« Fête de l’Huma » ou Fiesta du Capital ?
11 septembre 2021, Fête de l’Huma. Au cours de ce qui, historiquement, constitue la Fête des militants du Parti communiste français et du prolétariat (ouvriers en tête), est prise une photographie « historique » : Fabien Roussel, candidat PCF – nous n’utiliserons pas le qualificatif « communiste », totalement inapproprié au regard du développement qui suit – à l’élection présidentielle, pose tout sourire et bras dessus avec… Valérie Pécresse, Versaillaise à tout point de vue et animée par un anticommunisme profond. Et comme cela ne suffit pas, le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, après avoir « débattu » en 2020 avec le patron du MEDEF Geoffroy Roux de Bézieux, enchaîne et récidive dans le même espace avec… Gabriel Attal, le porte-parole du gouvernement Castex ; lequel Attal, trop content de l’aubaine, en profite pour confirmer tranquillement la destruction de l’assurance-chômage. C’est certainement la « nouvelle tendance » de ce qu’il reste d’un Parti se prétendant « de classe et de masse » : inviter ceux qui sont censés être ses ennemis de classe (censés, car on comprend bien, jour après jour, déclaration après déclaration, que ce n’est pas franchement le cas) pour « débattre », comme si lesdits ennemis de classe ne monopolisaient déjà pas suffisamment l’ensemble des médias capitalistes aux ordres. Mais Fabien Roussel doit certainement rendre la monnaie de sa pièce à « ses ennemis de classe » car « Sur le premier semestre 2021, Fabien Roussel est la troisième personnalité politique la plus présente dans les matinales »[1] devant les inénarrables Schiappa et Le Maire – ce dont se réjouit, sans rire, une intellectuelle membre du PCF croyant que le PRCF, qu’elle qualifie pourtant de groupuscule, roule pour Mélenchon en « sabotant » la candidature Roussel et en « détruisant » (sic !) le PCF.
Et en effet, Roussel est très prisé et même adulé par certains médias aux ordres qui l’encensent, le trouvent « rassurant », se félicitent que « pendant deux jours, Fabien Roussel va se muer en « Monsieur Loyal » de la campagne présidentielle »[2] et s’extasient même sur le « coup de foudre politique entre Fabien Roussel et Valérie Pécresse »[3]. La palme revient à un chroniqueur de RMC, Fred Hermel, bien connu pour sa grande passion pour le Real Madrid, qui couvre d’éloges Fabien Roussel – tout en versant au passage dans l’ironie cinglante envers le communisme – début septembre 2021 dans l’une des émissions symboles de la fascisation « Les Grandes Gueules », en l’opposant radicalement à Mélenchon : Roussel est ainsi félicité pour avoir manifesté avec les syndicats policiers factieux et présenté comme « un communiste [qui] travaille main dans la main avec Xavier Bertrand, président de droite de ma chère région Hauts-de-France pour essayer de sauver des usines et des milliers, eh bien voyez-vous moi je trouve ça très rassurant » ; le chroniqueur populiste ne franchira toutefois pas le petit Rubicon en rassurant son auditoire petit-bourgeois et anticommuniste : « Il donnerait presque envie de voter pour lui : bon, j’ai plus de 18 ans donc je ne le ferai pas ! »[4]. Car c’est bien connu, l’ancien ministre des gouvernements Villepin et Fillon, qui a participé à la désintégration industrielle du Nord-Pas-de-Calais et de la Picardie, va sauver les emplois industriels. Cette analyse peu flatteuse pour un communiste révèle cependant un élément rapprochant Roussel et Bertrand, et plus généralement tous les tartuffes que sont la Macronie, le prétendu RN, les faux LR, mais aussi les soi-disant « socialistes » comme Hidalgo et Montebourg et « écologistes » comme Jadot, Rousseau ou Bayou : les postures ne peuvent totalement effacer les impostures ; et dans le cas de Xavier Bertrand, que l’on se rappelle son accusation d’« assassinat prémédité » lancé à la direction de Goodyear qui annonça la suppression de 863 emplois à Béthune – phrase choc bien pensée pour séduire les médias aux ordres racoleurs.
