Depuis des mois, les jeunes partout en France se mobilisent pour refuser l’application de la loi ORE qui instaure notamment la sélection à l’entrée de l’enseignement supérieur, quel que soit le type d’établissement, avec notamment, pour la première fois, la sélection à l’entrée des universités. Face à la colère de la jeunesse, soucieuse de pouvoir construire son avenir et celui du pays, en ayant accès une fois le diplôme national du Bac obtenu à l’Université, c’est à coups de matraque, de grenades, de procès politiques que le régime Macron répond. C’est en effet par la force que ce régime réactionnaire réplique à la jeunesse. Pour imposer une loi qui n’est pas sans rappeler celle qui avait été écartée grâce aux mobilisations de mai 1968. Preuve s’il en est d’ailleurs qu’il n’y a rien de nouveau ou de moderne dans les actions de ce pouvoir macron, dont les lois, les actions, les méthodes ont tout des vieilles recettes de l’ancien régime ou de la France des années 30.
Point le plus en vue de cette réforme pour les 800 000 lycéens de France qui souhaitent poursuivre des études supérieures, le remplacement du décrié système APB par un nouveau système, le logiciel de sélection Parcoursup. En 2017, le gouvernement avait dénoncé avec force comme un dysfonctionnement le recours au tirage au sort de 4000 places dans des filières tendues – telles que les STAPS – comme si le problème était l’outil et non pas le fait qu’en raison de l’évolution démographique et des coupes budgétaires liées à l’euro-austérité de ces dix dernières années, il manque plus de 40 000 places dans l’enseignement supérieur pour accueillir correctement la jeunesse.
Le 23 mai dernier, les plus de 800 000 jeunes inscrits sur Parcoursup s’attendaient donc à voir leur vœux satisfaits et ne pas se retrouver sur le carreau. En effet, le gouvernement avait expliqué que Parcoursup n’était pas un système de sélection bloquant l’accès à l’université. Les chiffres sont pourtant là, cruels pour des centaines de milliers de jeunes qui plutôt que de se préoccuper de savoir s’ils seront interdits d’enseignement supérieur, devraient être ces jours-ci en train de se préparer pour réussir le bac.
Parcoursup les chiffres
À la rédaction d’Initiative Communiste on s’est procuré les chiffres publiés par le ministère de l’enseignement supérieur. des chiffres forts peu détaillés puisque qu’il n’y a aucune donnée géographique, aucune donnée par type de filière ( université, grandes écoles, IUT, BTS etc…). C’est bien dommage car la connaissance des résultats par lycée permettraient sans aucun doute de vérifier ce qu’il en est de la sélection sociale mise en oeuvre avec la loi ORE et Parcoursup. Toujours est-il que ces chiffres, les médias aux ordres du régime Macron se gardent bien de les diffuser. Car ils ont de quoi provoquer un tsunami de colère aussi bien auprès des lycéens, des étudiants que de leurs parents et de tous les travailleurs soucieux de l’avenir de la jeunesse et donc de celui du pays.
Il est important de rappeler ici les résultats de APB en 2017, un système non sélectif. Lors du premier rendu des résultats d’APB, 85,6% des jeunes avaient reçu une réponse positive, dont plus de la moitié (57,1%) sur leur vœu numéro 1.
Au moment de la parution des premiers résultats de Parcoursup, 91,1% des jeunes, se sont retrouvés sans proposition correspondant à leur voeu préférentiel. Moins de 5% des jeunes se voyaient proposer une formation correspondant suffisamment à leurs souhaits pour être acceptés.
Et 12 jours après, seuls 30% ont reçu une réponse à un de leurs vœux qu’ils ont acceptée. Parmi eux, on ne sait pas combien l’ont fait par défaut, dégoûtés par les files d’attentes interminables les empêchant d’étudier dans un domaine qui les motive. Pire, 61% sont toujours en attente soit d’avoir au moins une réponse positive (185 000) soit d’avoir une réponse correspondant à un vœu qu’il pourrait accepter ( 310 000). 62 000 jeunes soit 7,6% des lycéens voulant poursuivre leurs études dans le supérieur se sont déjà vu interdire l’accès à l’enseignement supérieur, y compris en université.
Pour résoudre le problème des 4 00 jeunes ayant été tirés au sort en 2017, avec Parcoursup, le gouvernement a donc plongé dans l’incertitude plus de 550 000 jeunes, qui au 3 juin 2018, quelques jours avant les premières épreuves du bac n’ont pas reçu de proposition satisfaisante et ne savent donc pas s’ils pourront étudier comme ils le désirent l’année prochaine. Un demi million c’est donc le nombre de jeunes, la moitié d’une génération qui sera sacrifiée chaque année sur l’autel de la concurrence de tous contre tous et du profit par le régime macron. La vraie question est de savoir si les jeunes, leurs professeurs, leurs parents vont accepter cette injustice immense.
Parcoursurp le fonctionnement de la sélection expliqué.
