En pleine lutte pour le retrait de la Loi Travail et alors que va s’ouvrir le congrès de la CGT, www.initiative-communiste.fr donne la parole aux syndicalistes de luttes.
A la veille du 51e congrès le FSC exprime ses analyses, tire un bilant et suggère des propositions quant aux responsabilités de ce congrès Et à l’égard du mouvement entrepris pour le retrait de la loi et quant à la nécessite de la lutte pour le changement de société dans les deux textes suivants :
L’action contre la loi travail à la croisée des chemins : la responsabilité du 51e congrés de la CGT
La réforme El Khomri de casse du code du travail, répondant servilement aux injonctions de l’UE et du MEDEF, est massivement rejetée dans la population.
Le rejet indiqué par les instituts de sondage (plus de 70% !) pourtant aux ordres du grand patronat est confirmé par une mobilisation de plusieurs semaines qui ne se dément pas, marquée par de grandes journées d’action, une pétition la plus importante jamais signée dans notre pays et par des initiatives « NuitDebout », une colère qui s’accentue et qui questionne de plus en plus ouvertement le système capitaliste et ses régressions sociales sans limite…
Cette colère a des racines objectives : cela fait des décennies que les reculs se succèdent, que toutes les conquêtes sociales sont désossées. Tandis que les grosses entreprises et les gros actionnaires sont gavés de subventions publiques et autres exonérations sans contre-partie, l’agriculture familiale comme l’artisanat sont laminés et les classes populaires condamnées à la dégradation continue de leurs conditions de vie : emploi, salaires, santé, logement, éducation, transports, culture, associatif, tout est passé à la moulinette euro-patronale pour construire une société du profit et de l’opulence d’un côté et pour le plus grand nombre de la précarité, du chômage de masse et de contrat de travail précaire, de l’insécurité, de l’isolement, de la misère.
Le ras-le-bol de cette régression sans fin, de cette France d’en-haut, des palais dorés et des beaux quartiers qui planque son argent dans les paradis fiscaux et qui suinte de son mépris et de sa peur du peuple,…de cette justice de classe qui condamne les syndicalistes mais qui annule les procédures contre les puissants, ce ras-le-bol est sensible dans tout le pays et il est en train de se cristalliser à partir de l’attaque en règle que constitue la destruction du code du travail.
La mobilisation de ce printemps 2016 est d’ores et déjà la plus importante de ces dernières années. Mais elle arrive à la croisée des chemins face à un pouvoir oligarchique qui ne renoncera que sous la contrainte.
En effet, l’échec du puissant mouvement contre la réforme des retraites en 2010 montre à la fois les limites d’un mouvement limité aux seules manifestations et l’impasse du syndicalisme rassemblé avec la CFDT.
La question posée est donc : poursuivre dans la voie des journées d’action comme en 2010 et aller à l’échec, ou passer à la construction d’une nouvelle étape de la mobilisation pour parvenir effectivement au retrait de la contre-réforme du marché du travail qui serai une grande victoire pour la classe ouvrière Française et européenne .
La réponse paraît évidente : les journées d’action à répétition ne suffiront pas ; c’est un rapport de force massif, durable et envisageant de bloquer les profits qui doit être à l’ordre du jour, la mise en marche comme en 1936 ou en 1968 d’un immense mouvement qui permette dans un premier temps de reprendre tous nos acquis volés et dans un 2ème temps d’acquérir des droits nouveaux pour les jeunes, les actifs, les retraités, les précaires et les chômeurs.
Pour gagner contre les régressions en cours, contre ce pouvoir qui s’assoit sur ses promesses de campagne et la souveraineté populaire et qui envoie nos camarades de la CGT Goodyear en prison, cette justice de classe qui condamne les syndicalistes d’Air France, d’EDF et de PSA, qui réprime et provoque la jeunesse, c’est un mouvement tous ensemble en même temps, comme en 1936, que nous devons préparer en faisant converger la colère et les revendications, en associant toute les forces syndicales, associatives, politiques prêtes à se jeter dans la bataille, en s’assurant que la volonté de ceux d’en bas soit suivie par ceux qu’ils ont chargés de les représenter.
Un tel mouvement ne se décrète pas mais tout doit être fait pour en assurer le développement, en s’appuyant notamment sur les organisations syndicales et en premier lieu sur la plus importante d’entre elle : la CGT qui tient son congrès confédéral à Marseille à partir du 18 avril.
Comme le demandent de nombreuses organisations de base de la CGT, à l’image du syndicat CGT des territoriaux de Toulouse, ou la fédération du livre le 51ème congrès de la CGT doit être saisi de la question de l’organisation de la grève générale reconductible et du blocage des profits afin de mettre toute la « grande dame » en situation de construire cette perspective.
Pour un printemps 2016, faisons monter ces mots d’ordre : jeunes, salariés, retraités, sans-emploi… « Tous ensemble » contre la casse du code du travail qui soumettrait totalement les travailleurs au patronat, contre la politique euro-formatée du gouvernement et du Medef aux ordres de Bruxelles, pour les libertés syndicales, pour commencer à avancer à nouveau sur la voie d’une société fraternelle, basée sur les besoins et les aspirations du peuple.
Nos revendications exigent un changement de société !
