Nous partageons le récit condensé de l’occupation de la Sorbonne hier soir par l’un de nos camarades JRCF présent sur place.
Bonjour camarades,
Des étudiant-e-s étaient réuni-e-s hier à la Sorbonne pour une AG inter-facs, prévue à 16h, censée permettre aux étudiants parisiens de s’organiser et de décider quelles suites donner au mouvement.
Environ 300 étudiants étaient déjà rentrés et réunis dans la cour d’honneur lorsque vers 16h30, les vigiles ont brusquement, sans donner de motifs, refermé les portes cochères d’entrée de la rue de la Sorbonne (c’était le seul accès, tous les autres ayant été déjà bloqués depuis le matin, et la veille aussi), laissant environ 200 étudiants dehors, les empêchant d’entrer et de participer à l’AG. Les portes étaient cadenassées, gardées par les agents de sécurité à l’intérieur et des CRS à l’extérieur.
Nous avons décidé de ne pas commencer l’AG dans ces conditions tant que nos camarades bloqués à l’extérieur ne pourraient pas nous rejoindre pour participer aux discussions.
Négociations infructueuses avec les agents pour ouvrir les portes. Ils ne font selon leurs dires, qu’obéir aux ordres du rectorat. Nous nous sentons « piégés », divisés, puisque nous sommes « invités » à tenir notre AG tandis qu’une moitié d’entre nous sommes interdits d’accès, bloqués par un déploiement de CRS.
Nous défilons dans les couloirs de la Sorbonne pour exiger l’ouverture des portes. Nous retournons près de la porte pour exiger l’ouverture, mais rien à faire, les agents appliquent les ordres du rectorat : les portes restent closent. Personne ne peut rentrer dans la Sorbonne.
Ce qui ne devait être qu’une AG, se transforme progressivement, sous la pression du rectorat et des CRS, en occupation. Nous décidons, à partir de 18h, d’aller dans les trois grandes salles du premier étage de l’UFR de philo de Paris 1 qui ont de grandes fenêtres qui donnent directement sur la rue de la Sorbonne, de façon à pouvoir être au contact de nos camarades bloqués à l’extérieur. Des banderoles sont déployées aux fenêtres. Les environ 200 étudiants qui restent à ce moment-là à l’extérieur sont déterminés, ils exigent eux aussi l’ouverture des portes. Les CRS sont devant les portes et d’autres arrivent de tous côtés pour encercler les étudiants dehors.
La communication par les fenêtres, entre les étudiants de l’intérieur et ceux de l’extérieur, nous permet de nous soutenir mutuellement et d’avoir une force commune.
A l’intérieur, nous sommes en négociation constante, par délégations interposées, avec le rectorat. Nous exigeons de pouvoir nous réunir au complet. Le rectorat refuse, nous propose de nous réunir au complet « la semaine prochaine », nous propose de « laisser rentrer les étudiants bloqués dehors à conditions que nous nous engagions à libérer les locaux à 22h » (proposition que nous acceptons, mais qui ne sera pas honorée par le rectorat, les portes restant fermées), et nous menace d’envoyer les CRS pour nous déloger dans un temps de 20 minutes en cas de déclaration d’occupation.
Nous sommes encore 200 à l’intérieur vers 19h, nous tentons de nous organiser, nous envoyons à la presse un communiqué et des photos, expliquant nos revendications : droit de nous réunir en AG au complet, retrait de la loi Vidal. Les étudiants occupants sont calmes, réfléchis et déterminés. L’ambiance de l’occupation qui s’organise passe de l’enthousiasme à l’inquiétude en fonction des aléas de la négociation avec le rectorat et des débuts de mouvements de nasse des CRS dehors.
A 21h30, la négociation avec le rectorat est terminée. Le refus d’ouvrir les portes est confirmé. Nous sommes sommés d’évacuer les lieux immédiatement. En cas de refus, nous serons évacués par les CRS. Nous restons dans la salle, décidés à faire valoir jusqu’au bout notre droit à nous réunir en AG.
A 22h, les CRS investissent la Sorbonne, ils sont 80 ou 100. A 22h10, ils pénètrent dans la salle où nous sommes réunis et nous évacuent sans ménagements. Je crois qu’il n’y a pas eu de grosses blessures. Le mégaphone que nous avions, la caméra et l’ordinateur dont nous nous servions pour les contacts médias sont saisis. Dans la rue de la Sorbonne, les CRS, encore très présents et nombreux, évacuent progressivement la rue.