par Floreal – Les pitoyables slogans du PCF en globish « Red is the new green! » et « PCF is back! » n’étant sans doute pas jugés assez racoleurs par son young leader Fabian Russell, on a vu récemment fleurir sur les affiches du PCF le mot d’ordre faussement radical « tout le pouvoir aux salariés!« .
Slogan pseudo radical
Slogan pseudo-radical d’abord: en effet, pour pouvoir faire dignement allusion au fameux mot d’ordre de Lénine* « tout le pouvoir aux soviets! », cette traduction en langage populaire de la dictature du prolétariat désormais honnie par le PCF -, encore faudrait-il avoir créé, à l’issue d’un vaste assaut révolutionnaire n’éludant pas la question décisive de l’armement des travailleurs, ce que Lénine appelait un « double pouvoir »; c’est en effet un tel double pouvoir qui mit aux prises en Russie entre mars et novembre 1917 le gouvernement provisoire bourgeois aux Soviets ouvriers et paysans et c’est à ce double pouvoir, totalement inexistant en France à ce jour, que la Révolution d’Octobre mit fin en transférant l’ensemble du pouvoir d’Etat aux Conseils ouvriers et paysans à l’issue des « Dix jours qui ébranlèrent le monde ».
Encore faut-il aussi disposer pour une telle révolution prolétarienne et socialiste, cher comrade Russell, d’un parti communiste de combat – ce parti qu’était le Parti bolchevik et que fut longtemps aussi lePCF avant qu’il n’eût cédé à l’euro-mutation réformiste pour s’arrimer au PS maastrichtien et aux « Verts » à toutes les élections, la lutte des places ayant définitivement supplanté la lutte des classes au PCF .
le pouvoir aux salaries : une expression niant la lutte des classes et le prolétariat
Enfin et surtout, revenons sur l’expression hautement impropre de Roussel « le pouvoir aux salariés ». On sait bien sûr qu’il y a longtemps (1994, 28ème congrès exactement) que le PCF a purgé ses statuts de la référence fondatrice à la classe ouvrière (et au marxisme, pour faire bon poids). Longtemps aussi qu’il abandonne dans sa « com » le mot « travailleurs » aux trotskistes de Lutte ouvrière qui en font un usage quasi folklorique.
Mais surtout, sur le fond, le slogan « tout le pouvoir aux salariés » est une expression hautement impropre. En effet, parmi les salariés, certains, les ouvriers, les employés, la majorité des techniciens, une partie minoritaire peut-être des prétendus « cadres moyens », entrent dans la catégorie marxiste du prolétariat qui désigne ces travailleurs « déliés de tout, sauf du besoin » (Marx) qui, contraints pour vivre de vendre leur force de travail aux capitalistes ou à leur Etat, produisent la plus-value capitaliste sans en bénéficier: en un mot, les exploités.
Au contraire, y compris dans le « salariat » nominal, nombre de cadres, dit moyens ou plus encore supérieurs (haute fonction publique inclue) bénéficient de cent façons des retombées sur leur « salaire » de la plus-value capitaliste et du surprofit impérialiste : au point que nombre d’entre eux affluent en permanence sur les marchés boursiers qui prédatent nos services publics et vampirisent nos usines (privatisations, délocalisations, fusions…).
Fabian Russell ignorerait-il aussi qu’à notre époque de précarisation générale (destruction des statuts, du Code du travail, des conventions collectives, externalisations d’activités, etc.), nombre d’ « entrepreneurs », en particulier la majorité des « auto-entrepreneurs », dont le statut juridique est proche en apparence de celui des petits patrons, sont des prolétaires caractérisés comme le montrent du reste de manière spectaculaire les luttes des travailleurs d’Uber ? Enfin, vivant dans le Nord, où la « construction » européenne (dont le PCF actuel, tournant le dos aux luttes frontales de Duclos et même de Marchais contre l’Europe supranationale, a rallié le principe tout en disant refuser ses effets ravageurs) a réduit à l’écroulement industriel bon nombre d’ex-bastions rouges rongés par la misère : car enfin, il ne se peut que le « come back » de Sir Fabian Russell ignore l’existence de ces millions de membres de la classe ouvrière que sont les chômeurs ; lesquels, par définition, échappent au statut juridiquement codé du salariat.
