Que se passe t il en Syrie, que font nos camarades communistes dans ce pays déchiré par une guerre impérialiste qui dure depuis plus de 5 ans maintenant ? Quelles sont les tenants et aboutissant de ce qui se joue en Syrie, les enjeux ? comment agir pour la paix concrètement en France ?. La rédaction d’Initiative Communiste a pu s’entretenir avec Salam Alsharif membre du conseil central du Parti de la Volonté du Populaire, qui est donc l’un des dirigeants communistes syrien. Cet entretien a été réalisé au début du mois de novembre.
Initiative Communiste : Cher camarade peux-tu nous présenter ton organisation ?
Salam Alsharif : C’est le Parti de Volonté Populaire (PVP), un parti qui se situe dans la lignée des traditions révolutionnaires des communistes et toutes les forces progressistes syriennes. Le PVP publie un hebdomadaire, et dispose de deux sites internet, l’un est le site du parti (Kassioun.org, qui dispose d’une version en anglais) et l’autre est la version électronique de l’hebdomadaire (Kassiounpaper.com).
La présence du PVP s’étend, historiquement et actuellement, dans toute la Syrie. Le Parti est connu sur la scène politique syrienne en tant que force d’opposition patriotique basée surtout à l’intérieur : patriotique dans le sens où le PVP s’oppose au régime et ses politiques ainsi qu’à l’intervention impérialiste dans le processus de changement social au niveau national. Les cas de l’Egypte, la Tunisie, la Libye et d’autres enseignent qu’il faut viser des changements sérieux, radicaux dans la structure du régime, sans se contenter de changer le président, tout en préservant le régime intact.
L’action du PVP est basée sur une analyse de la crise du capitalisme, prévoyant sa phase d’explosion qui pourrait être finale et globale si les conditions subjectives sont en présence. Le PVP base sa lutte sur le postulat que la restauration de la fonction sociale de notre parti nécessite « un retour du parti aux masses populaires » ce qui implique « le retour dans la rue de ces masses’. Ce retour se réalise dans les vagues des mouvements populaires dans la région depuis 2010. Le PVP met ces vagues dans le contexte de la phase historique actuelle de la vie du capitalisme, une phase marquée par une crise sans précédent, une phase marquée par une hausse accélérée d’activisme politique des masses au niveau mondial.
La crise actuelle du capitalisme est en train de dépasser sa phase économique, pour entrer dans un stade de crises politiques, que ce soit dans notre région, en Europe ou ailleurs. Ce qui se traduit par un changement majeur avec l’arrivée de nouveaux acteurs politiques et/ou l’effondrement des sphères politiques en place, avec ses acteurs traditionnels. Ces derniers trouvent des difficultés accrues, y compris la « gauche », pour s’adapter avec le nouveau dynamisme social et surtout en ce qui concerne le développement d’une relation saine avec les différentes composantes des forces potentielles de changement, à la tête les mouvements sociaux montants. La crise actuelle du capitalisme affirme le début d’ouverture d’un horizon historique pour le pole opposé, le pole des peuples et des travailleurs.
Le déroulement de la crise syrienne affirme cette idée. Malgré les dégâts énormes faisant de cette crise la pire tragédie depuis la deuxième guerre mondiale, elle a rendu manifeste le déclin accéléré des EU et de l’UE, en tant que centres politiques et économiques du capitalisme, et leur faiblesse en ce qui concerne leur capacité d’agir pour défendre leurs intérêts impérialistes.
Avec le déclenchement de la crise syrienne, le PVP a participé dans le mouvement populaire pacifique de l’époque, où plusieurs camarades sont tombés en martyrs et d’autres ont été emprisonnés. Le PVP a averti des conséquences de la réponse sécuritaire du régime, une réponse qui deviendra plus tard militaire. Également, il a averti des conséquences de la militarisation et l’armement du mouvement populaire pacifique. Dès le début de la crise, le PVP a appelé au dialogue car tôt au tard on y reviendra, tout en maintenant et développant le dynamisme de mouvement populaire pacifique. Par conséquent, le parti a participé à tous les événements – que ce soit au niveau national, régional et international – qui visaient la recherche d’une solution politique à travers le dialogue et la négociation permettant la fin de l’effusion de sang des syriens. Plus spécifiquement, le PVP participé à la conférence consultative de 2011, aux conférences Moscou 1 et 2, et finalement Genève 3, sachant que le parti a été exclu de la conférence Genève 2, ce qui a contribué à son échec.