Des médias aux ordres heureux de constater que la Fête de l’Huma qui, historiquement, est le moment du rassemblement de classe et de masse pour lancer l’offensive d’automne contre les ennemis de classe, devient une véritable féria, ce dont s’enthousiasme Le Parisien : « Pécresse, Attal, Hidalgo [Bayou et Autain aussi] … ils se bousculent tous à la Fête de l’Huma ». Tous ? Ou presque : si « à sept mois de la présidentielle, de nombreux candidats et personnalités politiques seront présents à la grand-messe communiste qui ouvre ses portes ce vendredi », « le leader des Insoumis, Jean-Luc Mélenchon en revanche sera lui en Belgique. »[5] Quant au PRCF, si militants y étaient pour participer aux débats politiques en communiquant des propositions franchement communistes avec une distribution de tract, le stand habituel ne pouvait être tenu du fait des conditions matérielles, surtout financières. Sans regret au regard de ce qu’a été cette « Fête de l’Huma 2021 » : un véritable grand marché de la présidentielle, qui concentrait le soi-disant « débat » sur les photographies avec les ennemis de classe (faux « socialistes » et « écologistes » inclus) dans une ambiance courtoise et de fête, désarçonnant même les militants comme l’illustre ce témoignage au sujet du prétendu « débat » Martinez-Attal : « À l’issue du débat, Antoine s’étonne presque de l’ambiance dans laquelle s’est tenu l’échange : « Je suis agréablement surpris, je m’attendais à ce qu’ils n’arrivent pas du tout à se parler. » »[6] C’est oublier que le « dialogue social » est la priorité absolue – voire unique – de l’actuel secrétaire général de la CGT[7].
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La fable éternelle de « l’Europe sociale »
En tout cas, comme toujours, les vrais débats qui devraient agiter les échanges entre les militants communistes ne furent pas évoqués, ce que même l’égérie et supportrice fanatique de Roussel regrette : « pourquoi faut-il faire silence ou marginaliser un tel combat ? qu’est-ce qu’on a à dire à Attal et à Pécresse quand on se tait sur le socialisme ? sur l’UE ? Sur l’Otan ? »[8] Quoique désagréable, la réponse est simple : on fait silence sur tout (même sur Cuba) car on est d’accord sur l’essentiel avec les ennemis de classe, comme sur l’UE dont on estime que la sortie équivaut à du nationalisme; n’est-ce pas d’ailleurs ce que déclare de manière péremptoire Fabien Roussel dans son livre Ma France, page 60 : « La démocratie, c’est d’ailleurs l’enjeu de cette élection. A qui allons-nous prendre le pouvoir ? Bien sûr, j’en ai déjà parlé, il y a l’UE, cette institution qui prend tellement de place dans les choix de chaque pays. Il ne s’agit pas pour nous d’agiter le spectre d’une sortie de l’UE en 2022. Un Frexit n’apporterait pas d’alternatives à la France. Lorsque l’on fait face à une pandémie, on a plutôt intérêt à coopérer, à travailler ensemble plutôt qu’à fermer les frontières à toute relation économique, humaine ou scientifique ». Circulez, il n’y a rien à voir ! Et tant pis si la fable de l’« Europe sociale », maintes fois écoulée depuis au moins François Mitterrand et que même des pseudo « insoumis » comme Manon Aubry reprennent à satiété, retrouve de la vitalité avec Fabien Roussel : « Je ne suis pas pour le repli sur les frontières : je suis pour faire vivre les droits des travailleurs européens, français et européens : un SMIC européen, une retraite commune, une santé publique partout et pour tous »[9]. On voit mal ce qui distingue ici Roussel d’un pseudo « Parti socialiste » qui tient les mêmes propos depuis 40 ans, ainsi que d’une frange croissante de la France de moins en moins « insoumise » à l’UE… Quel syndicaliste un peu éveillé ne voit d’ailleurs combien cette revendication d’un SMIG européen, alors que les différentiels existants entre la Bulgarie et la France, ne peut en réalité que désarmer notre lutte pour les salaires dans notre propre pays ? Car qui peut croire que, dans les rapports de forces actuels en Europe, le SMIG européen pourrait être autre chose qu’un RECUL grave, en matière de référence sociale, pour les travailleurs de notre pays sans apporter aucune garantie aux travailleurs bulgares, roumains, etc. qui n’ont plus aucun moyen de se défendre syndicalement ?
