Qui connait les faits de l’ingérence de la CIA – les services d’espionnage et d’action des Etats Unis – en France ? Un livre de Frédéric Charpier (La CIA en France) retrace une partie de cette histoire, le journaliste spécialiste de question de renseignement indique : « Pas moins de seize agences américaines tournent à plein régime, à Paris, aujourd’hui ».
Levant également le voire sur les agissement de la CIA en France de 1942 à nos jours, le militant gauliste Jean Luc Pujo des Clubs Penser la France expose dans un article publié par Politique Actu différents éléments de l’action des services d’espionnage américains en France.
La CIA en France : 1942-2017 – Par jean-Luc Pujo
La France – puissance économique, politique, militaire, diplomatique, culturelle, scientifique notamment spatiale – est une puissance convoitée. Pays stratège, la France est un des lieux au monde où se concentrent les réseaux d’influence les plus divers qui tentent de comprendre, de copier, de voler cette intelligence – parfois même d’influencer les choix stratégiques de notre pays. Tous les services secrets du monde entier ou presque sont implantés en France – Russes, Chinois, Algériens, Turcs, Allemands, Anglais, Israélien. Une des plus puissantes agences au monde, la CIA, ne manque pas à l’appel. Pour quoi faire ? Pour quelles actions ?
Nous allons tenter de relater – rapidement – l’histoire de l’agence américaine en France – son action, son influence – de 1942 à 1991 (I) pour essayer de comprendre la mutation géostratégique actuelle, à travers la mutation même du rôle de la CIA en France (II).
I – L’histoire de l’agence américaine en France – action & influence – 1942 à 1991
– Implantation de la CIA en Europe (Dès les années 30):
Il est communément admis que les services américains sont entrés en Europe par l’Italie, ce dès la période MUSSOLINIENNE (1925-1943).
Les Mafias italiennes ardemment combattues par ce régime fasciste ont demandé le secours de leurs cousins américains, qui avaient déjà établis de sérieuses relations avec les services secrets américains (pour l’anecdote, une partie du Plan CONDOR en Amérique du Sud a été exécutée par les mafias américaines).
Ainsi, les Mafias italiennes en guerre avec Mussolini ont pu trouver un concours précieux du côté américain.
A la libération, l’Italie est largement pénétrée par ses réseaux. On se souvient des liens entre la mafia et la Démocratie chrétienne. On ne s’étonnera pas de voir les bases américaines de l’OTAN trouver en Italie – notamment à Naples – un accueil sécure. C’est la terre de la Camorra.
Inutile ici de s’attarder sur le séjour à Naples de Lucky Luciano (Cosa nostra américaine), puis la découverte de la Loge P2, les liens avec le Vatican contaminé et le rôle des réseaux opérationnel de la CIA qui, durant des décennies, vont fomenter attentats sous fausses bannières pour invalider la progression du parti communiste italien (PCI) et ainsi assurer la domination d’une démocratie chrétienne gangrénée.
Examinons si vous le voulez bien l’implantation en France.
– « L’Implantation en France »(1) :
La présence américaine en France résulte de l’action de l’OSS (Of Spies and Stratagem – recueil de renseignements et organisation d’opérations). Créé en 1942, l’OSS est une sorte de légion étrangère, qui recrute Américains, Turcs, Français, Lituaniens, Allemands, des prêtres, des Francs-maçons, des libertaires et des anciens de brigades internationales dans la lutte antinazies.
Les cellules OSS implantées en Europe offrent un réel outil qui – à la Libération– aurait pu jouer un rôle essentiel notamment dans le projet d’administration de la France par les américains – le projet AMGOT(2) – auquel s’opposa fermement le général de Gaulle.
Si l’OSS disparait en 1945, Truman approuve en 1946, la création du Central Intelligence Group (CIG) dans un contexte naissant de guerre froide.
Le 26 juillet 1947, TRUMAN ratifie le National Security Act qui institue le Conseil national de sécurité, coordonne le secrétariat à la Défense et la CIA, qui remplace le CIG en septembre 1947.
Ainsi, à Paris, l’ancien chef de poste du CIG – Philip Clark Horton – devient le nouveau chef de poste de la CIA.
Pour l’anecdote, en 1948, à la suite du blocus de Berlin, un autre service américain ultrasecret multiplie les cellules en France : l’OPC (Office of Policy Coordination) qui rejoindra la CIA en 1952.
« CIA, OPC, département d’Etat, Département de la Défense, Policy Planning Staff, Conseil national de sécurité et d’administration du plan Marshall travaillent mains dans la mains » précise le spécialiste Frédéric Charpier.
Mieux, les cellules secrètes issues de la Résistance vont être maintenues : les cellules dormantes « Stay behind » et le réseau « Gladio » vont – durant toute la guerre froide – mener des opérations clandestines en Europe et en France contre le nouvel ennemi : le communisme, mais pas que.
1) Les actions en France (métropole) :
Justement quelles ont été les actions menées en France ? Dans quel but ?
Le nouvel objectif des réseaux américains en France vise très directement à contrer l’influence de l’URSS et du communisme, qui, progresse nettement dans le pays.
Pour cela, la CIA et ses officines vont mener des actions très nombreuses, financer de nombreux projets avec – il faut le reconnaitre un réel succès.