Comment fonctionne la sélection Parcoursup et pourquoi frappe-t-elle en premier les lycéens des quartiers populaires et de banlieue ? Explications
Soi-disant pour être transparent, la ministre de l’Enseignement supérieur a publié l’algorithme de Parcoursup. Il ne vous apprendra rien. En effet ce n’est pas Parcoursup qui effectue la sélection laquelle est confiée aux établissements d’enseignement supérieur. Comment cela marche-t-il pour mettre sur le carreaux des dizaines de milliers de jeunes et quelles sont les différences avec APB ?
Le fonctionnement d’APB était très simple. Les lycéens établissaient une liste de vœux, de leur vœu préféré n°1 à leurs vœux le moins désirés. En fonction de cette liste, APB se chargeait d’attribuer le meilleur vœu possible à chaque lycéen. Expliquant le taux de satisfaction élevé ( près de 60%) du nombre de vœux n°1 avec APB. La règle d’attribution des places était donc les souhaits des lycéens. Il n’y avait aucune sélection, c’est-à-dire que les établissements d’enseignement supérieur ne pouvaient ni choisir, ni sélectionner leurs étudiants.
Le fonctionnement de Parcoursup est totalement opposé. Les vœux des lycéens ne sont pas classés. Ce qui ne permet pas à l’algorithme de déterminer leurs vœux préférentiels. Car avec Parcoursup ce n’est plus le lycéen qui sélectionne la formation qui l’intéresse et le motive, c’est l’établissement d’enseignement supérieur qui sélectionne les lycéens qu’ils souhaitent accueillir. Et les critères de sélection de chaque établissement lui appartiennent et ne sont pas encadrés par la loi. Pire, le gouvernement a interdit que la liste et le poids des critères de cette sélection soient rendus publics. Comble de l’hypocrisie, le gouvernement a obligé les lycéens à écrire des lettres de motivation, des CV, leur faisant croire que ce seraient ces éléments qui permettraient aux établissements d’enseignement supérieur de les classer. Foutaise! On comprend bien que pour accorder ne serait-ce que 10 minutes à la lecture et l’examen de ces lettres, il aurait fallu consacrer 11 millions d’heures de travail en considérant les 8 vœux que peut faire chaque jeune. De quoi occuper 72 000 personnes à temps plein pendant un mois. Impossible pour les moins de 19 000 professeurs des universités en France même en y passant tout leur temps. Ces lettres auront donc fini directement à la poubelle. Et la plupart des établissements auront donc tout simplement croiser le bulletin de notes avec une note arbitraire attribuée à chaque lycée. Malheur à ceux venant de lycées de banlieue ou de quartiers populaires. Malheur aux lycéens des lycées professionnels, même brillants et motivés…De fait, c’est une sélection sociale qui a été mise en place avec la loi ORE et Parcoursup. La conséquence de ce système est également que les places dans l’enseignement supérieur ne sont plus attribuées en fonction de l’intérêt du jeune pour le domaine d’étude, mais uniquement du choix de l’établissement. Cela conduit à ne permettre qu’à une minorité – les moins de 5% qui ont reçu le 23 mai une proposition correspondant à leur vœux n°1 – d’avoir le choix de ses études, tandis que 95% d’une génération se voit imposer une voie qu’ils n’ont pas souhaité, ou pire se voit interdire l’accès aux études supérieures. Perversité supplémentaire, ce système conduit à terroriser les jeunes en les obligeant pour être sûrs d’avoir une place à s’autocensurer et à ne pas faire de vœux sur des filières en tension sauf à prendre le risque de se retrouver sans aucune place. Obliger 95% d’une classe d’age à faire des choix d’études par défaut c’est paver la voie à un échec encore plus massif dans les premières années d’université. Un résultat sans aucun doute voulu par le gouvernement qui pourra ainsi justifier encore d’avantage la mise en place de système encore plus strict de sélection. Cela plutôt que d’augmenter à mesure de la croissance démographique le nombre de places et les moyens de l’enseignement supérieur. Ces moyens sont pourtant le premier investissement pour permettre au pays d’avancer avec confiance vers l’avenir, alors que les technologies et les sociétés sont de plus en plus complexes et nécessitent une main d’œuvre toujours plus qualifiée qui grâce à des études de qualité est capable de s’adapter aux évolutions de plus en plus rapides.
Parcoursup un préalable à la privatisation :
Avec les résultats catastrophiques de Parcoursup pour des centaines de milliers de jeunes, sans compter l’incertitude que le système fait peser, il n’y a aucun doute que va se développer un marché privé pour fournir des places – au prix fort – aux recalés de Parcoursup qui auront les moyens de les payer. Qui plus est, en ayant la possibilité de choisir leurs étudiants, les établissements d’enseignement supérieur auront également tout loisir de renchérir leurs droits d’inscription et frais de scolarité dès lors qu’ils auront suffisamment de candidats pour se le permettre. De quoi sélectionner par l’argent et renvoyer les lycéens des classes populaires – sans argent – vers des facs sans moyens et aux diplômes dévalués. Pour les lycéens qui se demanderaient à quoi ressemble un tel système, il n’y a pas besoin d’avoir beaucoup d’imagination pour se le représenter, il suffit de regarder le système universitaire américain, un système catastrophique pour tous les jeunes de milieux populaires, qui ne sélectionne pas selon le mérite, mais bien selon l’argent et le milieu social.
JBC pour www.initiative-communiste.fr