A grand son de trompes et dans plusieurs journaux détenus par les milliardaires le 13 mai une tribune réunissant les vieilles figures de la social démocratie eurocrate, des personnalités aussi éloignés des réalités et des luttes des travailleurs que le chef du PS Olivier Faure, le soutien du coup d’état fascisant Maidan Raphaël Gluscksmann, l’adjoint d’Hidalgo étiqueté PCF Brossat, ou encore le chef de fil des euro députés EELV Yannick Jadot. Avec pour slogan de « tourner la page » non pas du « capitalisme », mais du « productivisme », et appelant à chambouler le modèle sociale vers des « droits sociaux individuel » au nom notamment de l’inégalité femmes-hommes, et surtout le refus de mettre en cause l’UE du Capital. Le 20 mai, en continuité avec cette tribune, le chef d’EELV, Julien Bayou annonce rassembler les même tout en se rapprochant de députés élus sous les couleurs d’En Marche et même de la vieille droite façon RPR comme Corine Le Page, là aussi « l’écologie » fait figure de paravent à la manœuvre politicienne : l’abre en plastique vert ne saurait cacher qu’il n’y a pas d’avenir en restant dans ce système capitaliste, ce système intrinsèquement exterministe qui fait de l’exploitation des travailleurs et de la nature son moteur. Bref, alors que la crise systémique du capitalisme explose avec le covid-19, il y a urgence à se départir de ces escrocs politiques, dont le seul but est de recycler sans cesse sous des trompe-l’oeil ce même système capitaliste qui a fait la preuve non seulement de son échec mais de sa dangerosité.
Le capitalisme, qu’il soit repeint en vert ou femme c’est identique
La crise actuelle du capitalisme, amplifiée par l’épidémie de Covid-19 est le moment tout trouvé par la bourgeoisie pour ressortir ses déguisements pudiques et ses mensonges ingénus. Puisque les projecteurs sont portés sur le prolétariat – personnels hospitaliers, livreurs et chauffeurs ubérisés, caissiers et personnels de magasins, manutentionnaires chez Amazon, travailleurs du BTP (qui n’ont pas tous cessé leur activité pendant le confinement), éboueurs, etc. – il faut les en détourner, c’est-à-dire masquer une lutte par une autre. Quel candidat, grimé en un personnage sans classe sociale pourra bien faire l’affaire ?
Nous avons bien l’écologisme malthusien, premier de cordée : la bourgeoisie n’existe plus, la petite-bourgeoise non plus, surtout pas les classes populaires qui consomment mal et trop ! L’ascétisme écologisant ne fait qu’une distinction : les gens abstraits contre l’immonde technique – celle tant haïe par Heidegger ! Ce n’est pas suffisant. « L’Europe des gens » et Mère-Nature… c’est trop peu pour cacher le fait patent du travail prolétaire sous-payé, méprisé, ubérisé et effectué sous les flatteries stériles – une prime coronavirus qui, dans le privé, n’a cessé de se voir réduire comme peau de chagrin, passant de 1000 euros à un calcul au prorata des heures effectuées, et qui, dans le secteur hospitalier, ne sera suivie d’aucune considération de ce que doit être un service public, d’aucun rehaussement des budgets en même temps que des salaires.
L’écologisme malthusien, apocalyptique et religieux, prescripteur d’examens intérieurs – une Pleine Conscience de ses gestes, minutieuse, dans la contemplation de l’impermanence qui s’écoule de son robinet d’eau – ne dédouane pas assez nos Maîtres. Après tout dans les « Paroles Vertes Révélées » les responsables politiques inactifs sont aussi coupables que les pauvres qui polluent. Les reportages sur « la Nature » qui reprend « ses droits » dissimulent mal l’écart entre la gestion de la crise du coronavirus par la France et par le Vietnam, Cuba ou le Venezuela – distance énorme puisque le Vietnam, disposant pourtant de moyens moindres que les nôtres, n’a souffert d’aucun décès. Ce qui est notevole pour ces farfadets verts de l’analyse historique ce n’est pas la contradiction capital – travail… c’est la contradiction technique – Nature, et même n’importe quelle autre qu’on pourra lui substituer.