Concernant :
La lutte contre le Parti communiste français et contre la CGT(3)(4);
- C’est le travail de Irving Brown, ancien de l’OSS, qui à partir de l’Américan Federation Labor (AFL) va travailler à défaire l’emprise du communisme sur le monde du travail ;
- C’est Brown qui va travailler à fonder la CGT-Force ouvrière pour torpiller la CGT française comme il travaillera à torpiller son homologue italienne, la CGIL ;
- De même, la Fédération Syndicale Mondiale (FSM), fondée en 1945 à Paris, est prise pour cible par l’AFL américaine qui crée le FTUC, organisation syndicale mondiale « Libre » ;
- C’est bien sûr le Financement d’autres centrales syndicales : CFTC, CGC (…)
- C’est le Plan « Cloven »(5) – 3 axes de combats : s’attaquer aux positions du PC dans l’enseignement et les universités ; réduire les postes de responsabilités occupés par des communistes dans l’administration ; réduire l’influence du parti dans le mouvement syndical en usant de mesures discriminatoires envers les entreprises qui tolèrent les syndicats communistes.
La CIA travaille aussi au financement des multiples revues intellectuelles(6) et de la presse – quelques exemples(7) :
- Crise orchestrée au journal « Le Monde » en 1949 entre atlantiste et neutralistes ;
- La CIA lance la revue intellectuelle « Preuves » à Paris, qui défend les écrivains antisoviétiques dans l’esprit du « Manifeste pour la Liberté » lancé à Berlin en 1950 ;
- Dans ce contexte est également financé la naissance à Paris du « New-York Herald tribune » ;
- Il faut noter que plusieurs journaux français ne subsistent déjà que grâce à la manne américaine via le plan Marshall : c’est le cas notamment du journal « Le Populaire », journal de la SFIO;
C’est aussi le Financement de partis et mouvement politiques :
- Création de l’association « Paix et Liberté », réunissant des membres du MRP, de la SFIO, des gaullistes…
- « le comité français pour une Europe libre » avec Paul Devinat (ami d’Allen Dulles n°2 de la CIA-monde);
- C’est l’encouragement de la cause fédéraliste européenne(8) à travers :
- Le National Committee for free Europe ;
- L’Union paneuropéenne;
- Le Free Europe Committee;
- Le tout financé par les fondations américaines : Carnegie, Ford et Rockefeller ;
C’est le Financement de manifestations culturelles qui vont irradier le cinéma, la chanson, la littérature…
- Nous pensons au financement du « Centre des hautes études américaines » ;
Face à cette avalanche d’actions et de financements américains, le premier réflexe est de conclure : les Etats-Unis font « leur job » : contrer l’ennemi communiste. Soit.
Mais que dire alors quand cette action américaine consiste à contrer les intérêts français même, y compris sur le sol national ?
Justement, nous assistons sur plusieurs terrains à un changement des relations avec la France. A la coopération entre services français et américains succède une concurrence mortelle.
2) L’Indochine, tout d’abord. A Saïgon, la CIA enfonce la France(9) :
Saigon était tenu par les Français grâce au dénommé « Bay Viên » qui avec ses hommes tenait le delta du Mékong. Grâce à lui les services français maitrisaient la sécurité sur la ville voisine de Cholon, la route stratégique de Cap-Saint-Jacques à Saigon, route de l’opium. Les américains – le colonel Lansdale et le chef de poste de la CIA – ne vont pas hésiter à attaquer Bay Vien et écraser ses hommes en lançant les sud vietnamiens contre lui, défiant ainsi les français. Saïgon plonge dans l’anarchie. En Mai 1955, la France et les Etats-Unis rompent l’alliance conclue en Indochine. Les accords de Genève sont morts.
Pour quel résultat ?
20 ans plus tard, le Vietnam se réunifiera aux mains des communistes. 2 millions de Vietnamiens seront tués. 58000 GI américains.
3) L’Algérie ensuite où le rôle de la CIA est loin d’être négligeable(10).
La présence américaine en Afrique du nord – depuis le débarquement de novembre 1942 – n’a jamais cessé : le pétrole algérien les intéresse beaucoup.
L’ombre des services américains plane sur la révolte de Sétif qui en quatre jours d’émeutes en mai 1945, a fait des centaines de morts chez les européens, et entrainé une répression féroce du côté musulman.
Les rapports des services français sont sans ambigüité sur la participation des services américains dans les soulèvements dans le Constantinois, à Sétif, et à Guelma.
Les liens avec les rebelles algériens sont tels que Jacques Soustelle convoque – en août 1955 – le Consul Clark et dénonce leur implication « comme il l’ont fait en Indochine avec l’opération « Brotherhood », chapeautée par Lansdale ! »
« On se plaint même à Paris des agissements inamicaux en Algérie de sociétés américaines comme la Standard Oil of New Jersey, la firme Coca-Cola et des missions protestantes qui appuient les milieux nationalistes » note Frédéric Charpier.
Même le syndicaliste américain, Irvin Brown de l’AFL–CIO, aide à la création de l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA) comme il l’a fait avec les syndicats tunisiens.
La IV république à bout de souffle, les Américains craignent un nouveau Front populaire en France.
Les réseaux CIA et ceux du Vatican vont alors assurer la promotion de De Gaulle et son retour au pouvoir en 1958 :
Conformément au protocole secret du traité OTAN, des émissaires américains viennent informer le président du Conseil Félix Gaillard le 11 avril 1958, à Matignon, du plan élaboré par le « National Security Council » en 1957, autorisé par le général Eisenhower.
