Été brûlant, rentrée bouillante : face au capitalisme menant la Terre et les travailleurs à l’apocalypse, amplifier le combat salutaire pour l’Alternative Rouge et tricolore ! Fadi Kassem répond cette semaine aux questions d’Initiative Communiste pour préparer la rentrée sociale et politique.
INITIATIVE COMMUNISTE– Dans la dernière revue de presse du PRCF en date du 5 juillet 2022, tu évoquais le risque d’affronter un été brûlant et suffocant. Au regard de la dramatique situation en France, peut-on dire que la question environnementale est centrale pour l’avenir de la Terre et des travailleurs ?
FADI KASSEM – Si l’on met de côté la conjoncture potentiellement apocalyptique de la guerre en Ukraine, il apparaît clairement que la question environnementale est le problème fondamental pour la survie du genre humain et, plus généralement, de toute trace vivante sur Terre. Ce n’est pas une nouveauté : depuis des décennies, et encore dans un récent rapport, le GIEC – quel que soit le jugement que l’on porte sur sa composition et son fonctionnement – ne cesse d’alerter sur le réchauffement climatique particulièrement. Quant au PRCF, via plus spécifiquement sa commission Écologie-Agriculture – car toutes les ressources, y compris agricoles, souffrent de la destruction de l’environnement et des dérèglements climatiques (au-delà du réchauffement) –, il souligne depuis des années l’enjeu central que constitue la question environnementale, aussi bien dans de nombreux articles ou déclarations[i] qu’à travers la publication en avril 2021 du Manifeste intitulé « Les communistes et le combat environnemental »[ii].
Or, ces dernières années, les situations dramatiques se multiplient, notamment au sein du « monde euro-atlantique » : après les terribles incendies ayant frappé à l’été 2021 le Canada, les États-Unis (de nouveau en proie à de graves difficultés depuis juin 2022[iii]) ou encore la Grèce déjà meurtrie à l’été 2018 par de terribles incendies ayant ravagé l’Attique et l’île d’Eubée[iv] (et sans oublier la Turquie, principale victime de l’été 2021), après les inondations meurtrières ayant frappé l’Allemagne et la Belgique à l’automne dernier, voici que « l’Italie décrète l’état d’urgence dans cinq régions du Nord et rationne ses habitants en eau potable » jusqu’au 31 décembre du fait de la sécheresse inédite touchant la plaine du Pô où il n’a plus plu depuis plus de 130 jours ![v] En France, cette année, la Gironde est la principale victime du cocktail détonnant alliant sécheresse, redoutables vents, températures caniculaires et départs de feux, menaçant désormais très directement les Landes ; précédemment, la Corse, le Vaucluse, le Var, les Bouches-du-Rhône ou encore les Pyrénées orientales avaient été particulièrement touchés. J’avais effectivement souligné le potentiel danger d’un été brûlant et suffocant dans la dernière revue de presse du PRCF, au regard des températures alors déjà caniculaires en mai-juin. Malheureusement, cette prévision s’est avérée dramatique pour la Gironde.
Face à cette situation, où situer les responsabilités ? Certes, le comportement criminel des auteurs, volontaires ou non (on pense aux jets de mégots de cigarettes mal éteints par exemple), doit être sévèrement châtié. Certes, les aléas météorologiques jouent un rôle. Mais en rester à ce degré d’« analyse » revient à nier la responsabilité écrasante du capitalisme, que même l’ancienne secrétaire d’État auprès du ministre de la Transition écologique et solidaire, Brune Poirson, avait fustigé à l’été 2018 en affirmant : « « Le modèle économique sur lequel repose notre société, et bien il ne fonctionne pas. Ce n’est pas qu’un constat » ; « Cette économie sur laquelle repose le système capitaliste comme aujourd’hui, on extrait toujours plus de ressources de la planète pour produire toujours plus de produits qui finalement finissent eux-mêmes généralement au fond d’un trou, et bien ce n’est plus le modèle économique qui convient. »[vi] Certainement le « en même temps » macronien consistant à nourrir et à se nourrir des contradictions, quand bien même elles deviennent totalement antagonistes… En tout cas, rien de nouveau sous le soleil brûlant puisque Marx et Engels expliquaient déjà dans Le Capital que : « La production capitaliste ne développe la technique et la combinaison du procès de production social qu’en ruinant dans le même temps les sources vives de toute richesse : la terre et le travailleur ».
