’Arabie Saoudite incarne leur programme
En sa théocratie impudente et qui charme
Etant un acheteur propice à nos desseins
Qui s’accordent sans honte avec des assassins.
Hissant le drapeau noir de son noir bréviaire
Daech nomme au final un crime planétaire.
Yves Letourneur
9 janvier 2016