L’opération comporte notamment l’intervention des réseaux « stay-behind »;
De nombreuses personnalités seront associées à cette opération notamment Geoffroy Chodron de Courcel(11) – fondateur de la Cité catholique et représentant en France de « l’Opus dei » – alors secrétaire général permanent de la Défense nationale.
Foccart assure la coordination avec le général de Gaulle.
C’est dans ce contexte que MASSU et SALAN proclament le Comité de Salut public au Balcon du palais du Gouvernement à Alger.
Le 15 mai 1958, De Gaulle déclare « je me tiens prêt à assumer les pouvoirs de la République ».
Soustelle – ancien des services secrets de la France libre – rejoint Alger. Dassault finance. Le général Chassin – OTAN – coordonne un mystérieux « Comité national pour l’indépendance ».
Des Comités secrets de Salut public se forment à Lyon, Bordeaux, La Rochelle, Nantes, Marseille (Charles Pasqua)… un peu partout en France.
Les réseaux GLADIO – dont le chef de zone est le fameux François Durand de Grossouvre – sont à l’action.
Le 19 mai, la conférence de presse du général De Gaulle est encadrée par des Stay-Behind, comme la manifestation aux Champs Elysées quelques jours plus tôt.
Le président Coty joint Colombey-les-Deux-Eglises et De Gaulle annonce le 27 mai : « J’ai entamée hier le processus régulier nécessaire à l’établissement d’un gouvernement républicain… »
De Gaulle arrive ainsi au pouvoir porté par les réseaux atlantistes.
Pourquoi alors autant d’ingratitude ?
En effet, après cette phase de promotion, une lutte acharnée va avoir lieu contre De Gaulle.
Il faut dire qu’en 1958, le retour de De Gaule annonce rapidement la fin de la docilité-servilité française.
A l’exception de l’aventure de Suez en 1956, la France a toujours été une alliée obéissante de Bidault à Pleven, de Pinay (Opus Dei) à Mollet (Groupe Bilderberg).
La crainte des américains est alors de voir la France de De Gaulle quitter l’OTAN.
La CIA va alors soutenir l’OAS. Les réseaux « Stay Behind » vont travailler à l’hypothèse d’un remplacement de De Gaulle(12).
Le général de Gaulle échappera à plusieurs tentatives d’assassinat.
Nous pourrions développer à souhait, je terminerai sur cette anecdote concernant les bases OTAN en France, qui bénéficient du principe d’extraterritorialité qui menace la France.
En 1958, le général de Gaulle demanda à l’ambassadeur des Etats-Unis en France, la communication de la carte des implantations des missiles OTAN en France : celui-ci refusa de lui répondre au nom de la sécurité OTAN ! On peut imaginer quelle fut la colère du général de Gaulle.
Assassiné ou chassé du pouvoir ? Mai 68 arrive à point. Immense barnum estudiantin, largement organisé par les réseaux trotskistes, eux-mêmes historiquement liés à la CIA – Mai 68 va assurer le basculement du régime.
Il faut dire que De Gaulle a quitté le commandement intégré de l’OTAN en 1966, et – vexation suprême pour les américains – il a fait fermer les bases OTAN en France -, comme d’ailleurs, il décrète l’embargo sur les livraisons d’armes à destination d’Israël après la guerre des six jours en 1967.
Trop, c’est trop !
POMPIDOU arrive au pouvoir. Les vedettes de CHERBOURG sous embargo sont tout de suite subtilisées innocemment par Israël.
POMPIDOU, fondé de pouvoir de la Banque Rothschild, peut alors accompagner le bouleversement monétaire en cours avec l’abandon de la convertibilité dollar/or ( aout 1971 -fin de Brettons-Wood), puis modifier substantiellement les statuts de la Banque de France (Loi du 3 janvier 1973).
La France post-gaulliste ne résiste plus à l’impérium états-unien.
Si quelques velléités de résistance (MITTERRAND – CHIRAC) peuvent être constatées, « la France de nos jours ne peut plus guère que « passer entre les gouttes » » (confesse Mitterrand à Chevènement) quand elle ne s’aligne pas tout simplement avec une présidence atlantiste (avec SARKOZY l’américain) ou pleine de louvoiements (avec François HOLLANDE(13)) ;
La CIA plus que jamais présente et agissante – aujourd’hui en France – travaille cependant à des objectifs nouveaux.
PARTIE II – La mutation actuelle de la CIA illustre une des clés du basculement mondial actuel. Actions de la CIA en France – 1991 à 2017.
En effet, à compter de la chute de l’URSS (26 décembre 1991), nous avons peu à peu changé de monde.
La structuration des relations internationales opérées autour des Etats souverains et des organisations internationales (ex : l’ONU) caractérise notre monde depuis le XVIIème siècle, dans la tradition classique Westphalienne.
Nous assistons depuis les années « 90 » à un véritable bouleversement caractérisé par le surgissement d’acteurs de types nouveaux(14) – institutions financière et bancaire mondiale (Goldman Sachs…), groupes agroalimentaire, chimique et pharmaceutique mondiaux (Bayer, Monsanto, Google santé…), réseaux d’influence mondiaux (Groupe Bilderberg – Le siècle…), compagnies militaires privées (Blackwater, Dyncorp …) – qui concurrencent les Etats et les organisations interétatiques.