Ainsi, les laquais du capitalisme, et notamment les tenants de l’ordre euro-atlantique, sont les grands responsables des dégâts écologiques considérables qu’ils causent, à commencer par Macron et ses fidèles serviteurs eux-mêmes. Certes, ces derniers ont beau jeu de fustiger le fasciste Bolsonaro qui, partageant la même vision obscurantiste du monde que Trump, niait la réalité du réchauffement climatique alors que l’Amazonie, « poumon de la Terre », brûlait en quantité considérable à l’été 2019. Certes, Macron peut multiplier les slogans publicitaires (en globish) tels que « Make our planet great again ! » ou organiser un « One planet summit » en décembre 2017[vii]. Mais la réalité, factuelle et cruelle, finit par rattraper les fossoyeurs de la planète en cas de situation (de moins en moins) exceptionnelle comme en Gironde. Et si l’état funeste des services publics pour lutter contre les désastres écologiques remonte au moins à Jacques Chirac, il s’est dramatiquement détérioré avec Emmanuel Macron : qu’a-t-il fait, alors secrétaire de l’Élysée, lorsqu’un rapport sénatorial de 2012 affirmait que « la France devra dépenser entre 60 et 160 millions d’euros dans les prochaines années pour remplacer sa flotte de bombardiers d’eau vieillissante et de plus en plus coûteuse à entretenir »[viii] ? Et plus encore, qu’a-t-il fait en tant que Président de la République alors qu’un rapport sénatorial de 2019 « rappelait que les deux-tiers des appareils ont dépassé les 25 ans »[ix] ?
Face à cette situation catastrophique, la solidarité des travailleurs – je pense notamment au personnel de restauration des établissements scolaire de Gironde, ayant interrompu leurs vacances pour porter secours aux habitants sinistrés en leur servant les repas – est admirable. Tout comme sont remarquables « le courage et le dévouement » des pompiers, appliquant leur devise avec une forte conscience professionnelle. Mais ils demeurent malheureusement insuffisants pour compenser le funeste état des services publics en charge des fonctions régaliennes, à commencer par les pompiers et les forêts. Les premiers manifestent depuis des années pour obtenir une amélioration de leurs conditions de travail et une augmentation salariale, alors que les effectifs sont taillés en pièce[x]. S’agissant des forêts, la situation est encore plus alarmante : en novembre 2021, les travailleurs de l’Office national des forêts était en grève massive car « le régime Macron, pour satisfaire aux ordres austéritaires de l’Union européenne du Capital, poursuit et accélère l’entreprise de destruction de l’ONF. Avec un plan scandaleux de suppression de 500 postes d’ouvriers forestiers : le travail sera privatisé et confié à des opérateurs privés » ; et comme le résume parfaitement un camarade du PRCF, syndicaliste Sud à l’ONF et responsable de la commission Écologie-Agriculture : « 50 ans de capitalisme sauvage menacent 700 ans de gestion forestière »[xi]. Ce secteur dévasté par des décennies d’euro-austérité symbolise la politique mortifère exigée par la maléfique Troïka – Commission européenne, Banque centrale européenne (BCE) et Fonds monétaire international (FMI) –, avec les conséquences que nous voyons en ce moment.
Toujours face à cette situation catastrophique, la bourgeoisie capitaliste fait le choix de la résignation et de la fatalité, à l’image du nouveau ministre de la Santé François Braun qui estime qu’« il faut s’habituer à vivre avec ces canicules » (sans, naturellement, envisager un massif investissement dans le secteur hospitalier) : les 15.000 morts de la canicule de l’été 2003 apprécieront ! Tout comme apprécieront, n’en doutons pas, les pompiers et les travailleurs forestiers exténués ainsi que les habitants sinistrés. Parallèlement, adeptes d’une « écologie responsable » bourgeoise et réactionnaire, les tenants de l’ordre euro-atlantique culpabilisent les travailleurs sur leur comportement individuel en les enjoignant de « moins consommer » – alors même qu’ils n’ont déjà pas de quoi boucler la première quinzaine du mois ![xii] ; mais dans le même temps, consumatrice hédoniste, elle opte de plus en plus pour l’idéologie survivaliste importée des États-Unis, estimant que, dans le sillage d’une vision millénariste, la fin du monde et de l’humanité est inévitable et que seuls les plus forts survivront[xiii] – sans, bien entendu, cesser de conduire son fastueux train de vie terriblement destructeur de la planète.
