Ce qui s’est passé le 6 décembre au plan syndical illustre une situation de confusion qui, d’une certaine manière, vient de loin.
Premier acte
Au siège de la CFDT avait lieu une réunion avec les principaux responsables de 7 organisations : CFDT, CGT, FO , CFE-CGC, CFTC, UNSA, et FSU.
Pour accoucher d’un communiqué consternant de soumission, trahissant tous les militants qui se battent sur le terrain puisque le communiqué issu de cette réunion :
- condamne les violences s’appliquant exclusivement aux gilets jaunes.
- répond positivement aux manœuvres du pouvoir macronien afin de lui permettre de se sortir de la situation dans laquelle il est acculé par le mouvement populaire en ressortant la vieille lune du « dialogue social »
Fait : Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT, a apposé la signature de son organisation à ce texte scélérat !
Voir le communiqué ci-après.
deuxième acte
L’attitude de la direction confédérale fait immédiatement l’objet de condamnations de nombreux militants et de nombreuses structures de la CGT comme celle de la fédération de la chimie demandant la réunion extraordinaire du parlement de la CGT (le Comité Confédéral National, CCN) .
Afin d’avoir un débat et de clarifier la position de l’organisation sur:
- la stratégie de lutte et le processus de mobilisation
- les modes de prise de décision et d’engagement de la CGT
Voir le communiqué de la Fédération de la chimie ci-après.
troisième acte
Deux heures plus tard, la CGT, sur son site, diffuse un communiqué, correct celui- là à l’opposé total du communiqué commun intersyndical et qui fait hurler les forces réactionnaires, Figaro en tête, dénonçant le double jeu de la CGT.*
Et refuse de se rendre à la réunion de ce jour avec la ministre du travail, Muriel Pénicaud, afin de ne pas se laisser récupérer par le gouvernement.
Voir le communiqué ci-après.Nous en sommes là :
S’agissant de la CGT, il est nécessaire de sortir de l’incohérence d’une position qui résulte d’orientations prises dans les années 90.
Car on ne peut à la fois souscrire à l’orientation d’une CFDT, soutien affirmé de la politique macronienne de réaction sociale sur toute la ligne, ET organiser la résistance à cette politique, construire les nécessaires convergences.
Et dans notre contexte avec les gilets jaunes, les lycéens, les précaires pour faire reculer massivement le pouvoir et empêcher les contre-réformes qu’il prévoit comme pour les retraites, l’indemnisation du chômage …
Dans les années 90, pour adhérer à la Confédération Européenne des Syndicats la direction de la CGT a accepté les conditions imposées par ses dirigeants et une Nicole Notat de la CFDT, qui consistaient à accepter les règles du marché capitaliste et de sa classe dirigeante.
Règles confinant les syndicats dans le rôle institutionnel de contrôle des conflits sociaux dans un « dialogue social » piloté par le patronat et le pouvoir et qui n’a conduit qu’à des défaites et à la remise en cause systématique de TOUS les conquis de la Libération.
Syndicats, pièce d’un système global d’exploitation, d’oppression et de régression sociale.
Ce qui en partie permet de comprendre le rejet dont les syndicats aussi font l’objet à un moment où de manière diversifiée certes, c’est le « système » lui-même que de très nombreux citoyens remettent en cause.
Facteur d’espoir et de fierté, sur le terrain, de nombreux militants et militantes, de nombreuses structures syndicales de base, des unions locales, des fédérations, des Unions départementales sont dors et déjà engagées, recherchent la convergence avec le mouvement actuel, travaillent au déploiement des luttes à l’organisation des grèves, à la solidarité, dénoncent la répression et comme à Marseille et dans le Var se portent au secours des lycéens.
Là est la voie et UNIQUEMENT là, la voie de la victoire de ce pour quoi nous agissons depuis des années sans y parvenir, et la possibilité pour le mouvement syndical de retrouver massivement le soutien et l’adhésion du peuple!
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LE COMMUNIQUĖ INTERSYNDICAL
Les organisations syndicales CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC, UNSA, et FSU se sont retrouvées ce jeudi 6 Décembre pour échanger sur l’actualité sociale.
