Un combat humaniste contre la justice de classe !
Tous les médias, même les médias dominants aux mains de milliardaires, ont célébré Gisèle Halimi dès l’annonce de son décès le 28 juillet dernier. Le plus souvent, cependant, ils ont honoré l’avocate féministe qui a défendu « la Cause des femmes » et permis des avancées majeures pour les femmes dans les années 70, en taisant ou en passant très vite sur les combats de l’avocate anticolonialiste, anti-impérialiste qui, dès les années 50, a pris la défense des militants et des peuples opprimés avec un courage et une détermination admirables, malgré l’hostilité et les menaces des militaires dont, avec force, elle dénonçait les tortures et les exactions pendant la guerre d’Algérie.
Aujourd’hui, surtout parmi la jeunesse, qui connaît vraiment ce que furent les guerres de libération des Tunisiens, des Algériens, des Vietnamiens, des Espagnols et de tant d’autres, pour se délivrer du colonialisme français, de l’impérialisme états-unien, du fascisme de Franco… ?
Gisèle Halimi a pris fait et cause contre l’oppression sous toutes ses formes, notamment pour défendre le Peuple palestinien assassiné par le régime raciste et belliqueux israélien. Par son intelligence et sa force de conviction, elle a réussi, malgré les procès à huis clos, dans des plaidoiries exceptionnelles où elle a pris parti pour les inculpés, informer et gagner l’opinion publique nationale et internationale à la cause des accusés.
D’abondants documents, (vidéos, entretiens radio-diffusés, articles, films…) ainsi que ses nombreux livres passionnants, permettent de découvrir cette petite fille pauvre, née en Tunisie alors colonisée par la France, devenue une intellectuelle militante dont la vie tout entière a été consacrée à la défense des pauvres et des opprimés, femmes et hommes.
Son parcours exceptionnel mérite qu’on le fasse connaître car nous lui devons beaucoup, dans une période où beaucoup d’intellectuels sont absents des combats essentiels contre le capitalisme exterministe qui détruit les peuples et la planète, relayé par les médias dominants. Dans l’article que nous lui consacrons, vous trouverez de nombreux liens pour aller directement sur les documents cités. La navigation sur internet vous permettra d’en découvrir beaucoup d’autres…
A.MC pour Initiative Communiste
C’est à une grande figure tuniso-française de la cause féminine, des droits humains et du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes à qui le Ministère des Affaires Culturelles de Tunisie rend hommage.
Gisèle Halimi, née Zeiza (Gisèle), Elise Taïeb, est née en Tunisie le 27 juillet 1927, dans le quartier de la Goulette, en banlieue de Tunis, dans une famille modeste judéo-arabe, d’une mère juive séfarade et d’un père d’origine berbère ayant acquis la nationalité française.
Les origines de son engagement et de ses combats politiques
# La malédiction de naître fille
Comme elle le raconte dans La Cause des femmes (Grasset, 1974), son père, Édouard, est si désolé d’avoir une fille qu’il met plusieurs semaines à avouer sa naissance à ses amis. Il faut rappeler qu’alors, une fille est considérée un peu « comme une malédiction« , dira-t-elle en 1989.
La fille, à l’époque, était une charge d’abord parce qu’économiquement, on ne la formait pas pour gagner sa vie : il n’était pas question d’indépendance économique. Ensuite, c’était un lourd fardeau à cause de tous les tabous sur la virginité, du fait qu’une fille sortant avec un garçon était « sale ». Je suis née et j’ai grandi dans cet amoncellement de tabous concernant les filles. Très tôt, je me suis posé la question du pourquoi : pourquoi ces différences, pourquoi ces handicaps majeurs qui nous réduisaient par rapport aux hommes ? Posé la vraie question : qu’est-ce qu’on est ?
Source : https://www.franceculture.fr/emissions/voix-nue/gisele-halimi-15
# Discrimination, injustice et révolte
Gisèle est confrontée à la discrimination entre filles et garçons dans l’exécution des tâches ménagères. Mais indocile, âgée d’à peine 12 ans, elle va suivre une grève de la faim pendant 3 jours, refusant de servir ses frères. Dès son adolescence, elle s’indigne des carcans d’épouse et de mère et, à 14 ans, elle refuse un mariage arrangé avec un marchand d’huile de plus de 20 ans son aîné.
