Vangelis GOULAS est un militant progressiste grec bien connu, syndiqué à la CGT. Dans une tribune, il interpelle ses camarades de la CGT pour que de toute urgence ils fassent un choix. Entre l’immobilisme et l’attentisme ou la construction de la grève générale, montrant que le premier revient à soutenir Macron et la fascisation, quand le second permet de pousser et faire gagner les revendications progressistes des travailleurs.
Julien AUBERGER est un militant insoumis ; dans une autre tribune, lui aussi montre que la question posée par le mouvement des Gilets jaunes est bien celle de la lutte des classes.
Des analyses qui entrent en résonance avec les explications et propositions du PRCF dès le début du mouvement des gilets jaunes, montrant que ce mouvement social qui dure maintenant depuis deux mois sans interruption malgré une répression des plus violentes et féroces, ouvre bien une nouvelle étape de l’affrontement de classe en France.
L’ HEURE DES CHOIX. LA CGT ENTRE DEUX CHEMINS
par Vangelis GOULAS
Quelques heures après l’acte 9 des gilets jaunes, une mobilisation massive partout en France et une prise de conscience de classe pour des milliers de Français on voit partout la convergence des luttes entre gilets jaunes et gilets rouges qui se met en œuvre. A Toulouse, à Lyon à Rouen, à Paris, les unions locales et départementales de la CGT, les militants de base se joignent aux cortèges des Gilets jaunes avec des mots d’ ordre en commun : justice sociale, augmentations de salaires, fin de l’ austérité, services publics pour tou-te-s, abolition des privilèges du grand capital et de leurs valets, démocratie .
En ce moment crucial de la lutte des classes et après tant d’années de défaites et de régression sociale, la direction de la CGT ne peut pas rester immobile, elle n’a pas le droit de réduire le plus grand syndicat du pays, le syndicat historique des prolétaires, en une organisation corporatiste.
C’est le moment où les centaines des milliers de travailleurs du pays se mobilisent, où la conscience de classe se construit dans les luttes, où la répression de la part des oligarques bat son plein avec des centaines de blessés et des milliers de citoyens arrêtés arbitrairement.
C’est le moment où la CGT se trouve entre deux chemins.
Premier choix, on reste immobile dans une logique corporatiste en cautionnant finalement le pouvoir.
La suite inévitable de ce choix, l’ affaiblissement du mouvement gilets jaunes et le basculement vers l’ extrême droite qui prône le passage d’ un capitalisme « rose » à un capitalisme « brun » les deux faces identiques d’une même médaille . L’exemple de l’Italie est caractéristique : un pays ou les choix néfastes du mouvement ouvrier organisé qui a basculé vers la sociale démocratie européiste en abandonnant les valeurs marxistes léninistes a conduit à son effacement ,à la débâcle du parti démocrate et à la renaissance du fascisme .
La bourgeoisie financière reprend la main, nous impose avec l’aide des médias aux ordres, pour une deuxième fois, le même chantage, à choisir entre les Lepénistes ou les Macronistes, entre les « Légitimistes » ou les « Orléanistes », des représentants de la grande propriété ou des banquiers et des rois de la finance. Le résultat, l’accélération de la destruction des droits des travailleurs mise en place par les traités européens, la commission européenne et leurs représentants nationaux .Dans le collimateur l’assurance sociale et les allocations, suppression des conventions collectives, privatisations des services publiques partage du chômage entre travailleurs et chômeurs, généralisation du travail à temps partiel, flexibilisation, suppression des cotisations patronales et salariales dans le système des retraites, c’est-à-dire destruction de ce système, «reformes structurelles », l’Europe de Macron- Merkel qu’ on ne veut pas.
Deuxième choix, la CGT met tous les moyens et rentre massivement dans la lutte, organise la grève dans chaque usine, dans chaque service public,
fournit un moyen d’expression aux millions de concitoyens en gilets jaunes ou sans, qui ne manifestent pas encore, mais qui ont la boule au ventre et la colère qui monte. La grève générale reconductible jusqu’à la victoire finale.
Un choix qui fera changer décisivement le rapport de forces et qui pèsera sur la construction de l’alternative progressiste, le jour d’après, la période post-macroniste a déjà commencé. Notre devoir doit être la transformation de cette période en période post-capitaliste.