Initiative Communiste : Comment analysez-vous la situation en Syrie ?
Salam Alsharif : Contrairement à la grille de lecture dominante en Occident sur ce qui se passe au Moyen-Orient – héritée de la tradition orientaliste coloniale qui est consacrée aujourd’hui par le bras de propagande médiatique de la classe dominante – réduisant la crise syrienne, et plus généralement les changements dans la région, à une guerre civile entre sunnite et chiite, une guerre des religions.
La crise syrienne est avant tout une crise sociale et économique. Cette crise a explosé en 2011, mais il faut être conscient qu’elle a débuté bien avant, et son explosion était prévisible comme une conséquence des politiques économiques libérales mises en place par le régime syrien d’une manière persistante et très accélérée dans la derniere décennie. Les « recommandations » du FMI, de l’Union européenne et de l’OMC ont été mis en place en ce qui concerne la privatisation, la libéralisation des prix (les prix ont plus que triplés entre 2006-2009), la suppression des subventions économiques, la libéralisation commerciale, la dérégulation financière etc.. Cela a provoqué l’effondrement des secteurs productifs, notamment au niveau agricole où un exode rural massif s’est enclenché, des millions de paysans se sont entassés dans les banlieues des villes. Le nombre de petits paysans s’est réduit de 2/3 entre 2006-2010. A la veille de l’insurrection, le chômage était au-dessus de 30%, 44% des syriens vivaient sous le seuil de pauvreté, et 30% sont à la limite de ce seuil.
En parallèle, le niveau de liberté démocratique était trop bas, et le droit de grève était réprimé, sans parler des arrestations politiques. En plus, la politique de discrimination envers les kurdes syriens n’a pas été abandonnée : le problème du « recensement exceptionnel » injuste de l’année 1962 n’a pas été résolu.
La distinction entre les facteurs « internes » et « externes » de l’explosion de crise et son parcours est utile, notamment au niveau politique national. Alors en tant qu’acteur politique syrien le PVP insiste sur le fait que le régime syrien soit le principal responsable de cette crise et son parcours (sinon, on tombe vite dans le fatalisme en face des facteurs « externes »). Toutefois, cette distinction a une porté analytique et politique limitée de point de vu plus globale cherchant à mettre la crise syrienne dans le contexte du développement global du capitalisme et sa crise actuelle. Or, en analysant les conditions socio-économiques de la Syrie d’avant la crise, il ne faut jamais oublier que c’est le capital financier transnational qui a imposé les politiques néolibérales, à travers des instituions telle que le FMI, l’OMC, le « partenariat » Euro-Méditerranéen [imposé par Sarkozy dont on se souvient qu’il avait alors reçu Bachar Al Assad le 14 juillet NDLR], tout en s’appuyant sur les classes compradore et bureaucratique locales dans la périphérie capitaliste. Or, le rôle néfaste des EU et de l’UE, en tant que centres politique et economqiue du capital financier transnational, dans la Syrie date bel et bien depuis bien avant l’explosion de sa crise.
Ces conditions politiques et socio-économiques ne sont pas limitées à la Syrie. Ce sont les facteurs géopolitiques qui ont déterminé le parcours extrêmement destructif de la crise syrienne.
En effet, devant :
- la crise d’hégémonie que vie les EU en tant que le centre impériale de capital financier,
- l’émergence des mouvements populaires et sociaux dans un région d’une importance géostratégique majeure et où ses peuples tiennent trop peu de sympathie vis-à-vis les EU et ses politiques;
alors devant ces faits, parmi d’autres, les EU et l’UE fixent l’objectif de redessiner la carte de région en la divisant sur des bases ethniques, religieux, communautaires. Cela permettra d’établir un système d’Etats faibles et clients, et s’entretuant dans une guerre par procuration.
Les EU et l’UE avec leurs alliés régionaux ont tout fait dès le départ pour communautariser la lutte sociale, afin de détourner les mouvements populaires du sentier de changement social et démocratique, et les récupérer dans leur lutte géopolitique contre les puissances émergentes, qu’elles soient internationales, surtout la Russie, ou régionale, surtout l’Iran. Il faut souligner que le souci de l’occident n’est pas le régime syrien, mais l’existence même de la Syrie en tant qu’unité politique et territoriale.