Nous assistons actuellement à la tentative de prise de pouvoir de cette « gouvernance » mondial et de ses cercles secrets(15).
Cette tentative de prise de pouvoir peut être datée : les attentats fabriqués du 11 septembre 2001 sur le WTC à New-York et Washington sont le signe de ce basculement (cf. rapport déclassifié des 28 pages en juillet 2016 qui révèle notamment l’implication de la CIA et du FBI)(16)-(17)
Cette lutte mondiale se joue à tous les niveaux, au sein des plus grandes organisations internationales, au sein de chaque Etat stratège, comme les Etats-Unis, Israël, la France …
La CIA, le FBI, le Pentagone, le Mossad, la DCRI, la DGSE… sont ainsi traversés par des tensions internes qui témoignent de cet affrontement titanesque(18).
D’autres lieux de pouvoirs sont concernés : Les grandes obédiences maçonniques et le Vatican.
Dans un tel contexte d’affrontement, comment appréhender le rôle et l’action de la CIA en France ?
Quels sont les nouveaux enjeux et les nouveaux objectifs de cette agence ? Comment la France vit-elle ces bouleversements ?
Dans cette partie – qui touche à notre actualité la plus récente qui n’a pas encore été appréhendée ni par les historiens ni par les géopoliticiens – vous me permettrez de ne pas raisonner par « affirmation » mais par « questionnement » ; ce, à partir de plusieurs évènements.
– La CIA en banlieue : Pourquoi l’ambassade des Etats-Unis intervient-elle dans les banlieues françaises ? Pourquoi des ponts d’or vers les States sont offerts à une jeunesse issue de l’immigration – sélectionnée par qui ? pour quoi faire ?(19)(20)
– Pourquoi les programmes Young leaders sélectionnent de jeunes français prometteurs et assurent leur surreprésentation au sein des deniers gouvernements français ?
– Qui assure les livraisons d’armements en banlieue (notamment les fameuses livraisons de pistolets mitrailleurs SCORPIO tchèques) alors que le volume de ces livraisons ne laisse pas de doute aux spécialistes : des services étrangers sont responsables de ces livraisons ?
– Pourquoi nos gouvernements réagissent si peu quand nos entreprises sont pillées et démantelées par les sociétés américaines ? Je pense notamment aux derniers affrontements industriels (Thomson, Alcatel…) ; je pense aussi aux lourdes sanctions financières infligées par les autorités américaines au secteur bancaire français (notamment à BNP-PARIBAS…) ;
– Qui a organisé les trois semaines d’émeutes en banlieue en 2005 ? Dans quels buts ? J’ai, encore en tête, les confidences d’un Préfet de banlieue – une des plus importantes en France – me disant qu’il avait été bien seul quand certaines des nuits les plus chaudes, personne ni place Beauvau, ni à Matignon, ni à l’Elysée ne le prenait plus au téléphone – Pourquoi ce vide organisé du pouvoir ?
– Pourquoi nos gouvernements tolèrent – si ce n’est parce qu’ils ne peuvent plus rien faire – les écoutes généralisées de la NSA sur les centres de pouvoir névralgiques français (Matignon, l’Elysée) et sur nos principales ambassades ?
– Pourquoi a-t-on organisée – sous Nicolas Sarkozy – la déstabilisation de tout le renseignement Français en fusionnant dans les pires conditions DST et RG, au sein d’une DCRI, considérée – par les spécialistes – comme une véritable « armée mexicaine » à Levallois-Perret ?
– Pourquoi assiste-t-on à une concurrence dramatique entre DGSE et DCRI, (notamment lors des Affaires Merah et Affaires Kouachi) ce qui ravie la CIA, jouant l’arbitre ?
– Pourquoi tolère-t-on l’intervention de société étrangère de technologie sécuritaire en France (surtout israélienne, américaine et britannique) alors que les enjeux stratégiques aurait dû imposer des technologies uniquement nationales ?
– Comment dans un tel contexte, a-t-on pu tolérer que la France réintègre le commandement militaire de l’OTAN (avec Nicolas Sarkozy(21)) et bénéficie – en janvier 2016 – de l’autorisation de réinstaller ses bases en France (avec Hollande-Fabius-Valls)(22) ? De Gaulle doit se retourner dans sa tombe(23).
– La vague terroriste 2015-2016 qui a frappé la France a-t-elle été simplement exécutée par les auteurs qui nous ont été présentés ? pour les objectifs affichés ? ou avons-nous assisté à une vague d’attentat visant notre pays comme un avertissement adressé à la France ? Par qui ? Dans quels buts ?(24)
– Pourquoi le milliardaire américain SOROS a-t-il assuré le financement d’association et d’ONG chargées d’organiser la vague migratoire de plus d’un million de personnes qui ont déferlé en Europe ces derniers 20 mois ? Dans quel but ?
– Pourquoi le gouvernement français a-t-il refusé l’ASILE à Edouard SNOWDEN, ce lanceur d’alerte menacé par les autorités américaines ?(25)
– Pourquoi le gouvernement français a-t-il interdit à l’avion du Président Morales (Bolivie) de survoler la France ? sur injonction de qui ?
Toutes ces questions restent sans réponse mais illustre un type de questionnement.
De nombreux signes attestent que la France est sous l’emprise de choix qui lui échappent.
Il est à craindre que toute tentative d’émancipation encourage à sanctionner la France, et ce de la pire des façons qui soit.
