Il fut un temps où le capitalisme-impérialisme était forcé de partager la planète avec une série de pays honorant le drapeau rouge orné de l’emblème ouvrier et paysan. Ce n’était certes pas le paradis terrestre car les richissimes tenants de l’exploitation capitaliste faisaient tout, en gâchant d’énormes ressources naturelles et sociales, pour faire tomber et/ou pour faire dévier la première expérience socialiste de l’histoire. Depuis lors, la RDA, l’URSS et tout le camp socialiste européen sont tombés, et derrière eux un certain nombre de P.C. occidentaux dont les directions étaient gangrenées par le révisionnisme, la soumission à la social-démocratie et la subordination à la « construction » européenne (avant de rebaptiser ces piteuses dérives pseudo-modernes « mutation » ou « métamorphose », on appelait ça l’eurocommunisme: en clair, toujours plus d’euro, toujours moins de communisme!). Souvenez-vous qu’au détours des années 1980/90, nous étions tous sommés, y compris par la rédaction « novatrice » de L’Humanité, de bondir de joie à l’annonce des « bouleversements démocratiques en Europe de l’Est »: c’est-à-dire en clair, d’applaudir à une contre-révolution et à cette restauration planétaire de l’exploitation capitaliste qu’en bonne novlangue capitaliste, on appelle « construction » européenne et mondialisation capitaliste. Le résultat: alors que la France et l’Europe des années 1945/1980 étaient principalement marqués par les avancées sociales, le discrédit du fascisme et du colonialisme, l’essor du féminisme et la montée des luttes ouvrières (Mai 68 fut avant tout la plus grande grève de l’histoire ouvrière mondiale), alors que le nom de Youri Gagarine résume le mouvement lumineux vers les étoiles de l’humanité, notre époque est marquée par la suite sans fin des régressions sociales, des lois liberticides, par le retour de l’extrême droite et du racisme, par la réhabilitation rampante des nazis et des mussoliniens sur la scène politique (Ukraine, Pays baltes, Allemagne, Autriche, Italie…). Et plus encore, la « modernité » est caractérisée par la montée des intégrismes religieux, par celle des enragés de djihad ou de croisade. Résumant l’essence contre-révolutionnaire de notre temps, un fanatique décapite au couteau un professeur « coupable » d’enseigner la liberté d’expression. Bref, le cinéaste communiste Pier-Paolo Pasolini voyait loin quand, dès la fin des années 1970, en pleine contre-offensive revancharde mondiale de l’impérialisme US battu au Vietnam, il n’avait pas tort de constater ce qu’il appelait l’ « extinction des lucioles »… Militants progressistes qui continuez masochistement à maudire l’URSS et la RDA « totalitaires », qui ne voyez que du négatif dans l’histoire du PCF d’avant la « mutation », qui ne jurez que par l’introuvable « Europe sociale » – en réalité par l’UE supranationale, patronale et cléricale – mais qui cependant vous dites sincèrement les ennemis de l’obscurantisme, comment ne voyez-vous pas que la remontada planétaire des intégrismes religieux (musulman, mais aussi « évangélique »: USA, Brésil, hindouiste: Inde, juif: Israël, catholique: Pologne, Hongrie…) les plus fanatiques est strictement contemporaine de la désintégration du socialisme? Et comment méconnaître les vases communicants qui mènent en permanence de la destruction du communisme historique, c’est-à-dire de l’élan historique du monde du travail vers les lumières partagées, à l’actuelle prolifération des mouvements archi-réactionnaires sur fond de revanche anticommuniste ? Nous progressistes, avons coutume, pour fustiger le néofascisme, de citer la phrase de Brecht « il est toujours fécond le ventre d’où a surgi la Bête immonde ». Faisons un pas de plus et nommons enfin, dans notre tête, ladite « Bête immonde »: et ne soyons pas surpris qu’elle réponde, toujours et encore, aux noms d’anti-communisme, d’exploitation capitaliste et d’antisoviétisme à retardement.