J’étais l’aînée qu’il fallait marier. Ça m’est apparu comme quelque chose de monstrueux. Me marier c’était me faire endosser le destin de ma mère… qui faisait un enfant tous les 2 ans, qui s’arrangeait avec la religion pour avorter comme elle pouvait…
Source : https://www.cairn.info/revue-travail-genre-et-societes-2005-2-page-5.htm
Enfant, elle découvre aussi l’injustice qui fera naître sa révolte.
C’est à partir de ma vie même, de mon vécu, que j’ai pris conscience de la discrimination qui frappait les femmes, de l’injustice intolérable, que je me suis révoltée et que, par la suite, en lisant goulûment, j’ai théorisé.
Source : Gisèle Halimi dans la revue Travail, genre et sociétés
«L’injustice m’est physiquement intolérable… Toute ma vie peut se résumer à ça. Tout a commencé par l’Arabe qu’on méprise, puis le juif, puis le colonisé, puis la femme».
Source : https://www.franceculture.fr/droit-justice/france-culture-rend-hommage-a-gisele-halimi-combattante-des-droits-des-femmes
L’injustice, Gisèle l’a découverte toute enfant, à 10 ans, quand elle a su ce que veut dire souffrir pour ses jeunes camarades tunisiens, marqués par la faim et la misère. « Ce sont des séquences affreuses que j’ai gardées dans ma mémoire pour l’éternité », répétait-elle souvent. De ces blessures et des vicissitudes de la vie, elle ne perdra ni ses convictions tranchées de justice et d’égalité, enracinées dans le terreau familial, ni cette forme de candeur dont elle ne se départira jamais, entretenue, dans son exercice ardu d’avocate et surtout de militante politique.
Source : entretien de Djamila Boupacha pour el Watan
# Un oncle et une tante, communistes et athées…
Justice et égalité
Ses convictions de justice et d’égalité, elle les a trouvées chez son oncle Jacques (frère de son père) et sa tante, inscrits au Parti Communiste tunisien.
En novembre 2011, sur France Culture, Virginie Bloch Lainé donne la parole à Gisèle Halimi dans une série d’entretiens « La cause des femmes ». Dans le deuxième volet, intitulé Gisèle Halimi ou l’auto-éducation, elle lui dit :
« Vous aviez un oncle communiste très politisé, l’oncle Jacques« . « Un oncle et une tante » répond G. Halimi… un oncle qui était une référence presque mythique dans la famille… On l’aimait ou on le détestait, la majorité le détestait répond Gisèle Halimi…. En plus, il était comme tout bon communiste, complètement athée, ce qui horrifiait ma mère, fille de rabin !… « Mais vous, vous en pensiez quoi, du communisme ?« insiste V. Bloch Lainé. « Ben, ça m’avait beaucoup séduit, dit G. Halimi. Ce qui horrifiait ma mère … il plaisantait avec Dieu et disait « Dieu soit loué et mes appartements aussi… » Moi, j’étais très séduite…. »
Source https://www.franceculture.fr/emissions/voix-nue/gisele-halimi-25
Union des Jeunes filles de Tunisie
C’est à cette époque là, qu’à l’instar de « l’Union des Femmes de Tunisie » proche du Parti Communiste tunisien (PCT), Gisèle Halimi a voulu créer « l« Union des Jeunes filles de Tunisie » avec un projet d’éducation : alphabétisation d’abord et déjà d’indépendance économique. » Il en sortira un petit journal qu’elle vend sur la voie publique. Mais le projet est boycotté par les Tunisiennes : »c’est mort de sa belle mort assez vite » dira Gisèle Halimi.
Indépendance économique et départ pour la France
Les filles des milieux pauvres ne pouvaient pas financer leurs études. Très bonne élève, Gisèle obtiendra une bourse qu’elle gardera tout au long de sa scolarité et qui lui permettra d’étudier. À 17 ans, les deux baccalauréats avec mention en poche, elle veut rejoindre Paris pour aller étudier, car à Tunis il n’y a pas d’université.
Pour assurer son indépendance financière, elle donne, grâce à son oncle et à sa tante communistes, des cours particuliers à leur fils qu’ils lui paient et à des jeunes, en retard dans leurs études qu’ils lui trouvent. Cela lui permettra de se faire une petite cagnotte pour partir à Paris.
On est en 1945. Pour se rendre en France, il y a très peu de transports. Ce sont les avions de l’Armée qui font le rapatriement. Avec obstination, elle viendra chaque jour pendant plus d’un mois, avant d’obtenir un ordre de rapatriement, car elle n’est pas prioritaire.