Sous Nicolas Sarkozy – dont la politique ne souffrait aucune ambigüité envers les nouveaux réseaux de la gouvernance mondiale – la France n’a été frappé par aucun attentat.
Faut-il alors accepter cette paix qu’on appelle soumission ?
Conclusion
En conclusion, nous pouvons constater que les services américains – présents en France depuis au moins les années 40 – ont d’abord mené une politique efficace de containement vis-à-vis des forces communistes et de promotion stratégique des intérêts américains.
Si les services français et leurs homologues américains ont partagé les mêmes objectifs et développé des actions de concert, ils sont rapidement entrés en conflit.
Les Etats-Unis n’ont pas hésité à bousculer les intérêts français partout où cela les avantageait, usant des moyens les plus classiques (influence, entrisme) comme les plus abjects (opérations militaires dures, espionnage et sabotage).
Placée sous influence, la France a d’abord résisté puis – petit à petit – elle a basculé récemment dans une soumission quasi-totale, au moment même où la CIA subissait une mutation importante au service d’objectifs nouveaux.
En effet, depuis les années « 90 », un nouvel acteur mondial tente de s’imposer qui n’a plus rien à voir avec les intérêts américains – ou anglosaxon – à proprement parlé.
Il s’agit d’un acteur mondial qui définit chaque Etat comme un obstacle à son objectif d’administration mondiale.
Ainsi les Etats-Nations et leur centre d’intérêts névralgique – l’Etat profond – affrontent un hégémon d’un type nouveau.
Celui-ci prend prétexte de l’incapacité des Etats à régler des problèmes devenus planétaires pour tenter de leur substituer des autorités et agences libres de tout contrôle étatique.
Ces acteurs mondiaux vantent des programmes mirifiques – Environnement, santé, alimentation et agroalimentaires, biotechnologie, sécurité – qui, d’ores et déjà, s’annoncent inaccessibles à une très grande partie de l’Humanité.
Cet hégémon moderne parle également de hiérarchisation des humanités, de sélections, et de régulation démographique.
La CIA a choisi son camp, opposé à celui du Pentagone, centré sur « l’Etat profond » américain.
Particulièrement inquiétant, ce projet politique de « gouvernement mondial » est en train de faire naitre de profondes résistances.
Nous assistons actuellement à des revirements politiques spectaculaires :
– Le BREXIT : la City de Londres affrontant une autre partie de la City;
– L’élection de Donald TRUMP : le Pentagone soutenant avec succès son champion contre la candidate de la CIA – d’une partie de la CIA – Hillary Clinton …
– En Israël même, la lutte entre Netanyahou (et les religieux) et à Tzipi Livni ;
– En Turquie, pays stratège qui est en train de payer fort cher son basculement hors l’OTAN.
Une véritable lutte de titan est en train d’avoir lieu.
La France n’échappe pas à cet affrontement surtout en période d’élection présidentielle.
Aujourd’hui dirigée par des tenants d’un ordre mondialiste, entièrement soumise à l’OTAN et à la CIA, la France va-t-elle connaître le sort de la Grande Bretagne, des Etats-Unis ?
Inévitablement, les services étrangers vont tenter de peser sur cette élection car le possible basculement de la France aura une résonnance mondiale.
Quels sera la forme de ce basculement ? Qui peut l’incarner ?
Cette question reste ouverte.
Quoi qu’il arrive, il est peu probable que nous vivions cet affrontement dans le calme.
Derrière une certaine idée de la démocratie, c’est d’une certaine idée de l’Homme dont il s’agit.
En un mot, et pour ce qui nous concerne – militants républicains et humanistes français – nous devons nous interroger.
N’est-il pas temps de faire – une fois de plus – « le pari de la France » qui, plus que jamais, reste un magnifique pari sur l’Homme.
Jean-Luc PUJO*
[Présidentielle 2017 : Notes sur exposé oral – cercles Alpha – Béziers en Languedoc]
le 2 janvier 2017
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* Jean-Luc Pujo est président des Clubs « Penser la France », organisation française qui milite pour « Sortir de l’OTAN, sortir de l’UE et sortir de l’Euro » et travaille à une action de refondation politique « Pour une nouveau Conseil National de la Résistance » (CNR) réunissant communistes authentiques et gaullistes authentiques. Romancier, essayiste, il est également rédacteur en chef du journal en ligne « Politique-actu.com » qui traite de géopolitique, de philosophie, d’économie, d’histoire et de politique.