En tant que militant syndicaliste, je suis à la CGT parce que je crois profondément que les travailleurs peuvent s’émanciper et construire eux mêmes l’alternative pour une autre société humaniste, progressiste, anticapitaliste et non pas s’enfermer dans une logique corporatiste. Je suis à la CGT pour la charte d’ Amiens.
C’est pour toutes ces raisons qu’il faut agir maintenant.
Dernière sommation, camarades.
La responsabilité revient au prolétariat avancé et ses organisations, la CGT, d’ investir, unir, expliquer, orienter la lutte pour mettre à genoux la bourgeoisie financière, œuvrer pour la paix, combattre l’impérialisme, se battre pour la justice sociale et les droits de l’humanité.
Les riches ont tous les moyens et toutes les armes pour achever leur but, les travailleurs seulement trois, l’organisation, la solidarité et la grève générale !
« Travailleurs, sauvons-nous nous-mêmes ;
Travaillons au salut commun.
Pour que les voleurs rendent gorge,
Pour tirer l’esprit du cachot,
Allumons notre grande forge !
Battons le fer quand il est chaud ! »
Mouvement des gilets jaunes : enjeux d’une lutte entre classes sociales
par Julien AUBERGER
Depuis la mi-novembre a éclaté une remarquable mobilisation spontanée à l’appel d’un certains nombres d’individus sur les réseaux sociaux. Avant tout menée par la classe travailleuse de ce pays et les plus précaires, elle a aussi su rallier à elle les couches intermédiaires comme le petit patronat qui ont peur pour l’avenir de leur production et leur niveau de vie. Retour sur un mouvement qui a su conquérir le cœur des français : en quoi il est dans une entière opposition aux intérêts des plus riches et quelles sont les stratégies de sortie de crise pour la classe dominante.
Qui aurait cru un jour que le jaune allait donner des sueurs froides aux oligarques et leurs valets libéraux de toute espèce ? Depuis la dernière intervention publique du Président de la République, ils se relaient sur tous les supports médiatiques et claironnent en chœur :
« Macron a compris, il a entendu. Le geste social est significatif. Il est temps que les manifestations et les blocages qui heurtent notre économie cessent. Sitôt que la détresse des plus précaires est reconnu en mots, elle disparaît en fait avec leur colère. L’heure est au dialogue. Macron est légitime, il a été élu pour cinq ans : ceux qui veulent persévérer dans les désordres sont des irresponsables qui mettent en péril notre République, qui plus est en période d’attentat terroriste etc. » Bref, le discours traditionnel du parti de l’ordre inique qui aimeraient persuader qu’il peut y avoir une voie de consensus entre ceux qui dominent et ceux qui sont dominés dans ce pays.
Non, il ne peut y avoir en avoir. Le dissensus est total. Et nous allons le montrer en prenant les quatre niveaux principaux de revendications des gilets jaunes [1]. Quand bien même les partis en présence seraient animés des plus haut sentiments, de la plus grande volonté de concorde, que le dissensus perdurerait, car ce qu’exigent les gilets jaunes est radicalement incompatible avec les intérêts de la caste dirigeante. Voici ce qu’ils exigent :
1) L’abolition de la déchéance sociale. La suppression du phénomène des sans abris, la fin de la pauvreté, une augmentation réelle du salaire minimum. Nous sommes loin des sempiternels refrain autour de « la lutte contre la pauvreté » ou « l’égalité des chances » qui n’ont pour résultat que de maintenir indéfiniment l’existence des misères les plus indignes. Les gilets jaunes tonnent comme Hugo dans Quatre-Vingt-Treize : « Vous voulez les misérables secourus, moi je veux la misère supprimée ! ». Or, la détresse d’une partie de la population permet à la classe dominante de forcer le peuple à travailler dans de mauvaises conditions, avec des salaires médiocres, afin de ne pas sombrer dans ce que l’on appelle prudemment « l’extrême pauvreté ». Il n’est pas dans son intérêt d’éradiquer ce fléau. Au contraire, elle se plaît à disserter autour du ’problème de l’assistanat’.
