le COVID-19 est une maladie virale, qui provoque une forte épidémie avec déjà de très nombreux morts et malades graves en à peine quelques semaines de propagation. Une maladie qui peut menacer au regard de sa contagiosité la vie de milliers et milliers de personnes. D’où la nécessité de suivre avec sérieux et rigueur les gestes et comportements de prévention.
Cela permet d’éviter une propagation trop rapide de l’épidémie, en laissant la possibilité à l’hôpital public de soigner plus de malades graves d’une part, d’autre part, à la recherche d’avancer en confirmant l’usage de traitement.
À travers deux interventions récentes de spécialistes, quelques explications scientifiques sur la propagation de la maladie et ses possibilités de traitements.
[Entretien actualisé le 13 mars 2020]
Question – Professeur Matthieu Revest bonjour, merci de nous accorder de votre temps pour nous aider à poser des repères clairs, basés sur les données scientifiques disponibles aujourd’hui concernant l’infection au coronavirus SARS-CoV-2. Pourriez-vous d’abord vous présenter, et nous dire quel rôle vous jouez dans la réponse médicale à cette infection et en prévention de l’épidémie ?
Matthieu Revest – Bonjour, je suis professeur à l’Université de Rennes 1 où j’enseigne à la faculté de médecine. Je suis également infectiologue au CHU de Rennes, responsable médical pour les maladies infectieuses émergentes pour le service de maladies infectieuses et réanimation médicale du CHU de Rennes. À Rennes, nous prenons en charge plus particulièrement la Bretagne et les Pays de la Loire. Nous sommes équipés de chambres à pression négative, et d’un laboratoire de virologie doté d’équipements spécifiques. Le réseau national de lutte contre les maladies émergentes dont nous faisons partie est collaboratif, et solidement entraîné pour faire face à ce type de pathologies. Nous avons pu tirer les enseignements du SRAS de 2003, du MERS ou encore d’Ébola.
Q. – Si on devait le résumer en deux points, quel serait votre message essentiel sur ce nouveau coronavirus ? Au fait, le nom officiel du virus c’est bien SARS-CoV-2 et celui de la maladie qu’il peut provoquer, Covid-19 ?
M. R. – Tout à fait. Covid-19 c’est le nom de la maladie, pas celui du virus. Le coronavirus qui nous occupe actuellement s’appelle SARS-CoV-2. Pourquoi SARS 2 ? parce qu’il est génétiquement proche du virus du SARS qu’on a connu en 2003, bien qu’il soit moins dangereux pour les personnes infectées.
Concernant ce nouveau virus il y a deux messages à retenir, en fait. Un au niveau individuel, le second à l’échelle de la population.
Au niveau de chacun, il faut commencer par prendre un peu de distance face au flux d’information continu et parfois contradictoire, donc angoissant, que nous recevons. Garder son sang-froid et réagir de manière adaptée, c’est la condition pour pouvoir se protéger et protéger les autres de manière efficace. Je vais essayer de donner des repères clairs et fiables, pour remettre les choses au bon niveau.
D’abord, il faut avoir à l’esprit que la très grande majorité des patients atteints par ce virus présentent des formes parfaitement bénignes. Il peut en effet y avoir des formes sévères mais de façon vraiment rare. Les personnes le plus à risque de ces formes graves, d’après ce que l’on observe aujourd’hui, sont celles âgées de 60 ans et plus, surtout si elles souffrent déjà de pathologies sérieuses de type cardiovasculaire, respiratoire, diabétique, cancer. Ce groupe concentre la quasi-totalité des cas graves et des décès, ce qui ne veut pas dire qu’une personne âgée contractant le virus va mourir ! Simplement ce groupe est nettement plus à risque que les autres, il doit être protégé au mieux.