[Merci à Jean-Marc pour sa relecture précieuse]
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(1) « La CIA en France : 60 ans d’ingérence dans les affaires françaises » – Frédéric CHARPIER – Seuil – janvier 2008 ;
(2) « Quand les Américains voulaient gouverner la France » par Annie Lacroix-Riz (historienne) – Le monde diplomatique – mai 2003 – https://www.monde-diplomatique.fr/2003/05/LACROIX_RIZ/10168
(3) « La CIA en France (…) p.40 ;
(4) « AFL-CIO’s dark past » Harry Kelber – 2004 ;
(5) David Bruce, ambassadeur des Etats-Unis à Paris, un des concepteurs du plan Cloven est ami de René Pleven et de … jean Monnet ;
(6) « La CIA en France : 60 ans d’ingérence dans les affaires françaises » – Frédéric CHARPIER – « Les intellectuels et la CIA » p. 52 ;
(7) On peut ici rajouter le « Reader’s Digest » (lien de la revue avec d’anciens dirigeants de la CIA tels que Paul Henze (« La Fabrication du consentement. De la propagande médiatique en démocratie », Noam Chomsky et Edward Herman, Agone, 2008) [Merci Jean-Marc]
(8) Ibid « La CIA et les comités européens – p. 168 ;
(9) « La CIA en France : 60 ans d’ingérence dans les affaires françaises » – La bataille de Saïgon – CIA contre le 2ème bureau » p. 186 ;
(10) Ibid, « Les circuits de la CIA au Maghreb français » p.204 ;
(11) Parent de Bernadette Chirac ;
(12) Cf. rapport Sécurité suisse sur le lien entre CIA et OAS [Merci Jean-Marc];
(13) « La France et le Grand Echiquier – considérations sur les Attentats de Paris » par jean-Luc PUJO, « Penser la France » – samedi 21 novembre 2015 – http://www.politique-actu.com/actualite/france-grand-echiquier-considerations-attentats-paris-jean-pujo-president-clubs-penser-france/1504548/
(14) « Les nouveaux empires » Anne Salmon (2010) ;
(15) Gouvernance mondiale : sur l’architecture ésotérique complexe, la codification extrêmement élaborée des rituels pratiqués par les cercles secrets de la gouvernance mondiale, cf. les travaux de jean-luc Pujo (A paraître)
(16) « Les conséquences politiques des attentats fabriqués du 11 septembre 2001 » par Jean-Luc Pujo, « Penser la France » – 11 septembre 2010 – http://www.politique-actu.com/osons/attentats-11-septembre-2001-pujo/178638/
(17) Attentats du 11 septembre 2001 : les 28 pages déclassifiées du rapport du Congrès (juillet 2016) – http://www.politique-actu.com/dossier/attentats-septembre-2001-pages-declassifiees-rapport-congres-juillet-2016/1655468/
(18) « Il y a une CIA dans la CIA, un Mossad dans le Mossad… » pour reprendre une des fulgurances du militant si particulier, le rabbin Rav Haim Dynovisz [Merci Jean-Marc];
(19) La CIA recrute dans les banlieues françaises (II) : la SUITE grâce à WIKILEAK – janvier 2010
(20) La CIA recrute dans les banlieues françaises les futurs ennemis de la République (I)
http://www.politique-actu.com/osons/cia-banlieues-francaises-ennemis-france-republicaine/201303/
(21) « L’OTAN … Au vent mauvais ! » Jean-Luc Pujo – Le Sarkophage – novembre 2007 ;
http://www.politique-actu.com/debat/otan-de-gaulle/24/
(22) « OTAN : La FRANCE occupée » – Vous aimez l’OTAN? Vous allez adorer ! – Janvier 2016
(23) APPEL AUX PARLEMENTAIRES : « Refuser la réintégration de la France dans l’OTAN … » ! par Pierre Pranchère et l’Amiral Michel Debray – 29 mars 2016
(24) « La France et le Grand Echiquier – considérations sur les Attentats de Paris » par jean-Luc PUJO, Président des Clubs « Penser la France » – samedi 21 novembre 2015
(25) À partir du 6 juin 2013, Snowden rend publiques par l’intermédiaire des médias, notamment The Guardian et The Washington Post, des informations classées top-secrètes de la NSA concernant la captation des métadonnées des appels téléphoniques aux États-Unis, ainsi que les systèmes d’écoute sur internet des programmes de surveillance PRISM, XKEYSCORE, Boundless Informant et Bullrun du gouvernement américain et les programmes de surveillance TEMPORA, MUSCULAR et Optic Nerve du gouvernement britannique. Pour justifier ses révélations, il a indiqué que son« seul objectif est de dire au public ce qui est fait en son nom et ce qui est fait contre lui. ».
- « La CIA en France : 1942-2017» Par jean-Luc Pujo (Penser la France) – Janvier 2017 –
Quand la CIA finançait ses alliés anti-communistes FO, la SFIO et les pro-européens dans les années d’après guerre……
L’ingérence de la Central Intelligence Agency dans les affaires françaises depuis 60 ans est méconnue. Le livre du journaliste Frédéric Charpier « La CIA en France » (Le Seuil) lève un coin du voile…..
La Central Intelligence Agency, la principale agence de renseignements américaine, traîne une réputation sulfureuse. Et c’est souvent justifié. Depuis sa création dans le contexte de la guerre froide en 1947, elle n’a cessé d’espionner et d’intervenir, au nom des intérêts américains, aux quatre coins du monde. En France, ses ingérences sont encore méconnues. Et c’est bien le mérite du journaliste Frédéric Charpier de nous en dévoiler certains volets, dans un livre-enquête « La CIA en France, 60 ans d’ingérence dans les affaires françaises, (Le Seuil, sortie le 10 janvier) fourmillant de détails et de personnages parfois aussi inquiétants que pittoresques.
Hommes politiques, patrons, syndicalistes, intellectuels, journalistes : il est peu de milieux que les agents de la CIA en France n’aient tenté d’approcher, d’infiltrer, d’influencer de manière directe ou indirecte. Au nom de la lutte contre le communisme, ennemi suprême, les espions se sont mêlés de beaucoup de choses, souvent à tort et à travers, allant jusqu’à établir des plans secrets (le « Plan Cloven ») avec le gouvernement français en 1952 pour tenter de « liquider » le Parti communiste français.