C’est bel et bien la preuve que le combat environnemental est un combat de classes, nécessitant à la fois d’en finir avec le capitalisme exterministe et les structures qui l’encadrent – ce qui signifie, au niveau de la France, de rompre avec l’UE du Capital et le monde euro-atlantique comptant sur la mortifère OTAN pour assurer son hégémonisme déclinant –, mais aussi avec un « pacte girondin » impuissant pour juguler les catastrophes auxquelles sont confrontées les populations sinistrées de Gironde. Car ces dernières sont bien heureuses que les pompiers venus de toute la France (Corse, Bretagne, Alsace, etc.) combattent les flammes et assurent une égalité républicaine en fait (et non en palabres vantant la « différenciation des territoires ») de tous les territoires de France : comme quoi, le jacobinisme est bien supérieur au sinistre girondinisme[xiv] ! Et dans ce domaine comme dans d’autres, l’Alternative Rouge et Tricolore est indispensable pour reconquérir une souveraineté nationale et populaire permettant aux travailleurs de reconstruire des services publics au nom de l’égalité républicaine et de faire face aux nombreuses menaces – y compris environnementales –, sous peine d’être entrainés par l’ordre euro-atlantique vers une apocalypse à grande échelle pour le genre humain.
[i] https://www.initiative-communiste.fr/articles/prcf/pour-une-veritable-revolution-ecologique-avec-fadi-kassem-portons-lalternative-rougetricolore-communique-31/
[ii] https://www.initiative-communiste.fr/articles/prcf/pour-en-finir-avec-la-destruction-de-la-planete/
[iii] https://www.france24.com/fr/am%C3%A9riques/20220615-%C3%A0-l-approche-de-l-%C3%A9t%C3%A9-les-%C3%A9tats-unis-subissent-inondations-incendies-et-canicule
[iv] https://www.initiative-communiste.fr/articles/europe-capital/lunion-europeenne-du-capital-brule-la-grece/
[v] https://www.geo.fr/environnement/secheresse-litalie-decrete-letat-durgence-dans-cinq-regions-du-nord-et-rationne-ses-habitants-en-eau-potable-210728
[vi] https://www.initiative-communiste.fr/articles/prcf/desastre-ecologique-quand-le-gouvernement-denonce-le-capitalisme/
[vii] https://www.initiative-communiste.fr/articles/luttes/viol-de-langue-francaise-mepris-planete-one-planet-summit-farce-macron-a-paris/
[viii] https://www.bfmtv.com/economie/economie-social/finances-publiques/canadair-leur-remplacement-va-couter-cher-a-l-etat_AN-201211100055.html
[ix] https://www.bfmtv.com/economie/entreprises/augmenter-le-nombre-de-canadair-une-mesure-indispensable-ou-un-aveu-d-echec_AV-202207200297.html
[x] https://www.initiative-communiste.fr/articles/luttes/solidarite-avec-les-pompiers-en-greve-pour-notre-securite/
[xi] https://www.initiative-communiste.fr/articles/luttes/50-ans-de-capitalisme-sauvage-menacent-700-ans-de-gestion-forestiere-les-syndicalistes-mobilises-pour-defendre-nos-forets-publiques-alors-que-macron-et-pompili-detruisent-lonf/
[xii] https://www.initiative-communiste.fr/articles/culture-debats/ecologie-reelle-contre-ecototalitarisme/
[xiii] https://www.lefigaro.fr/actualite-france/survivalisme-enquete-sur-ces-francais-qui-se-preparent-a-la-fin-du-monde-20220418
[xiv] https://www.initiative-communiste.fr/articles/billet-rouge-2/incendies-de-gironde-ou-feu-sur-le-pacte-girondin/