Sur l’OTAN, Roussel explique qu’il faut sortir de l’OTAN, ce que le PRCF ne peut que valider, lors de sa dernière sortie sur France Inter (ce qui est en contradiction avec le fait que Joe Biden pourrait prendre sa carte au PCF, mais passons…). Mais comment ne pas voir que cette sortie de l’OTAN sans sortir de l’UE n’équivaudrait rien puisque l’UE est officiellement partenaire stratégique de l’OTAN depuis 2002 et que tout pays désirant adhérer à l’UE doit préalablement s’affilier à l’Alliance atlantique, comme ont dû le faire tous les ex-pays socialistes de l’Est lors du prétendu « élargissement européen » ?! Quant au socialisme, à peine investi nouveau secrétaire national du PCF en novembre 2018, Fabien Roussel n’a-t-il pas rendu hommage, lors de sa première intervention médiatique, à… Alexandre Soljenitsyne sur France Culture le 28 novembre 2018, en déclarant que « Soljenitsyne, c’est un écrivain qui a écrit de grands livres, qui a dénoncé le stalinisme, qui a quitté la Russie, qui a quitté l’URSS à l’époque » ; et d’ajouter : « quand j’entends ce qui se passe en Chine aujourd’hui, ça réveille des choses qui ne me plaisent pas »[10] ?
Cela n’empêche pas certains « communistes identitaires » du PCF de dédouaner Fabien Roussel, qui « a deux grandes qualités : une dimension de classe et un sens de la souveraineté nationale » (et cela s’est clairement vu à la Fête de l’Huma, et plus encore dans ses prises de position déjà analysées). Ce dont souffre finalement l’actuel candidat PCF, c’est qu’il soit « soit mêlé à ce déni de solidarité » (avec Cuba) et donc qu’il soit victime d’intrigues (peut-être réelles au sein du PCF) de la part de ses adversaires de l’intérieur – en attendant que l’épouvantail PRCF soit une nouvelle fois évoqué pour assimiler les critiques (légitimes) contre les positions toujours aussi catastrophiques de Fabien Roussevelt[11] à du « sabotage ». Si Roussel dépasse triomphalement les 2 points en avril, cela signifiera d’avance qu’il avait raison et que le PRCF n’existe pas ; s’il fait un score aussi piteux que Hue et Buffet avant lui, c’est par avance la faute du dangereux PRCF : à tous les coups, on gagne avec ce type de raisonnement « scientifique »… Avec un tel raisonnement, impossible de voir que Fabien Roussel, bien loin d’incarner un quelconque « renouveau communiste » – bien que le candidat PCF affirme que « le PCF is back »[12] : une sorte de renouveau dans le langage, en tout cas ! –, illustre plus que jamais la désastreuse euro-mutation entamée, avec l’appui de tout le Comité central de l’époque, sous Georges Marchais – lequel, malgré ses contradictions et ses erreurs, eut le mérite de résister autant que possible aux sirènes du « renouveau » incarné par les Juquin, Wurz et autres Robert Hue – et menée tambour battant par Robert Hue (décoré de la légion d’honneur par la Macronie, certainement pour « services rendus à la nation » pour avoir liquidé le Parti communiste de combat…), Marie-George Buffet, Pierre Laurent et, désormais, Fabien Roussel.
Autophobie sans autocritique
A vrai dire, il n’était pas utile d’attendre la Fête de l’Huma pour constater que Fabien Roussel multiplie les déclarations versant toujours plus dans l’autophobie communiste et l’allégeance envers les forces du Capital, et concentre également ses attaques toujours plus ciblées à l’encontre de Jean-Luc Mélenchon[13]. Rien d’étonnant concernant ce dernier point : dans le « Manifeste pour un Parti communiste du XXIe siècle », la critique du porte-parole national de la France insoumise et candidat de « l’Union populaire » – changement de terminologie significatif de la progressive capitulation de la France de moins en moins « insoumise » face à l’UE du Capital par rapport à 2017 – constitue l’un des ciments du texte, Mélenchon étant réduit à un « populisme de gauche » non clairement défini et traversé, incontestablement, de nombreuses contradictions, à commencer par le positionnement au sujet de la mortifère « Union européenne ».