Cela s’est concrétisé dans les efforts systématiques suivants de part des EU et l’UE avec leurs alliés régionaux : un refus d’une solution politique à la crise, la militarisation du mouvement populaire, les sanctions économiques, l’entrave permanente à la coordination internationale et régionale pour combattre efficacement le terrorisme.
La réponse sécuritaire du régime syrien aux contestations sociales a balisé la route devant l’interventionnisme occidental, et ce dernier a été mobilisé pour justifier de la réponse militaire par le régime sous prétextes de l’intervention impérialiste et de lutte contre le terrorisme. Il faut noter ici, que tout au long de la crise, les actions de l’un ont renfoncé les actions de l’autre, dans un cercle vicieux destructeur.
L’occident a tout fait pour bloquer une voie politique de traitement de la crise syrienne, tout en a poussant vers l’aggravation des tensions principalement à travers l’internationalisation de la crise et l’armement du mouvement populaire.
De plus, les sanctions économiques, passées sous silence même par la « gauche radicale » française, ont joué et jouent toujours un rôle catalyseur du dynamisme destructif. L’Union Européenne était le premier partenaire commerciale de la Syrie dont le revenu national est hautement dépendant de la vente du pétrole à l’Europe. Une étude faite par un institut danois pour les études internationales a dressé le bilan de ces sanctions, et surtout les sanctions européennes : le chômage fut multiplié par deux, les prix ont triplé en 2012 tandis que les salaires baissaient, restriction sur les transferts des fonds migrants, la chute dans les revenus de l’Etat engendre une dégradation des services publics : coupures quotidiennes d’électricité, mais surtout les sanctions s’appliquent aussi à la santé et aux importations de médicaments. Officiellement ces sanctions visent à punir le pouvoir politique, mais ce dernier n’est pas touché. Ces sanctions ont pris la population en otage en l’affamant au point où elle serait prête à tout pour survire, et prête à accepter tout type d’issue à la crise.
Au moment même où le peuple syrien est appauvri et l’emploi détruit sous sanctions européennes, le seul emploi florissant reste celui des milices paramilitaires, côté régime ou celle de l’opposition. C’est un mouvement complémentaire. Nous pouvons nous interroger sur le nombre de personnes affamées qui ont rejoint les milices de DAESH, Al Qaeda et d’autres, juste pour pouvoir survivre et nourrir leurs familles. Les sanctions économiques balisent la route du terrorisme.
Enfin, c’est bien reconnu aujourd’hui que la politique de l’occident impérialiste est la principale responsable de l’essor du « terrorisme » dans la région, mais ce qui n’est pas encore reconnu c’est qu’il continu à refuser jusqu’à l’heure actuelle de combattre sérieusement le terrorisme.
La Russie propose une coalition internationale sous mandat de l’ONU, en coopération avec les forces locales, l’armée syrienne et l’opposition qui accepte de combattre Daesh et al Nosra, tout en commençant le processus politique en Syrie. L’occident a refusé, tout en décidant de prendre l’ONU de vitesse avec la formation d’une coalition internationale, incluant l’Arabie Saoudite et le Qatar, contre DAESH en septembre 2014. Un an après, les territoires sous contrôle de groupes néofascistes se sont extrêmement étendus et Damas allait tomber dans leurs mains avant que les opérations militaires russes commencent fin septembre 2015.
Initiative Communiste : Quel rôle pour la Russie ?
Salam Alsharif : Parler sur le rôle de la Russie en Syrie ici, en France, n’est pas facile étant donné l’alimentation d’une nouvelle phobie par la classe dominante : la russophobie. A laquelle n’échappe pas même la « gauche radicale » qui se trouve coincée dans un débat entre ceux ne se rendant pas encore compte de la dissolution de l’URSS et que la Russie est un pays capitaliste, et l’autre essayant de mobiliser la rhétorique marxiste pour faire de la Russie un pays « impérialiste » !
Comprendre le rôle russe nécessite la compréhension de la porté de la crise syrienne et son potentiel. La Syrie est la pièce centrale dans la stabilité géopolitique de l’espace régional s’étendant de l’Est de la Méditerrané jusqu’au Caucase et la Mer Caspienne. L’effondrement de l’appareil de l’Etat syrien où la division de la Syrie engendra des mouvements tectoniques de la géopolitique régionale allant jusqu’à la Russie même.
