Le mercredi 7 février dernier, les Etudiants Marxistes Paris Sorbonne organisaient un colloque intitulé « Marxisme contre stalinisme », affirmant sans vergogne que « le marxisme et le stalinisme sont non seulement contradictoires, mais irréconciliables ». Et d’utiliser pour désigner « l’URSS de Staline, la Chine de Mao, etc. » (mais au fait, qui est désigné par ce « etc. » ?…) le vocable de « totalitaire », empruntant à satiété et sans le moindre recul critique un « concept » (en réalité, une arme de guerre anticommuniste visant à assimiler le communisme au nazisme) défini par Hannah Arendt et repris avec militantisme par les ouvrages scolaires de l’« Education nationale » (en réalité, Ineducation territoriale qui inculque parfaitement le prêt-à-penser de la bourgeoisie anticommuniste).
LA DEFENSE DU MARXISME NE CONSISTE PAS A CEDER A LA CRIMINALISATION DE L’U.R.S.S., MAIS A NE PAS LUI CEDER !
Coordination PRCF et JRCF de la Région parisienne
Il y aurait mille choses à rétorquer aux organisateurs de ce colloque bien-pensant et qui, sans doute, se croient sincèrement marxistes… Et d’abord ceci : tous les sondages réalisés en Russie montrent que la majorité des Soviétiques, dont l’écrasante majorité des ouvriers, regrette l’URSS, expérience faite de ce qu’a signifié pour eux la restauration capitaliste et la destruction concomitante des acquis socialistes : santé, éducation, accès à la culture, plein-emploi, recherche, promotion sociale, rayonnement mondial de leur pays et de leur langue, etc. Quant à l’homme historique le plus estimé des Russes, que cela plaise ou non, c’est… Joseph Staline, comme les sondages le montrent invariablement. De même, l’homme d’Etat le plus favorablement cité par les Polonais n’est pas Walesa, le syndicaliste favori de la CIA, de la CFDT et du Pape (2% des voix aux dernières présidentielles où il s’est présenté…), mais le communiste Edward Gierek, ancien mineur en France, expulsé pour faits de grève, devenu chef de file du Parti ouvrier unifié polonais dans les années 70. Tels sont là des FAITS, qui n’ont rien à voir avec la doxa anticommuniste !
Et d’ailleurs, si les peuples de l’ex-camp socialiste n’avaient plus aucune appétence pour ces « régimes odieux », comment expliquer que dans toute l’Europe de l’Est, et dans l’indifférence de la gauche « antitotalitaire » de l’Ouest, les PC soient persécutés de Kiev à Vilnius en passant par Varsovie, Budapest, etc. ? Si la bourgeoisie compradore asservie à Berlin et à Washington s’évertue à persécuter les communistes de l’Est, c’est parce qu’elle redoute la mémoire populaire qui, comparant l’ « avant-1990 » (dont nul ne nie les manques !) à la période dite « postcommuniste » (chômage de masse, exil économique des jeunes, surexploitation de la main-d’œuvre bon qualifiée de l’Est par la RFA « réunifiée », en un mot, recolonisation capitaliste des pays de l’Est), n’en déduit nullement une quelconque supériorité du capitalisme sur le « socialisme réellement existant », graves défauts compris !
Bref, quand les organisateurs du colloque Marxisme contre stalinisme prétendent que ces régimes (qualifiés de « staliniens » sans aucune prudence méthodologique) n’exercent plus aucune « attraction sur les populations », ils se trompent grossièrement, du moins s’ils parlent des pays de l’Est où les travailleurs, au moins ceux des générations nées avant 1975, peuvent comparer leur situation avant et après la contre-révolution gorbatchévienne (l’ainsi-dite « perestroïka »). Que les choses soient différentes à l’Ouest, où l’endoctrinement antisoviétique cible en permanence les jeunes et les intellectuels, non seulement dans les médias, ARTE en tête, mais dès les bancs du collège, comment en irait-il autrement alors que nos compatriotes n’ont aucun moyen de comparer l’avant et l’après à l’Est… Surtout quand on sait que nos historiens doivent montrer patte blanche antisoviétique s’ils veulent faire carrière et passer dans les médias. Ajoutons que plusieurs partis d’Europe se réclamant du communisme croient s’acheter une « respectabilité » en abondant dans le sens de l’antisoviétisme dominant, à commencer par la direction du PCF, désormais affilié au « parti de la gauche européenne » et qui vient de se déchaîner contre Lénine à l’occasion du 100ème anniversaire de la Révolution d’Octobre.
