Tandis que le cap des 100 000 morts du covid-19 en France va être tragiquement franchi, le régime Macron par la voix de son ministre de la santé Véran tente de cacher une terrible réalité derrière une mascarade de langage « il y a un problème de livraison de vaccins »… Disons plutôt que comme pour les masques et les tests, le capitalisme est incapable de produire et distribuer en nombre suffisant les vaccins contre le covid-19. Des vaccins dont la formule est pourtant disponible. Une formule qui est d’ailleurs le résultat de la recherche publique ou des investissements massifs de fonds publics, mais qui reste pour ce qui concernent les vaccins « occidentaux » totalement privé. Les multinationales s’en réservent les brevets et licences et brident donc la production. Rappelons que ce sont bien les USA et l’UE – dont le régime Macron – qui ont fait pression sur l’OMC pour l’interdiction d’une licence mondiale des vaccins levant de manière automatique les brevets. Dans une récente tribune de Tribuna Comunista, des camarades mexicains démontrent la responsabilité criminelle du système capitaliste dans l’actuel pénurie de vaccin. Une pénurie qui frappe de manière encore plus violente les peuples des pays en voie de développement. Faut il rappeler que Biden vient ainsi de confirmer l’interdiction de mise à disposition en nombre de des millions de doses de vaccins sécurisées par les USA pour ses voisins canadiens et mexicains ?
La vaccination universelle. Un impératif de santé publique.
un article de Tribuna Communista traduit de l’espagnol pour www.initiative-communiste.fr
Boris Differ – Luis Rodriguez – En ce début d’année 2021, la pandémie de covid-19 continue de ravager le monde entier, à l’exception des pays dits socialistes comme la Chine, le Viêt Nam, la Corée ou Cuba qui ont réussi à gérer et à contrôler la pandémie grâce à une intervention étatique efficace, un système de santé robuste, le soutien et la confiance de sa population, qui a confiance dans le caractère humain de ses institutions publiques. D’autres pays capitalistes, mais avec des éléments socialistes importants, ou du moins des institutions publiques efficaces, comme le Venezuela ou le Belarus, ont réussi à contenir la pandémie avec un certain succès. Dans le reste du monde dominé par le capital financier, le tableau est très différent, tant dans les pays du centre que dans ceux de la périphérie, le nombre de personnes infectées et de décès continue à augmenter de façon vertigineuse. Entre l’absence totale de politiques pour faire face au covid comme au Brésil ou aux Etats-Unis – les deux pays avec le plus de contagions de la planète – ou un autoritarisme aussi délirant qu’inefficace, basé sur des mesures purement policières (comme si le virus pouvait être emprisonné) pour des pays comme la France et l’Espagne, il ne semble pas y avoir de sortie scientifique et politique de la crise sanitaire.
Face à leur échec retentissant, les dirigeants de l’hémisphère occidental ont appelé au miracle de la vaccination comme solution finale à la pandémie, écran de fumée pour faire oublier aux peuples du monde leur gestion criminelle de la pandémie. Car, même si la vaccination permet d’atteindre l’immunité collective et de mettre un terme à la pandémie, on n’oubliera jamais les plus de 2,5 millions de morts et les plus de 100 millions de personnes infectées qui auraient pu être évitées si les systèmes de santé publique n’avaient pas été systématiquement pillés et privatisés au profit de l’élite capitaliste mondiale. Et ce ne sont que les chiffres d’aujourd’hui. Nous savons parfaitement qu’ils vont continuer à augmenter dans les prochains mois.
Mais le problème n’est pas de seulement se contenter de dénoncer les atrocités du système à ce jour, mais de voir les problèmes qui existent maintenant et qui menacent notre avenir et la sortie possible de la crise sanitaire par le haut. Le vrai problème de fond.
Nous avons examiné un rapport d’Airfinity et de BBC News sur les principaux acteurs derrière les vaccins, du moins en Occident. L’État reste définitivement un acteur majoritaire (plus de 70 % des ressources actuellement consacrées à la lutte contre la pandémie proviennent des États; à ce jour, plus de 8 milliards de dollars) :
- Oxford-AstraZeneca : +2.200 Millions de dollars (70% État + 30% Organisations à but non lucratif).
- Novavax : +1.500 Millions de dollars (80% État + 20% Organisations à but non lucratif).
- Curevac : +1.100 Millions de dollars (70% État + 23% Privés – 7% Organisations à but non lucratif).
- Johnson & Johnson : +841 Millions de dollars (100% État).
- Modern : +820 Millions de dollars (95% Etat + 5% Organisations à but non lucratif).