En conséquence, la Russie va de l’avant pour défendre sa sécurité nationale et son unité territoriale. La Russie se trouve contrainte d’adresser et de contenir le terrorisme fasciste dans la Syrie en adoptant une stratégie défensive proactive, avant qu’elle se trouve obligée de se défendre passivement au sein de ses frontières, sachant que plus que cinq milles militants du Caucase (sans parler de ceux qui viennent de l’Asie centrale) combattent en Syrie avec DAESH et Al Nosra (Notamment dans des positions avancées dans la hiérarchie de ces groupes). Comme la victoire du fascisme en Espagne, si le fascisme gagnait et s’installait en Syrie, la paix internationale serrait mise en danger à grande échelle.
Concrètement, le rôle de la Russie était basé sur la volonté d’éviter la répétition du scénario de la destruction de la Libye. Dès le départ, la Russie a insisté pour qu’il y ait une solution politique à la crise, et que les syriens, régime et opposition, doivent s’asseoir autour de la table pour trouver un consensus sur les réformes et les changements nécessaires dans le régime politique. D’une manière globale, la Russie et la Chine voulaient aussi mettre fin à l’interventionnisme occidental, qui mobilise le Conseil de sécurité de l’ONU, visant le « changement des régimes » à l’image de l’intérêt des Etats-Unis. Ce qui explique les trois vétos consécutifs russo-chinois, depuis 2011, pour empêcher la répétition du scénario libyen.
Contrairement à l’idée promue par l’appareil de propagande, la Russie ne supporte pas Al-Assad, mais tout simplement refuse l’interventionnisme occidental dans la crise syrienne. La Russie préserve une ouverture et de bonnes relations avec la grande majorité des groupes de l’opposition syrienne. Le mot clé de la vision et des pratiques russes en Syrie, c’est qu’il n’y a qu’une issue politique à cette crise. Ce pays a été la puissance motrice de plusieurs initiatives pour une issue politique en Syrie, en commençant par le communiqué de Geneve I en 2012, la conférence de paix de Geneve II en 2014, les conférences Moscou I et II en 2015 entre l’opposition et le régime et enfin le conférence de Genève III 2016.
Fin septembre 2015, la Russie commence ses opérations militaires dans un moment très délicat et sombre, dont l’objectif, d’une part, est d’empêcher l’effondrement de l’Etat syrien en repoussant les groupes terroristes et néofascistes, et d’autre part, de redonner un souffle à la solution politique étranglée par les EU et ses satellites régionaux.
Ces objectifs ont été réalisés. DAESH, Alnosra et les autres groupes néo-fascistes ont été repoussés, Palmyre libérée etc. Au niveau politique, les EU, l’UE et leurs satellites, ont annoncé pour la première fois que le départ immédiat d’Assad n’était plus une condition préalable à une solution politique en Syrie. C’était une contradiction dans les termes de désirer une solution politique tout en revendiquant dans le même temps le départ immédiat d’Assad. Mais jusqu’à maintenant l’action de ce front n’a pas suivi ses paroles.
Un mois après les opérations russes, à Vienne commence la négociation de paix visant à lancer le processus politique en Syrie, ce que va déboucher sur la constitution du Groupe International de Soutien à la Syrie, incluant la Russie, EU, UE, Iran, Arabie Saoudite, Turquie et d’autres pays de la région. Deux mois après, le conseil de sécurité adopte les résultats de la discussion de Vienne à l’unanimité pour la première fois depuis l’explosion de la crise dans la résolution 2254. Cette résolution constitue une marque dans l’évolution de la crise syrienne qui reconnaît l’unité, l’intégrité territoriale et la laïcité de la Syrie. Il commande un processus de transition politique dirigé par les syriens dans lequel tous les groupes d’oppositions syriens sont représentés (et non seulement l’opposition fantoche de l’occident, de la Turquie et l’Arabie Saoudite: la Coalition Nationale Syrien). Nous pensons que la résolution 2254 de CSNU est une traduction des changements des rapports de force internationaux à l’encontre des intérêts états-uniens.
En février 2016, pour la première fois la Russie et les EU annoncent un cessez-le-feu entre les forces loyalistes et rebelles. En Mars, la négociation entre les syriens a commencé à Genève sur la base de la résolution 2245, et deux cycles ont pris lieu en attendant le troisième. Ce dernier devait commencer suite à la signature d’un accord très important en septembre entre la Russie et les EU, ce qui a été bloqué suite au rejet de l’accord par les EU.