Il faut décidément une autre vague. Comment sauver le capitalisme autrement que par la peur de l’Apocalypse ? Un premier pas est fait avec la tribune du féminisme bourgeois parue dans Libération. D’un tour de magie le prolétariat, composé de femmes et d’hommes, disparaît derrière « la femme » sans classe sociale, être chimérique au moins aussi absurde que nos précédents farfadets verts. Ce n’est plus le prolétariat qui a travaillé durant le confinement, risquant la contamination et la mort mais « les femmes », aussi bien les infirmières qui furent objectivement exemplaires que Manon Aubry, signataire du texte… et quoique nous puissions aller de cette catégorie dé-classée jusqu’à Brigitte Macron ! Que faisaient les « messieurs » comme ils sont ainsi nommés dans toute l’étendue de leur diversité ? En « col blanc et costume noir » ils dirigeaient la gestion de la crise, les pieds sur la table. Par merveille d’émerveillement : Bernard Arnault, Macron, le livreur Uber et le vigile dirigeaient nonchalamment le pays pendant que la femme de Bernard Arnault, Brigitte, l’infirmière et la caissière travaillaient main dans la main !
Nous espérons que cette petite image d’Epinal aura suffi à montrer l’escroquerie d’un tel faux-semblant de féminisme. Le féminisme ça n’est pas opposer les femmes prolétaires et bourgeoises d’un côté, aux hommes prolétaires et bourgeois de l’autre. Ce féminisme-là n’abolit aucune exploitation.
Il reste cependant pour cette bourgeoisie es escrologie à ne pas faire seulement dans la confusion. Il faut à tout prix, également, rehausser positivement les « femmes dirigeantes » et promettre les jours heureux du capitalisme (qui sont bien l’inverse de nos vrais jours heureux !). Nous apprenons dans Forbes, d’une PDG, sur la base d’études qui ne prennent jamais en compte la variable « classe sociale » – si nous pouvons parler pour l’occasion dans des termes de scientifique positiviste – que les femmes dirigeantes auraient mieux géré la crise que les hommes dirigeants. L’espoir d’un capitalisme nouveau est enfin là ! Le capitalisme masculin laisse la place à son homologue différent, et pourtant identique, le capitalisme féminin. La femme, toujours la femme abstraite, sans classe sociale, sans condition matérielle d’existence, sans même position ou conviction politique, porte une capacité extraordinaire : elle « manage » bien, elle est « flexible », elle est capable de « prendre des risques », parce qu’elle se lève tous les jours avec le risque en tête.
« Gallop speculates that this is because “women, people of color, the disabled wake up to risk everyday so they have to see it. Women are at risk everyday so we see it differently, assess it differently, and act in the face of it differently.” » [Gallop présume que la cause de cela est que “les femmes, les gens de couleur, les handicapés sont habitués au risque quotidien et donc le voient. Les femmes sont confrontées quotidiennement au risque, donc nous le voyons différemment, nous l’évaluons différemment et nous agissons face à lui différemment”]
Ce tour de passe-passe, en plus d’être essentialisant, faisant de la femme le porteur quasi inné de caractéristiques comme « l’empathie », la capacité de demander conseil ou « le risque » tombe à point nommé pour faire l’apologie du management flexible. Une performance d’illusionniste qui nécessite évidemment de cacher dans une trappe, encore une fois, le Vietnam, Cuba ou le Venezuela (à titre non exhaustif).
Après tout, Marine Le Pen est une femme : ne pourrions-nous tous compter sur sa prise de risque ou son empathie naturelle ? « We know from research that women are less driven by self-interest—but also maybe they know they have less to lose. » [La recherche nous a appris que les femmes sont moins conduites par l’intérêt personnel – mais peut être qu’elles savent également qu’elles ont moins à perdre] Oh ! comme il est vrai encore que Merkel, elle aussi, sert admirablement bien les intérêts de l’UE et non les siens propres ! Nous n’avions jamais pensé à cette solution… et pourtant !
Où devons-nous porter notre regard quand les mains habiles de la bourgeoisie, en pleine réalisation d’illusionnisme nous divertissent ? Faut-il croire à ces disparitions subtiles ? Faites attention au tour le plus extraordinaire : la transformation fantasmatique de l’écologie et du féminisme en serviteur du Capital !
Signé Tibavsky.