Quarante et un mille euros pour trois mois de traitement 04au Sovaldi contre l’hépatite C, quarante mille par an pour soigner au Gilvec les leucémies myéloïdes (cancer du sang)… deux exemples parmi tant d’autres.
Le Solvadi est fabriqué par le laboratoire états-unien Gilead. Son chiffre d’affaire 2014 est de 24 milliards $ et son résultat net 12 milliards (bénéfice net 50 % du chiffre ! qui dit mieux ?).
Le Gilvec est fabrique par le suisse Novartis : CA 58 milliards $ et résultat net 9,3 milliards.
110 cancérologues viennent de se rebeller contre cette pratique de prix exorbitants que rien ne justifie à part la volonté de se gaver au maximum avec les maladies des autres. [Selon le Pr Vernant, moins de 15 % du chiffre d’affaires va dans la Recherche et Developpement, soit moins que les bénéfices distribués aux actionnaires. La principale recherche que mènent les multinationales pharmaceutique c’est celle du profit maximal pour ceux qui les détiennent : la classe capitaliste ndlr]
En France, la sécurité sociale prend en charge les traitements. À force de contorsions le gouvernement se flatte d’avoir contenu les prix. Pour 2015, le prix du traitement de la seule hépatite C fut de 1,15 MILLIARDS € ramené officiellement par un artifice comptable à 700 millions.
Ici, ce sont les cancérologues qui s’indignent résolument dans une pétition contre le prix « exorbitant » des médicaments contre le cancer. Car ce sont eux qui les prescrivent et qui seront à la première occasion accusés de creuser l »trou de la sécu » avec leurs prescriptions. Car c’est dans leurs hôpitaux de pointe que ces médicaments sont prescrits et c’est à ces mêmes hôpitaux que le gouvernement vient de réduire le budget de 1 à 2 %.
Aujourd’hui l’heure est à la contestation. Les moutons que l’on veut tondre acceptent de moins en moins de se laisser faire facilement et nombre d’entre eux refusent et contestent.
Saluons l’initiative de ces médecins qui assument ainsi leurs responsabilités vis-à-vis de leurs malades. Le cancer capitaliste qui mine notre société montre là un de ses jours le plus hideux. Et son traitement jusqu’à son éradication se trouve dans la lutte, dans les luttes.
pour la commission santé du PRCF Dr C-E Tourné – www.initiative-communiste.fr
«L’urgence de maîtriser les prix des nouveaux médicaments contre le cancer»
De nombreuses innovations thérapeutiques apparaissent dans le domaine du cancer. Certaines offrent aux malades des espoirs de survie plus longue et d’une meilleure qualité de vie. Pourtant, le coût d’abord croissant et maintenant exorbitant de ces innovations risque fort de compromettre ces espoirs.
À travers des pétitions et des articles, des médecins américains spécialistes du cancer ont exprimé leurs inquiétudes devant les prix de ces innovations, s’émouvant de les voir passer de 10.000 à plus de 120.000 dollars par patient et par an en une quinzaine d’années. De fait, des dizaines de millions d’Américains qui ne bénéficient ni d’une aide de l’État ni d’une assurance santé personnelle ne peuvent déjà plus profiter de ces progrès thérapeutiques. Quant à ceux qui sont pourtant détenteurs d’une assurance santé, ils peuvent néanmoins avoir à s’acquitter d’un «reste à charge» de 25.000 à 30.000 dollars par an, soit la moitié du revenu moyen des ménages aux États-Unis.
«De façon paradoxale, les prix des nouveaux produits explosent alors que le coût de leur R&D a diminué»
Le régime de santé solidaire dont nous bénéficions en France met pour l’instant les patients à l’abri. Mais pour combien de temps? Et jusqu’à quel niveau d’inflation des prix? Longtemps, l’industrie pharmaceutique a calculé le prix d’un médicament en fonction de l’investissement qu’elle avait consacré à la recherche et au développement (R&D) de celui-ci. Or, aujourd’hui, de façon paradoxale, les prix des nouveaux produits explosent alors que le coût de leur R&D a diminué. En effet, alors que les anciens traitements du cancer étaient souvent issus de longs et difficiles screenings plus ou moins systématiques, les nouvelles molécules commercialisées par les industriels visent des cibles définies a priori, et le plus souvent fournies par la recherche publique.Par ailleurs ces nouveaux traitements bénéficient d’autorisations de mise sur le marché (AMM) très rapides, donc leur temps de développement est beaucoup plus court qu’auparavant. Ainsi, la charge de la R&D ne suffit pas à justifier les prix très élevés de ces nouveaux traitements. D’ailleurs, les comptes de l’industrie pharmaceutique eux-mêmes confirment cette faible charge, où en moyenne 15 % du chiffre d’affaires de la branche est allouée à la R&D contre plus de 25 % pour les dépenses de marketing, et des marges bénéficiaires annoncées excédant 15 %.
