Imprescriptibilité des crimes de guerre: Après le débat à l’Assemblée Nationale des 12 et 13 juillet 2010, l’action est plus que jamais d’actualité.
Saisissant l’occasion du vote par le Sénat, hélas unanime, d’une proposition de loi dont un article dispose que les crimes de guerre soient prescrits au bout d’un délai de trente ans, Le Collectif Maquis de Corrèze a engagé une lutte pour que les lois françaises confirment définitivement l’imprescriptibilité des crimes de guerre.
Sa pétition « pour l’honneur » a reçu un accueil extraordinaire et de multiples soutiens dans les milieux fidèles à la glorieuse épopée de la Résistance victorieuse. La flamme de la Résistance a repris de la vigueur, portée par une mobilisation de la base au sommet, qui a pesé lourd dans les changements prometteurs qui se sont produits dans les débats à l’Assemblée Nationale des 12 et 13 juillet 2010.
Le Président de la République s’est impliqué dans ces débats avec son gouvernement, ils ont bafoué tous les engagements internationaux pris par la France, à l’issue de la glorieuse victoire sur les fascistes, engagements qui firent de la France l’une des quatre grandes puissances. Ils ont bloqué la majorité de l’Assemblée Nationale pour interdire la prise en compte de quelque amendement que ce soit. Madame Alliot-Marie, garde des Sceaux, messieurs Thierry Mariani, rapporteur et Jean-Marie Bockel, secrétaire d’Etat, ont imposé ce véritable diktat : ils ont fait voter le texte sénatorial sans le modifier. Des députés UMP manifestant leur attachement à l’imprescriptibilité des crimes de guerre n’ont pas échappé à la règle du talon de fer : M. Jean-Pierre Grand, député de l’Hérault, qui a porté entre autres l’amendement fondamental du collectif n’a pas eu la tâche facile.
C’est le scrutin majoritaire qui donne à la majorité parlementaire de tels pouvoirs. Mais aux dernières élections régionales, cette majorité a recueilli 11 % des inscrits. Le vote de l’Assemblée Nationale détermine plus que jamais le collectif Maquis de Corrèze à l’action.
Un des premiers et des plus profonds principes de la République, qu’une injustice reste une injustice, même lorsqu’elle est inscrite dans les lois ; se fondant sur ce principe, ils ont décidé de ne pas en rester là : que les crimes de guerre puissent être prescrits est en effet une grande injustice et une source inépuisable de nouvelles injustices : pour les républicains qu’ils sont, la nouvelle situation, créée par cette loi, est intolérable : il faut y mettre fin !
Cela les conduit à examiner plus attentivement les interventions prononcées dans le débat parlementaire par les députés, et à les comparer à leurs arguments diffusés au cours de leur propre campagne. Ils constatent en lisant la transcription des débats que neuf députés sont intervenus pour inscrire dans la loi l’imprescriptibilité des crimes de guerre, sur une cinquantaine de présents. Mesdames et messieurs Daniel Boisserie, Jean-Jacques Urvoas, George Pau-Langevin, Jean-Paul Lecoq, Sandrine Mazetier, Marietta Karamanli, François Loncle, Alain Vidalies, Jean-Pierre Grand.
La lecture de leurs interventions le montre : tous ces députés ont utilisé au moins un des arguments du collectif, et plusieurs s’en sont inspirés pour leur exposé à l’Assemblée ; quant à monsieur Jean-Pierre Grand, il a repris notre proposition d’amendement:
« Les crimes de guerre, tels qu’ils sont définis par le protocole additionnel 1 du 8 juin 1977 aux Conventions de Genève du 12 août 1949, sont imprescriptibles quels que soient la date et le lieu auxquels ils ont été commis. »
L’ensemble des interventions ne peut être retranscrit, cependant le discours d’une portée historique de Monsieur Daniel Boisserie, député de la circonscription dont fait partie Oradour-sur-Glane, expose une analyse identique à la nôtre. Il rappelle le vote du parlement autorisant l’adhésion de la France au protocole additionnel 1 du 8 juin 1977, aux Conventions de Genève de 1949, paraphée par le Président Jacques Chirac et le Premier ministre, Lionel Jospin. Il dit ensuite, dans une émouvante déclaration dans ce palais Bourbon, chargé d’histoire : « la prescription serait une véritable injure jetée à la face de celles et de ceux qui ont payé de leur vie les exactions des hordes nazies et de leurs affidés français ». Daniel Boisserie a indiqué qu’il parlait au nom de François Hollande, député de Tulle, ville martyre et de Jean Launay, député du Lot.
Jean-Paul Lecoq, député de Seine-Maritime, va droit au cœur de l’enjeu « non seulement la France serait en rupture avec le droit international en ratifiant ce projet en l’état mais, en outre, elle serait en rupture avec elle-même. »
Ce qui reste évident et décisif pour la poursuite de l’action du collectif, c’est que l’unanimité déshonorante du Sénat du 10 juin 2008, a volé en éclat à l’Assemblée Nationale.
Le moment de vérité est arrivé lors de la discussion de l’amendement n° 65 de M. Jean-Pierre Grand : Messieurs Mariani et Bockel ont donné la mesure de leur cynisme. Pour eux, le vote de 2001 par lequel la France a confirmé l’imprescriptibilité des crimes de guerre n’a jamais existé, pas plus que la décision du 22 janvier 1999 par laquelle le Conseil Constitutionnel rappelle que rien n’interdit cette imprescriptibilité.
Le protocole additionnel 1 inscrit dans son article 75, alinéa 7 : « pour que ne subsiste aucun doute en ce qui concerne la poursuite et le jugement des personnes accusées de crimes de guerre ou de crimes contre l’humanité, les principes suivant seront appliqués: a) les personnes qui sont accusées de tels crimes devraient être déférées aux fins de poursuite et de jugement conformément aux règles du droit international applicable…. » Il n’y a donc aucune rupture dans le temps comme le confirme l’article 75 en son alinéa 4, n’en déplaise à Monsieur Thierry Mariani. L’imprescriptibilité des crimes de guerre découle de l’application intégrale des dispositions de l’ensemble des articles dudit protocole.
Le collectif maquis de Corrèze sait gré, à toutes celles et à tous ceux qui ont participé à cette formidable prise de conscience qui s’inscrit dans l’aspiration universelle à la paix et à la suppression de tous les crimes dénoncés par Nuremberg, qui menacent toujours l’humanité.
Le collectif agira jusqu’à la victoire de la justice et de la paix !
Jean-Pierre Combe Pierre Pranchère
Président délégué Secrétaire général
PS: Lors du vote final Jean-Paul Lecoq a annoncé que le groupe de la gauche démocrate (GDR) et républicaine a voté contre ce texte ainsi que Mme G. Pau-Langevin pour le groupe socialiste, radical citoyen (SRC), et des députés. Le scrutin public n’avait pas été demandé.