L’autophobie ? Outre sa première intervention sur France Culture en novembre 2018, depuis qu’il est candidat, Fabien Roussel n’a pas hésité à sévèrement désavouer ce qui constitue le cœur du marxisme-léninisme (qui, rappelons-le, a été abandonné par le PCF en 1979) comme le centralisme démocratique (abandonné lui aussi en 1994), au sujet duquel le candidat PCF déclara au sujet du tyranneau Macron, devant Laurence Ferrari sur C-News le 29 janvier 2021 : « Ah bah aujourd’hui, c’est le centralisme démocratique dans ce pays, celui qu’on a reproché à mon parti d’ailleurs [le tout en riant…]. Le président est enfermé dans ce bunker, ils sont à quinze, ils se réunissent et ils décident » ; et d’ajouter : « je ne suis pas dans l’opposition : je suis exigeant »[14]. Passons sur l’ignorance crasse de Fabien Roussel sur ce qu’est le centralisme démocratique et son mépris pour un fondement majeur du communisme remontant aux Jacobins et reformulé par Lénine ; il n’en demeure pas moins que le secrétaire national du PCF éprouve décidément de l’aversion pour cet élément central, au point d’accuser Jean-Luc Mélenchon de pratiquer lui aussi le centralisme démocratique[15] – quand bien même Mélenchon refuse l’organisation en parti au profit du « mouvement gazeux » et ne se revendique certainement pas du léninisme… Il est d’ailleurs remarquable que cette autophobie décomplexée se double parallèlement d’une obsession, celle de vouloir se distinguer à tout prix de Jean-Luc Mélenchon, quitte à lui accoler des formules et des pans de l’histoire que ne saurait pourtant renier un vrai communiste. Et c’est ainsi qu’en avril dernier, dans Marianne, Fabien Roussel déclara : « Les insoumis estiment que chacun doit avoir un travail et que s’il n’en trouve pas, l’Etat doit être employeur en dernier ressort. Nous ne partageons pas cette philosophie là, ça c’est l’époque soviétique, le kolkhoze »[16]. « Oh, manière subtile de ramper devant la bourgeoisie », eût dit Lénine qui employait alors cette expression contre les menchéviks de son temps.
Ce genre d’attitude peut même se révéler dangereux et nourrir à son corps défendant la fascisation, comme lorsque Fabien Roussel « a prôné la « neutralité des agents du service public, le besoin de protéger nos enseignants et les femmes, de lutter contre le fascisme islamiste et les certificats de virginité », « au contraire des Insoumis », selon lui. »[17] Sous-entend-il que Jean-Luc Mélenchon soutien le fascisme islamiste et les certificats de virginité ? A-t-il des preuves concrètes pour étayer ce genre d’assertion ? Ou ne fait-il que véhiculer voire valider indirectement les calomnies toujours plus haineuses et nombreuses de l’extrême droite lepéno-zemmourienne sur ce sujet, donnant encore plus de crédit à la détestable entreprise de criminalisation de la France insoumise en la qualifiant d’« islamo-gauchiste »[18] ? Il y a suffisamment de critiques à adresser à la FI – et notamment sur sa dérive européiste avérée et illustrée par Manon Aubry ou Clémentine Autain – pour s’embarquer dans des attaques que ne peuvent savourer que les forces réactionnaires et fascisantes sévissant en France. Au passage, pour en finir avec la basse calomnie répétée par certains sur « le PRCF à la remorque de Mélenchon » (que d’amalgames et de paresse intellectuelle chez ces gens qui nous critiquent sans prendre jamais la peine de nous lire !), nous les appelons à lire dans le dernier Initiative communiste notre article intitulé : « LFI : l’UE on la change… ou on ne la quitte pas ! ».
Des postures ne pouvant effacer les impostures
Certes, Fabien Roussel a parfois le sens de la formule et est capable de saisir l’importance des enjeux politiques quand il en perçoit le gain électoral possible. C’est ainsi qu’en septembre 2019, à l’occasion du 160e anniversaire de la naissance de Jean Jaurès, Fabien Roussel affirma vouloir : « Voir flotter ensemble le drapeau bleu blanc rouge de la France au côté du drapeau rouge du mouvement ouvrier ». Comme le releva alors positivement Initiative communiste : « Plus généralement, au cours de votre intervention tout comme dans d’autres déclarations ou entretiens réalisés auprès des « grands médias », vous dénoncez la destruction de la « souveraineté » opérée par Macron et le gouvernement Philippe, que ce soit dans le cas de General Electric au sujet de l’arrêt de la diversification des turbines – « nous considérons que c’est une production stratégique, c’est dans l’intérêt de la nation, de notre pays, de conserver ces savoir-faire, ces compétences », « pour des raisons de souveraineté économique » – ou dans votre discours du 3 septembre 2019 quand vous déclarez : « ceux qui défendent ce système ultra financiarisé ne veulent pas de nations souveraines ! Ils veulent encore moins de frontières entre lesquelles peut encore s’exercer cette souveraineté, s’organiser le débat démocratique. Ils ne veulent pas non plus de services publics qui pourraient échapper aux règles de la compétitivité et de la profitabilité à tout prix. » ; de même affirmez-vous que « la nation de Jaurès, et de tous les progressistes, est d’abord conçue comme une communauté de citoyens qui ne se distinguent ni par leur origine, ni par leurs convictions intimes. C’est en cela que la nation française, grandie par la Révolution de 1789, a pu d’emblée porter un message universel en direction des autres peuples d’Europe. Qu’elle a accompagné leur marche vers la liberté et l’indépendance. » »[19]