Études à Paris
Gisèle Halimi a soif de connaissance !
« Comprendre, savoir, c’est une arme formidable » dit-elle.
https://www.franceculture.fr/emissions/voix-nue/gisele-halimi-35
À Paris, elle s’inscrit à plusieurs universités, La Sorbonne pour le Droit et la Philosophie, Sciences Po et même en PCB (examen préparant à l’entrée en Médecine),… tout en occupant un emploi de téléphoniste.
Elle sera en butte aux propos racistes de ses condisciples qui ignorent tout de son pays, la Tunisie …
Elle obtient son diplôme d’avocate en 1947 et revient en Tunisie en 1949 où elle s’inscrit au Barreau de Tunis dominé par les avocats français… tous les avocats tunisiens sont arrêtés. Nous sommes à l’époque du colonialisme français !
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L’intellectuelle militante anticolonialiste et anti-impérialiste défend la cause des opprimés !
Avant de devenir l’avocate féministe célèbre de la « Cause des femmes » que tous les médias encensent aujourd’hui, Gisèle Halimi défend, dès son plus jeune âge, la « cause des opprimés ».
Ses combats anticolonialistes en Tunisie et en Algérie sont clairement présentés dans le document Le Maitron, dictionnaire biographique Mouvement ouvrier et Mouvement social
# Soutien à la cause tunisienne
De rebelle qu’elle a toujours été, Gisèle Halimi devient militante et engage des combats pour l’indépendance de la Tunisie, son pays colonisé par la France, en 1949 dès son retour de Paris où elle a obtenu son diplôme d’avocate..
J’avais onze ans lorsque éclata, à Tunis, la grande répression du 9 avril 1938 [une date charnière dans l’histoire du mouvement nationaliste tunisien]. Des mitraillettes tiraient dans la rue, des tanks barraient le boulevard Bab-Benat, des soldats — beaucoup de Noirs, des Sénégalais, j’en avais été frappée — sillonnaient, l’arme au poing, les ruelles de la Médina. Le sang coula, notamment à la Zitouna [université religieuse située alors dans la mosquée éponyme],où plusieurs étudiants furent abattus. (…) Je me souviens encore de cette journée nationaliste…
Source : http://Extrait de « Le lait de l’oranger » Mémoires du pays natal https://www.monde-diplomatique.fr/mav/160/HALIMI/58885
À vingt et un ans, Gisèle Halimi a plaidé devant les tribunaux d’exception pour Habib Bourguiba (futur président de la Tunisie indépendante) qui fut son premier client, alors, en exil, purgeant une énième peine pour sa Patrie. Elle n’était, à cette époque, qu’avocate stagiaire.
Par la suite, inscrite au barreau de Tunis en 1949, elle exerce jusqu’à 1956, en défendant ses compatriotes nationalistes, simples citoyens, activistes ou syndicalistes, car l’UGTT fut, avec le Parti bourguibiste et les cadres et militants du Parti communiste, le vivier de la lutte anticolonialiste.
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# Soutien à la cause algérienne
Gisèle Halimi est aussi « une des ferventes défenseuses de la cause nationale lors de la guerre de libération de l’Algérie » (APS). C’est ainsi qu’elle devient l’avocate du FLN (Front de Libération Nationale) et qu’elle défend les militants du MNA (Mouvement National Algérien) poursuivis par la justice française. En 1960, apprenant qu’une Algérienne de 22 ans, Djamila Boupacha, militante du FLN, accusée d’avoir posé une bombe a été arrêtée, torturée et violée par des soldats français, elle accepte de la défendre.
Commence alors une longue bataille, dans laquelle Gisèle Halimi entraîne Simone de Beauvoir. Celle-ci écrit une tribune pour Le Monde « POUR DJAMILA BOUPACHA« et crée un comité, avec, notamment, Jean-Paul Sartre, Louis Aragon, Geneviève de Gaulle, Germaine Tillion.
Djamila est finalement jugée en France, à Caen, en 1961. En dépit de la brillante plaidoirie de Gisèle Halimi, elle est condamnée à mort, mais sera amnistiée et libérée en 1962 après les accords d’ Évian qui mettent fin à la guerre d’Algérie.