«Les prix des nouveaux traitements du cancer sont déterminés par l’idée que les industriels se font de ce que les marchés sont capables de supporter»
Mais, se défend l’industrie pharmaceutique, ces prix sont à la hauteur de l’efficacité des traitements et de l’amélioration des services rendus, un investissement pour de moindres dépenses, en quelque sorte. Outre que beaucoup de ces innovations ne présentent pas un bénéfice qui justifie de telles assertions, on peut se demander si, même quand l’efficacité est majeure, cela autorise en soi de tels excès. Le prix des antituberculeux apparus au milieu du XXe siècle n’a heureusement pas été défini en fonction des années de sanatorium et des morts évitéesâŠEn réalité, les prix des nouveaux traitements du cancer sont déterminés par l’idée que les industriels se font de ce que les marchés sont capables de supporter. Cela explique les écarts de prix très importants observés d’un pays à l’autre et permet également de comprendre pourquoi l’Imatinib (Glivec®), traitant de façon très efficace la leucémie myéloïde chronique a vu son prix passer aux États-Unis en quinze ans de 30 000 à 90 000 dollars par an, sans que le service médical rendu ait été amélioré.
Au Royaume-Uni des traitements pourtant efficaces sont aujourd’hui déremboursés à cause des dépenses qu’ils engendrent.
«Des menaces réelles pèsent sur l’équité d’accès des patients aux traitements innovants des cancers»
Face à l’inflation des prix pratiqués par des laboratoires pharmaceutiques enclins à optimiser leurs gains, des menaces réelles pèsent sur l’équité d’accès des patients aux traitements innovants des cancers, comme sur la pérennité de notre système de santé solidaire, d’autant que cette inflation déborde maintenant largement le champ du cancer et touche d’autres médicaments innovants comme ceux de l’hépatite C.Ces menaces sont suffisamment graves pour que les cancérologues et les hématologues manifestent leur préoccupation extrême auprès des pouvoirs publics et proposent notamment:
– de définir un juste prix pour les médicaments du cancer, basé sur les sommes investies par les industriels pour la R&D du produit (en tenant compte des apports fournis par la recherche académique), auquel s’ajouterait un retour sur investissement raisonnable, éventuellement défini a priori ;
– de rendre le système d’arbitrage des prix plus démocratique et transparent, en y associant de façon structurelle des représentants des patients et des professionnels ;
– de ne plus accepter les extensions de durée des brevets que la rapidité du développement des nouvelles thérapeutiques ne justifie pas ;
– d’autoriser, comme cela existe déjà pour les traitements du sida et des infections opportunistes, l’utilisation de licences obligatoires pour les pays en développement, qui leur permettent la production et l’utilisation de génériques avant même que les brevets ne tombent dans le domaine public.
* La liste des 110 signataires: L. Ades, F. André, T. André, M. Attal, M. Bagot, A. Baruchel, J.O. Bay, F. Bertucci, D. Blaise, N. Boissel, J. Bonneterre, D. Bordessoule, P. Bougnoux, D. Bouscary, R. Bugat, J.Y. Cahn, F. Calvo, M. Campone, S. Castaigne, M. Cavazzana, C. Chabannon, F. Chauvin, M.P. Colombat, C. Cordonnier, S. Culine, E. Deconinck, A. Delmer, H. Dombret, J.Y. Douillard, J.B. Dubois, M. Ducreux, F. Duffaud, C.Durdur, A. Eggermont, F. Eisinger, M. Espié, T. Facon, F. Fenaux, J.M. Ferrero, P. Feugier, A. Fischer, G. Freyer, P. Fumoleau, G. Ganem, C. Gardin, S. Giraudier, J. Gligorov, A. Goncalves, P. Guardiola, D. Guyotat, E. Gyan, C. Haïoun, J.L. Harousseau, O. Hermine, M. Hunault, N. Ifrah, A. Jaccard, P.Kerbrat , J.L. Lagrange, T. Lamy, G. Laurent, P. Laurent-Puig, V. Leblond, S. Legouill, F.X. Mahon, D. Maraninchi, G. Marit, J.P. Marolleau, J.J. Mazeron, J. Mazières, M. Michallet, L. Mignot, N. Milpied, J.L. Misset, M. Mohty, P. Moreau, F. Morschhauser, S. Nguyen-Quoc, S. Oudard, R. Peffault de la Tour, J.M. Phelip, T. Philip, A. Pigneux, X. Pivot, J.L. Pujol, H. Roché, P. Rousselot, S. Salas, G. Socié, M. Schneider, J.F. Seitz, H. Sobol, F. Suarez, J. Taïeb, C. Thieblemont, A. Thyss, H. Tilly, J.M. Tourani, O. Tournilhac, V. Trillet-Lenoir, N. Tubiana-Mathieu, A. Turhan, B. Varet, P. Verrelle, J.P. Vernant, N. Vey, P. Viens, E. Wattel, M. Ychou, R. Zittoun.
COMMUNIQUE DE PRESSE
APPEL DES CANCEROLOGUES : Explosion du prix des nouveaux médicaments METTRE FIN A L’ECONOMIE CASINO DES LABORATOIRES PHARMACEUTIQUES
110 cancérologues ont lancé ce jour un appel pour dénoncer le coût exorbitant des nouveaux traitements anti-cancer alors même que le coût de la recherche – développement diminue. Pour eux, cela remet en cause « l’équité d’accès des patients aux traitements innovants des cancers » et menace de nous conduire, comme cela est déjà le cas avec le traitement contre l’hépatite C le Sovaldi, vers un système de soin de rationnement rompant avec l’égalité d’accès pour tous.