Nous avons souligné par ailleurs la responsabilité du 51e congrés de la CGT pour servir de tremplin au mouvement actuel : «L’action contre la loi travail à la croisée des chemins :la responsabilité du 51e congrés de la CGT »
Le congrès aura en effet à prendre des décisions qui vont peser considérablement sur l’issue du bras de fer engagé avec le pouvoir socialiste pour le retrait de la loi travail.
Mais le rôle de la CGT et du congrés ne peut-être limité à cela.
Compte-tenu de son histoire la CGT a des responsabilités particulières : elle continue – en dépit des contradictions qui entravent son plein déploiement- à représenter une référence de lutte et de résistance pour de très nombreux travailleurs et de jeunes.
Ce constat ne peut masquer par ailleurs les contradictions auxquelles la CGT est confrontée et les critiques légitimes dont ses orientations confédérales font l’objet de la part de nombreux militants et de structures diverses.
Car jusqu’à la veille de son ouverture on ne peut pas dire que les échanges inter-organisations aient été marquants : pratiquement pas de débat d’orientation pas de bilan sur les choix opérés dans les années 90, l’adhésion à la CES, le « syndicalisme rassemblé « , sur la sempiternelle référence à » l’Europe sociale ».
Quand il n’y a pas purement et simplement mise à l’écart de militants critiques.
Quel est donc le rôle de la CGT dans ce contexte exceptionnel ?
Renouer avec la double mission du mouvement syndical
L’explosion des inégalités, les contre-réformes imposées au forceps depuis 30 ans par la droite et à présent par le parti socialiste plongent leurs racines dans la volonté de l’oligarchie de préserver ses privilèges.
Fondamentalement ces privilèges découlent de la propriété des grands moyens de production et d’échange.
Et avec la crise la plus grave et la plus profonde du capitalisme depuis 1929 cette oligarchie n’a que du sang et des larmes à proposer au peuple et la destruction et le détricotage de TOUS nos conquis !
Dans ces conditions inscrire son action dans le « dialogue social « où la perspective de « négociations »qui prendraient en compte nos propositions alternatives c’est entretenir des illusions qui préservent les exploiteurs.
Depuis plus de 20 ans nous faisons état de notre souci d’être « force de proposition » .
Mais quel bilan revendicatif de ces 20 ans ?
Mais quelles possibilités de prise en compte de ces propositions dans un système en crise profonde verrouillé par ailleurs par des traités européens qui font prévaloir sur tout la « concurrence libre et non faussée, » qui instaurent le dumping social entre les travailleurs comme garantie majeure du profit des entreprises ?
Comment croire que dans une situation où à la fois la droite classique, l’extrême droite et le parti socialiste sont au fond d’accord pour mettre en œuvre les contre-réformes exigées par Bruxelles, imposer une précarisation généralisée nous allons pouvoir négocier un nouveau code du travail intégrant de nouvelles conquêtes et de nouvelles sécurités pour les travailleurs ?
Alors que le seul regret et la seule critique qu’ils adressent à Hollande c’est de ne pas avoir dit dès sa campagne électorale de 2012 la politique qu’il avait l’intention de mettre en œuvre .
Et donc qu’ils se préparent non seulement à continuer dans ce sens mais plus encore de l’aggraver.
Dans ce contexte donc il n’y a pas de débouché revendicatif possible sans lier notre résistance indispensable contre les régressions sociales à la lutte pour le changement de société et la sortie des verrous européens.
La capitulation du gouvernement grec devant les diktats de l’UE montrant qu’il n’y a pas de sortie des politiques d’austérité et donc de prise en compte des revendications des travailleurs et du peuple sans remise en cause radicale des institutions nationales et européennes qui sont destinées à confiner et refouler les intérêts populaires.
Et il ne suffit pas de dresser un impeccable catalogue revendicatif (un autre code du travail, les 32 heures, une « autre Europe « …) sans dire en même temps quelles sont les conditions nécessaires à la prise en compte de ces revendications.
Et donc à désigner avec la plus grande clarté quels sont les obstacles et qui sont les ennemis irréductibles de cette prise en compte : les institutions et les traités européens, la propriété privée des grands moyens de production et d’échange, les forces politiques et syndicales qui approuvent et justifient ces reculs et ces agressions comme c’est la cas des dirigeants de la CFDT dans le mouvement syndical …
C’est donc un choix néfaste qui a été effectué en 1995 de supprimer des statuts de la CGT l’objectif de l’appropriation collective des grands moyens de production et d’échange !
Et ce n’est pas la redistribution des richesses qui mettra fin à l’oppression et à la domination de classe !
Pour rendre crédible et réaliste notre propre plate-forme revendicative il importe donc que le 51e congrès revienne sur cette réflexion et que les militants se réapproprient le débat sur les conditions concrètes et nécessaires à la fois du blocage des contre-réformes et de la possibilité de nouvelles conquêtes comme dans les grands moments de mobilisation du monde du travail.
Qui allaient avec la lucidité sur les réalités du combat de classe et la nécessité de le mener jusqu’au bout !
Nous faisons notre ce à quoi plusieurs dirigeants de la fédération du livre aspirent : » Le congrès doit aussi servir à porter , à aider, à construire un véritable mouvement de transformation sociale capable de perdurer au-delà du seul combat contre la loi El Khomri »
Au 51e congrès d’apporter une véritable réponse à ces interrogations !
Le Front syndical de Classe – 11 avril 2016