PACA a le triste privilège d’être la seule région qui de 1986 à 1998 a été administrée par une majorité Droite-Front National. Son président, n’était autre que Jean-Claude Gaudin, l’actuel maire de Marseille. C’est lui qui, quelques années plus tard affirmait, sans vergogne, que toute alliance de l’UMP avec le FN était totalement Inacceptable car contraire à la morale républicaine.
Sans doute par rejet de cette alliance, le candidat Michel Vauzelle (socialiste) fut élu à la tête d’une majorité PS–Verts–PCF. A l’heure où j’écris ces lignes, Vauzelle, semble assuré de pouvoir briguer un nouveau mandat.
Depuis que j’ai pris conscience de mon appartenance de classe,
je considère les élections du point de vue de l’expression des besoins d’une nation au service de ceux qui créent les richesses et luttent . Autrement dit, sans montée des luttes sociales, point de salut dans les élections.
Les élections régionales de 2010 revêtent un caractère exceptionnel qui semble avoir échappé à toutes les listes qui se présentent : Aucune ne semble vouloir lier le sort de la région à ce qui se trame au niveau de l’ Union Européenne, à savoir la casse des structures des états : communes, départements, régions et Service Public . Rien d’étonnant puisque les mêmes à de rares exceptions près ont gardé un silence complice après la forfaiture de Sarkozy qui est passé outre le rejet populaire de la constitution européenne. Quant aux autres, elles ne peuvent s’exprimer sur la question sans mettre en péril les alliances du second tour.
S’il est nécessaire d’apporter une preuve du lien existant entre la casse de la Nation au nom du profit mondialisé et ce scrutin, voici un élément éclairant:
Technicien à l’université de Provence, militant à la CGT et au PRCF,
j’ai vécu depuis 2006 trois conflits très durs, dont les deux derniers au moins avaient pour raison d’être la sauvegarde du Service Public d’enseignement : le mouvement contre le CPE, celui contre la loi LRU et en 2009 la lutte contre le décret du statut des enseignants- chercheurs, la disparition des postes de catégorie C, la disparition du CNRS et des IUFM.
La trahison de certains syndicats en pointe dans l’enseignement et l’opportunisme d’un nombre non négligeable d’enseignants du supérieur ont eu raison de ces mouvements. Et puis il y a le soutien sans réserve de la CPU (Conférence des Présidents d’ Universités) à Valérie Pécresse qui avait promis aux présidents des indemnités mirobolantes. A noter (une fois n’est pas coutume) qu’elle a tenu sa promesse. Encore fallait-il créer un rempart face à la rage des étudiants, des BIATOSS (personnels administratifs et techniques) et des enseignants en lutte. L’université de Provence a vu parallèlement à la disparition des postes de fonctionnaires de catégorie C, la constitution d’un service de la communication composé de plus de 10 nouveaux personnels dont le but n’est pas d’informer la communauté universitaire mais de constituer un outil de propagande en direction des entreprises qui financeront l’université à coups de contrats de recherche, un nombre très impressionnant d’embauches de contractuels de catégorie A, de profs chargés de mission, de secrétaires généraux adjoints et surtout de vice-présidents, passés de 4 à 12 (+ le vice-président étudiant, responsable du syndicat jaune minoritaire, l’UNEF).Parmi les vice-présidents, l’un était candidat du SNESUP à la présidence contre l’actuel président, Jean-Paul Caverni, l’autre, elle-même conseillère municipale PS, était secrétaire générale du SNESUP à l’université de Provence. Cette dernière a voté la suppression de 7 postes de catégorie C en déclarant qu’il s’agissait d’un moindre mal.
Dans cette université que beaucoup appelaient jadis l’université rouge,
qui, il y a un peu plus de trente ans eut un président membre du parti communiste, un évènement devait à jamais meurtrir tous les personnels et étudiants, ceux qui luttaient et les autres : l’intervention des CRS appelés par le président pour déloger les étudiants qui occupaient pacifiquement les locaux. Aucun vice-président ne démissionna. Au contraire, ils apportèrent leur soutien à cette initiative.
Cerise sur le gâteau, la mise en place du projet de fusion des trois universités d’Aix-Marseille dont le but est de concurrencer les autres, connaît une accélération importante. Ainsi, le conseil d’administration s’est réuni avec pour ordre du jour le vote d’un texte commun sur la fusion. On y lit en page 5 (faut-il le rappeler, nous parlons d’un service public) : « Il s’agit en quelque sorte de passer d’un modèle organisationnel traditionnel à un modèle entrepreneurial. S’il faut se méfier d’une rupture trop brutal, il faut construire un changement continu, exigeant sur la base de notre autonomie.»
Ce texte rejeté par les élus est passé grâce aux voix du représentant socialiste du Conseil Régional (tiens tiens !) et des deux vice-présidents SNESUP.
La liste des méfaits de la politique sarkozienne sur l’université ne cesse de s’allonger. Cela signifie-t-il que l’ UMP recrute parmi les enseignants présidents et vice présidents d’université ?
Un courriel envoyé récemment à la communauté de l’U.P. par le président contredit cette idée : « Chère Collègue, Cher Collègue, dans le cadre d’une ouverture qu’il souhaite faire à la société civile, Michel Vauzelle m’a proposé d’être candidat sur la liste qu’il conduit pour les prochaines élections régionales. J’ai accepté. Cette candidature relève d’une démarche citoyenne personnelle. A l’université, je resterai bien sûr fidèle aux principes et valeurs qui ont guidé mon action. Je continuerai à servir chacun sans distinction, à défendre les missions de service public de l’université, à porter nos intérêts ainsi que notre projet collectif auprès de toutes les instances partenaires. Cordialement à chacune et à chacun. Jean-Paul Caverni »
A force d’ouvertures à Droite comme à Gauche, la France devient un véritable courant d’air.
Quant à l’ancien premier secrétaire fédéral du PCF, J.M. Coppola, tête de liste du « Front de Gauche », ancien vice-président du C.R., il « tire un bilan très positif de l’action menée par la coalition de Gauche » dans une interview publiée par le quotidien gratuit : 20 minutes, justifiant cependant le choix de faire cavalier seul au premier tour par le fait que « la Gauche est trop molle ». Enfin, la tête de liste du Front de Gauche pour le département des Bouches-du-Rhône, n’est autre que la secrétaire académique du SNESUP qui fut à nos côtés dans la lutte de l’an dernier. Que se passera-t-il lorsque cette nouvelle coalition de Gauche devra gérer ensemble les affaires de la région ou du moins ce qu’il en restera ?
Sur le point de prendre ma retraite, je songe à un de mes meilleurs souvenirs de lutte : ma convocation par le secrétaire général de l’université à la suite d’une dénonciation, alors qu’avec quelques camarades, nous avions collé une banderole confectionnée par des étudiants sur laquelle était écrit : « FITS », transformant l’université de ProVENCE en université de ProFITS . Une fois de plus, la jeunesse qui luttait avait raison.
Luc WAJS