Le sectarisme n’est pas une alternative à l’opportunisme échevelé du PCF-PGE : il est l’opportunisme en miroir et comme lui, il rabat vers une politique d’impuissance qui fait des communistes des suiveurs ou des spectateurs sans prise sur la réalité.
Après avoir expliqué pour le premier tour des présidentielles que la classe ouvrière n’avait pas à se mêler des élections et que l’élection d’un candidat direct de la finance ou de Mélenchon réclamant non pas certes la construction d’un Etat Socialiste mais au moins l’abrogation de la loi El Khomri, l’amnistie des syndicalistes poursuivis, la sécu à 100 %, se réclamant de la paix et de la sortie de l’OTAN, de la mise en cause de l’UE,… ne changerait rien pour les classes populaires, le PCRF (un groupe certainement tellement reconnu par les masses ouvrières qu’il s’autoproclame parti en singeant le nom du PRCF) se pique de publier une nouvelle analyse de fond pour le second tour dans un texte entretenant la confusion au plus haut point.
Faisant le bilan du premier tour avant tout pour tenter de régler à nouveau son compte à Mélenchon, il justifie la position de l’abstention en faisant de ce dernier le candidat de la « petite bourgeoisie en colère » et en passant sous silence les éléments de son programme, de sa campagne et de la mise en mouvement de centaines de milliers de travailleurs et de militants syndicalistes. Or, en termes marxistes, la petite bourgeoisie est constituée essentiellement par la petite propriété indépendante et ce n’est pas là que le vote Mélenchon a trouvé son « cœur de cible » (un peu plus loin dans le même texte, mais ne cherchons pas trop à trouver une approche sérieuse et cohérente là où il n’y en a pas, la « petite bourgeoisie ruinée » est classée dans les milieux déclassés de la classe ouvrière…). C’est au contraire en grande partie dans la classe des travailleurs salariés que la dynamique Mélenchon s’est construite : partiellement la classe ouvrière mais surtout travailleurs du public en voie de déclassement, employés intermédiaires, jeunesse populaire dont l’avenir promis est de sang et de larmes. Il n’est d’ailleurs pas indifférent pour tout marxiste se disant intéressé par la reconstitution en France d’un parti d’avant-garde que le vote Mélenchon ait percé au sein des sympathisants et a fortiori des militants de la CGT (51%) , de Solidaires (53%) ou de la FSU (43%), autrement dit chez ceux qui mènent la résistance « en bas », dans les usines et les services publics, où se joue centralement l’affrontement de classes et qui portent en puissance la renaissance du syndicalisme de classe.
Et pour ces couches sociales qui doivent être gagnées à la nécessité de la sortie franche de l’UE et de la révolution socialiste, il ne fait guère de doute que le passage de Mélenchon au second tour aurait eu des conséquences non seulement sur leur quotidien immédiat mais aussi pour la perspective d’un changement de société, par la définition d’une processus de politisation accélérée liée à la nécessité de contraindre Mélenchon à tenir ses promesses sur l’UE, l’Otan ou les conquêtes sociales, permettant de démontrer qu’« on ne peut avancer d’un pas si l’on a peur d’aller au socialisme. » En particulier, il faut être du dernier aveuglement pour ne pas voir que le 1er mai se déroulerait dans un tout autre contexte offensif, antifasciste, internationaliste, anticapitaliste, anti-impérialiste alors que le tonnerre guerrier gronde de toutes parts, si Mélenchon avait été au second tour alors que dans les conditions présentes, il est pris en otage par les faux démocrates qui rabattent sur Macron.
Ne comprenant rien à la politique ni à la tactique, le texte de l’URCF résume indûment tout soutien à Mélenchon à une remise en cause de la nécessité du socialisme alors que tout le mouvement ouvrier et communiste s’est construit et a obtenu ses plus grands succès par l’articulation dialectique subtile entre parti communiste et fronts permettant de mettre la classe ouvrière au centre par la construction d’alliances avec les couches non monopoliste. Tels furent le Front populaire, le Front national de lutte pour l’indépendance et la liberté de la France, précurseur du CNR, qui apportèrent l’un et l’autre de grandes avancées à notre peuple malgré les criailleries gauchistes des trotskistes d’alors arc-boutés sur leur sectarisme et sur leur sempiternel et pseudo-radical slogan « le socialisme partout et tout de suite, sinon rien ».
Dans le même ordre d’incohérence et d’incompréhension de la période actuelle, le texte affirme d’un côté que « le danger d’éradication du mouvement ouvrier et populaire n’est pas à l’ordre du jour » et veut en appeler « aux démocrates inquiets de la politique liberticide du dernier quinquennat ». Il faudrait savoir !
Il est vrai que les poursuites massives de syndicalistes, l’assimilation de la CGT à Daesh par les médias bien-pensants, les graves atteintes aux droits démocratiques visant d’abord les militants ouvriers et les communistes dans de nombreux pays de l’UE, la propagande totalitaire des médias aux ordres, la banalisation de l’état d’urgence et des manifestations de policiers cagoulés et armés, la guerre qui avance à grands pas à l’initiative de Trump… permettent d’affirmer que « le danger d’éradication du mouvement ouvrier et populaire n’est pas à l’ordre du jour »…
Au final, ce texte rempli de contradictions débouche sur l’impuissance du sectarisme et, dans les faits, du refus de la politique, avec les traits les plus caricaturaux de l’anarcho-syndicalisme.
Car en conclusion « politique » de « l’analyse », la répétition ad nauseam de formules certes justes (se syndiquer, construire le parti communiste, établir le pouvoir de la classe ouvrière) mais qui ne servent qu’à les discréditer si elles n’affrontent pas la question concrète « que faire ? » posée par Lénine qui y répondit par le refus du sectarisme comme de l’opportunisme et par l’articulation entre l’action indépendante des communistes et la constitution d’alliances plus ou moins temporaires permettant de faire de la politique ici et maintenant pour bâtir une hégémonie idéologique, politique, culturelle mettant la classe ouvrière et le communisme au cœur du mouvement populaire. Quelle aberration en particulier que d’opposer sans trêve la reconstruction du parti, la lutte pour le socialisme, et la participation critique et indépendante à des fronts, si imparfaits soient-ils, visant à contrer la fascisation et/ou l’euro-dissolution de la nation et des acquis sociaux.