Comment en outre ignorer, au prix d’un slogan raccoleur, ces millions de femmes sans emploi, ou à l’emploi « informel » qui, épouses d’ouvriers ou d’employés « sans grade » partagent au quotidien ce que la CGT rouge de jadis osait encore appeler la « vie ouvrière », font partie objectivement, qu’elles le sachent ou pas, de la grande famille prolétarienne sans cesse exploitée, piétinée et humiliée?
Pour ne rien dire de ces millions de retraité(e)s issus du monde ouvrier qui, nommément, ne sont plus des salariés, mais n’en appartiennent pas moins au prolétariat, de même que, à l’autre bout de la chaîne des générations, sont des prolétaires en puissance les centaines de milliers de lycéens des LP et des LT et la majorité des étudiants paupérisés issus des couches populaires.
Enfin n’oublions pas que, même si les ouvriers et les employés sont le cœur combatif de la classe prolétarienne, ils doivent de toute nécessité, s’ils veulent isoler le grand capital et son fascisant Parti Maastrichtien Unique (qui s’étend désormais du PS au Rassemblement lepéniste), s’ALLIER aux artisans, aux petits commerçants, aux petits et moyens agriculteurs en grave souffrance: ces travailleurs indépendants (indépendants en apparence, car ils sont pieds et poings liés aux banques et aux « donneurs d’ordre » du grand capital!) que le slogan pseudo fédérateur « tout le pouvoir au salariés » ne peut qu’écarter du large Front antifasciste, patriotique, populaire et écologiste indispensable pour sortir la France de l’UE-OTAN, nationaliser les secteurs-clés de l’économie et engager pour du bon la lutte révolutionnaire pour le socialisme.
Du rôle dirigeant de la classe ouvrière, son organisation et son rassemblement
Ne confondons pas en effet deux choses qui s’articulent: la nécessité d’un large rassemblement populaire dépassant les limites du prolétariat proprement dit et englobant certains milieux de la petite bourgeoisie, et le RÔLE DIRIGEANT, dans ce rassemblement, Y COMPRIS AU SEIN DU « SALARIAT » lui-même, de la classe ouvrière qui, pour cela, a précisément besoin d’un parti bien à elle, d’un parti communiste de combat, d’un parti franchement communiste ne « jouant » pas avec les mots d’ordre du léninisme pour des raisons bassement publicitaires, mais pratiquant l’analyse marxiste-léniniste de la société pour éclairer son combat sérieux, réellement au service des travailleurs, du peuple et de la nation.
Dernier point qu’ignore le slogan aussi faux que racoleur du New Communist Party: dans la perspective du passage de la France au socialisme, autant il faudra reconstruire l’économie productive (industrielle et agricole) détruite par Maastricht, autant il faudra réduire l’espace délétère de ce capitalisme parasitaire, massivement lié à la financiarisation des activités et à l’exportation impérialiste des capitaux, et qui rime avec l’hypertrophie de la « com », de la « pub », du tourisme friqué. Un « capitalisme de la séduction » dont Michel Clouscard a montré le lien qui l’attache à l’impérialisme et qui fait objectivement des « bobos », ces salariés privilégiés des « métropoles » (massivement européistes, globishisants, « postnationaux », atlantistes et pseudo-écolos) des « métropoles ». Lesquelles ne construisent plus notre pays, mais au contraire le détruisent, le regard en permanence tourné vers les dernières modes idéologiques en provenance des « States », tout en appuyant d’avance, et avec enthousiasme, toutes les ingérences et guerres impérialistes menées au nom de « valeurs » humanistes dévoyées. N’est-il pas clair en effet que le consumérisme effréné de ces catégories pseudo-écologistes, auxquelles il serait suicidaire d’abandonner le combat environnemental – est incompatible avec les exigences d’un nouveau développement économique planifié appropriant rationnellement l’essor des forces productives à la satisfaction des besoins de tous dans le respect des ressources naturelles?
Comme on le voit, ce n’est pas pour une, mais pour vingt raisons que le slogan porté par Fabien Roussel est impropre à unir la classe ouvrière et à faire d’elle le coeur du rassemblement pour changer vraiment. Ce n’est pas d’un « roussellement » de com « new look » et de néo-léninisme bidon qu’a besoin le communisme français pour reconstruire son parti de combat, c’est d’une alternative rouge et tricolore portée par des militants franchement léninistes sachant marcher à contre-courant de l’idéologie dominante et de ses modes débilitantes.
*Ce Lénine que le PCF, rappelons-le, a viré de ses références statutaires depuis 1979…