« On est en finale ! » et, l’on conçoit que notre peuple, qui a des raisons de douter de son avenir après les innombrables coups qu’il a encaissés depuis des décennies au nom de la « construction européenne », puisse s’en réjouir bruyamment. Paradoxalement, aurions-nous tant besoin de « faire la teuf » si la société telle qu’elle va ne rudoyait pas sans trêve celles et ceux dont Monseigneur Macron prétend arrogamment qu’ils « ne sont rien » ?
D’autant que d’un point de vue sportif, ils jouent plutôt bien, et plutôt collectivement les Tricolores (qu’on me permette de ne pas dire les Bleus : notre drapeau compte trois couleurs, le bleu est très connoté « droite » et « Union européenne » – souvenez-vous de la « vague bleue » sarkozyste ! – alors que le rouge, couleur du peuple ouvrier est très rarement, tiens donc, la couleur dominante du maillot national…) ; par ailleurs le jeune M’Bappé est très sympa, Griezmann est solide et régulier, Lloris, infranchissable…
Cela dit, il serait naïf de croire que le sport professionnel capitaliste est étranger à toute politique. Pour ne prendre qu’un seul exemple, l’équipe croate est truffée d’individus, disons pour être gentils, étranges, qui, bravant l’hôte russe, trouvent toutes les occasions pour crier « vive l’Ukraine ! » alors que ce pays est dirigé par un gouvernement belliciste, russophobe et… truffé de néonazis !
On peut aussi se souvenir qu’en 98, quand l’équipe de Jacquet avait remporté le trophée, la côte de Chirac était remontée de vingt points : cela ne déplairait pas à Macron, qui plonge dans les sondages en raison de sa politique de casse des statuts, du code du travail, du bac déchu de son rôle de premier grade universitaire, de sa taxation des retraités, de son rabotage des APL, de ses cadeaux fiscaux aux millionnaires rebaptisés « premier de cordée » (tant pis pour les « premiers de corvée » dont le SMIG est bloqué) ; sans parler des projets macroniens visant à liquider la Sécu, les retraites par répartition, les pensions de réversion et à traquer les chômeurs et autres « bénéficiaires » des minima sociaux, qui, aux dires de cet émule de Marie-Antoinette, « coûtent un pognon dingue »… Quant au « patriotisme » de ce président qui s’en va scander « allez les Bleus ! » (dès lors qu’ils se mettent à gagner…), mais qui ne rate pas une occasion de remplacer le français par l’anglais, qui, selon les circonstances, courtise Trump ou Merkel, qui privatise à tour de bras le patrimoine national et qui, en violation de la Constitution, veut remplacer la souveraineté du peuple français par une « souveraineté européenne » que les Français ont refusée quand ils ont massivement retoqué la constitution européenne.
Ce n’est donc pas Floréal qu’il faut agonir d’injures s’il annonce, sur la base de l’expérience, que l’actuelle « union sacrée » autour des « Bleus », donc, la marée humaine qui suivra comme un seul homme le président remontant les Champs-Élysées, va certainement être exploitée par ce dernier pour accélérer ses attaques contre la fonction publique, diminuer les prestations sociales et imposer sa très régressive « retraite à points » aux dépens des retraites par répartition créées en 46. Alors, faisons la fête aux Bleus, pourquoi pas, mais surtout, n’oublions pas, avec les Rouges, de « faire la fête à Macron » POUR DÉFENDRE LES BASES DE NOTRE EXISTENCE SOCIALE !
À
quand donc une immense manifestation de combat sur les Champs-Élysées, comme l’avait en vain proposé Mélenchon en septembre dernier, pour combattre le « coup d’État social » exécuté par Macron sous la conduite du MEDEF et de l’UE ? Et ce que tant de vous font allègrement quand « la France » (en réalité, onze pros dont beaucoup ont quitté la France) remporte une coupe, c’est-à-dire veiller la nuit, défiler, brandir des drapeaux, scander des slogans, nous ne pourrions pas aussi le faire TOUS ENSEMBLE pour défendre nos acquis gagnés au prix du sang, reconquérir notre indépendance, cesser de bazarder notre langue, renouer avec cet esprit frondeur qui donna le vertige au monde entier quand notre peuple prenait la Bastille, criait vive la Commune ou libérer Paris quasiment à mains nues ?