2) Remise en cause des inégalités sociales. Des conditions de travail décentes, revalorisation de l’ensemble des salaires, mise à bas de l’inégalité fiscale avec une plus grande progressivité et la remise en place de l’ISF, et de l’inégalité sociale avec un maximum des salaires à hauteur de 15000€. Or, une augmentation des salaires à temps de travail égal et à intensité égale entraîne une baisse du taux de profitabilité des entreprises (ce qui n’est pas une mauvaise chose pour la population laborieuse, contrairement à ce qu’on aimerait nous faire croire !). La part du capital qui doit être reversé en salaire augmente, ce qui entraîne une diminution de la survaleur produite, qui n’est rien d’autre que du temps de travail extorqué aux salariés [2]. Du point de vue des possédants, le travail « coûte », tout salaire rogne la part dévolue à l’accumulation ; du point de vue du travail, le « capital coûte » car il monopolise une partie – toujours plus grande – de la valeur produite, sans pour autant qu’il y est un intérêt social quelconque à cette appropriation. Là aussi, le dissensus ne peut être que complet.
3) Le maintien et le développement de l’appareil productif national via l’investissement de la puissance publique : fin des délocalisations, plus jamais une trahison comme celle de la vente en pièces détachées d’Alsthom au Siemens allemand et General Electrics états-unien. C’est à partir d’un appareil productif fort que nous pourrons organiser, planifier, la transition écologique. Or, la grande bourgeoisie, encore une fois toute entière obsédée par son niveau de profitabilité, a depuis longtemps abandonné l’investissement dans l’économie réelle, lui préférant la finance, la spéculation, le boursicotage. La remise en cause des inégalités sociales (point 2) est le levier permettant de réinvestir dans l’économie productive et les services publics en prenant l’argent là où il est, c’est-à-dire chez les plus riches.
4) Enfin nous terminons sur l’axe le plus important et sans aucun doute le plus affolant pour la caste qui domine : le pouvoir au peuple. Référendum d’initiative populaire, 6ème République, contrôle des élus payés au salaire médian, déprofessionnalisation de la vie politique. Or la République, la démocratie, ne sont acceptés par ceux qui règnent sans partage sur l’économie que tant qu’elle est un garde-fou permettant de cacher et de protéger leur règne sans égal sur l’avoir. Ils n’ont jamais accepté la République qu’à demi-mot et hypocritement. Si les français ne votent pas comme il se doit, ainsi qu’il en a été lors du référendum sur la constitution européenne de 2005, on s’arrange pour contourner le vote, le détricoter, ou on les fait revoter. Et il en est ainsi plus généralement de toute l’histoire de France : la République a toujours été une concession (1792, 1848, 1871, 1946). La protection des intérêts des plus fortunés est normalement assuré par un puissant appareil de propagande médiatique qui permet de faire voter les gens « raisonnablement » et qui est directement entre les mains des oligarques : Xavier Niel, Serge Dassault, Martin Bouygues, Bernard Arnault, Vincent Bolloré, François Pinault, Patrick Drahi, Pierre Bergé, Mathieu Pigasse, Arnaud Lagardère, Marie-Odile Amaury, les Bettencourt.