Pourtant les progressistes occidentaux qui résistent vraiment au tsunami euro-libéral le constatent : les grandes avancées qui furent conquises en 1945 en France, en Belgique, en Italie, à l’époque où des ministres « staliniens » siégeaient dans les gouvernements, sont sans relâche attaquées depuis que nombre de PC occidentaux se sont dé-marxisés (pardon, « déstalinisés », en réalité, dé-SALINISES et édulcorés) et que le camp socialiste a implosé en permettant le rétablissement mondial de l’exploitation capitaliste (rebaptisé « mondialisation », « Europe unie », « fin de l’histoire »). Mais qui vous enseigne à l’école que la Sécu fut créée à la Libération par le ministre communiste Ambroise Croizat, fraichement sorti des geôles de Vichy, et avec elle les retraites par répartition, la généralisation des conventions collective et les comités d’entreprise ? Que le grand savant communiste Henri Wallon relança en 1945, sur des bases progressistes, l’Education nationale déshonorée par Pétain ? Que Maurice Thorez a créé en 1946 le statut des mineurs, et aussi celui des fonctionnaires dont jouissent encore aujourd’hui en toute ingratitude certains « historiens » qui dénigrent la Résistance communiste ? Que Marcel Paul, déporté-résistant à Buchenwald où il avait créé un réseau à l’intérieur du camp, militant PCF et CGT, fut le créateur d’EDF, qui devint l’entreprise énergétique la plus performante du monde avant d’être dépiautée par les euro-privatisations ? Que le physicien communiste F. Joliot-Curie fut l’aile marchante de la relance de la Recherche publique à la même époque ?
La classe dominante qui, apparemment, connaît mieux l’histoire et ses rapports de forces changeants que nombre de petits-bourgeois « marxistes », ne s’y trompe pas, elle : qu’on relise l’édito de Denis Kessler, alors n°2 du MEDEF, qui appelait cyniquement en novembre 2007, dans Challenges, à « démanteler le programme du CNR » ( !), un programme « construit par les gaullistes et les communistes à l’époque où l’Armée rouge stationnait à 1000 km de Paris et où le PCF obtenait 30% des voix ». Comment des militants anticapitalistes, comment des antifascistes responsables, peuvent-ils encore refuser de voir que ce monde, délesté du contrepoids mondial que le camp socialiste opposait au mortifère capitalisme, est bien pire depuis que la contre-révolution a détruit la première expérience socialiste de l’histoire ? S’il y a aujourd’hui un « totalitarisme », voire un « globalitarisme » – une marche PLANETAIRE au totalitarisme capitaliste! -, il n’est pas lié à l’URSS, mais à la défaite de l’URSS, il n’est pas imputable au marxisme-léninisme, mais à son reniement par des « marxistes » décaféinés qui ne retrouvent un peu de virulence que quand il s’agit de dénigrer le socialisme réel !
Mais Marx et Engels n’étaient pas des bisounours, ils étaient « intolérants » à l’encontre des réformistes de leur temps qui pactisaient avec la bourgeoisie (cf le le film de R. Peck LE JEUNE MARX). On a le droit de ne pas être marxiste, mais pas celui de feindre l’être tout en poussant des cris d’horreur au mot de « dictature du prolétariat » dont Marx a longuement exposé la nécessité dans La Guerre civile en France (analyse critique de la défaite des Communards parisiens). Ajoutons deux points :
a) Le concept de totalitarisme, propagé par l’antimarxiste Hannah Arendt, est inconsistant d’un point de vue matérialiste puisqu’il privilégie la forme du pouvoir aux dépens de son contenu de classe, qui est l’essentiel pour Marx. Ainsi en arrive-t-on à l’amalgame odieux qui fleurit actuellement, selon lequel « URSS = totalitarisme, Hitler = totalitarisme », donc… « Hitler = Staline », « Troisième Reich = URSS » (on n’est pas loin de cette ignominie dans nombre de manuels du Secondaire…). Pourtant, l’URSS a perdu 27 millions des siens pour briser l’ « invincible Wehrmacht » (de Stalingrad à Berlin…) et nous permettre aujourd’hui à certains de palabrer sur le « totalitarisme soviétique ». Les « marxistes » qui ne reconnaissent même pas aujourd’hui, comme l’a fait De Gaulle en 1945, que « la Russie soviétique a joué le rôle principal dans notre libération », n’arrivent donc même pas à la cheville, historiquement parlant, de ce général bourgeois !