- Sanofi/GSK : +579 Millions de dollars (90% Privés + 10% État).
- Pfizer/BioNTech : +548 Millions de dollars (66% État + 34% Privés).
- Sanofi/Translate Bio : +302 Millions de dollars (100% Privés).
Il est donc clair non seulement que le vaccin est financé par les impôts des contribuables, mais aussi qu’il finance le secteur privé afin qu’il puisse en tirer profit. Rien de nouveau sous le soleil.
Nous devons tenir compte d’un autre aspect important de la question, si nous parlons de 2019 faire ce type d’investissements scientifiques dans les pays capitalistes néolibéraux n’était pas seulement impensable, mais qui plus aurait été considéré comme une mesure radicale de gauche ou contraire à la dynamique même du marché. L’importance des investissements publics est une preuve irréfutable des grands progrès réalisés dans la recherche et dans la communauté scientifique, car on parle beaucoup de l’incertitude d’accélérer les processus pour le développement d’un vaccin qui prend habituellement des années et cette fois a été réalisée plus rapidement, ce qui est compréhensible. Avec la technologie du 21e siècle et grâce au concours de nombreux scientifiques et d’investissements considérables, il est normal que le développement des vaccins soit si rapide. C’est une victoire de la recherche collective de nombreux scientifiques, et des organisations et des investissements publics dans ces secteurs, ce qui nous donne une vue d’ensemble énorme de tout ce que nous pourrions réaliser en si peu de temps si les pays capitalistes néolibéraux, et d’autres, ne coupaient pas autant le budget de la science, de la santé et des autres services publics.
En ce qui concerne la vaccination, depuis la deuxième semaine de décembre 2020, la première phase a été lancée dans plusieurs pays avec le vaccin Pfizer, le premier à être approuvé par les autorités sanitaires. Depuis lors, les vaccins Moderna, Spoutnik B et Sinovac ont commencé à être appliqués par divers pays. À ce jour, plus de 152 millions de doses ont été administrées dans 75 pays, selon les données recueillies par Bloomberg. Le dernier taux était d’environ 5,64 millions de doses par jour. Aux États-Unis, plus d’Américains ont reçu au moins une dose que ceux qui ont été testés positifs au virus depuis le début de la pandémie. À ce jour, 46 millions de doses ont été administrées, en fonction du nombre d’états. Au cours de la dernière semaine, une moyenne de 1,57 million de doses par jour a été administrée.
Malgré la nécessité d’une vaccination universelle, les pays capitalistes du centre ont concentré la plupart des doses des laboratoires privés (60% du stock mondial) comme Pfizer, Modern ou AstraZeneca par le biais de préachats massifs en fermant l’accès à de nombreux pays. Des pays comme l’Ukraine ou l’Amérique centrale auront leurs premières doses d’ici 2023 seulement ! Alors que les États-Unis ou d’autres pays atteignent près de 20% de la population vaccinée. La logique du marché finit par réduire la possibilité d’une vaccination universelle rapide et efficace, mais le problème ne s’arrête pas là. Au fond, il y a la question de la capacité de production des principaux laboratoires privés qui ont mis sur le marché les principales formules de vaccins validés par les autorités sanitaires.
Leur capacité industrielle est limitée à quelques usines qui sont loin de pouvoir satisfaire la demande mondiale. En outre, la production a été retardée par des problèmes tels que l’incendie de l’usine d’Astrazeneca en Inde ou l’invalidation de lots entiers de Pfizer par les autorités sanitaires européennes. Des pays comme la France, malgré leur préachat de doses massives, n’ont reçu que la moitié des doses achetées et dans d’autres cas encore moins, ce qui les oblige à ralentir ou même à arrêter leurs phases de vaccination comme dans le cas français. Le problème sous-jacent mis en évidence par ces symptômes est l’incapacité structurelle de l’économie capitaliste à satisfaire la demande mondiale de vaccins. Si la production de vaccins par les industries des pays socialistes comme la Chine ou Cuba peut modifier ce fait et compenser le manque de production de l’industrie privée pour couvrir une partie de la demande mondiale, elle sera néanmoins insuffisante. D’abord par l’opposition féroce des élites capitalistes occidentales qui tentent par tous les moyens de les discréditer en poussant en avant le mouvement antivaccins et ce malgré le fait que ces vaccins se sont avérés plus sûrs en termes d’effets indésirables et plus abordables en termes de logistique et de prix que ceux des laboratoires occidentaux. Il faut lutter pour convaincre la population de la supériorité de ces vaccins sur les formules capitalistes, moins sûres et plus chères dans le seul but de permettre aux labos privés de s’en mettre plein les poches.