Comme nous l’avons dit dans notre ouvrage et dans le cadre de notre opération Mains propres sur la santé, 56 médicaments sont déjà commercialisés à un prix public supérieur à 1650 euros la boîte. 70% de ces traitements concernent les traitements contre le cancer.
Aussi, dans l’étude comparée du prix du médicament France / Italie, il apparaît que la France pourrait réaliser 18,6 millions d’euros d’économies par an en alignant le coût du Glivec (antileucémique très utilisé de chez Novartis) sur celui de l’Italie. Idem pour le Zytiga (médicaments contre le cancer de la prostate commercialisé par Janssen-Cilag) qui présente un prix en pharmacie de 3612,58 euros en France contre 3011,21 euros en Italie soit une économie potentielle de 16,7 millions d’euros pour la caisse de la Sécurité sociale.
Il faut rappeler que la facture de la politique du médicament est en grande partie responsable du déficit structurel de la Sécurité sociale avec des dépenses qui culminent à 34 milliards d’euros en France quant l’Italie offre les mêmes garanties sanitaires pour une dépense en matière de médicaments n’atteignant que 18 milliards d’euros.
Les causes de cette inflation du coût du médicament sont connues : opacité des instances de fixation du prix ; sur-prescription médicamenteuse et sous prescription des génériques ; foisonnement de conflits d’intérêts entre l’industrie pharmaceutique, les médecins, les politiques et haut-fonctionnaires…
Les solutions existent aussi pour en finir avec l’explosion des prix du médicament en France. Il faut tout d’abord garantir l’indépendance de l’expertise et des systèmes de sécurité du médicament ; puis revoir la composition des instances d’évaluation, de fixation du prix (CEPS) et de remboursement (Commission de la transparence de la HAS) des médicaments souffrant de trop de porosité avec l’industrie pharmaceutique ; enfin, il convient de revoir le suivi des médicaments et la pharmacovigilance (le danois Peter Gotzsche –responsable de l’Institut Cochrane- considère par exemple sur la base de méta-analyses s’appuyant sur la littérature médicale internationale que certains nouveaux médicaments anti-cancers nuiraient aux chances de survie de certains patients et entraîneraient des effets délétères en fin de vie).
La France pourrait aussi faire baisser drastiquement le prix de ces médicaments en recourant à la licence d’office (dite aussi licence obligatoire) –où en menaçant d’y recourir, l’effet dissuasif doit jouer dans le rapport de force à instaurer entre pouvoirs publics et industrie pharmaceutique- comme le prévoit l’article L613-1 du code de la propriété industrielle. En effet, en vertu de cet article et des accords de l’Organisation mondiale du commerce, le gouvernement français a le droit de délivrer des licences d’office. C’est-à-dire que la France peut légalement autoriser des laboratoires pharmaceutiques concurrents à produire des génériques des anticancéreux vendus hors de prix. C’est ce qu’avait d’ailleurs fait l’Inde et le Brésil en créant des copies d’AZT au moment de l’épidémie du SIDA.Il est grand temps de répondre au lobbying institutionnel des multinationales de la Big-Pharma et à la faiblesse des moyens de contrôle démocratique dans l’exécution des politiques de santé publique en remettant les laboratoires à leur juste place : celle d’innover, de guérir et non de nourrir exclusivement et abusivement ses actionnaires en spéculant sur la santé des citoyens et en utilisant l’innovation thérapeutique comme un jackpot financier.
15/03/2016
Michèle RIVASI (députée européenne Groupe Verts ALE, agrégée en biologie, initiatrice de l’Opération Mains propres sur la santé et co-auteure du livre Le racket des laboratoires pharmaceutiques et comment en sortir)
Il y a des médicaments d’intérêts thérapeutiques majeurs pour lesquels il n’y a pas d’alternative thérapeutique et dont les prix atteignent des sommes exorbitantes sans rapport avec les coups de développement, de production et de distribution. Ca a été dit.
Il existe aussi des ruptures d’approvisionnement de ces médicaments dues à une demande croissante de pays qui acceptent de payer le meilleur prix. Il y a également des ruptures de stocks organisées sciemment par les laboratoires pharmaceutiques et/ou les distributeurs grossistes afin de maintenir les prix à leur niveau le plus élevé. Maximalisation des profits exige. Enfin, ces mêmes laboratoires peuvent très bien investir, demain, dans d’autres industries plus ”porteuses” et abandonner le médicaments, cela en toute légitimité.
Ces situations mettent en danger la vie des patients atteints de maladies fatales.
Sur la base de ces observations banales, les «moutons » ne doivent pas demander mais exiger que la recherche-développement, la fabrication et la distribution des médicaments « essentiels », qu’ils soient à effets anticancéreux ou autres, soient totalement pris en charge par les pouvoirs publics et le service public, garants de la protection des citoyens…