Les salariés de Dunkerque ont eu le mérite de lancer l’action pour sauver le raffinage en France. Leur lutte n’était pas tournée, comme c’est hélas souvent le cas, vers la négociation des meilleures conditions possibles de départ, mais pour la défense du « produire en France » menacé par la volonté de la transnationale Total de délocaliser les productions. L’alibi écologique avancé par de Margerie, le PDG du groupe, ne trompe personne: en quoi raffiner le pétrole à l’étranger dans des usines à faibles exigences socio-écologiques, puis importer les carburants et les produits transformés à grands frais, serait-il plus écologique que le produire ici ?
Il faut se féliciter, comme le PRCF l’a fait dès le 22 février, que l’ensemble des sites Total se soient mis dans l’action, suivis par plusieurs sites Exxon ou « ex-Shell » (Berre), soient entrés dans l’action au lieu d’abandonner la raffinerie des Flandres. Il faut se réjouir aussi que les travailleurs et leurs syndicats CGT n’aient pas hésité à bloquer les raffineries en oubliant la scandaleuse phrase de Thibault en 2003 « la CGT n’a pas vocation à bloquer le pays » qui signifiait : feu vert à toutes les agressions du gouvernement, on ne fera plus comme en décembre 95 ! La simple menace d’un blocage du pays a d’ailleurs permis de contraindre la direction de Total à garantir la non-fermeture des raffineries autres que Dunkerque…
Cependant les travailleurs de Dunkerque ont raison d’être amers. Il est difficile de comprendre que certaines raffineries qui sont entrées dans l’action plus tard et en sont sorties plus tôt, obtiennent une garantie écrite de la direction (qui n’est jamais qu’un CDD de cinq ans, comme l’a dit un syndicaliste de Dunkerque), alors que la raffinerie la plus menacée qui a lancé l’action et qui la poursuit aujourd’hui est abandonnée et vouée à la fermeture ? Qui croit réellement qu’une fois passées les régionales, les promesses de reconversion faites aux Dunkerquois seront tenues ? Sans parler des salariés de la sous-traitance qui sont carrément abandonnés au chômage et, au bout d’un an, aux « fins de droits » ? Et que devient l’exigence de rapatrier les productions faites à l’étranger et qui, tout à la fois, augmentent les énormes profits de Total et alourdissent la balance commerciale de la nation ?
Bref, avec les orientations actuelles de la CGT, qui cherche plus à limiter les dégâts dans le cadre du système capitaliste, des négociations bidon avec Eskrozy et de la sacro-sainte « construction européenne », il est impossible de défendre avec esprit de conséquence le « produire en France », la nationalisation démocratique de Total et la reconstruction de la France comme pays industriel.
C’est pourquoi le PRCF avance à nouveau avec force l’idée d’une manifestation nationale unitaire de toutes les formations qui se réclament de l’anticapitalisme, de la gauche antilibérale, du syndicalisme de lutte, de la République et de l’anti-impérialisme, contre Sarkozy, contre l’ensemble de sa politique, y compris contre sa politique d’alignement sur Bruxelles et les guerres impérialistes de Washington. Emploi, salaires, services publics, retraites, Sécu, indemnisation du chômage, libertés démocratiques saccagées par Sarko, droit de notre peuple à disposer de lui-même en secouant les interdits de Bruxelles (nationalisations, ré-industrialisation, mise en cause du ruineux libre-échangisme capitaliste mondial…), il faut s’y mettre tous ensemble et en même temps.
Et pour cela il ne suffit plus de crier « tous ensemble, ouais ! » dans les manifs : il faut se fixer un premier rendez-vous national pour que le « tous ensemble » finisse par s’imposer malgré les directions syndicales euro-formatées et enclines à toutes les compromissions.
Pour sauver le pays, il faut bloquer leurs profits, tous ensemble et en même temps !
Et comme une fois de plus que les directions syndicales s’y refusent et négocient non les avancées, mais les « meilleurs » reculs possibles, il faut poser des actes pour construire « en bas » l’unité d’action !