Photo Reuters/Stephan Wermuth
A l’approche des élections en Grande-Bretagne la sagesse vient, par magie, inspirer un coup de bluff de haute volée au Premier Ministre britannique, David Cameron. De quoi s’agit il ?
Cameron propose d’organiser un referendum sur l’appartenance du Royaume Uni à l’UE. Cette proposition a l’apparence de la démocratie, le goût de la démocratie, la couleur de la démocratie mais ce n’est en rien une victoire de la démocratie.
Pourquoi ?
1° Le Parti Conservateur ainsi qu’une fraction de la grande bourgeoisie britannique n’a jamais porté l’UE (et la construction européenne) dans son cœur. En effet depuis la Première mais surtout la Seconde guerre mondiale, où l’Empire britannique a sombré, cette fraction de la bourgeoisie voit son destin comme le 51e Etat des États-Unis d’Amérique.
2° Une fraction de l’impérialisme britannique ne veut pas de la domination d’une nation continentale en Europe. C’est une vieille obsession britannique, dirigée soit contre la France, napoléonienne par exemple, soit contre l’Allemagne, hitlérienne par exemple. Or l’UE est en train de devenir une zone où la domination allemande devient de plus en plus évidente et donc dangereuse aux yeux de certains capitalistes britanniques. De là deux attitudes possibles: se mêler des affaires continentales pour contre-carrer l’Allemagne, soit renforcer encore le choix atlantique (avec les E-U) pour se prémunir de cette domination dans le cadre d’une négociation/concurrence entre Berlin et Washington.
3° Une autre fraction du grand capital britannique, symbolisé par la City, le capital financier, est au contraire attaché pour défendre ses intérêts spécifiques à l’UE. Inutile de souligner la puissance de cette composante et son influence sur le gouvernement.
4° Le peuple britannique par sa culture politique et son histoire reste fondamentalement sceptique quand à l’Europe : attachement à une insularité certes géographique mais aussi politique : pas un seul drapeau européen dans les bâtiments officiels britanniques….
5° Même le parti Travailliste, plus favorable à l’UE, est obligé de tenir compte d’un état d’esprit de plus en plus critique vis à vis de l’Europe. Il se repli sur le positionnement classique de la social-démocratie européenne (y compris le PGE) en revendiquant une « Europe sociale ».
6° Cameron est obligé de naviguer au sein de ces contradictions entre fractions du grand capital et de l’opinion populaire. C’est pourquoi il tente une manœuvre qui est l’annonce du referendum. Avec une dimension qui ne doit pas être sous estimée: les difficultés que connait l’unité de la Grande-Bretagne avec la tentation sécessionniste de l’Écosse et l’unification inéluctable à terme de l’Irlande. Et qui sait si le Pays de Galles ne finirait pas par avoir des idées….Là encore Cameron peut tenter de la jouer défenseur du Royaume-Uni pour que celui-ci le reste….
Reste que dans son discours le Premier britannique a donné des arguments pour voter OUI à l’UE, donnant des gages à la puissante City mais annonçant un referendum pour se concilier et le peuple et la fraction anti-UE du grand capital britannique, tourné vers les USA et le Commonwealth. N’oublions pas que Thatcher était très hostile à la réunification allemande et que la vision mondialiste de cette fraction du capital a obtenu le maintien de la Livre sterling contre l’Euro….
Mais, comme l’apprenti sorcier, Cameron ne met il pas en route une dynamique qui peut dépasser ses calculs tactiques? Si par exemple se développait une exigence de referendum sur le maintien dans l’UE en Grèce, au Portugal ou en ….France. Qui parierait une victoire du OUI ?
Alors, que les révolutionnaires et les patriotes républicains reprennent la balle au bond en exigeant aussi EN France un référendum sur le maintien ou pas du pays dans l’UE. Déjà sur le site du Parisien, qui a lancé un sondage sur cette question, une majorité écrasante des intervenants se déclarent pour un référendum. Quant au PRCF il n’entretient pas d’illusions sur la manière dont la bourgeoisie respecte le suffrage universel quand il lui est défavorable (se souvenir du grossier viol du « non » populaire à l’euroconstitution qu’a été l’adoption du Traité de Lisbonne, et encore plus du TSCG, par lesd députés de l’UMPS, mais il sait aussi que pour faire mûrir l’exigence populaire du RETRAIT révolutionnaire de l’UE et de l’euro, une campagne référendaire nationale pourrait être un puissant accélérateur ; sachant qu’en toute occurrence, c’est seulement par l’intervention, voire par l’insurrection d’une large alliance populaire et patriotique conduite par la classe ouvrière, que pourra s’effectuer la rupture, fondamentalement révolutionnaire, avec la prison des peuples qu’est l’Union européenne.
AM pour la Com inter