Cependant sitôt que les masses se mobilisent, se rencontrent, discutent, débattent, sans médiation, l’influence des « médias » en prend un coup, l’endoctrinement devient bien plus ardu. Ce dernier point nous permet de faire directement le rapprochement entre la mobilisation des gilets jaunes qui portent les vélléités de souveraineté politique de l’écrasante majorité du peuple français avec ce que François Ruffin a désigné dernièrement comme « le resserrement autoritaire de la caste ». Le problème se pose ainsi à la bourgeoisie : comment maintenir notre domination politique et économique, quand 75 % de la population luttent ou soutiennent la lutte contre le néo-libéralisme [3] ? Quand les mensonges, les manipulations rhétoriques, n’entament pas la détermination du peuple, il ne reste à la classe dominante qu’à accélérer trois solutions stratégiques parallèles pour protéger ses intérêts :
1) La première est évidente, elle consiste en la dépossession de la souveraineté populaire. La souveraineté des masses populaires s’exprime dans le cadre national. A cette échelle, il s’agit en premier lieu de réduire à peau de chagrin l’expression politique du peuple en procédant à une centralisation inouïe des pouvoirs et, se faisant, en la cantonnant à des échéances électorales peu fréquentes : élection présidentielle et, dans la foulée, parlementaire afin d’assurer à tous les coups la majorité présidentielle au parlement. Jean-Jacques Rousseau, dont l’œuvre restera à bien des égards une bible pour les républicains, écrivait déjà dans Le Contrat Social en 1762 au sujet de la monarchie parlementaire anglaise : « Le peuple anglais pense être libre, il se trompe fort : il ne l’est que durant l’élection des membres du parlement ; sitôt qu’ils sont élus, il est esclave, il n’est rien ». Bien entendu, vote blanc et abstention ne doivent pas être pris en compte. L’ensemble du système électoral doit être fait pour retenir l’émergence d’une alternative au consensus libéral. En ce sens, un individu comme Emmanuel Macron, qui n’a disposé que de 16 % des suffrages si on les rapporte à l’ensemble de la population en état de voter, peut prendre possession de presque tous les pouvoirs, ce qui permet de procéder aisément à une transformation autoritaire des institutions. Ensuite, il faut procéder à un « transfert de souveraineté » hors du cadre d’expression de la souveraineté du peuple vers le cadre des institutions européennes, comme l’a formulé « très clairement » le député LREM Aurélien Taché : « Le fait de transférer une grande partie de la souveraineté nationale au niveau européen, c’est le cœur de ce qu’on proposera aux élections européennes, ça c’est très clair. » [4] Cette expression « transfert de souveraineté » est en réalité une invention de communicants qui n’a aucune signification concrète : la souveraineté existe ou n’existe pas, elle ne peut pas être transférée. Sitôt qu’elle échappe aux mains du peuple, le peuple n’est plus souverain. La combine est bien plutôt une dépossession de la souveraineté populaire, dépossession intrinsèquement anti-démocratique. Et elle est déjà bien avancée : l’objectif de LREM consiste à faire aboutir ce processus. Le transfert des compétences les plus essentielles d’une nation libre se marie avec une parodie de débat démocratique national, limitant le choix des citoyens à la couleur politique à laquelle ils seront mangés ; acceptant le cadre des traités, ils acceptent l’austérité contrainte. Ces pantins politiques maquillent l’absence de contrôle économique, monétaire, militaire, en choix politiques délibérés, mais ils ne pourront plus longtemps masqué l’état de servitude volontaire imposé aux pays : privatisation du rail, des barrages, euro fort profitant à l’économie allemande contre le reste de l’europe, augmentation du budget militaire en réalité commandé par l’OTAN etc.
2) Dans un deuxième temps, pour sanctifier cette distance infinie qui sépare le peuple de l’exercice réel de sa souveraineté, tout une stratégie de répression voire de terreur peut être mise en place. Et cela est amenée à prendre une nouvelle ampleur avec le mouvement des gilets jaunes perdurant. Cette fois, une large frange de la population qui méconnaissait la violence dont était capable le pouvoir face à des mobilisations sociales est en train d’en prendre conscience. A l’heure où l’on écrit, on décompte 8 morts, 865 blessés, 4 yeux perdus, 3 mains arrachées, sans compter les nombreuses insultes, les entorses à la loi quand aux conditions d’interrogatoires en garde à vue, et la violence morale ineffaçable, représentée au plus haut point par le scandale mondial du traitement des lycéens de Mante-La-Jolie à genoux, les mains sur la tête, pour certains face contre le mur. La criminalisation des classes populaires en lutte va de paire avec la criminalisation de tous ceux qui veulent se faire les représentants de cette colère dans les parlements comme dans les entreprises. Cela permet d’empêcher cette lutte concrète et dans le même temps effrayer, terroriser, tous ceux qui seraient tentés de la joindre. Les attaques judiciaires contre l’opposition populaire (FI, Mélenchon, Ruffin, Eric Drouet etc.) ainsi que les diverses apologies du caractère monarchiste des français, ou de Pétain, l’affaire de barbouzerie Benalla, ne sont pas des coïncidences mais participent de la voie autoritaire prise par la caste pour empêcher son renversement.