6 septembre 1960, Le Manifeste des 121
Gisèle Halimi rejoint de nombreux intellectuels français, universitaires, artistes, écrivains, cinéastes … dont Robert Barrat, Simone de Beauvoir, Pierre Boulez, André Breton, Marguerite Duras, Edouard Glissant, Claude Lanzmann, François Maspero, Françoise Sagan, Nathalie Sarraute, Jean-Paul Sartre, Simone Signoret, François Truffaut, Vercors, Pierre Vidal-Naquet, entre autres, qui ont publié, le 6 septembre 1960 dans le magazine Vérité-Liberté de Robert Barrat (militant catholique de la lutte anticolonialiste) le « Manifeste des 121″, ou « Déclaration sur le droit à l’insoumission dans la guerre d’Algérie », un article qui prônait la désobéissance militaire et l’indépendance de l’Algérie. Il sera censuré et le journal Vérité-Liberté saisi.
Le manifeste se termine sur trois propositions finales :
- « Nous respectons et jugeons justifié le refus de prendre les armes contre le peuple algérien. »
- « Nous respectons et jugeons justifiée la conduite des Français qui estiment de leur devoir d’apporter aide et protection aux Algériens opprimés au nom du peuple français. »
- « La cause du peuple algérien, qui contribue de façon décisive à ruiner le système colonial, est la cause de tous les hommes libres. »
La lutte courageuse de Gisèle Halimi contre la torture !
Gisèle Halimi dénonce les exactions et l’usage de la torture par l’armée française, ce qui lui vaudra une arrestation et une brève détention.
De 1956 aux accord d’Évian de 1962, je n’ai cessé de faire des allers-retours entre Alger et Paris où j’étais désormais installée pour assurer la défense des Algériens arrêtés, insurgés, indépendantistes. C’était pour moi une évidence. Mais les pouvoirs spéciaux votés en 1956 avaient pris le droit en otage. La justice n’était souvent qu’un simulacre. J’ai découvert, horrifiée, l’étendue des exactions commises par l’armée française, la torture érigée en système, les viols systématiques des militantes arrêtées, les condamnations sur aveux extorqués, sans compter les disparitions et exécutions sommaires. J’étais abasourdie ».
Source : https://www.franceculture.fr/droit-justice/france-culture-rend-hommage-a-gisele-halimi-combattante-des-droits-des-femmes
L’indépendance de l’Algérie, Archive INA 1974
« je crois qu’un peuple qui est humilié est un peuple qui se battra jusqu’au bout pour recouvrer sa dignité« .
Source : Gisèle Halimi « L’indépendance de l’Algérie » | Archive INA
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# Engagement anti-impérialiste
– Crimes de guerre des États-Unis au VIÊT-NAM
Au niveau international, Gisèle Halimi participe à une commission d’enquête sur les crimes de guerre américains durant la Guerre du Viêt Nam. Alors que la contestation s’amplifie aux États-Unis et dans le monde occidental, des intellectuels et activistes se réunissent autour du philosophe britannique Bertrand Russell afin d’enquêter et de porter un jugement sur l’intervention américaine au Viêt Nam et fondent, le 15 Novembre 1966, un tribunal d’opinion, également connu sous le nom de Tribunal international des crimes de guerre et Tribunal Russell–Sartre pour dénoncer la politique des États-Unis dans le contexte de la guerre du Viêt Nam. Jean-Paul Sartre en deviendra président exécutif le 17 novembre 1966.
– Contre la dictature franquiste : procès de Burgos
Gisèle Halimi, avocate de Djamila Boupacha, de Mehdi Ben Barka, présidente de la commission d’enquête du Tribunal Russell sur les crimes de guerre américains au Vietnam, observatrice judiciaire aux procès de Rabat et d’Athènes, a été envoyée par la Fédération internationale des Droits de l’Homme au procès sommaire de Burgos qui a suscité de violentes réactions mondiales et internationales en 1970.
Source http:// »http://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Temoins/Le-Proces-de-Burgos
– Guerre de l’OTAN contre la YOUGOSLAVIE
Son engagement international la conduit à une prise de position contre la guerre de Serbie. En 1999, elle signe, pour s’opposer à la guerre, la pétition « Les Européens veulent la paix », initiée par le collectif « Non à la guerre, Non à l’OTAN« .
Le « plus grand défi militaire » – d’après l’expression de Clinton – de l’histoire de l’OTAN, fut en fait un passage à tabac sadique d’un petit pays par les forces militaires les plus puissantes du monde.
Ces bombardements impitoyables sur la Yougoslavie furent les premières concrétisations d’une longue série d’agressions prédatrices réalisées par une institution non élue, l’OTAN, qui se place au-dessus des lois, des nations et des peuples.