Elles rappellent que, depuis des mois, face aux inégalités sociales et territoriales, elles ont réclamé des politiques publiques permettant de la justice sociale. Elles rappellent aussi que, depuis des mois, elles ont appelé le gouvernement à les écouter à travers un véritable dialogue social.
Aujourd’hui, dans un climat très dégradé, la mobilisation des gilets jaunes a permis l’expression d’une colère légitime. Le gouvernement, avec beaucoup de retard, a enfin ouvert les portes du dialogue.
Nos organisations s’y engageront, chacune avec ses propres revendications et propositions, en commun chaque fois que cela sera possible. Les sujets du pouvoir d’achat, des salaires, du logement, des transports, de la présence et de l’accessibilité des services publics, de la fiscalité doivent trouver enfin des débouchés concrets, créant les conditions sociales d’une transition écologique efficace parce que juste.
Le dialogue et l’écoute doivent retrouver leur place dans notre pays. C’est pourquoi nos organisations dénoncent toutes formes de violence dans l’expression des revendications.
La CFDT, la CGT, FO, la CFE-CGC, la CFTC, l’UNSA, la FSU appellent le gouvernement à garantir enfin de réelles négociations. Cela suppose qu’elles soient larges, ouvertes et transparentes, au niveau national comme dans les territoires.
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LE COMMUNIQUĖ DE LA CGT
Le gouvernement joue à l’incendiaire social : c’est irresponsable !
La CGT s’indigne et condamne fermement l’attitude du gouvernement qui répond par la seule violence aux légitimes exigences qui s’expriment diversement dans tout le pays.
La jeunesse est victime d’une répression inadmissible visant à juguler l’agglomération des exaspérations. Les lycéens, qui se mobilisent contre le tri social pour l’entrée à l’université, qui veulent des moyens pour l’éducation et avoir le droit d’espérer un avenir de progrès, sont la cible d’une répression violente. La CGT ne peut pas accepter que le pouvoir frappe et tape nos enfants, ceux de la République !
Gouvernements et patronat, qui depuis des années, restent sourds à tout progrès social, qui s’accaparent les richesses que les travailleurs créent, sont responsables de la désespérance qu’ils tentent de faire payer à la jeunesse. La CGT n’a jamais prôné l’action violente. Mais la violence est d’abord sociale, il y a urgence à augmenter le SMIC à 1800 euros, les pensions, les minima sociaux, le dégel du point d’indice. Urgence à instaurer une réelle justice fiscale qui fasse contribuer les plus riches, à développer des politiques publiques de transport et logement qui répondent aux besoins de la population.
Répondre à ces urgences est un préalable qui permettrait d’amorcer une résolution de la crise actuelle. Ce n’est certes pas l’invitation de la Ministre Pénicaud aux organisations syndicales et patronales pour discuter de la méthode et du calendrier des mises en œuvre et décisions (mais lesquelles ?) annoncées par le Premier ministre qui peut nous satisfaire. La CGT se refuse à toute concertation. Elle exige maintenant l’ouverture immédiate de négociations sur l’urgence sociale. Elle confirme son appel aux travailleurs à se réunir et à décider de l’action sur les lieux de travail.
La CGT ne répondra donc pas à cette invitation. Elle ne se laissera pas « récupérer » par le gouvernement qui tente de trouver une unité nationale sous prétexte de risques de violences lors des manifestations et actions à venir. La France championne d’Europe du versement de dividendes aux actionnaires a les moyens de répondre à l’urgence sociale. La CGT est disponible, elle a des propositions concrètes et connues pour que chacun ait un emploi et que les jeunes, les actifs, les retraités vivent mieux dès aujourd’hui.
Montreuil, le 6 décembre 2018
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LE COMMUNIQUĖ de la fédération de la chimie
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2
L’Histoire ne repasse pas les plats
Appel du Front Syndical de Classe aux organisations syndicales de lutte et aux travailleurs
Face au pouvoir anti-populaire de Macron-UE-MEDEF,
l’histoire ne repasse pas les plats !