3) Enfin, à défaut de pouvoir anéantir la colère sociale, il est néanmoins possible de la détourner. Toute société de classes est une société dans laquelle un certain nombre d’individus vivent et s’enrichissent sur le dos de ceux qui travaillent. Il faut donc dévier cette légitime colère, qui part d’une véritable souffrance, sur un groupe d’individus qui n’est pas la cause réelle des problèmes sociaux. Recentrer le débat politique sur la question religieuse a toujours été redoutablement efficace pour se prémunir de toute remise en cause de l’ordre établi ; au fur et à mesure que les tensions s’aiguisent, la remise en cause de la laïcité est plus qu’une tentation. En ce sens, les « libéraux » anticipent toujours sur la prise de pouvoir de l’extrême-droite en cherchant à poser le débat en ces termes. La liste d’exemples serait infinie, nous nous bornerons à en donner deux : Mr Collomb et Mr Wauquiez. Le premier énonçait sans le moindre scrupule la théorie du Grand Remplacement chère aux fascistes français en pleine commission parlementaire, et se plait à faire bénir annuellement sa ville de Lyon par le cardinal de la cathédrale de Fourvière. Rappelons que Mr Collomb était tout d’abord membre du parti socialiste avant de rejoindre la majorité présidentielle de Macron. C’est dans la même perspective que Mr Wauquiez défend « les racines chrétiennes de la France », en montant de toutes pièces des polémiques autour d’une crèche de Noël qu’il a fait monter au Conseil Régional Auvergne Rhône-Alpes. Le retour sur le devant de la scène politique de la religion chrétienne autorise la stigmatisation d’une importante minorité musulmane qui serait incompatible avec les institutions républicaines, qui attaquerait la culture française, qui vivrait « assistée » sur le dos des travailleurs français. Toute chose qui par contre est vraie si nous visons les grandes fortunes de ce pays qui ont depuis longtemps atomisé la production culturelle populaire de ce pays, sous la mass culture anglaise ou un art formaliste ultra élitiste, qui n’aime la République que lorsqu’elle leur est privatisée, qui s’engraissent sur le travail d’autrui. En tout cas Macron suit avec force cette voie de dé-laïcisation des débats : pleurant la rupture entre l’Église et l’État tout en se faisant chanoine de Latran, posant encore dans son dernier discours le problème de la laïcité avec celui de l’immigration de manière absolument impromptue, dans une volonté d’enfermer l’espace du débat politique autour de la pseudo-contradiction entre LREM et le RN.
Mais le peuple travailleur a montré qu’il n’était plus dupe des manœuvres destinées à lui faire lâcher ses revendications. Et le mouvement s’enracine dans le temps, comme les gens s’enracinent sur les barrages de rond-point. Quand bien même les gilets jaunes devaient mettre en repos la mobilisation pendant un moment, que les puissants ne se fassent pas d’illusions : le peuple n’acceptera plus les reculs. L’on n’extirpe pas facilement les réflexes d’auto-organisation qu’il a précieusement acquis. Si les culs cousus d’or aimeraient faire croire que cela donne une image délétère de la France, le réveil du peuple français donne au contraire de l’espoir aux exploités sous toutes les latitudes pour secouer le joug qui pèse sur eux. La victoire de l’insurrection citoyenne ferait l’effet d’un tremblement de terre et précipiterait bien d’autres à suivre l’exemple. Elle rappellerait cette loi clamée par Saint-Just, le 8 ventôse An II, et que les financiers apeurés s’efforcent d’oublier :« Les malheureux sont les puissances de la terre ; ils ont le droit de parler en maîtres aux gouvernements qui les négligent. ».
Julien Auberger
[1] Revendications accessibles ici : https://www.francetvinfo.fr/economie/transports/gilets-jaunes/zero-sdf-retraites-superieures-a-1-200-euros-salaire-maximum-a-15-000-euros-decouvrez-la-longue-liste-des-revendications-des-gilets-jaunes
[2] Voir chap 7 et chapitre 12 du Capital de Marx sur le phénomène de la survaleur.
[3] https://www.20minutes.fr/societe/2394811-20181214-gilets-jaunes-rarement-mesure-tel-soutien-opinion-mouvement-social
[4] Émission Les Terriens du Dimanche, 2 décembre, C8