- A lire, à regarder : :
Le PRCF ne peut qu’adhérer à ce genre de déclaration… si celle-ci ne masquait pas une forte imposture sur les sujets tabous comme l’UE. Et c’est d’ailleurs ce que Natacha Polony rétorqua début septembre 2021 au candidat PCF désireux de « mettre en place de nouveaux traités européens » à travers des discussions « avec la chancelière Merkel ou quelqu’un d’autres » : « Mais vous faites comment ? […] Et vous faites sortir, par exemple, les Pays-Bas, l’Irlande, qui pratiquent le dumping fiscal ?! Et vous faites sortir la Roumanie qui pratique le dumping social ?! Vous faites sortir la Pologne, qui permet de délocaliser Whirlpool ?! Vous faites tout ça ?! C’est magique ! » – l’autre journaliste complétant : « Fabien Roussel, est-ce que ce n’est pas un peu naïf ? »[20]. Ça ne vous rappelle pas François Hollande qui déclarait en janvier 2012 : « Nous avons besoin d’Europe : elle doit nous aider à sortir de la crise, mais pas de nous imposer une austérité sans fin. […] Je renégocierai le traité européen issu de l’accord du 9 décembre »[21] ? On sait d’ailleurs ce qu’il advint du faux « socialiste » une semaine après son élection lorsque Merkel le rabroua illico presto à Berlin. Il arrive que la naïveté se révèle mortifère pour les travailleurs…
De la même manière, que valent les déclarations fortes et certainement sincères contre la fraude fiscale et le capitalisme si, dans le même temps, Fabien Roussel veut « abandonner le capitalisme (sans que l’on sache exactement ce que cela signifie…[22]) puis déclare à 20 Minutes « vouloir traquer les exilés fiscaux, sans pour autant « chasser les grandes fortunes : ils sont très intelligents, ils ont créé, inventé, et ne pourront refuser un pacte pour la jeunesse, de participation à l’amélioration du système éducatif et d’augmentation des salaires ». » ?[23] Faut-il donc comprendre que les nationalisations – interdites par les imbéciles et dogmatiques traités européistes afin de faire respecter la « concurrence libre et non faussée » – des grands secteurs productifs de l’économie que sont les transports, les banques, les assurances, les énergies, les communications, les énergies, la grande distribution ou encore le bâtiment et l’armement, ne sont pas à l’ordre du jour ? Faut-il également comprendre qu’il serait possible de travailler avec Bernard Arnault, Arnaud Lagardère, la dynastie Dassault, la famille Mulliez à Auchan, et que ceux-ci, européistes convaincus, se plieront aux injonctions du président Roussel ?!
Pour une candidature franchement communiste et insoumise, briser TOUS les tabous dont celui du Frexit progressiste
Oui, Fabien Roussel a raison d’expliquer que les gardiens de la paix sont également des travailleurs, ce que fait d’ailleurs le PRCF[24]. Oui, Fabien Roussel a raison de parler de « souveraineté », de « nation », de « tranquillité publique » (disons plutôt sûreté publique), tout en disant que les classes populaires de France ont été trahies et abandonnées sur ces thèmes – par qui, sinon par les gouvernements d’« union de la gauche » de 1981-1984 et de la « gauche plurielle » de 1997-2002 auxquels a participé le PCF, Fabien Roussel étant alors le salarié de la ministre « communiste » Demessine… MAIS encore faut-il leur parler avec un discours de classe et non avec les paroles de l’extrême droite, comme ceux des syndicats policiers factieux fustigeant la justice (à reconstruire) ou comme lorsque le candidat PCF osa déclarer au sujet du droit d’asile en juin 2021 sur C-News devant une Laurence Ferrari tout sourire : « Concernant ceux qui viennent en France et qui sollicitent le droit d’asile : quand ils l’ont, eh bien ils l’ont ; et s’ils n’ont pas vocation à rester sur le sol français, ils ont donc vocation à repartir chez eux, (« donc à être expulsés ? »), oui, à être raccompagnés chez eux […] Quand on ne bénéficie pas du droit d’asile, on a vocation à rentrer chez soi »[25]. Ou comment confondre l’immigration utilisée comme arme d’exploitation par le patronat – ce qui est d’ailleurs appliqué grandeur nature par l’Union européenne – avec les migrants fuyant la guerre, les persécutions et les violences et qui, dès lors, sollicitent à raison le droit d’asile !
