06/09/2011 – Interrogé non sans finesse ce dimanche 4 septembre par Mme Ullmann, journaliste de la Cinq, M. Mélenchon a eu ce cri du cœur : « ma seule crainte, a-t-il dit en substance, c’est que nous ne puissions intervenir avant qu’ils (= les financiers et la droite) n’aient détruit l’euro et l’Union européenne »…
On aurait pu penser que le candidat du Front de gauche aurait eu, comme nous, la crainte que la France, que son industrie et sa classe ouvrière, que son agriculture et sa paysannerie, que ses acquis sociaux, ses services publics, son école laïque, sa langue évincée par le tout-anglais de l’oligarchie mondiale, ne fussent détruits PAR l’euro et PAR l’Union européenne avant que le mouvement populaire n’ait eu le temps de SORTIR notre pays de ces broyeurs de peuple que sont l’UE et son maudit euro. Eh bien non, car Jean-Luc Mélanchon est avant tout soucieux de sauver… cette construction européenne qui n’a JAMAIS apporté que du mauvais à la nation et à la classe ouvrière ! A chacun ses « peurs », décidément !…
Et c’est dommage, car pour le reste, – et à condition de ne rien dire ici des questions internationales: le candidat du front de gauche a voté pour l’intervention impérialiste en Libye! -, Mélenchon a eu le mérite de fustiger les marchés financiers, d’appeler à récuser la dette artificiellement créée par la politique européenne, de rappeler que la France est encore une grande puissance économique qui aurait les moyens d’affronter l’oligarchie européenne, de faire vibrer le patriotisme républicain si décrié par les trotskistes, euro « communistes » et autres euro-écologistes…
Mais « l’enfer est pavé de bonnes intentions »… A lors à quoi bon cette verve jauressienne si la seule solution pour Mélenchon, c’est de convaincre les gouvernements européens qu’il faut mettre la Banque européenne et l’euro au service des peuples ALORS MEME QUE CES INSTRUMENTS ONT ETE CONÇUS DE A A Z POUR ASSERVIR LES TRAVAILLEURS ET LES NATIONS et que manifestement, ni Cameron, ni Merkel, ni les « socialistes » Socrates, Papandréou ou Zapatero ne voudront bouger d’un pouce sur l’ « indépendance » de la Banque européenne, comme on le voit dans leurs pays respectifs malgré d’immenses manifestations populaires à Athènes, Madrid et Londres !
C’est pourquoi la journaliste Ullmann pouvait faire observer qu’en réalité, M. Mélenchon n’avait pas les moyens de sa politique (mais veut-il les avoir si pour lui le maintien de l’UE passe avant l’avenir du peuple et de la nation ?) et qu’au final, la seule position logique serait pour lui de sortir de l’euro et de l’UE… ce qu’il ne veut à aucun prix !
Quant à nous, nous reposons inlassablement à Mélenchon et aux militants du PCF et du P.G. la question suivante : si comme on peut aisément le prévoir, les autres pays européens refusent catégoriquement de bouger sur la question des finances européennes, le président Mélenchon (par hypothèse d’école) se couchera-t-il comme l’a fait le gouvernement Jospin (incluant Mélenchon et M.G. Buffet) en baissant la barre de ses objectifs sociaux et en acceptant l’effacement terminal de la France, ou fera-t-il ce que le PRCF, -qui s’efforce simplement d’être logique -, ne cesse d’exiger : que la France sorte de l’UE et de l’euro UNILATERALEMENT (contrairement à ce que demande Marine Le Pen qui, en demandant une « sortie concertée de l’euro », s’engage en fait à ne rien faire sans l’accord de Merkel !) pour reconstruire le pays sur des bases progressistes, indépendantistes, anti-impérialistes et internationalistes ?
A nous, militants franchement communistes et républicains de poser inlassablement cette question qui n’est rien d’autre qu’un choix de classe décisif. Encore un effort, il est vrai très très gros pour Mélenchon, cet ancien partisan de Maastricht qui appelait encore il y a peu à former une « république européenne », c’est-à-dire à mettre fin à l’indépendance, voire à l’existence de la nation !
Question également posée aux dirigeants du PCF qui, inféodés au « parti de la gauche européenne » et reniant le combat de Marchais et de Krazucki en 1992, militent désormais pour « sauver l’euro »…
Mais si nous restons dans l’euro, c’est là que nous « y resterons »… alors que si nous osons claquer la porte de cette prison des peuples qu’est l’UE, nous nous donnerons les moyens de mettre en place, hors de toute « concurrence libre et non faussée ouverte sur le monde », une politique de reconstruction nationale, de transformation sociale et de coopération internationale non limitée à l’Europe.
Faut-il préciser que pour les communistes que nous sommes, sortir de l’UE n’implique aucun enfermement nationaliste et que l’exemple de l’ALBA latino-américaine démontre la possibilité d’une coopération continentale (à la place de « continentale », je mettrais « internationale »)respectueuse des souverainetés nationales et porteuse de politiques progressistes.
Quant à ceux qui n’auront pas clarifié sur ce point et qui, jusqu’au bout, auront prétendu sauver à la fois l’UE et le monde du travail, nous leur prédisons qu’ils ne parviendront à nouveau qu’à jouer les forces d’appoints du PS… tout en ouvrant un boulevard à Marine Le Pen dans les milieux populaires comme dans les couches moyennes. Car « on ne peut servir deux maîtres », le monde du travail et l’Union européenne qui en est la négation de Lisbonne à Bucarest en passant par Paris !
G.G.