Michel Collon Tuer une nation. L’assassinat de la Yougoslavie de Michael Parenti
– Soutien à la cause du PEUPLE PALESTINIEN
Gisèle Halimi fut l’une des avocates de Marwan Barghouti, emprisonné par Israël et refusant de reconnaître les tribunaux de l’occupant, et l’une des premières signataires de la pétition lancée en 2002 par CAPJPO (Coordination des Appels pour une Paix Juste au Proche-Orient) contre l’occupation par Israël de la Palestine.
« L’humanité s’est transformée en une grande famille, donc nous ne pouvons pas assurer notre prospérité si nous ne garantissons pas la prospérité de tous. Si vous voulez être heureux, vous devez vous résigner à voir les autres aussi heureux », Bertrand Russell, 1872-1970
Gisèle Halimi fera également partie du comité de parrainage du Tribunal Russel sur la Palestine, dont les travaux ont débuté le 4 mars 2009, aux côtés d’Henri Alleg, ex-directeur du journal communiste « Alger Républicain » (auteur de « La Question« sur la torture pratiquée par l’armée française en Algérie), Raymond Aubrac résistant, Pr Albert Jacquard biologiste généticien et essayiste, Stéphane Hessel diplomate et militant politique, Naomi Klein (journaliste canado-états-unienne auteur de la Stratégie du choc) Ilan Pappé (historien israélien), Michel Warschawski (historien, militant pacifiste israélien) Jean Ziegler (sociologue suisse rapporteur pour l’ONU), Zebda (groupe de musique français), Howard Zinn (historien états-unien) et de nombreux autres membres au niveau international.
Tribunal Russell pour la Palestine
Issu d’une initiative privée, il se présente comme un « tribunal d’opinion » qui a pour objet de juger en fonction d’une méthode judiciaire plusieurs aspects de la politique israélienne, spécialement dans les territoires occupés.
« J’ai participé au premier Tribunal Russell, celui que présidait Jean-Paul Sartre sur les crimes américains au Vietnam. Je me souviens du jour où le grand Bertrand Russell nous a convoqués à Londres et a dit : « Maintenant, cela suffit avec le crime de silence. » J’espère que cette fois aussi nous réussirons à briser le silence ». Quant à la solution ? « Quand on est là-bas, elle est une évidence : mettez fin à l’occupation israélienne, et l’aurore se lèvera. Si les troupes se retirent, les voix de la paix se feront entendre » expliquait Gisèle Halimi à l’Humanité en 2002.
Source : https://www.humanite.fr/gisele-halimi-une-vie-de-combats-691963
GAZA « JE NE VEUX PAS ME TAIRE »
Appel publié le 28 juillet 2014, six ans, jour pour jour, avant sa disparition !
« Un peuple aux mains nues – le peuple palestinien – est en train de se faire massacrer. Une armée le tient en otage. Pourquoi ? Quelle cause défend ce peuple et que lui oppose-t-on ? J’affirme que cette cause est juste et sera reconnue comme telle dans l’histoire ».
Source – https://www.humanite.fr/gaza-je-ne-veux-pas-me-taire-548310
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La Cause des femmes : la passion de convaincre !
Les années 1970 sont un moment de désillusion pour Gisèle Halimi, qui se rend compte que ses « copains libertaires » avec qui elle a fait Mai 68 considèrent en fait, tout libertaires qu’ils soient, que les femmes doivent rester à leur place, se taire et continuer d’être aux petits soins des hommes.
Si elle considère que le féminisme est la vraie politique, elle admet cependant que le féminisme peut être politique, qu’il existe un féminisme de droite, et un féminisme de gauche. Ce dernier s’attache d’avantage à l‘émancipation économique des femmes, et s’intéresse aux changements de société dans ses racines mêmes.
https://www.franceculture.fr/emissions/voix-nue/gisele-halimi-45
# Combat pour le droit à l’avortement
– Manifeste des 343, 5 avril 1971
Féministe depuis son adolescence, Gisèle Halimi est signataire du Manifeste des 343 femmes, publié dans le n°334 du
le 5 avril 1971, qui déclarent avoir avorté et réclament le libre accès aux moyens contraceptifs. Acceptant le risque de subir des sanctions, elle est la seule avocate signataire du Manifeste.
Un million de femmes se font avorter chaque année en France. Elles le font dans des conditions dangereuses en raison de la clandestinité à laquelle elles sont condamnées, alors que cette opération, pratiquée sous contrôle médical, est des plus simples. On fait le silence sur ces millions de femmes.