Deuxièmement, une solution possible pour la production et la demande mondiale serait la mise sous tutelle des États de l’industrie pharmaceutique mondiale privée pour répondre en priorité à la demande mondiale de vaccins afin d’atteindre une vaccination universelle permettant de développer l’immunité collective dont l’humanité a tant besoin pour surmonter cette pandémie. Créer un grand pôle industriel pharmaceutique au service des besoins de la santé publique est une tâche essentielle, non seulement pour gérer la pandémie actuelle, mais aussi pour être prêt à toute éventualité à l’avenir et ne pas avoir à perdre des années de développement économique dû au confinement d’une bonne partie de la société et perdre d’importantes quantités de vies humaines. Ce combat devient essentiel quand on peut se rendre compte que les élites capitalistes occidentales ne sont absolument pas pressées de terminer la vaccination, tant le prétexte de la crise sanitaire est utile pour justifier la mise en place de l’autoritarisme comme dans le cas du régime macronien en France.
Dans le cas du Mexique, la situation est grave, l’un des pays les plus contaminé du monde, avec le plus de morts et le taux de mortalité parmi les plus élevés de la planète, en grande partie à cause des facteurs de diabète et d’obésité très répandus parmi la population (près d’un tiers de la population totale). La gestion publique de la pandémie a été, sinon catastrophique, au moins clairement négligente à tous les niveaux de gouvernement (municipal, étatique et bien sûr fédéral), faisant près de 200000 morts et plus d’un million de personnes encore contagiées à l’heure actuelle. Bien que le gouvernement soit parfaitement conscient de l’existence de la pandémie, il a attendu que le virus pénètre dans le pays pour prendre les premières mesures en mars 2020, alors que la mesure du danger existait déjà depuis janvier. Les normes sanitaires nécessaires n’ont jamais été appliquées dans les grandes usines et sur les lieux de travail, les secteurs non essentiels n’ont jamais été fermés et il n’y a eu aucune mesure minimale de confinement, si ce n’est la fermeture d’activités secondaires telles que les loisirs, où seul un pourcentage limité de cas de contagion se produisent. Au lieu de cela, les dirigeants du pays se sont livrés à une avalanche de discours culpabilisants en faisant retomber tout le poids des contagions dû supposément au manque de conscience individuelle, du même niveau que le dicton selon lequel le pauvre est pauvre parce qu’il le veut.
Mais le problème ne s’arrête pas là. La phase de vaccination a maintenant commencé et de nombreuses défaillances et anomalies peuvent être enregistrées.
Le processus de vaccination a été truffé de corruption où les administrateurs et même les partisans du parti au pouvoir ont été vaccinés en premier alors qu’ils n’étaient pas prioritaires. Mais ce n’est pas le problème principal, c’est la pénurie de vaccins comme celui de Pfizer (où beaucoup de gens n’ont reçu qu’une seule dose et sont maintenant en attente de la seconde sans aucune garantie) combinée avec la très mauvaise gestion logistique du même processus de vaccination. Ceci malgré les achats de vaccins Spoutnik et Cansino pour compenser le manque de doses de Pfizer, ce qui était certainement une bonne décision, mais insuffisant en soi. Car tout le processus de la deuxième phase commencée au mois de février pour vacciner les personnes âgées repose sur l’utilisation d’une seule plate-forme numérique mal conçue et que, pour des raisons évidentes, a été surchargée par des millions de demandes provenant de tout le pays. En outre, les centres de vaccination prévus sont très insuffisants pour répondre à la demande de la population et se terminent par des files d’attentes kilométriques avec un temps d’attente pouvant aller jusqu’à 12 heures pour être pris en charge. Le taux de vaccination est très lent et une sortie de la pandémie est peu probable avant plusieurs années si ce rythme se maintien.
Le processus de vaccination doit être décentralisé à plusieurs niveaux, mais bien sûr toujours entre les mains des institutions publiques, afin d’éviter la spéculation privée et de privilégier les couches supérieures. On pourrait gagner plusieurs années et permettre au pays de sortir de la pire crise sanitaire par le haut. Au niveau mondial, il est nécessaire de lutter pour l’universalisation du vaccin et l’accès de tous les pays à celui-ci. Pour un pôle public de santé publique dans chaque pays et une articulation mondiale des efforts de santé. Lutter contre les pays accapareurs comme les États-Unis. Les États-Unis ou l’Union européenne doivent ouvrir les portes aux vaccins de pays socialistes comme la Chine ou Cuba et au vaccin russe qui sont conçus pour une diffusion dans des conditions de réfrigération simples, et parfois à un prix bien plus accessible du grand nombre.