Et pour proposer une candidature franchement communiste, il est nécessaire d’en finir une bonne fois pour toute avec tous les tabous et incohérences. Or à ce sujet, le PRCF, qui a déjà interpellé Fabien Roussel à plusieurs reprises, n’a jamais obtenu de réponse, ni même la moindre esquisse de dialogue, à des questions simples que nous reproduisons ici[26] :
- Après avoir lu les programmes de la FI et du PCF, et sachant que l’UE supranationale est le principal instrument de l’oligarchie pour démolir la France et ses acquis sociaux, en quoi le PCF apporte-t-il un plus sur ce sujet par rapport à la FI (dont la contestation de l’UE est déjà extraordinairement timorée) ?
- Vous prétendez que vous ne voulez pas sortir de l’UE par la gauche, comme le propose le PRCF, mais seulement rompre avec les traités européens « tout en restant dans l’UE ». Pouvez-vous alors dire de manière précise comment, l’UE n’étant rien d’autre que l’ensemble institutionnel créé par les Traités et ces traités ne pouvant être modifiés ou suspendus qu’à l’unanimité des États-membres (TOUS dirigés par des gouvernements néolibéraux et/ou fascisants) vous comptez « suspendre les traités » sans sortir de l’UE ?
- Vous exprimant dans Marianne, vous vous êtes exclamé : « PCF is back! ». Une récente affiche du PCF était par ailleurs ainsi libellée : « Red is the new green ! » et à la fête de l’Huma, la boutique du PCF avait pour enseigne « PCF Shop ». Étant donné, d’une part, que l’oligarchie européenne et hexagonale promeut une politique linguistique qui substitue le tout-globish des traités transatlantiques au « français, langue de la République » (art. II de la Constitution), pouvez-vous préciser comment vous comptez faire respecter la loi Toubon de 1994 (qu’avaient alors voté les députés communistes) si vous êtes élu président ?
- Question complémentaire : vous n’avez pas pris part personnellement au vote sur la dangereuse loi Molac, du nom d’un député breton proche de LAREM, violemment hostile à la langue française comme langue commune de la République, ainsi qu’à la « République une et indivisible ». Or vos députés ont tous voté la loi Molac, laquelle fait obligation aux communes de financer les écoles Diwan enseignant en breton, c’est-à-dire des écoles privées. Êtes-vous d’accord avec ce vote anti-laïque de vos camarades et vous réclamez-vous encore du jacobin Robespierre (« Elle répond toujours du nom de Robespierre, ma France », chantait Ferrat dans « Ma France ») ou êtes-vous devenu vous-même, pour être « dans l’air du temps », euro-fédéraliste et euro-régionaliste à l’instar de vos colistiers verts lors des dernières Régionales ?
- Vous, ou plutôt, certains de vos supporteurs, prétendez incarner la ligne « identitaire » du PCF. Or, votre parti figura partout en France, sauf en Auvergne, sur des listes dirigées, soit par le PS maastrichtien, soit par les Euro-Écolos d’EELV. Pouvez-vous expliquer comment il est possible de défendre nationalement la République une et indivisible, condition nécessaire pour qu’existent des statuts nationaux, des sociétés nationalisées, des conventions collectives et un Code du travail national, un bac, des diplômes et des qualifications nationales, un SMIG national (toutes choses indispensables aux salariés que vous dites représenter), tout en aidant les Verts et le PS « girondin » et antijacobin à gagner des présidences de Grandes Régions, parfois en alliance avec de francs séparatistes régionalistes comme l’UDB en Bretagne ?
- En tant que communiste « identitaire », appellerez-vous à nouveau à voter Macron, l’homme qui a couvert l’éborgnage de nombreux gilets jaunes et la loi Sécurité globale, au second tour de la présidentielle si celui-ci venait à l’atteindre aux côtés de Marine Le Pen comme il le souhaite ?
- Vu que vous ne vous réclamez plus, ni de la nationalisation démocratique des secteur-clés de l’économie – que G. Marchais considérait pourtant comme le « seuil minimum » en-deçà duquel on n’aurait pas un vrai changement mais seulement un replâtrage social-démocrate à la Mitterrand, vu que l’idée de pouvoir populaire (Marx disait « dictature du prolétariat ») vous fait rire et que, membre du Parti de la Gauche Européenne subventionné par Bruxelles, vous refusez, ne serait-ce que d’envisager de quitter l’UE, pouvez-vous dire de manière simple ce qui vous distingue du réformisme et ce qui fait que les ouvriers devraient vous croire quand vous déclarez représenter le communisme ?