Je déclare que je suis l’une d’elles. Je déclare avoir avorté. De même que nous réclamons le libre accès aux moyens anticonceptionnels, nous réclamons l’avortement libre.
Le Nouvel Observateur, n 334, 5 avril 1971 °https://www.nouvelobs.com/societe/20071127.OBS7018/le-manifeste-des-343-salopes-paru-dans-le-nouvel-obs-en-1971.html
343 femmes, connues et inconnues, anonymes et publiques, parmi lesquelles Simone de Beauvoir, Catherine Deneuve, Marguerite Duras, Brigitte Fontaine, Gisèle Halimi, Nicole Higelin, Bernadette Lafont, Jeanne Moreau, Françoise Sagan, Delphine Seyrig, Nadine Trintignant... s’accusent volontairement d’avoir eu recours à l’avortement. En affirmant avoir avorté, ces 343 « salopes » (terme employé par Charlie Hebdo en Une, le 12 avril 1971, resté dans la postérité) tombaient directement sous le coup de la loi. Leur objectif était de frapper les consciences et d’obtenir le droit pour les femmes d’avorter, ce qui était, à l’époque, un délit condamné par la justice.
En 1975, Simone de Beauvoir revenait sur l’impact de ce manifeste des 343 salopes sur le vote de la loi Veil, donnant le droit à l’IVG (Interruption Volontaire de Grossesse).
« En ce qui concerne l’avortement, nous les féministes, nous pouvons être fières car je me demande si cette loi aurait eu lieu si on n’avait pas commencé par signer le manifeste des 343.
Source : https://www.ina.fr/contenus-editoriaux/articles-editoriaux/5-avril-1971-le-manifeste-des-343
# Choisir la cause des femmes
Gisèle Halimi et Simone de Beauvoir fondent en juillet 1971, peu après le Manifeste des 343, « Choisir la cause des femmes » qui est, à la base, un mouvement de lutte pour la dépénalisation de l’avortement.
Le slogan des féministes de « Choisir la cause des femmes » : « La contraception, ma liberté. L’avortement, mon ultime recours. Donner la vie, mon choix ».
# Le féminisme de Gisèle Halimi, un humanisme
En s’émancipant, les femmes aident les hommes à s’émanciper. C’est ensemble qu’ils doivent lutter contre l’aliénation.
Gisèle Halimi a toujours insisté sur le fait que le féminisme est un combat qui a pour particularité de ne pas éliminer l’oppresseur – l’homme.
Le féminisme, par ses combats, a jeté les bases d’un changement social important, avec plus de justice, plus d’égalité.
Les féministes françaises n’ont jamais voulu exclure ou liquider les hommes. Leur projet global de société est essentiellement mixte. Les hommes doivent avoir l’«intelligence théorique» de leur libération à travers la nôtre. Nous les convaincrons…
Source : Le complot féministe Gisèle Halimi
– 1972, les procès politiques de Bobigny
°° Procès de Marie-Claire Chevalier
Le 11 octobre 1972, se tient à huis-clos le procès de Bobigny où Gisèle Halimi défend une jeune fille de 16 ans, Marie-Claire Chevalier qui avait avorté suite à un viol.
Malgré le huis-clos, elle saura mettre l’opinion publique du côté des inculpées. Dans une plaidoirie passionnante, elle dénonce la loi de 1920 qui interdit la contraception et l’avortement, une loi, dira-t-elle
« d’un autre âge », « la pierre de touche de l’oppression qui frappe les femmes » : « Cette loi, Messieurs, elle ne peut pas survivre et, si l’on m’écoutait, elle ne pourrait pas survivre une seconde de plus : pourquoi ? Pour ma part, je pourrais me borner à dire : parce qu’elle est contraire, fondamentalement, à la liberté de la femme, cet être, depuis toujours opprimé ».
Gisèle Halimi refuse de demander pardon au nom de sa cliente ; elle transforme sa plaidoirie en une tribune pour le droit à l’interruption volontaire de grossesse et fait elle-même le procès de la loi liberticide de 1920 sur l’avortement.
