Quand le dieu des actionnaires créa Monsieur Laurent Berger, il lui permit de porter de flamboyants gilets. Pourvu qu’ils ne fussent pas jaunes, c’est-à-dire emblématiques du courageux soulèvement de masse contre la précarisation de millions de travailleurs exploités, paupérisés et « ubérisés », véritables esclaves modernes.
Bon prince, le divin Démiurge permit cependant à Berger d’arborer la couleur jaune pourvu que ce fût celle des briseurs de grève spécialisés dans la trahison du mouvement ouvrier et dans le service hautement profitable du patronat.
Dans la foulée, Il l’autorisa à doter la CFDT, l’ex-« syndicat » gauchiste devenu le chouchou du MEDEF (il n’est pas si difficile de passer de l’anticommunisme de « gauche » à l’anticommunisme tout court…) d’un étendard rouge, l’emblème traditionnel du mouvement ouvrier. A condition toutefois que ce rouge, désormais mâtiné du jaune de la trahison, prenne la couleur de ces « révolutions oranges » qui, dans certains pays de l’Est, ont suicidairement livré la classe ouvrière (ukrainienne, géorgienne, etc.) à l’impitoyable Europe atlantique et supranationale.
Le Plan divin prescrivit aussi à Berger de se montrer excellent catholique : pourvu que ce ne fût pas à la manière des prêtres-ouvriers du Nord engagés dans le combat prolétarien* ni à l’imitation de la Théologie de la Libération latino-américaine, mais bien à la façon des dames patronnesses de jadis qui s’enfiévraient au seul mot de « Communards »** et pour lesquelles le « syndicalisme » s’est toujours résumé à la « généreuse » distribution aux « bons pauvres » de restes moisis… une fois que les banqueteurs du capital ont fini d’engouffrer les ortolans !
En un mot, ne confondons jamais, sous couvert d’on ne sait quel « syndicalisme rassemblé », l’actuel patron de la CFDT devenu président de la Confédération Européenne des Syndicats (la CFDT européenne) – avec un noble Gilet jaune affrontant la répression policière : car l’excellent homme qui a déjà poignardé dans le dos les défenseurs du Code du travail, du bac national, des indemnités chômage et du Statut des cheminots, et qui s’apprête maintenant à casser notre grève de masse pour les retraites, ne sera jamais au mieux qu’un Gilet rayé de l’illusoire « collaboration » des travailleurs avec ceux qui les exploitent : les capitalistes.
*La journaliste de Radio France qui présentait dernièrement Berger à l’antenne a rappelé qu’il « n’avait jamais travaillé de sa vie ». Saluons le courage de cette héroïne…
**Dame, il faut tout partager mais pas… la propriété des moyens de production !