Exposition au Grand Palais : COUREZ VOIR « ROUGE » AU GRAND PALAIS ! – Par Georges Gastaud
Courez voir « Rouge », au Grand Palais (Paris, Métro Elysée-Clémenceau) et visitez toutes affaires cessantes cette exposition dédiée à l’extraordinaire floraison artistique, picturale, sculpturale, architecturale, musicale, littéraire, gymnique et chorégraphique… qui a accompagné la grande Révolution prolétarienne d’Octobre 17 et les premières années de construction de la République socialiste russe.
Non seulement vous y verrez des œuvres extraordinaires, qui parlent à la fois aux érudits épris de novations esthétiques et aux travailleurs socialement conscients, mais vous ferez en direct une expérience sensorielle et philosophique des plus stimulantes. En effet, dès que l’on entre dans l’exposition, on est stupéfait de l’écart béant entre, d’une part, la manière dont les faits historiques sont présentés et ce que clament d’autre part (car elles nous parlent toujours rudement !) les œuvres soviétiques qui nous sont présentées. Ce qu’égrènent les commentaires officiels de l’expo, c’est, bien entendu, la « doxa » antisoviétique actuelle, tout droit sortie des élucubrations de Courtois, de Nicolas Werth et de la plupart des honteux « manuels scolaires » destinés à bourrer le crâne des collégiens et lycéens : à savoir que le 7 novembre 1917 ne fut qu’un « coup d’Etat bolchevik » mettant en place une abominable tyrannie.
Puis, on lève le nez, on regarde le tableau, la maquette architecturale ou la sculpture et que voit-on concrètement ? Une efflorescence extraordinaire de recherches de toutes natures, des œuvres manifestement faites pour un prolétariat et pour un pays entrés tout entiers en ébullition, une production entièrement non marchande et portée par des groupes artistiques ou politiques militants, une participation massive, enthousiaste, des masses populaires non seulement à la révolution elle-même (il faut compléter votre visite par la relecture du grand classique de John Reed, le grand journaliste américain venu témoigner de la révolution russe, Les 10 jours qui ébranlèrent le monde…), mais à la construction du socialisme et à la mise en place d’un art nouveau (notamment théâtral, chorégraphique, cinématographique…) suscitant l’intervention directe de tous.
Et manifestement, nombre de visiteurs de l’expo dont la tenue et les postures indiquent qu’ils n’ont pas tout récemment promené leurs guêtres dans une manif syndicale, ressentent eux aussi – tant mieux pour eux ! – ce décalage hautement signifiant entre le dire et le voir ; un ressenti qui ne peut que les pousser à réfléchir, non seulement sur les œuvres, non seulement sur la flagrance d’une révolution populaire et artistique aux antipodes de la grisaille contre-révolutionnaire actuelle, mais aussi, de manière plus autocritique, sur la déformation du regard, voire de LEUR regard, que suscite ce fléau de la raison qu’on appelle l’anticommunisme…
Enseignants progressistes, ne manquez pas de montrer cette exposition à vos classes d’histoire, d’arts plastiques, de philo, de russe, d’EPS, etc. Militants, syndicalistes, visitez l’exposition ensemble et ne manquez pas d’exprimer vos idées sur le livre d’or (qu’il faut demander alors qu’il devrait être accessible directement à tous).
Bien entendu, le prix d’entrée n’est pas des plus doux, mais c’est un autre combat. Ou le même, à chacun de dire…
Un grave reproche cependant doit être adressé aux organisateurs : en violation de la loi Toubon, qui prescrit que l’anglais ne doit jamais être la seule langue en laquelle sont traduits des textes français dans les lieux culturels français, les notices présentant les œuvres sont seulement donnés en français et en anglais. Non seulement c’est mauvais pour notre langue (l’anglais étant ainsi institué en langue internationale unique), mais traduire en russe les textes d’une exposition qui est aussi destinée au Russes de Paris et qui parle centralement de leur pays, c’était trop demander sans doute ?
Très regrettable aussi que la librairie de l’expo ne présente presque que la vision antisoviétique de l’histoire. Est-ce trop demander que dans un lieu culturel subventionné par tous les Français, un peu de place soit faite au pluralisme idéologique de notre peuple ?