Sans être toujours décisive, « l’ingérence » de la CIA a pu semer le trouble, déstabiliser des personnes, influencer des stratégies, financer des amis, mener une guerre clandestine, autant psychologique que politique. Le livre de Frédéric Charpier raconte quelques-unes de ces opérations clandestines, principalement celles des années d’après-guerre jusqu’aux années 70. Avec quelques jolis épisodes que vous dévoile Bakchich, en exclusivité et en plusieurs épisodes.
Un joli coup de coupe à Force ouvrière
- La Guerre froide bat son plein. L’URSS veut pousser ses pions en Europe, notamment en France et en Italie, où les partis communistes disposent de bases électorales et syndicales solides. Créée sur instruction du président américain Truman, la CIA entend bien contrer cette offensive. Elle envoie pour cela à Paris l’un de ses agents d’influence les plus actifs, Irving Brown, nommé officiellement délégué général pour l’Europe du puissant syndicat américain AFL (American federation of labor). C’est lui qui se charge de soutenir la scission du syndicat ouvrier CGT, dominé par les communistes, pour créer Force ouvrière (FO).
« Depuis 1946, Brown intrigue et manœuvre pour rompre l’hégémonie communiste à la direction de la CGT. Dans ce but, il appuie la fraction Force ouvrière qui s’est constituée depuis 1944, dirigée par Léon Jouhaux et surtout Robert Bothereau, un militant syndicaliste aguerri qui, depuis le 27 août 1944, siège au bureau et au secrétariat général de la CGT, réinstallée dans ses locaux historiques de la rue Lafayette. Divisée avant la guerre, la CGT s’est réunifiée lors d’une réunion clandestine qui s’est déroulée au Perreux en 1943.
Or, les anciens clivages sont toujours vivaces. Beaucoup de militants n’ont jamais admis cette réunification. Depuis décembre 1944, Robert Bothereau encadre une fraction anticommuniste regroupée autour d’un journal intitulé Résistance ouvrière, et, en septembre 1946, il suscite des groupe baptisés « les amis de FO », qui formeront bientôt Force ouvrière.
Car la scission est en route. Officiellement, Robert Bothereau défend une stratégie de reconquête de la CGT. Mais les chances que ses amis et lui puissent prendre le contrôle de l’appareil dirigeant, où ils restent minoritaires, sont minces. Officieusement, le but poursuivi est plus réaliste : entraîner dans une scission le plus grand nombre de militants de la CGT, objectif atteint à la fin de 1947.
La conférence nationale des Amis de FO se prononce le 18 décembre pour la création d’une nouvelle centrale. Bothereau remet sa démission du secrétariat confédéral de la CGT le 29 décembre 1947. Tout au long de la crise, il a chroniqué l’événement dans la rubrique « Le drame confédéral » de Force ouvrière. Il y passe sous silence le soutien logistique et financier que les scissionistes ont reçu d’Irving Brown, mais aussi du puissant syndicat allemand DGB et des trade-unions britanniques qui servent de relais à l’AFL (…) »
En 1949, la CIA intervient dans la foulée, via l’AFL et l’une de ses branches étrangères, le Free Trade Union Committee (FTUC) dirigée par un agent de la CIA, Jay Lovestone, et son ami Irving Brown, pour diviser la Fédération syndicale mondiale. L’AFL et le FTUC envoient régulièrement de l’argent à Force ouvrière, qui peine à boucler ses fins de mois, comme le prouvent les documents inédits que Bakchich a exhumé de ses cartons, évoquant des versements de 25 000 dollars à FO et des soutiens financiers à certaines fédérations (voir doc joints). Or l’argent de l’AFL et du FTUC provient notamment des officines de la CIA et des crédits détournés du plan Marshall, qui aident à la reconstruction de l’Europe.
« De 1948, les fonds du plan Marshall alimentent aussi le FTUC, qui peut compter sur au moins 5% des 13 milliards de dollars destinés à l’Europe occidentale. En fait bien davantage, puisque ce sont 800 millions de dollars qui seront finalement attribués aux opérations de l’AFL à travers le monde. Ces largesses s’expliquent par les relations amicales qu’entretiennent à Paris, Irving Brown et Averell Harriman, le responsable du plan Marshall, dont les bureaux, d’abord installés dans l’hôtel de Talleyrand place de la Concorde, non loin de l’ambassade américaine, émigreront dans un appartement plus discret de la rue Barbet-de-Jouy, dans le VIIème arrondissement (…)
Lorsque la manne du plan Marshall se tarit, en 1951, la CIA prend le relais : sa division des organisations internationales subventionne les activités clandestines de l’AFL, comme le révélera publiquement Thomas Braden, qui a tenu les cordons de la bourse pendant quelques années (…)
Braden a fait l’aveu de ces financements non pour les critiquer, mais pour en faire l’éloge. De 1951 à 1954, sa division a versé à Lovestone et Brown 1 million de dollars par an, et même 1 600 000 dollars en 1954. Ces fonds étaient destinés à Force ouvrière, mais aussi aux syndicats italiens, aux dockers de Marseille et d’autres ports méditerranéens et à d’autres opérations à caractère syndical. Œcuménique, Braden a reconnu avoir fourni des fonds à la CFTC (Confédération française des travailleurs chrétiens) et en a même précisé le cheminement. »
Des fonds secrets pour la presse socialiste
Durant la même période, la CIA n’hésite pas à soutenir, outre les syndicats « réformateurs », les partis politiques capables de barrer la route au communisme. Parmi eux, figurent, à leur yeux, les socialistes français de la SFIO (ancêtre de l’actuel Parti socialiste, né en 1971) qui se débattent, eux aussi, dans de sombres difficultés financières, notamment pour éditer leurs journaux. Heureusement, ses dirigeants, dont Léon Blum, savent frapper aux portes de la CIA, ou plus exactement de ses guichets que sont, via l’OPC (une antenne du Département d’Etat), le syndicat FTUC et l’ILGWU, un syndicat américain dirigé par David Dubinsky, proche de la centrale de renseignements.
