D’excellents amis du PCF et de dirigeants de la CGT, voire de la F.I., se prononcent pour que la France sorte de l’OTAN, qu’ils voient à juste titre comme une machine de guerre états-unienne. Mais ces mêmes camarades incendient le PRCF parce qu’il veut sortir de l’UE alors que, selon eux, il faut la changer du dedans. Position proprement absurde. En effet, l’UE se déclare elle-même « partenaire stratégique de l’OTAN ». Partenaire stratégique, cela signifie en clair « à la vie à la mort » (c’est la différence avec une alliance tactique, donc provisoire). Les pays de l’Est qui voulurent s’affilier à l’UE durent même préalablement solliciter leur adhésion… à l’OTAN. Bref, si l’UE et l’OTAN sont statutairement inséparables, qu’on nous explique donc un peu, pour voir, comment la France pourrait quitter l’OTAN sans quitter l’UE ? Alors, illogisme caractérisé, mauvaise foi désespérante ou… refus de combattre réellement l’OTAN ?
Les mêmes camarades nous disent aussi qu’ils veulent « changer l’UE du dedans » et que pour cela, il faut d’abord changer les gouvernements nationaux. En clair que l’UE n’est pas l’obstacle rédhibitoire au changement, que ce sont les gouvernements nationaux qu’il faut d’abord virer tout en restant dans l’UE et dans l’euro. Sauf que…
<![if !supportLists]>a) <![endif]>Depuis au moins le Traité de Maastricht, tous les traités européens reprennent la phrase qui définit l’UE comme « une économie de marché ouverte sur le monde où la concurrence est libre et non faussée ». Bref, comme une économie capitaliste, comme une économie capitaliste néolibérale et mondialement libre-échangiste (bienvenue au CETA et au TAFTA !) refusant toute forme de protection douanière, comme une économie capitaliste néolibérale interdisant toute forme de protectionnisme et stipulant le démantèlement et la privatisation des services publics, qualifiés de « monopoles ». Et bien évidemment, c’est ce qui se passe avec la casse de la SNCF, de la poste, d’EDF, etc. Car les capitalistes qui ont signé ces traités sont logiques et cohérents, EUX !
<![if !supportLists]>b) <![endif]>Pour changer les traités européens, il faut l’unanimité des 27 États ; il faut donc que la gauche, et plus encore, la vraie gauche, gagnent 27 pays à la fois. Rappelons au passage que lorsque, brièvement, les douze États européens qui constituaient l’Europe institutionnelle à l’époque ont eu en même temps… douze gouvernements socialistes, l’UE n’a pas dévié d’un pouce de sa politique néolibérale. Ce sont au contraire les gouvernements « de gauche » qui se sont alignés sur les traités, Mitterrand en tête, puis Jospin (les deux fois avec des gouvernements à participation « communiste »). Tout récemment on a encore eu l’exemple parlant du premier ministre grec Tsipras, un homme de la « gauche radicale » qui, non seulement a renié son programme socialiste pour rester dans l’UE, mais qui en est actuellement, toujours pour rester à tout prix dans l’UE-euro, à limiter le droit de grève dans son pays.
Bref, la prétendue « gauche radicale » euro-béate nous expliquent qu’ils changeront l’Europe le jour où tous les gouvernements seront dominés par la gauche de la gauche, et qu’ils décideront ensemble de changer les traités : ça rappelle la révolution permanente telle que la conçoivent les trotskistes : défense de construire le socialisme dans un seul pays, révolution mondiale sinon rien ! Donc, rien ! Camarades, d’ici à ce que la gauche de la gauche domine dans les dix pays de l’UE où les PC sont actuellement … interdits et où des fachos gouvernent, combien restera-t-il d’acquis sociaux, d’usines en état de marche, de services publics dans chacun de nos pays respectifs ? N’est-il pas clair que la politique du Frexit progressiste est mille fois plus réaliste que cet entêtement européiste qui ne promet l’Europe sociale pour 2076 que pour mieux LAISSER PASSER d’ici là le démontage total des acquis obtenus dans le cadre de nos nations respectives ?
Troisième preuve éclatante de leur désolant illogisme, les dirigeants du PCF nous expliquent que si ce parti a reculé, c’est parce qu’il a tardé à larguer le boulet du léninisme, de l’amitié avec l’URSS, de l’attachement à l’indépendance nationale et de sa conséquence… logique : le refus carré, cher à Duclos et à Marchais, de l’Europe capitaliste. Étrange tout de même : car tant que le PCF s’inspirait du marxisme-léninisme (viré des statuts en 1979, comme le temps passe !), tant que le camp socialiste contrebalançait l’impérialisme américain et contenait l’impérialisme allemand, tant que le Parti des Fusillés refusait l’Europe capitaliste et défendait le « produire en France », le PCF restait le premier parti de France (29 % à la Libération, 22,7% en 1967…). Et bizarrement, depuis que le PCF a largué tous ces prétendus « boulets » pour « s’élargir », se « rénover » et « rassembler largement », il a vu fondre ses effectifs, il est tombé à 2% des voix et jamais notre peuple n’a tant reculé socialement. Quant à la planète, quelque critique qu’on puisse faire au socialisme soviétique, elle va mille fois plus mal depuis que le « gentil » Gorby, applaudi par les eurocommunistes français, italiens et autres, a livré la Russie et l’Europe de l’Est à la contre-révolution et à la restauration capitaliste. Grande « novation », comme on voit, qui nous fait revenir à… avant 1917, voire, par certains aspects, à avant 1789, tant la restauration mondiale du capitalisme est porteuse de régressions !
Bref, camarades, je me permets de vous interpeller : en êtes-vous venus, pour justifier tous les écarts de vos directions par rapport à une ligne prolétarienne honnête, à nommer « dialectique » ou « novation » des contradictions logiques qui feraient sursauter un enfant de dix ans normalement conformé ?