Cela veut dire aussi qu’on peut être rassurant sur les autres catégories. Les enfants et les jeunes en particulier résistent très bien : en cas d’infection, ils restent très généralement asymptomatiques, ou présentent des symptômes s’apparentant à un simple rhume. Mais ils n’en sont pas moins contagieux ! Avec la difficulté pour les enfants de respecter les gestes barrières, c’est ce qui explique la fermeture totale jusqu’à nouvel ordre des établissements scolaires et universitaires décidée par le président de la République. Rappelons qu’on a 0% de décès chez les moins de 15 ans dans une étude portant sur les 72 000 premiers cas chinois.
Q. – Et à l’échelle de la population ?
M. R. – Là, c’est l’épidémiologie qui prend le relais. D’abord, cette épidémie est-elle inquiétante ? Il faut savoir que plus un virus est dangereux, moins il se répand. C’est le cas d’Ébola par exemple. La maladie affecte tellement les patients que ceux-ci ne peuvent pas diffuser le virus bien loin. Alors qu’un virus plutôt discret au contraire se propage facilement car il affecte peu les malades, avec en plus pas mal de formes asymptomatiques. La diffusion du virus est donc large et rapide, c’est le cas ici. Est-ce grave ? Cela dépend de la gravité de la maladie pour les individus, mais pas que, comme on va le voir.
Pour le SARS-CoV-2, la réponse est qu’il faut être à la fois zen, sérieux et vigilant. Ce coronavirus est au moins aussi contagieux que la grippe saisonnière. Si un individu lambda contracte le Covid-19, et là je parle tous âges confondus, dans plus de 80% des cas la maladie sera bénigne. Je vous dis cela sans compter la proportion de personnes qui seront infectées sans même déclarer la maladie. On pense d’ailleurs qu’il y a plus de personnes infectées sans symptômes, que de personnes ayant déclaré le Covid-19.
Mais il faut être très clair : sans mesure de précaution (éloignement
social ou autre), une seule personne, même sans symptômes, peut en
contaminer en moyenne plus de deux autres. Le nombre de cas peut donc
très rapidement doubler d’une semaine à l’autre. C’est d’ailleurs ce qui
s’est produit au début en Chine. Sur ce schéma (cinétique de
l’épidémie), on voit la très grande rapidité avec laquelle le virus s’y
est répandu, comparé au SARS de 2003.
En voyant ces courbes, tout le monde comprend que si le nombre de personnes infectées explose, alors le nombre de cas graves, même s’ils ne représentent qu’une faible proportion de l’ensemble, explosera aussi jusqu’à saturer le système de santé, déjà bien fragile comme chacun sait. Et c’est ce que nous devons très sérieusement limiter ou éviter, car si les médecins sont mobilisés sur un trop grand nombre de cas graves de Covid-19, ils seront moins disponibles pour les autres malades. Et ceux-ci se retrouveront à leur tour exposés à un plus grand risque.
Olivier Véran, le ministre de la santé, a récemment dessiné un schéma à la télévision
pour expliquer le raisonnement scientifique derrière la réponse des
autorités à l’épidémie. Voici ci-dessous la version complète, issue d’un article paru dans The Lancet,
prestigieux journal médical. Elle illustre la stratégie de prévention :
freiner au maximum la propagation du virus, non pour diminuer le nombre
de malades, mais pour éviter que celui-ci ne dépasse les capacités du
système de soin. Au passage, notez la courbe bleue : il faudra rester
vigilants après la levée des mesures de prévention pour ne pas relancer
l’épidémie.
Il est donc absolument nécessaire de respecter les mesures de prévention, celles qui sont décrétées au niveau national et les autres. C’est difficile. Et si on est malade, encore plus difficile de rester chez soi sans contaminer sa famille. Mais il faut essayer de faire cela bien, si on veut limiter la propagation. On va voir tout de suite que ça fonctionne.
Q. Comment faire alors pour limiter la contagion ?
M. R. – Le virus se transmet essentiellement par les gouttelettes émises par une personne contagieuse. Chez les patients infectés, on a retrouvé du virus dans les sécrétions de la bouche et du nez et dans les selles, sans que l’on sache d’ailleurs si le virus présent dans les selles possède un potentiel contagieux. Pour que la quantité de particules virales transmises soit suffisante pour vous contaminer, il faut entrer en contact direct avec la personne (une poignée de main, un baiser) ou rester en proximité (moins d’un mètre) dans un endroit confiné. Autrement dit, croiser une personne dans la rue ne présente pas de danger, mais discuter ou déjeuner en tête-à-tête, si.