A toutes ces questions, jamais une réponse n’a été clairement apportée. Ou plutôt si : sous forme de confirmations selon lesquelles le PS et EELV seraient « de gauche », il est hors de question de sortir de l’UE, etc. Et c’est pourquoi le PRCF anime sa propre campagne pour l’élection présidentielle[27], de manière parfaitement indépendante de la France de moins en moins insoumise et du candidat PCF qui refuse, quoi qu’il arrive, d’envisager la sortie de l’euro et de l’UE et ne parle que de « l’abandon » du capitalisme (ce qui ne signifie strictement rien !). Cette campagne franchement insoumise et communiste est portée par Fadi Kassem, secrétaire national du PRCF, pour qu’émerge une Alternative Rouge et Tricolore alliant le drapeau rouge de l’internationalisme prolétarien et le drapeau tricolore de la Révolution jacobine et des sans-culottes, et sans le hideux drapeau de la mortifère UE qui doit être brisée et non « réorientée ». Car c’est en menant le combat de classe, et non en promettant l’éternelle arnaque de l’Europe sociale, qu’un vrai mouvement populaire associant travailleurs, lycéens et étudiants et retraités en lutte, gilets jaunes, syndicalistes de combat, forces communistes, insoumises et patriotiques sincèrement antifascistes et anti-européistes, pourra espérer en finir avec l’oligarchie capitaliste de France et éviter le fascisant second tour Macron-Le Pen ou avec leurs duplicatas Bertrand-Pécresse (avec qui il n’y a RIEN à débattre !) et Zemmour-Dupont-Aignan-Philippot (avec lesquels il n’y a pas plus à débattre, n’en déplaise à J.L. Mélenchon).
Pour cela, la reconquête pleine et entière de la souveraineté nationale et populaire est la condition absolue, nécessitant d’en finir une fois pour toutes avec l’euro, l’UE, l’OTAN et le capitalisme exterministe et ses institutions de malheur (FMI, OMC, Banque mondiale, etc., que la FI souhaite désormais réorienter… comme Fabien Roussel avec l’UE !). C’est ainsi que l’on contribuera à la renaissance d’un véritable parti communiste sur des bases franchement marxistes-léninistes : le centralisme démocratique, la dictature du prolétariat, le rôle d’avant-garde, la fonction d’un parti de classe et de masse. Et qu’ainsi s’ouvrira enfin la perspective des « nouveaux Jours heureux » (nom du programme du PRCF depuis 2011, désormais cible de plagiat de la part de militants du PCF et de Fabien Roussel lui-même) dont les citoyens et les travailleurs de France ont urgemment besoin.
Le temps des faux semblants est révolu face à la dissolution de République une et indivisible, à la dislocation de la France, au démantèlement des services publics, à la destruction des conquêtes sociales, à l’arasement des libertés démocratiques, à la fascisation qui fait le lit de Le Pen et Zemmour, dans le cadre de la réactionnaire Union européenne du Capital. FREXIT PROGRESSISTE ET VITE… ou nouvelle désillusion pour le monde du travail. Puissent les nombreux militants du PCF s’en apercevoir avant qu’il soit trop tard.
[1] https://histoireetsociete.com/2021/07/11/la-dynamique-de-la-campagne-de-roussel-et-la-maniere-dont-lessai-doit-etre-transforme/ L’information émane originellement du Figaro.
[2] https://www.leparisien.fr/politique/pecresse-attal-hidalgo-ils-se-bousculent-tous-a-la-fete-de-lhuma-10-09-2021-W7CDTFNMXRABLHTUE6QCYLNM3Q.php
[3] https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/on-ne-pouvait-pas-le-rater/on-ne-pouvait-pas-le-rater-coup-de-foudre-politique-entre-fabien-roussel-et-valeriepecresse_4754321.html
[4] https://twitter.com/GG_RMC/status/1432643840096223233
[5] https://www.leparisien.fr/politique/pecresse-attal-hidalgo-ils-se-bousculent-tous-a-la-fete-de-lhuma-10-09-2021-W7CDTFNMXRABLHTUE6QCYLNM3Q.php
[6] Idem.