Parallèlement à tout ce qui précède, la Russie continue ses efforts de médiation entre les groupes d’oppositions militaires et le régime syrien pour conclure le cessez-le-feu local. En fin octobre, le nombre des villages et localités qui ont signé un accord de trêve avec le régime syrien, sous garanti du centre de réconciliation russe, a dépassé le 850 (Etant donné que cette initiative a été lancé fin Février 2016).
Bref, la Russie cherche à unifier les efforts et établir une alliance internationale coopérant avec les forces locales pour combattre les groupes néofascistes, à l’image d’alliance entre l’URSS et les alliés pendant la deuxième guerre mondiale. Malheureusement, les EU continuent d’entraver cette démarche comme le montre les évènements récents en Alep. Mais nous pensons que l’occident est obligé de préparer le « débarquement de la Normandie », sinon ils seront privés du rendement politique de la défaite des néofascistes.
Initiative Communiste : Que se passe-t-il à Alep ?
Salam Alsharif : Tout d’abord, il faut rappeler qu’Alep est la deuxième ville en Syrie et sa capitale économique. Donc, la victoire de terrorisme fasciste dans cette ville équivaut la division de la Syrie. Cela explique le fait que tous ceux qui cherchent la division de pays, refusent la sortie des groupes fascistes d’Alep et essaient de les protéger à tout prix.
Le cessez-le-feu de février 2016 exclut les organisations classées « terroriste » par le CSNU, c’est à dire DAESH et Front Al Nosra (Al-Qaïda en Syrie). Dans les faits, les milices supportées par les EU et classées « modérées » combattent coude-à-coude avec Al Nosra sur les mêmes fronts et mêmes barricades avec un commandement commun. Les EU reconnaissent ce fait et ont promis de travailler à leur séparation depuis mars 2016. Cela n’a jamais été fait. Pire, la Russie et l’armée syrienne ont été accusé de saboter la trêve quand ils frappaient Al Nosra avec ses alliés « modérés ».
Le 10 Septembre et après une négociation marathonienne, la Russie et les EU signent un accord très important, selon lequel une trêve à Alep doit être appliquée le 12 Septembre pour une semaine pendant laquelle la séparation entre terroristes et « modérés » doit y être opérée. Après cette semaine, des opérations militaires coopérées entre la Russie et les EU contre les terroristes devait prendre lieu (même contre les « modérés » s’il refuse de se séparer de Al-Qaïda), et le ciel d’Alep était exclusivement réservé à ces deux pays.
Malgré le fait que l’Armée syrienne et ses alliés ont accepté et respecté leurs obligations comprises dans l’accord, les milices « modérés » ont refusé l’accord et ils n’ont pas respecté leurs obligations. Surtout en ce qui concerne la séparation d’Al Nosra. Et pire encore, certains ont commencé une négociation pour fusionner avec ce dernier.
Le 5ème jour de la trêve, les EU bombardent l’armée syrienne dans un endroit stratégique vers la ville Deir Ezzor assiégée par DAESH avec ses deux cent mille habitants, tuant environ cent soldat syriens et permettant l’avancé de DAESH. Le lendemain, un convoi humanitaire qui devait entrer à Alep Est a été attaqué. Les EU ont de suite accusés la Russie, conditionnant le maintien de l’accord du 10 septembre dans la mesure où la Russie accepte qu’Alep devienne une zone aérienne exclusivement états-unienne ! Bien sûr, cela a été refusé. Les EU se sont donc retirés par la suite de l’accord, annonçant l’arrêt de toute consultation bilatérale avec la Russie et la recherche d’un plan alternatif à la solution politique en Syrie.
Le 6 Octobre, l’envoyé spécial de l’ONU en Syrie, De Mistaura propose la sortie garantie d’Al Nosra d’Alep vers Idlib, afin d’éviter la destruction de la ville. La Russie accepte, et l’opposition syrienne parrainée par l’occident appelle à la démission de De Mistura.
En 8 Octobre, deux projets de résolution se sont confrontés au sein de l’ONU. Le premier proposé par la France, appel à un cessez-le-feu surtout de la part du régime syrien, sans inclure aucune revendication concernant le nœud du problème qui est la séparation des groupes « modérés », de Al-Qaida. La deuxième proposition de la Russie appelle à un cessez-le-feu tout en soulignant à la séparation des « modérés » de terroristes conformément à l’accord Russo-Etats-uniens. En plus, la résolution russe a appelé à la mise en place de la proposition de De Mistaura de 6 Octobre. Aucune des deux résolutions n’est pas passée.
