Chers amis chanteurs de Génissieux (Drôme),
Nous saluons votre initiative de d’avoir choisi d’interpréter la chanson de Craonne à l’occasion de la commémoration des cérémonies du 11/11/17.
Ce choix revêt une portée symbolique et mémorielle lumineuse. Nous saluons les bons soins que vous apportez à la mémoire du martyre des 639 soldats fusillés pour l’exemple par Pétain et cie. Soldats qui ne voulurent pas servir ni mourir dans des « guerres qui sont faites par des gens qui ne se connaissent pas au profit de gens qui se connaissent très bien, mais qui refusent de s’entretuer » Paul Valéry. Ceux ci ne voulurent pas servir ni mourir dans des guerres « où l’ on croit mourir pour la patrie et l’on meurt pour des industriels » Anatole France. Punis hier mais aussi punis aujourd’hui par les tentatives de bannissement de notre mémoire collective du Secrétaire d’État aux Anciens Combattants Jean-Marc Todeschini ( gouvernement PS ) qui fit interdire la Chanson de Craonne le 1er juillet 2016, mais aussi ces jours derniers par les pressions de quelques élus LR de Génissieux qui la font retirer du répertoire de votre groupe de choristes.
Pourquoi cette attitude entachée de pétainisme ? On dit qu’ils craignent l’exemple de la mutinerie. À l’instar des 639, les citoyens contemporains pourraient voir dans les guerres en Libye, en Syrie, en Centre Afrique un processus expansionniste favorable aux stratégies monopolistes des multinationales visant à faire main basse sur les terres et les matières premières. Les Français pourraient connaître et s’offusquer des sommes consacrées aux opérations extérieures (100 000 euros de l’heure) et des centaines de millions d’euros aux opérations de police. Les citoyens pourraient refuser les guerres pour le profit des multinationales et leur pendant politique : l’institution imposée d’un espace impérial euro- atlantiste, UE et USA, et sa machine de guerre l’OTAN. Les 639 qui fraternisèrent avec les soldats allemands nous disent par leur exemple qu’il n’est point besoin de liquider notre patrie historique des lumières pour fraterniser avec d’autres peuples. Qu’ont donc apporté les guerres de l’OTAN, bras armé de l’UE et des USA ? Il suffit de regarder un écran de télévision pour voir combien elles ont généré le chaos faisant ainsi le printemps de hordes nihilistes dans le monde et en France.
La Chanson des 639 soldats pacifistes peut et doit être entendue à Génissieux.
Nous saluons votre initiative de d’avoir choisi d’interpréter la chanson de Craonne à l’occasion de la commémoration des cérémonies du 11/11/17. Ce choix revêt une portée symbolique et mémorielle lumineuse.
Nous vous invitons aussi à réfléchir autour de l’analyse du philosophe communiste Georges Gastaud, dirigeant du Pôle de la Renaissance Communiste en France, à propos de l’année 1917 et de la fondation de l’URSS dont nous célébrons le centenaire :
« Plus que les tanks américains et que la coûteuse victoire de Pétain à Verdun, ce seront les mutineries de l’Argonne (réécoutons la Chanson de Craonne !) et surtout, la Révolution russe de 1917 qui briseront l’engrenage exterminateur de la première guerre impérialiste mondiale. On omet trop de dire en effet que ce qui mit fin – très provisoirement ! – au choc sanglant des impérialismes pour le repartage du monde, ce ne furent pas seulement les défaites allemandes sur le front de l’Ouest. Sur le front de l’est, ce fut l’insurrection victorieuse des Soviets ouvriers et paysans, rapidement suivie par le Décret sur la paix signé par Lénine; en Allemagne même, les défaites militaires n’auraient pas abouti à l’armistice sans le fulgurant essor (vite brisé par la social-démocratie) du mouvement ouvrier allemand (drapeau rouge flottant sur la flotte allemande de la Baltique, Conseils ouvriers en Bavière…), le renversement du Kaiser et la proclamation de la République : la bourgeoisie allemande avait soudain le feu « à la maison » et comme on l’a vu cent fois en France, les classes exploiteuses n’hésitent jamais longtemps quand il leur faut choisir entre abattre l’ennemi de l’intérieur (les travailleurs) ou combattre les puissances étrangères… »
Faire de l’année 2017 une année de résistance et de paix, contre la guerre qui menace, serait le meilleur des hommages a rendre aux fusillés « morts pour l’exemple » car refusant de mourir « pour les industriels « .
Patrick Grelait