Alors que le mouvement des gilets jaunes met le gouvernement en grande difficulté et l’a contraint à des premiers reculs, le mouvement syndical ne peut plus tergiverser.
Non seulement les gilets jaunes ont su créer un rapport de force comme on n’en avait pas connu depuis longtemps, en utilisant des formes de luttes (action reconductible, blocage de l’économie, manifestation nationale à Paris) utilisées avec parcimonie ces dernières années, non seulement il est l’expression des classes populaires qui y participent et le soutiennent de manière écrasante, mais son évolution a mis au premier plan des mots d’ordre bien plus proches des revendications syndicales que des thèmes de l’extrême-droite : refus d’une fiscalité de classe, exigence d’une augmentation du SMIC, des pensions et des minimas sociaux, du rétablissement de l’ISF et plus généralement dénonciation d’un pouvoir de l’oligarchie écrasant par sa politique et son mépris la majorité de la population.
En réalité, le mouvement des gilets jaunes, héritier des grands mouvements populaires de notre pays, exprime à sa manière et avec ses formes d’action l’affrontement de classe en germe dans notre pays depuis des années (et déjà perceptible avec le NON de classe à la constitution européenne en 2005), opposant les couches ultra-privilégiées des gros actionnaires et des grandes fortunes du CAC 40, leurs gouvernement et leur UE à l’ensemble des classes populaires.
Bien sûr, l’oligarchie, dans la tradition des Versaillais, espère pouvoir utiliser les provocations qu’elle laisse faire et met en scène comme à l’Arc de Triomphe et elle compte en dramatisant sur les violences discréditer le mouvement et comme en 1968 rameuter le parti de la peur.
Mais la situation créée par la puissance inédite de la colère populaire rend envisageable de battre le pouvoir et d’ouvrir une perspective de changement social si l’on parvient à allier révolte populaire, manifestations et grève de masse permettant de bloquer les profits capitalistes.
Salaires, emplois, pensions, services publics, conditions de travail, chômage de masse, fiscalité anti-populaire, privatisations, santé, éducation…, nous sommes tous attaqués et en situation de créer enfin un rapport de force en notre faveur.
Alors que les lycéens et les étudiants se mettent eux-aussi en action contre des réformes iniques, c’est donc dès aujourd’hui qu’il convient de lancer toutes les forces dont nous disposons pour la construction d’une puissante grève générale reconductible. Celle-ci ne se décrète pas, mais elle peut se construire très vite. En déposant des préavis de grève reconductible – à l’image de celui déposée par la CGT fonction publique à partir du 9 décembre -, en organisant immédiatement des assemblées générales interprofessionnelle dans toutes les villes, en renforçant ainsi les convergences gilets jaunes et colère rouge dont le mouvement populaire a besoin pour finir d’ébranler le pouvoir.
L’heure n’est pas aux rencontres syndicales au sommet avec une CFDT et un Laurent Berger discrédités par leur honteux appui au pouvoir macronien et leur soutien aux contre-réformes !
Gilets jaunes, rouges, blouses blanches, bleus de travail… dès maintenant, tous ensemble en même temps pour imposer le progrès social ! Tous ensemble pour renforcer le mouvement populaire en cours par l’intervention organisée et décisive des travailleurs en lutte.
Front Syndical de Classe,
6 décembre 2018
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3
La tentation de l’oligarchie
C’est dans l’émission sur la 5, » C dans l’air » véhicule quotidien de l’idéologie dominante et des intérêts de la macronie que l’un des chroniqueurs, éditocrate patenté, Claude WEIL, avec un sourire narquois évoquait très récemment l’histoire des révoltes populaires.
Et pour dire quoi ?
Évoquant les périodes d’intervention populaire des années, 1830, 1848, la Commune de Paris en 1871 et 1968 il conclut : ces situations de confrontation entre le peuple et le pouvoir en place se terminent toujours par la victoire du parti de l’ordre.
Donc par une victoire politique et/ou la répression sanglante!
Il y a dans cette affirmation dans la complexité et la diversité des situations un constat en rapport avec la réalité historique.