« Nous, les femmes, nous ne voulons plus être des serves... Est-ce que vous accepteriez, vous, Messieurs, de comparaître devant des tribunaux de femmes parce que vous auriez disposé de vos corps ? »
Source https://information.tv5monde.com/terriennes/deces-de-gisele-halimi-inlassable-avocate-des-droits-des-femmes-323794
°° Procès de Michèle Chevalier et des 3 femmes qui l’ont aidée à pratiquer un avortement clandestin
Gisèle Halimi convoque Simone de Beauvoir, Michel Rocard, les Prix Nobel de médecine Jacques Monod et François Jacob, témoignent à la barre du Palais de Justice de Bobigny en novembre 1972, où l’on juge Michèle Chevalier, mère qui a aidé sa fille Marie-Claire à avorter.
À la sortie du tribunal, le 22 novembre 1972, elle déclare ainsi devant les micros et les caméras des journalistes, entourée de nombreuses militantes et sympathisantes :
« Ce jugement est quand même un pas irréversible pour un changement de la loi, pour deux raisons. D’abord parce qu’il a exprimé le désarroi de tous les juges devant ce problème. […] Et c’est un pas parce que le procès lui-même, quel qu’ait été le jugement, le procès lui même a marqué un pas irréversible. Disons que le tribunal a été troublé.»
Source : https://www.ina.fr/contenus-editoriaux/articles-editoriaux/1972-gisele-halimi-au-proces-de-bobigny-un-pas-irreversible/
C’est grâce à son combat lors de ce procès « qu’un pas irréversible » vers la dépénalisation de l’avortement et la loi Veil du 17 janvier 1975 relative à l’interruption volontaire de la grossesse a été franchi.
Bibia Pavard, historienne dira :
« Avec ce procès, elle a transformé un fait privé en fait politique. Et c’était d’ailleurs sa méthode. Elle prenait toujours une situation qu’elle jugeait exemplaire d’une injustice et transformait le procès en tribune pour faire passer ses idées. »
Source : https://www.la-croix.com/France/Mort-Gisele-Halimi-avocate-figure-feminisme-2020-07-28-1201106750
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# Le procès qui a changé le regard de la France sur le viol
En 1978, lors d’un autre procès symbolique, à Aix-en-Provence, devant les assises des Bouches-du-Rhône, Gisèle Halimi représente deux jeunes femmes belges violées par trois hommes qui plaident non coupables, Anne Tonglet et Araceli Castellano. De ces viols, l’une d’elle tombe enceinte et se fait avorter, une pratique encore illégale à l’époque en Belgique.
Pour Gisèle Halimi, l’enjeu de cette bataille est de :
« changer les rapports entre les hommes et les femmes » car « il ne peut y avoir de société où le couple soit basé sur un rapport de force physique« . »En fait, une femme violée, c’est une femme cassée. C’est une femme qui ne s’en remettra jamais, elle entre dans une espèce de coma« , disait l’avocate en 1977 lors d’une interview télévisée.
Source :https://information.tv5monde.com/terriennes/deces-de-gisele-halimi-inlassable-avocate-des-droits-des-femmes-323794
Hors du prétoire, Gisèle Halimi est bousculée, injuriée, menacée. Les hommes sont condamnés. Ce procès permet une révision de la loi : la loi de 1980, qui reconnaît le viol comme un crime puni de 15 ans de prison.
Voilà ce que l’avocate et co-fondatrice de « Choisir la cause des femmes » Gisèle Halimi disait à propos du viol en 1977
Sur la prostitution
Sur le viol, on a progressé, mais c’est une violence visible. Tandis que la prostitution, on l’habille comme un choix. Et c’est cela qu’il faut combattre radicalement.
On ne peut pas être féministe et défendre ce servage des femmes. De même qu’une femme a le droit de choisir de donner la vie, que l’on ne peut pas l’obliger à mettre au monde un enfant, de la même façon, on ne peut pas accepter qu’elle ait à commercialiser son sexe.
Idem pour les « mères porteuses ». Quand j’étais à l’Assemblée Nationale, j’ai fait voter une loi qui interdit la location des ventres. Tout cela tient ensemble. Louer son utérus, c’est une forme de prostitution.
Accepter la prostitution ou les mères porteuses, c’est créer des catégories de femmes construites sur l’argent. Ce n’est pas supportable. On a d’un côté les femmes riches et stériles, de l’autre les femmes fécondes et pauvres. Les unes étant au service des autres. Il faut tenir bon sur l’interdiction totale de commercialisation des organes.
Source : https://mouvementdunid.org/prostitution-societe/tribunes/gisele-halimi-avocate-et-feministe/
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Les combats de Gisèle Halimi vont se poursuivre quand elle sera élue député de l’Isère.
