Source: François Krug sur rue 89
La facture EDF des particuliers devrait augmenter de 1,9% en août, affirment Les Echos. Mais un petit détail gêne le gouvernement. Selon les règles en vigueur, la hausse ne peut pas dépasser le taux d‘inflation. Or, en un an, les prix ont justement reculé de 0,5%. Pour résoudre ce casse-tête, Jean-Louis Borloo et Christine Lagarde devront recourir à une rhétorique très subtile.
1. Qui va vraiment décider ?
Ce ne sera pas EDF. Fournisseur d’un service public, le groupe doit pratiquer des « tarifs réglementés ». Le montant de la hausse sera établi conjointement par le ministère de l’Ecologie et de l’Energie et par celui de
l’Economie, dans un arrêté comme celui-ci. EDF ne peut qu’exprimer ses souhaits. Son PDG l’a fait publiquement début juillet, de manière pas très diplomatique. Dans La Tribune, Pierre Gadonneix suggérait rien de moins qu’une hausse de 20% sur trois ans, pour « refléter les investissements nécessaires ».
Le gouvernement optera bien sûr pour une hausse moins spectaculaire : les enjeux sont autant politiques qu’économiques. Et en coulisse, Jean-Louis Borloo et Christine Lagarde devront obtenir l’accord définitif de Nicolas Sarkozy, comme le précisent Les Echos.
Avant de publier leur arrêté, les deux ministres devront cependant le soumettre à la Commission de régulation de l’énergie (CRE). Celle-ci nous a indiqué qu’elle n’avait encore rien reçu. Et rien n’oblige le gouvernement à suivre son avis.
2. Peut-on échapper à la hausse ?
Non. Selon la loi et le « contrat de service public » conclu avec l’Etat, les tarifs doivent obligatoirement « couvrir l’ensemble des coûts supportés » par le groupe. Or, une décision du gouvernement a déjà fait gonfler une partie importante de ces coûts.
Le 5 juin, Borloo et Lagarde ont décidé d’augmenter les TURPE, les « tarifs d’utilisation des réseaux publics d’électricité ». En clair, le coût de l’acheminement de l’électricité. Un service confié à deux filiales d’EDF, ERDF et RTE, qui le facturent à leur maison-mère et à ses concurrents.
Mécaniquement, EDF répercutera cette hausse auprès de ses consommateurs. Le coût de l’acheminement représente déjà 47% de la facture finale, selon la CRE.
Le calcul des tarifs prend aussi en compte les autres dépenses d’EDF, des centrales électriques aux agences commerciales. Et selon Pierre Gadonneix , les prix ne couvrent pas toutes les dépenses liées aux missions de service public du groupe.
3. Quel sera le vrai montant de la hausse ?
En apparence, elle sera moins élevée que l’an dernier. Selon Les Echos, la facture pourrait augmenter de 1,9% pour les particuliers (le tarif « bleu »), de 4% pour les PME (le « jaune ») et de 5% pour les grandes entreprises (le « vert »). Contre 2%, 6% et 8% l’an dernier.
Sauf qu’entretemps, l’inflation a nettement reculé. Et dans le contrat de service public signé en 2005, l’Etat et EDF s’engageaient justement à en tenir compte: « Les cinq premières années, l’évolution des tarifs aux particuliers ne sera pas supérieure au taux de l’inflation. »
A l’été 2008, ce n’était pas un problème : l’inflation était en progression de 3,6% sur un an. C’est nettement plus compliqué cette année. Selon les chiffres les plus récents de l’Insee, datant de juin, les prix ont reculé de 0,5% en un an.
Mais la référence aux « cinq premières années » reste très ambiguë. Signifie-t-elle que, jusqu’en 2010, on prendra en compte le taux d’inflation annuel ? Ou autorise-t-elle à se fonder sur l’évolution des prix depuis 2005 ?
Nous avons tenté d’obtenir une traduction officielle, mais les cabinets de Jean-Louis Borloo et Christine Lagarde n’ont toujours pas donné suite à nos demandes d’explications.