D’autre part, le virus peut subsister sur les surfaces et les objets, et on ne sait pas combien de temps pour l’instant : quelques heures, 9 jours ? On ne sait pas. On ne sait pas non plus si l’épidémie sera saisonnière ou non.
Donc les gestes barrières
se déduisent assez facilement. Se laver les mains soigneusement toutes
les heures environ, pendant 20 secondes au moins avec du savon, et, si
on n’en a pas, avec une solution hydro-alcoolique. Éternuer dans son
coude, utiliser des mouchoirs à usage unique et les jeter. Éviter les
contacts directs de personne à personne. Porter un masque si on est
malade. Et, autant que possible, désinfecter régulièrement les surfaces
dont le contact pourrait faciliter la contagion entre personnes.
Q. Quels signes peuvent évoquer un cas de Covid-19, et comment vérifier si on a attrapé ce coronavirus ?
Les symptômes décrits dans cette étude sont, par ordre de fréquence décroissant, les suivants : la fièvre, la toux sèche, la production de crachats, le souffle court, la gorge irritée, les maux de tête, les douleurs musculaires, les frissons, la nausée ou les vomissements, la congestion nasale et la diarrhée. Ils sont observés dans près de 90 % des cas pour la fièvre, et seulement 6% ou moins pour les trois derniers cités.
Mais vous vous doutez que bien d’autres virus, dont celui de la grippe, peuvent provoquer ces symptômes. La marche à suivre est donc la suivante. Dans tous les cas, il ne faut pas vous rendre chez votre médecin ni à l’hôpital, au cas où vous auriez vraiment le coronavirus. Si la maladie reste bénigne (fièvre et toux sèche sans gêne respiratoire, par exemple), appelez votre médecin traitant. Si vous ressentez une gêne respiratoire, appelez le SAMU (15). En cas de besoin, vous serez pris en charge. S’il existe une suspicion d’infection au coronavirus, c’est après validation par le SAMU d’une part, et par un infectiologue référent comme moi d’autre part, que vous serez testés par un médecin ou par un infirmier pour vérifier si vous êtes effectivement porteur du virus.
Q. Que va-t-il se passer maintenant ? Que signifie le stade 3 qu’on annonce ces temps-ci ?
M. R. – Rappelons d’abord qu’il n’y a que 4 stades, et non pas 14 ou 20, ça permet de mieux respirer ! Le stade 3 correspond au stade épidémique, où le virus est présent sur tout le territoire. Le stade 4, le suivant et le dernier, est tout simplement le retour progressif à la normale.
Le nombre de cas va probablement continuer à augmenter en France car nous sommes un pays où le virus vient d’arriver, mais pour se projeter on peut déjà voir qu’il stagne en Chine, ce qui veut dire que les mesures d’éloignement social sont efficaces, et c’est une excellente nouvelle, même si la vigilance ne doit pas se relâcher. Cela montre qu’on peut faire quelque chose, au niveau des médecins, au niveau de l’individu et au niveau de la population, et que ça fonctionne.
Coronavirus : diagnostiquons et traitons !
Les explications du professeur Raoult
- choix de stratégie de test et de dépistage
- quels traitements possibles : de premiers résultats encourageants
À l’IHU Marseille : 6100 tests de cas suspects, 311 positifs au 16 mars 2020. Le professeur Raoult démontre que l’on pourrait tester tout le monde.
En moyenne un malade est contagieux pendant 20 jours, en l’absence de traitement.
Le professeur Raoult montre qu’il y a de bons espoirs que l »hydroxychloroquine permettent de diminuer rapidement la charge virale (pour une durée de contagiosité de l’ordre de 6 jours). La réduction de la charge virale est également favorable à un meilleur pronostic d’évolution du malade.