« Depuis la Libération, certains journaux français ne survivent que grâce aux subsides du plan Marshall. En particulier ceux du groupe de presse socialiste de la SFIO. Le FTUC, dont l’OPC est un des bailleurs de fonds, a versé 20 000 dollars, puis 15 000 supplémentaires. Ces aides remplissent les caisses vides et permettent de faire face aux échéances critiques, sans néanmoins apporter un remède au mal chronique dont souffre la presse socialiste.
Le 16 juin 1948, Léon Blum appelle de nouveau à la rescousse le président de l’ILGWU, David Dubinsky, et l’informe que sans aide urgente, Le Populaire risque d’affronter une tempête qui pourrait lui être fatale. La même année, Léon Blum tente d’obtenir de Dubinsky qu’il finance en remplacement du Populaire un nouveau quotidien socialiste. Le projet n’aura aucune suite. Dans les années d’après-guerre, hormis les fonds secrets gouvernementaux, d’ailleurs le plus souvent d’origine américaine, David Dubinsky et son syndicat ont été une source régulière de financement pour le quotidien de la SFIO. Sans doute ont-ils sauvé la presse socialiste française du naufrage. »
Un appui direct aux mouvements pro-européens
La CIA multiplie les contacts avec les milieux intellectuels, soutenant des revues, des journaux, des agences de presse, de symposiums, des rencontres, des congrès où l’on croise notamment le sociologue Raymond Aron. Elle soutient surtout les mouvements politiques pro-européens, où officient des leaders tels que l’ancien résistant Henri Frenay, le futur père de l’Europe Jean Monnet, ou le jeune ministre François Mitterrand.
« A l’échelon politique, Washington appuie et finance donc les courants de pensée proeuropéens, alors représentés par les fédéralistes et les partisans d’une union européenne. Il s’agit en fait de donner une substance politique à l’esprit de reconquête, de consolider le bloc occidental qui, en cas de conflit, sera naturellement en première ligne (…) En novembre 1947, se crée un comité de coordination qui rassemble l’UEF (Union européenne des fédéralistes (présidée par Henri Frenay), l’United Europe Movement de Winston Churchill, le Mouvement pour les Etats-Unis socialistes d’Europe de Jean Monnet et les Nouvelles équipes internationales.
Du 7 au 10 mai 1948, le Comité international de coordination organise à La Haye un congrès international, sous la présidence d’honneur de Winston Churchill et en présence des souverains des Pays-Bas. Trois ans seulement après l’armistice en Europe, ce congrès marque la naissance du Mouvement européen, qui n’existera officiellement que le 5 janvier 1949, à la suite d’une réunion solennelle qui se tiendra à New York sous les auspices de la fondation Woodrow Wilson, du nom de l’ancien président des Etats-Unis.
Présidées par l’Anglais Enthony Eden et le Hollandais Paul Van Zeeland, les séances plénières (du congrès de mai 1948) se déroulent dans un ancien relais de chasse, la Ridderzaal, dite salle des chevaliers du château de La Haye. Dix-sept pays sont représentés, dont la France, la Grande-Bretagne, la Belgique, les Pays-bas, l’Italie et l’Allemagne, les même qui vont en 1949 créer l’OTAN et signer le Pacte atlantique.
Près d’un millier de délégués sont présents, dont douze anciens premiers ministres (parmi eux les Français Paul Ramadier et Paul Reynaud), de nombreux ministres et parlementaires (dont François Mitterrand), ainsi que des intellectuels qui, pour la plupart, participeront l’année suivante à la fondation du Congrès pour la liberté et la culture. (…)
Quelques fonds du plan Marshall ont servi à l’organisation du congrès de la Haye, couvrant les frais d’hébergement des 750 participants. Mais s’il veut s’inscrire dans la durée , le Mouvement européen a besoin d’aides financières importantes, régulières et d’un camouflage approprié pour ses canaux de financement.
Ainsi apparaît en 1949 le Comité américain pour l’Europe unie (CAEU). Son staff dirigeant comprend notamment plusieurs anciens pontes du renseignement comme William Donovan (ex-patron de l’OSS, ancêtre de la CIA) qui en est le président, et sn vice-président Allen Dulles, directeur des plans à la CIA (…)
A partir du printemps 1949, la machine se met en place. Les subventions pleuvent sur les mouvements pro-européens. Le Comité et la CIA, son principal bailleurs de fonds, débloquent une première tranche d’u peu moins de 14 millions de francs, qui permet de financer les premières réunions du Conseil de l’Europe de Strasbourg. Peu à peu et par le biais de circuits financiers labyrinthiques, les pro-européens empochent entre 1949 et 1951 l’équivalent de 5 millions d’euros. »
V. Nouzille – source