La Russie avec l’armée syrienne annonce une trêve à Alep le 18 octobre pendant cinq jours et pratiquement les frappes aériennes n’ont pas reprises jusqu’à l’heure actuelle, en appelant à une sortie garantie des milices et de la population civile de l’Est d’Alep. Mais les groupes terroristes ont bloqué la sortie des civils.
Ce qui se passe à Alep rend irréfutable la réalité que les EU, soutiennent les terroristes et cherchent à les protéger de toute attaque sérieuse. Ce qu’à déclaré une fois Laurent Fabius (ex-ministre des affaires étrangères français) qu’Al Nosra « fait du bon boulot » à Marrakech en 2012, l’opposition reconnue par l’occident comme la « seule représentante du peuple syrien », le prononce tous les jours. La Coalition Nationale Syrien défend ouvertement Al Nosra, tout en refusant de la considérer en tant qu’organisation terroriste!
Le PVP considère DAESH, Al Nosra et les milices coopérant avec eux comme des groupes néofascistes conçus, mobilisés et instrumentalisés, tout comme c’était le cas avec le nazisme dans les années 30, par les factions les plus arriérées du capital financier transnational qui n’arrive pas à accepter le déclin accéléré de l’hégémonie des EU, en tant que le centre impérial, dans le monde et dans la région.
Cela peut être expliqué par
(i) la crise économique réduisant les ressources consacrées aux affaires étrangères et à l’armée,
(ii) l’incapacité des EU à réaliser ses objectifs en Syrie et dans la région par les moyens politiques et économiques,
(iii) l’essor et le retour sur le devant de la scène de certaines puissances internationales, la Russie et la Chine, et régionales, surtout l’Iran,
(iv) redéfinition de priorités géopolitiques pour les EU.
Dans un tel contexte, le centre impérialiste préfère, pour l’instant, une guerre indirecte prolongée avec ses adversaires. Mais le PVP pense que cela ne tiendra pas longtemps et que le rapport de force international et régional va s’imposer.
Initiative Communiste : Comment envisagez-vous la sortie de crise en Syrie et les perspectives pour les forces progressistes, patriotiques et laïques ?
Tout d’abord il faut réaliser ce que le PVP appel « la triple mission N°1 »: mettre fin à la catastrophe humanitaire, la violence et l’intervention extérieure quelque soit sa source, et la mise en marche d’une solution politique; ces missions doivent être opérées parallèlement et non pas consécutivement.
La solution politique, est l’arme stratégique pour combattre le terrorisme fasciste, car elle permet d’unifier tous les syriens contre ce dernier. La solution politique déclenchera une recomposition rapide de toutes les forces politiques, du côté de régime ou du côté d’opposition, sur des bases sociales et politiques et non pas communautaires.
Cela doit se faire sur la base de la résolution 2254 de CSNU garantissant l’unité des territoires, du peuple syrien, d’Etat et des institutions garantissant sa souveraineté. Une telle solution politique devrait permettre l’union des fusils syriens contre le terrorisme, de toute forme ou couleur, inclue l’unification de leur volonté contre le terrorisme socio-économique, ce qui équivaut à garantir « la liberté des syriens en ce qui concerne leur mot et leur bouché » comme l’indique l’expression syrienne c’est à dire de leurs droits sociaux et politiques. Alors, il ne faut pas se contenter des revendications « démocratiques » mais aussi et surtout des revendications « sociales ».
Le PVP défend un modèle démocratique (i) garantissant l’unité du peuple et des territoires syriens, (ii) permettant que le « social » soit au cœur des débats politiques. Un modèle fondé sur la démocratie des acteurs politiques nationaux transcommunautaires, et non pas une démocratie intercommunautaire (que ce soit des communautés religieuses, sectaires ou ethniques). Cette dernière signifie une répartition de richesse sur des critères sectaires et/ou ethniques, une répartition entre différentes chapelles au détriment des pauvres qui seront mobilisés en tant que pions dans le pillage de leurs propres richesses (à l’exemple de Liban et l’Iraq d’après occupation états uniens).
Cela nécessite d’achever les réformes constitutionnelles, légales et électorales : il faut des reformes permettant les libertés politiques les plus élevées, et l’adoption d’une loi d’élection parlementaire proportionnelle ou la Syrie sera considérée comme une seule circonscription. Une loi qui encadre les partis assurant une compétition politique sur la base d’un programme électoral destiné à l’ensemble des syriens ou non pas à telle ou telle communauté religieuse ou ethnique.
