QUI, en réalité, « nique la France » ? – par G. Gastaud
Les militants du PRCF combattent le délit de blasphème sous toutes ses formes et ils l’ont encore montré récemment en condamnant les ignobles attentats perpétrés à Paris par des fanatiques.
En France, pays de Rabelais et de Molière et de Descartes, de Diderot et de Voltaire, de Jaurès et de la loi laïque de 1905 séparant l’Etat des Eglises, les citoyens devraient être parfaitement libres de critiquer ou de moquer les religions et toutes les formes de sacré autoproclamé, pourvu qu’en sens inverse les citoyens qui adhèrent à tel ou tel type de sacré aient eux-mêmes le droit de répondre pacifiquement et démocratiquement en utilisant au besoin la polémique et la satire pour défendre leurs convictions. Tel est le vrai « sacré » républicain et laïque qui fait l’honneur de notre pays contrairement aux Etats cléricaux dans lesquels prédomine une religion d’Etat ou à ceux qui, comme les pays anglo-saxons, censurent la critique antireligieuse et qui inculquent aux enfants dès la maternelle le culte drapeau et l’hymne national. Notre sacré républicain est, ou plutôt devrait être, celui qui permet le rire et la dérision ; en fait, tous ceux qui veulent brider l’insolence et corseter le rire, font penser aux Inquisiteurs que fustige Le Nom de la rose, ce grand roman d’Umberto Eco…
C’est donc paradoxalement parce que nous aimons la France, parce que nous nous indignons qu’elle soit « niquée » de mille façons par le MEDEF, par l’U.E. du capital, par les gouvernements maastrichtiens qui se succèdent pour détruire les acquis du CNR et les conquêtes de 1789, parce que nous haïssons toutes les formes de communautarisme, de fanatisme, de cléricalisme, de racisme, de néocolonialisme et de nationalisme (cette contrefaçon haineuse du patriotisme vrai !) que nous considérons comme une atteinte à la France elle-même le fait de traîner en justice Saïd Zep et Saïd Bouamama. En effet, ces derniers sont inquiétés au seul motif qu’ils ont édité un disque où l’insolence revendiquée du titre « nique la France » est aussitôt explicitée par une parenthèse qui en précise la portée : la France « raciste, colonialiste, impérialiste ». Car cette anti-France est à nos yeux le contraire de la France « belle et rebelle » que nous aimons, celle des Sans Culottes que chantait l’hymne révolutionnaire de Rouget de Lisle ou cette « France des travailleurs » que célébrait Ferrat dans sa chanson « Ma France ».
En réalité, ceux qui « niquent la France » aujourd’hui, ce sont les capitalistes « français » qui ont expatrié 420 milliards d’euros dans les paradis fiscaux, qui délocalisent l’emploi ouvrier, qui ferment les services publics et privatisent la protection sociale, qui sacrifient la langue française au Business-English, qui substituent l’Europe des régions chère à Merkel à la République une et indivisible, qui salissent notre pays en l’associant à des entreprises impérialistes en Afrique, au Proche-Orient ou en Ukraine.
En conséquence nous appelons les autorités judiciaires à lever les poursuites grotesques contre les deux Saïd. Il est temps que revive en France l’esprit FRONDEUR de l’humanisme et des Lumières, l’esprit révolutionnaire des Soldats de l’An II, le « Merle moqueur » des Communards, l’esprit de résistance du CNR, car là est l’âme véritable de notre pays. Là est le véritable patriotisme, et non dans la mise en place d’une nouvelle chasse aux sorcières qui insulte les traditions du pays de Gavroche et la Liberté guidant le peuple.
Georges Gastaud, fils de Résistant, philosophe, auteur de la Lettre ouverte aux ‘bons Français’ qui assassinent la France, Temps des cerises, 2005.