Membre de l’exécutif municipal de Graz, seconde ville autrichienne où le Parti communiste et sa section locale, restée fidèle au marxisme-léninisme, joue un rôle politique important, le camarade ROBERT KROTZER, conseiller municipal à la santé et aux soins de la ville de Graz répond en exclusivité aux questions d’I.C. sur la défense par les communiste de la santé et du logement social.
Quelles sont tes principales orientations en tant que conseiller municipal KPÖ chargé de la santé et des soins dans la ville de Graz?
Pour le KPÖ de Graz, un système de santé publique qui fonctionne bien et qui est accessible à tous est une composante fondamentale de la politique sociale et c’est dans ce sens que nous dirigeons le département. La santé et les soins ne doivent pas être une question de revenus et de fortune, c’est un droit fondamental – et donc une politique sociale !
Le KPÖ a défini l’accès global à la santé conformément à la définition qu’en donne l’Organisation mondiale de la santé, à savoir « un état de complet bien-être physique, mental et social qui ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité ». En ce sens, notre bien-être dépend de facteurs physiques, psychiques mais aussi matériels, dont font partie un environnement intact, l’accès à des aliments frais et sains, le mouvement et le sport, la qualité des relations sociales, l’estime de soi ou des conditions de travail conformes à la dignité humaine.
Les positions générales du KPÖ sur les questions de santé ne surprendront pas, mais elles sont plus urgentes que jamais par les temps qui courent : nous sommes pour un système de santé publique fort et gratuit, dans lequel chaque personne bénéficie du même degré de soutien. Par conséquent, nous sommes opposés à une médecine à deux vitesses, contre la quête du profit dans le domaine de la santé et des soins, contre la privatisation des établissements de santé et, dans l’intérêt des meilleurs soins possibles, nous rejetons évidemment les fermetures d’hôpitaux. Le Parti communiste se distingue là aussi des partis bourgeois : pour nous, l’être humain n’est pas un coût et la santé de la population est un bien important, qui protège contre la souffrance et la douleur et peut sauver des vies. Nous rejetons clairement tous les plans d’économies au détriment de la santé.
Un succès particulier du Parti communiste est que depuis le 1er juillet 2018, la pension de retraite minimum de 863 euros est maintenue pour toutes les habitants de Graz qui ont besoin de soins mobiles à domicile, personne ne doit aller en maison de retraite parce qu’il n’a plus les moyens de payer son loyer et sa nourriture. C’est garanti par les indemnités compensatoires de la ville de Graz qui sont prévues dans le nouveau modèle tarifaire pour les soins et la prise en charge mobile ainsi que les soins infirmiers à domicile. De nombreux retraités et retraitées peuvent maintenant respirer : ils ont travaillé dur toute leur vie et ne touchent cependant qu’une petite retraite. Il aurait été profondément injuste qu’ils ne puissent pas rester chez eux.
Il est aussi particulièrement important que nous ayons réussi à préserver le centre de vaccination de Graz, malgré le budget réduit de la coalition gouvernementale de droite. Ces dernières années, il y a constamment eu des plans visant à le fermer – à une époque où le taux de vaccination baisse et où les enfants meurent de nouveau de la rougeole, cela aurait été de la folie. Avec notre action « Le service de santé sur place », nous avons rapproché les services de la ville des habitants et des habitantes de Graz. Le nombre des vaccinations contre la grippe a augmenté l’an dernier grâce à l’accent que nous avons mis sur ce plan.
Dans quelle mesure cette orientation est-elle en contradiction avec les directives de l’UE et, plus largement, avec les exigences du système capitaliste ?
Les exigences de l’UE, par exemple le « plafonnement » des dépenses ont de graves effets négatifs sur les systèmes de santé. Comme l’UE est un instrument des grandes entreprises et des banques, les groupes de pression puissants financièrement ont une influence importante lorsqu’il s’agit de soumettre partiellement ou totalement la santé à la poursuite des profits privés. L’UE exige que l’Autriche plafonne ses dépenses en la matière pour qu’elles correspondent au produit intérieur brut (qui a baissé). Dans notre Land de Styrie, un hôpital public sur deux doit être fermé et le nombre de lits doit être fortement réduit d’ici à 2035.