Le PVP propose un modèle économique et social fondé sur le principe : « la réalisation des taux de croissances les plus élevés et la justice sociale la plus profonde ». Le PVP appel à un modèle économique dirigé vers la production des biens nécessaires pour satisfaire les besoins locaux, d’une manière aussi indépendante que possible, tout en défendant l’intégration régionale sur des bases sociales reflétant les intérêts des peuples de la région et non pas ses classes « supérieures ».
Concernant les perspectives pour les forces progressistes, patriotiques et laïques, nous ne sommes pas du tout inquiets à ce niveau. La Syrie a été et continu d’être le foyer politique et idéologique de telles forces dans la région, y compris la gauche radicale. L’extrémisme n’est pas un phénomène syrien, mais fondamentalement, le résultat de politiques états uniennes et de l’occupation de l’Iraq. Ce sont les conséquences du déroulement de la crise syrienne et du niveau d’internationalisation trop élevé de cette crise.
Le PVP pense qu’une nouvelle sphère politique a commencé à se former dans la Syrie, la région et le monde. Devant ce fait, les forces politiques, du part de régime ou d’opposition, se trouvent devant deux choix: l’adaptation aux exigences de ces nouvelles réalités politiques, ou l’agonie et la disparition. Au premier rang de ces exigences est l’incarnation des intérêts politiques et de classe profonds des couches sociales exploitées et marginalisées.
La Syrie traverse un carrefour existentiel. A la manière dont sera résolu sa crise dépend la trajectoire d’autres crises dans la région et le monde. Le PVP reste optimiste en ce qui concerne la victoire d’une issue politique à cette crise. Ce qui signifie une défaite du fascisme international dont le centre est à Washington, et les membres dans notre région et ailleurs.
Qu’attendez-vous des communistes du PRCF dans le cadre de la lutte anti-impérialiste commune ?
Une de raisons pour laquelle les impérialistes arrivent à mener des politiques aussi destructives dans la région, c’est l’absence quasi-totale de résistance à ces politiques à l’intérieur des pays comme la France fortement impliqué dans la tragédie syrienne. Malheureusement, la majorité de la gauche européenne est tombée dans le piège de l’interventionnisme impérialiste dit « humanitaire », sans parler du soutien à un modèle de démocratie entre communautés ethniques. Il y a des activités de solidarité avec les réfugiés, ce qui est bon, mais il y a peu ou pas des activités visant les causes des catastrophes humanitaires poussant les gens à fuir leur pays, des causes telles le pillage économique et les guerres impérialistes.
Le PVP attend de toute la gauche radicale et des forces vives de la société française et européenne une campagne pour la fin de la guerre en Syrie, pour une solution politique et pacifique, et pour la fin du blocus économique contre le peuple syrien.
Salam Alsharif – Membre du conseil central du Parti de Volonté Populaire
Voici comment se présente le PVP sur son site internet, traduction depuis l’anglais par www.initiative-communiste.fr. Il existe deux autres organisations communistes en Syrie : le parti communiste unifié et le parti communiste (bakdash) qui sont elles membre du Front National Progressiste dirigé par le parti Baath
Au sujet du Parti de la Volonté du Peuple :
Le Parti de la Volonté Populaire est le parti de la classe ouvrière syrienne et de tous les cols blancs et bleus. Le PVP s’efforce de réaliser les intérêts nationaux et de classe de ces couches sociales en travaillant à la mise en œuvre de son programme, au niveau de la politique nationale ainsi que de ses aspects socio-économiques et démocratiques. Le PVP a pour but de construire une société socialiste contemporaine qui élimine toutes les formes d’exploitation de l’homme ou de la nation et qui satisfasse les besoins matériels et moraux de la société.
Le PWP fait partie intégrante du mouvement politique syrien moderne et de sa sphère politique. Cela grâce à son analyse précoce et correcte de la crise des mouvements politiques en Syrie et à sa volonté de rétablir son rôle fonctionnel en incitant les masses à conserver un haut niveau d’activité politique.
Le Parti de la Volonté du Peuple est l’aboutissement historique des luttes des dizaines de milliers de communistes syriens depuis tant de décennies. C’est l’héritier légitime et l’extension du Mouvement communiste syrien, s’opposant et travaillant à développer ses réalisations les plus remarquables, idéologiquement, intellectuellement et politiquement.