[7] https://www.initiative-communiste.fr/articles/luttes/les-organisations-constitutives-de-la-cgt-se-dissocient-et-condamnent-la-declaration-commune-des-confederations-syndicales-et-patronales-du-19-mars-2020/
[8] https://histoireetsociete.com/2021/09/12/la-fete-de-lhuma-sur-les-reseaux-sociaux/
[9] https://www.francetvinfo.fr/politique/parti-communiste-francais/video-il-faut-un-travail-pour-tous-et-un-smic-a-1800euros-reclame-fabien-roussel-secretaire-national-du-pcf_4767839.html
[10] https://www.franceculture.fr/emissions/linvite-des-matins/proletaires-gilets-jaunes-meme-combat-fabien-roussel-est-linvite-des-matins Au cours de ce même entretien, Fabien Roussel précisera que la motion finale du texte n’a pas retenu la notion de « parti d’avant-garde », sans doute trop désuète pour le « Parti communiste du XXIe siècle » …
[11] En référence à Franklin Delano Roosevelt, président des Etats-Unis de 1933 à sa mort en 1945, au sujet duquel Roussel déclara : « Le plan qu’il [Biden] met en œuvre est un plan révolutionnaire qui n’a pas d’équivalent depuis Roosevelt » : https://www.facebook.com/watch/?v=176048797725132 On appréciera le peu de crédit qu’accorde Roussevelt au Front populaire ou à l’URSS des années 1930…
[12] https://www.youtube.com/watch?v=f0tWK9BK0rE Au passage, on remarquera que Roussel est un grand adepte des slogans publicitaires et des formules en mesure de susciter les réactions sur les réseaux sociaux, en utilisant le terme de « remontada » (avant que le sieur Montebourg s’en serve carrément comme slogan de campagne pour 2022).
[13] Au sujet duquel un article critique est disponible dans le journal Initiative communiste de septembre 2021.
[14] https://www.facebook.com/watch/?v=717797295592970&ref=sharing
[15] https://www.lejdd.fr/Politique/fabien-roussel-secretaire-national-du-pcf-levenement-de-la-presidentielle-ce-sera-un-candidat-communiste-4032788
[16] http://www.le-chiffon-rouge-morlaix.fr/2021/04/entretien-de-marianne-avec-fabien-roussel-le-probleme-de-la-gauche-ce-n-est-pas-sa-division-c-est-sa-faiblesse.html
[17] https://www.20minutes.fr/politique/3108375-20210824-presidentielle-2022-fabien-roussel-pcf-promet-candidature-affaiblira-gauche
[18] https://www.initiative-communiste.fr/articles/prcf/stop-a-la-tentative-de-criminaliser-la-france-insoumise-en-laccusant-dislamo-gauchisme/ ; https://www.initiative-communiste.fr/articles/culture-debats/que-cache-le-gouvernement-derriere-le-concept-fumeux-dislamo-gauchisme/
[19] https://www.initiative-communiste.fr/articles/prcf/voir-flotter-ensemble-le-drapeau-bleu-blanc-rouge-de-la-france-au-cote-du-drapeau-rouge-du-mouvement-ouvrier-et-en-finir-avec-celui-de-lunion-europeenne/
[20] https://www.initiative-communiste.fr/articles/europe-capital/chez-polony-entre-leurope-du-capital-et-les-travailleurs-fabien-roussel-choisit-lunion-europeenne/
[21] https://www.youtube.com/watch?v=qnANL00YfKM
[22] https://www.initiative-communiste.fr/articles/europe-capital/russie-union-europeenne-et-capitalisme-georges-gastaud-analyse-les-reponses-de-fabien-roussel-a-la-pravda/
[23] https://www.20minutes.fr/politique/3108375-20210824-presidentielle-2022-fabien-roussel-pcf-promet-candidature-affaiblira-gauche
[24] https://www.initiative-communiste.fr/articles/prcf/lettre-ouverte-du-prcf-a-destination-des-gardiens-de-la-paix/
[25] https://www.facebook.com/watch/live/?v=302668954925566&ref=watch_permalink
[26] https://www.initiative-communiste.fr/articles/prcf/6-questions-de-fadi-kassem-porte-parole-de-lalternative-rouge-et-tricolore-a-fabien-roussel-candidat-du-pcf-pge/
[27] https://www.initiative-communiste.fr/articles/prcf/fadi-kassem-le-porte-parole-de-lalternative-rougetricolore-en-conference-de-presse-a-paris-fk2022-frexitprogressistepresidentielles2022/