Malgré les coupes néolibérales, l’Autriche garde un des meilleurs systèmes de santé au monde, mais aujourd’hui il est menacé par de multiples dangers. C’est le gouvernement de droite qui fait passer au forceps les exigences de l’UE et de la Fédération de l’industrie autrichienne, sacrifiant sur l’autel du marché le système de santé solidaire pour lequel le mouvement ouvrier a combattu.
Avec les travailleurs, les syndicats et les mouvements sociaux, nous devons repousser ces attaques. Ce ne sera pas facile, compte tenu de la supériorité des adversaires, mais nous travaillons à rassembler des forces pour la défense du système de santé ainsi que toutes les autres conquêtes sociales. Ces luttes contiennent aussi le germe d’un large mouvement social qui peut ébranler la puissance du capital et finalement briser sa domination. Nous ne nous faisons cependant pas d’illusion, ce sera un long et dur chemin qui commence par la création d’une conscience de classe prolétarienne et d’un esprit de résistance.
Comment les conseillers municipaux communistes du KPÖ travaillent-ils avec la classe ouvrière de Graz pour renforcer cette action ?
Alors que dans toute l’Autriche les forces de gauche sont précarisées, Graz et la Styrie font exception, grâce à des décennies de position de classe du parti. À Graz, la seconde ville la plus importante d’Autriche, le KPÖ est le deuxième plus grand parti et il a obtenu plus de 30% des voix lors des dernières élections communales de février 2017. Il a dix membres du Conseil municipal et, avec Elke Kahr et moi, deux membres de l’exécutif municipal, composé à la proportionnelle. C’est un double rôle : d’une part, nous avons la responsabilité du département des transports et de la santé, et d’autres parts nous sommes en forte opposition avec le Parti populaire, conservateur, et le Parti de la liberté, de droite, qui forment une coalition au sein du Conseil municipal et qui servent prioritairement les intérêts des investisseurs et des spéculateurs.
Jusqu’en 2017, le Parti communiste a été responsable pendant 19 ans du département du logement du département du logement, ce qui lui a permis d’imposer la rénovation de tous les logements communaux, de plafonner les loyers à un tiers du revenu, de construire de nouveaux logements bon marché et d’empêcher la privatisation des logements. Une grande partie de ces mesures ont été obtenues grâce à de larges mobilisations de milliers de locataires et à la récolte de signatures. Après le dernier succès électoral du KPÖ, les partis de droite nous ont retiré cette responsabilité dans l’espoir que nous perdrions aussi le soutien de la population. Nous continuons cependant à nous soucier de toutes les préoccupations des locataires, des milliers de personnes par année viennent à l’Hôtel de ville nous demander conseil dans les bureaux du parti communiste.
Simultanément, nous sommes très présents dans la rue avec des stands d’information et des campagnes : après la décision de la coalition de droite de poser la candidature de la ville de Graz pour les Jeux olympiques d’hiver 2026, nous avons lancé au nom du KPÖ une collecte de signatures au printemps 2018 demandant un référendum populaire, qui a été soutenue par près de 12 000 personnes sur les stands d’information. En raison de la pression exercée pendant des mois et de la crainte d’un résultat négatif au référendum, la candidature de Graz a finalement été retirée par le Comité olympique autrichien. De très nombreuses personnes, justement issues de la classe ouvrière, qui craignaient que le projet olympique de l’élite ne provoque hausse des prix et expulsions, ont appris une fois encore que le Parti communiste représente tous ceux qui n’ont pas de lobby puissant financièrement. Ces prochains mois et années, nous voulons utiliser ce succès pour continuer à renforcer le parti en tant que représentant des intérêts de la classe ouvrière et réorganiser le mouvement ouvrier.