Prenant le marxisme-léninisme comme référence idéologique, créative, loin du nihilisme et / ou du littéralisme, le PVP adopte et est guidé par le socialisme scientifique, et il travaille à sa mise en œuvre en tenant compte des réalités et des particularités historiques de la Syrie, Du Mouvement révolutionnaire mondial, en investissant dans ses productions optimales.
Le PVP vise la mise en place d’un nouveau régime politique et social en Syrie, en réalisant les taux de croissance économique les plus élevés et la justice sociale la plus large, en plus d’élargir les libertés politiques et démocratiques afin de garantir les engagements populaires les plus larges de la vie politique syrienne .
Le PVP travaille à maintenir l’indépendance nationale, à défier les plans américains et sionistes, régionalement et internationalement, et à lutter pour la libération et la restauration de tous les territoires arabes et syriens occupés.
Le PWP est l’aboutissement et la poursuite des travaux et des luttes du Comité national pour l’unité des communistes syriens qui a été lancé dès le 21ème siècle, basé sur une croyance scientifique que les défaites qui ont été témoins pendant la deuxième moitié du 20ème Siècle n’étaient qu’une fermeture historique provisoire avant le Mouvement révolutionnaire mondial contre le capitalisme mondial. Le PWP avait prévu tôt que cette fermeture d’horizon se transformerait en ouverture avec l’escalade de la crise capitaliste, atteignant son propre impasse et la fermeture historique ultime.
Gardant à l’esprit cette convection scientifique profondément enracinée, le PWP a une mentalité triomphante et vit à l’âge des victoires imminentes du pôle des peuples contre le système capitaliste mondial.
Historique du PVP, repris d’après Wikipédia
En 2000, peu de temps après la convention du 9ème Congrès du Parti communiste syrien, 80% des membres de l’organisation Damas du Parti ont été expulsés. Au fur et à mesure que cette procédure illégitime s’élargissait pour couvrir plus d’organisations du partis dans toute la Syrie, les camarades touchés et les organisations du parti formaient le Comité national pour l’unité des communistes syriens, qui republiait le journal Kassioun. Contrairement aux deux autres factions communistes, le nouveau courant communiste ne faisait pas partie du Front national progressiste qui réunissait le parti Ba’ath au pouvoir et les autres partis «légaux».
Il a fallu au groupe communiste plus d’une décennie, en fait en 2012, pour former et déclarer officiellement un parti enregistré connu comme le Parti de la Volonté du Peuple (PVP), qui a convoqué son 10e congrès périodique, le 1er après son enregistrement, en Juin 2013. Le parti a présenté des candidats comme indépendants aux élections législatives de 2003 et 2007, mais n’a pas remporté de sièges. Néanmoins, lors des élections législatives de 2012, le Front Populaire pour le Changement et la Libération, une coalition formée par le PVP, a pris 5 sièges. Le Parti a rejoint les manifestations au début de la crise syrienne de 2011 et plusieurs de ses militants à Damas, Homs et DerEzzour ont perdu la vie aux mains de la police gouvernementale et d’autres services tandis que d’autres étaient détenus ou arrêtés dans d’autres gouvernorats syriens . Au fur et à mesure que le mouvement populaire syrien devenait violent et armé, le PVP continuait ses aides humanitaires et ses efforts de médiation dans certaines zones de conflit. Le PVP cherche un changement global, radical et démocratique du régime dans son ensemble, et pas seulement le retrait du président. Sur le plan économique, le parti appelle à la suppression des «réformes» de la libéralisation qui a débuté en 2005 et a jeté les bases des troubles sociaux et politiques en Syrie et appelle à la création d’une économie nationale forte.
Le Dr Kadri Jamil, un des Secrétaires du Conseil du PVP, a été membre du comité qui a rédigé des amendements à la Constitution de la Syrie en réponse au mouvement populaire syrien 2011. Les amendements ont été approuvés lors du référendum constitutionnel syrien 2012 et ont permis des élections multipartites en Syrie.
Direction du PVP :
L’organisation du PVP repose sur le Centralisme Démocratique. Toutefois, il n’a pas désigné de secrétaire général, mais un collectif de direction du Conseil Central, qui sont élus lors d’un Conférence Générale. Le Conseil Central élit parmi ses membres une présidence et les membres du Secrétariat pour conduire les taches quotidiennes.