Effacer jusqu’au nom même de communisme, voilà la tâche urgente des réactionnaires de tous pays, parallèlement à la casse accélérée des conquêtes sociales de la Révolution ou de la classe révolutionnaire.
En France, l’avenue Jacques Duclos à Châtillon, les noms de résistants communistes au Plessis-Robinson, la place Georges Marchais à Villejuif…
En Pologne, Edward Gierek…dans l’Ukraine fasciste du post-Maïdan, les noms des dirigeants de l’URSS, le buste de Joukov…
Mais les amateurs d’alpinisme et de montagne se sont peut-être aperçus de la difficulté à localiser certains points culminants de l’ex-URSS, situés dans les républiques d’Asie centrale, où se situent bon nombre de 7000, appréciés des alpinistes. Bon, les alpinistes persistent à les appeler par le nom soviétique, mais sur les cartes, plus moyen de les localiser : quel progrès !
Alors faisons le point …
Le point culminant de l’URSS fut le Pic du Communisme ( 7495 m, Tadjikistan), vaincu d’abord en 1933 par le plus fameux des alpinistes soviétiques, Evgueni Abalakov ( qui a donné son nom à un ancrage par perçage d’une lunule dans la glace), rebaptisé dès 1998 Pic Samani, le fondateur de la dynastie des Samanides en 874 : il s’agit donc bien dans cette débaptisation d’une volonté de restauration, remontant à une soi-disant idéale société moyenâgeuse.
De 1932 à 1962, il fut le Pic Staline ( dont la suprématie sur le Pic Lénine fut découverte en 1932).
Les alpinistes l’appellent encore Pic du Communisme, notamment les Russes.
Le Pic Lénine ( 7134 m, Tadjikistan) ( considéré jusqu’en 1932 comme le point culminant de l’URSS), a été débaptisé en 2006 et rebaptisé Abu Alis Ibn Sina ( Avicenne). Il fallait donc un nom bien prestigieux pour tenter d’effacer celui de Lénine.
Néanmoins, encore une fois, pour les alpinistes, il reste le Pic Lénine : allez donc dire que vous avez gravi le Mont Avicenne et puis demandez donc sa localisation.
L’alphabétisation du Tadjikistan – pays quasiment illettré avant la révolution- s’est effectuée dès la victoire des Bolchéviques et en quelques années ( 80% très rapidement)… sans doute un crime du communisme. C’est assez cocasse et hypocrite de choisir le nom d’un lettré pour tenter d’effacer celui de Lénine, qui était non seulement lettré, mais a agi pour construire une société où l’Éducation de tous et de toutes a tenu la plus grande part et distingue le socialisme du capitalisme.
Même le Pic Pobedy ( Pic de la Victoire, , 7439 m , Kirghizstan, renommé dès 1943 en l’honneur de la Victoire de Stalingrad ; auparavant, c’était le Pic Komsomol) a été rebaptisé Jengish Chokusu ( et Tomur Peak ( Pic de Fer en ouïghour ) par les Anglais).
Jengish Chokusu signifie « indépendance » … une indépendance qui bafoue donc une victoire décisive sur la barbarie nazie … très intéressant. La plupart des expéditions de ce difficile et dangereux sommet reste le fait d’alpinistes russes. Il a d’abord été gravi par l’autre frère Abalakov, Vitaly, en 1956. En 1977, une cordée chinoise gravit la face Sud, en laissant entendre qu’elle réalisait une première…
Le Pic Korjenevskoï ( Tadjikistan), lui, n’a pas été débaptisé : mais c’est le géographe russe qui l’a identifié et nommé en l’honneur de sa femme.
Et le célèbre Khan Tengri ( Kazakhstan) non plus … mais il a un nom local…( Roi-Paradis).
La Montagne est depuis longtemps un enjeu idéologique impérialiste : le cas le plus fameux est celui de l’Eigerwand : la Face Nord de l’Eiger ( une paroi de 1600m en Suisse bernoise). Les nazis y ont triomphé en 1938 avec une double cordée austro-allemande : la cordée de l’Anschluss (pour la presse occidentale). Kasparek et Harrer : le « précepteur » du Dalaï Lama, l’auteur de « 7 ans au Tibet » pour l’Autriche et Heckmaier et Vörg pour le Reich : la race aryenne expliquerait cet exploit …
La deuxième ascension, en 1947, juste après la guerre, a été le fait de Lionel Terray et Louis Lachenal : sorte de revanche par deux alpinistes pourtant pas aryens…
Déjà le Pic Everest a été nommé en 1865 en l’honneur du chef du service Survey of India, le service de mesures trigonométriques des montagnes sous la Colonisation britannique. L’Empire colon utilisait des espions indiens, qui sous couvert de mesurer les montagnes, espionnaient pour la Couronne, afin de se prévenir celle-ci d’éventuelles rebellions populaires.
Il porte d’autres noms, officiellement…
Il fut d’abord désigné Pic XV (on ignorait qu’il culminât si haut). Il est le Chomolungma ( Déesse mère de la Terre) pour les Tibétains …peut-être pas pour tous. Et Sagamartha ( Tête de l’Océan ) pour les Népalais, moins portés sur le religieux.