b) On peut certes établir une critique marxiste, voire léniniste, des phénomènes que regroupe, de manière théoriquement sauvage, la notion fourre-tout, en réalité antisoviétique et anticommuniste, de « stalinisme ». Mais le préalable à une telle critique, dont nul dirigeant révolutionnaire ne peut en droit être excepté, est de refuser toute forme de critique droitière, consensuelle, « antitotalitaire », de l’expérience issue d’Octobre 1917, puis de Stalingrad. Une critique qui est la spécialité des sociaux-démocrates et des trotskistes depuis près d’un siècle, auxquels il faut désormais ajouter Pierre Laurent qui, en reniant récemment l’Octobre rouge, ne peut que renier du même coup le Congrès de Tours qui donna naissance au PCF (par affiliation du PS français à la Troisième Internationale, déc. 1920). Libre à ces « eurocommunistes » de préférer à Lénine, ce géant de l’histoire, le piteux Alexis Tsipras, le petit valet de l’UE qui tente d’interdire la grève en Grèce (Laurent co-préside le Parti de la Gauche européenne : il vient de refuser la demande du Parti de Gauche d’exclure Syriza du PGE !).
Ce ralliement conceptuel majeur vaut à ces tendances décaféinées d’être MENAGEES par les dominants, alors que les marxistes-léninistes sont quasi-exclus de l’Université, des médias, etc. ; c’est pourquoi un « marxisme gentillet », délesté des notions « barbares » de « matérialisme dialectique », de « dialectique de la nature », de « matérialisme historique », de « dictature du prolétariat », de « rôle historique de la classe laborieuse », domine aujourd’hui la scène « marxologique » avec la totale complaisance de l’ennemi de classe. Mais chut ! « il n’y a pas d’ennemi de classe », c’est là un concept « stalinien » ! Sauf que la grande bourgeoisie sait bien, elle, qu’elle a eu en face d’elle un ennemi de classe prolétarien, marxiste et déterminé : elle sait que Lénine, puis l’Armée rouge dirigée par la Stavka et victorieuse de Hitler, ou encore l’Armée populaire chinoise vainqueur des « seigneurs de la guerre », sans parler de Fidel, du Che ou de Ho Chi Minh, ont vaincu – fût-ce provisoirement – cet ennemi cruel et surpuissant qu’est l’impérialisme. Et cela, quelles qu’aient pu être les erreurs, voire les déviations qui ont pu surgir dans notre camp au cours d’un bras de fer planétaire où l’ennemi fasciste, impérialiste, colonialiste, etc. a toujours fait flèche de tout bois pour exterminer le communisme**. Ne nous y trompons pas : ce ne sont pas leurs « crimes » mais leurs VICTOIRES qui sont avant tout reprochés aux hommes historiques* du camp révolutionnaire, comme cela est encore reproché de nos jours par Macron et Cie à Robespierre, alors que la bourgeoisie française continue d’exalter Napoléon ou Thiers, le « nabot sanglant » fustigé par Marx. Car l’oligarchie capitaliste patauge dans le sang chaque jour ! -, c’est leur VICTOIRE SUR LA BOURGEOISIE ; des victoires qui ont prouvé à l’humanité qu’elle peut VIVRE SANS LES CAPITALISTES. C’est pourquoi il faut sans trêve « vacciner » la jeunesse en gravant dans sa tête : « socialisme réel = crime ». En revanche, si ça vous aide à supporter le capitalisme, rêvez donc tant qu’il vous plaira de douceâtres utopies réformistes !
Bonjour !
A un moment du texte, ça m’a fait penser à cet article, rare et intrigant du moins.
Peut-être au moment où vous parlez de fausse dissidence, de marxisme gentillet, soutenu complaisamment par le capital car pas dérangeant ? Cela m’a fait penser, en résumé à cette phrase : « il n’y a plus de gauche, de coco anar radicaux, ils sont tous à militer pour la gpa. »
Je veux bien votre avis.