Mais qui ne dit rien sur les méthodes mises en oeuvre par les classes dominantes pour parvenir à ce résultat et dont on peut souligner la récurrence … et l’actualité.
Pour s’en tenir au plus récent il y a un paradoxe flagrant dans ce qui s’est passé en 1968 :
comment le plus grand mouvement de masse du XXe siècle, la plus grande grève ouvrière avec occupation d’usines, jetant dans l’action des millions de travailleurs, parallèlement à d’incontestables fortes avancées sociales, s’est soldé au final sur le plan politique par l’écrasante victoire du camp réactionnaire et l’élection d’une chambre « bleu horizon »?
De manière décisive, le rejet massif du pouvoir gaulliste ( « 10 ans ça suffit ») du début du mouvement s’est transformé en quelques semaines sans doute pas en adhésion mais en soutien par défaut face au refus du désordre réel ou fantasmé désigné à l’époque comme la « chienlit ».
Et à l’époque la droite, vent debout contre les grèves et les conquêtes sociales que les grèves et les occupations lui avaient infligé a mené sa campagne des législatives sur un » programme » exclusif : rétablir l’ordre !
Rue gay-Lussac Paris 1968
En utilisant au maximum les images de voitures brûlées, les dégâts matériels, les affrontements de rue …
Le parallèle n’est pas factice!
Ce matin Darmanin sur France inter évoque pour la manifestation de samedi prochain à Paris de milliers de gens y venant pour tuer.
Tandis que du côté du pouvoir et de ses soutiens fleurissent les accusations de factieux, putschistes et que commence à monter la petite musique selon laquelle il n’y a plus de différence entre les casseurs et les gilets jaunes, la République serait en danger …
Tandis que O hasard, dans les gens arrêtés samedi dernier à l’Etoile il n’y a que des gilets jaunes et pas un seul casseur équipé pourtant de pied en cap!
La provocation, la dramatisation, la division de ses adversaires l’appel à rétablir l’ordre ont toujours été l’arme ultime de la bourgeoisie quand ses intérêts de classe sont menacés par le mouvement populaire en révolte ouverte.
C’est pourquoi dans la situation présente rien n’est plus décisif que l’unité autour des objectifs qui émergent et susceptibles du plus large rassemblement qu’on peut résumer :
- baisse des taxes
- augmentation salaires et pensions
- restauration des services publics
- réforme des institutions démocratisant la vie publique
Au plan syndical l’heure n’est donc pas à l’alliance avec une CFDT honteux soutien à Macron, prête à accompagner ses contre-réformes comme celle des retraites ou de l’indemnisation du chômage et que le mouvement a déjà commencé à neutraliser!
Le mouvement, les luttes convergentes mettant en cause la politique de casse de Macron, les grèves doivent se déployer en isolant le pouvoir pour à partir des reculs déjà imposés conduire à une véritable victoire du mouvement populaire.
En déjouant donc les pièges tendus par une classe qui n’abandonne jamais le combat pour défendre ses privilèges par tous les moyens!
Je suis membre de la CGT chez Orange et les diffusions internes censurent totalement le mouvement des gilets jaunes, et le tract de 8 pages qui doit coûter très cher à la confédération pour l’envoyer à tous les adhérents ne dit pas un mot en décembre de ce mouvement de classes. Par contre ce 8 pages fait la pub de la CES et de l’UE.
J’ai écouté Philippe Martinez sur Inter la semaine dernière et outre que je pense qu’il doit beaucoup fumer (sa voix est inaudible et il s’interrompt sans arrêt pour tousser) sur le fond il a condamné les gilets jaunes comme d’ailleurs hélas le site du PCF paris 15 qui m’a beaucoup déçu sur ce point. Quant à Brossat invité CNEWS pour commenter la « casse » il a certes remis à sa place en direct l’aboyeur ultralibéral Sylvain Boulouque, mais s’est félicité de la bonne conduite des forces de l’ordre grâce la collaboration de la Ville de Paris tout en soutenant tout de même qu’il fallait une issue politique.