1981-1984, Députée de la 4ème circonscription de l’Isère
Gisèle Halimi se présente aux élections législatives parce qu’elle croit en la puissance du pouvoir législatif. Élue à l’Assemblée nationale (députée de la 4ème circonscription de l’Isère) de 1981 à 1984, elle siège comme apparentée au groupe socialiste, puis y dénonce un « bastion de la misogynie».
Elle intervient notamment pour l’abolition de la peine de mort, contre la prolifération des centrales nucléaires, contre les « mères porteuses » et dépose une dizaine de propositions de loi en faveur des femmes (congé parental, quota électoral (parité), dépénalisation de l’homosexualité (projet adopté le 20 décembre 1981), remboursement de l’IVG..).
La politique n’a pas voulu de moi, et je le lui rendais bien. Je trouvais que la politique, dans ce que j’envisageais comme projets de vie et d’avenir, était réductrice, en particulier pour les femmes. La politique, dans l’ensemble, est une politique mâle, surtout à l’époque. C’était quelque chose de masculin. Les chefs étaient tous masculins, les grands orateurs, les leaders, ceux qu’on encensaient étaient masculins… De temps en temps, il y avait comme une petite tache de couleur féminine dans les groupes, pour justifier une mixité qui n’en était pas une, puisqu’une vraie mixité est paritaire. Cette politique ne me séduisait donc pas. […] Je pensais que la vraie politique, c’était le féminisme.
Source : https://www.franceculture.fr/emissions/voix-nue/gisele-halimi-45
Elle se déclarera déçue par François Mitterrand dont elle avait pourtant soutenu la candidature dès 1965, avec la création du Mouvement démocratique féminin (MDF) pour soutenir sa candidature à la présidence de la République, ainsi qu’en 1981 où elle fut élue députée.
Gisèle Halimi défend la laïcité
Elle interviendra, notamment, dans les débats controversés sur le port du voile à l’école
La vraie question – les signes religieux à l’école sont-ils compatibles, dans certaines conditions, avec nos principes constitutionnels ? -, noyée dans le flou de certaines approches, divise.
Sont en cause le principe de la laïcité de l’État (art. 2 de la Constitution), qui constitue à la fois un principe politique et un mode d’emploi juridique, et son corollaire direct dans l’enseignement public, la liberté de conscience, d’opinion et d’expression (art. 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen). L’égalité des sexes (préambules des Constitutions de 1946 et 1958) est un autre principe de même valeur que le précédent. Il convient d’y insister pour contrer une certaine mollesse à le défendre, dans cette problématique.
Théoriquement, la laïcité, dont le fondement même est né de la loi de 1905 (séparation de l’Église et de l’État), garantit aux citoyen(ne)s la neutralité du service public, conséquence de l‘indépendance du politique à l’égard du religieux.
Laïcité : une loi pour la cohésion, par Gisèle Halimi
En plateau, Gisèle Halimi, présidente du mouvement « Choisir », s’explique sur son départ du mouvement SOS Racisme, favorable au port du voile islamique à l’école. Plus largement, elle soulève la question de la dignité des femmes musulmanes. – Journal télévisé de FR3, 2-11-1989
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1998, Militante altermondialiste, elle participe à la création d’Attac
En 1998, Gisèle Halimi fait partie de l’équipe qui crée ATTAC (Association pour la taxation des transactions financières et pour l’action citoyenne). Elle rédigera les statuts de l’association avec Bernard Cassen.
Connue surtout pour son travail admirable sur les droits des femmes, l’on sait peut-être moins que Gisèle était aussi internationaliste et particulièrement sensible à la pauvreté et aux injustices que supportent les peuples du « Tiers Monde » comme on disait alors. Née elle-même en Tunisie, elle défendait l’idée lancée dans un éditorial d’Ignacio Ramonet, directeur du Monde Diplomatique, d’une taxe sur les transactions financières qui pourraient être collectée et transférée aux communautés du Sud.…
C’est Gisèle qui a accepté cette charge et qui, avec le concours de Bernard, a rédigé nos statuts. Et c’est Gisèle que nous avons consulté en premier chaque fois qu’un avis sur une question de droit se présentait. Elle était notre collègue, notre conseillère, notre camarade.
Une femme qui luttait pour les femmes, oui, mais aussi qui luttait pour un monde plus juste pour tous.
Source : https://france.attac.org/actus-et-medias/salle-de-presse/article/gisele-halimi-n-est-plus-attac-est-en-deuil
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« Mère, femme, avocate, militante politique : tout ça c’est la même chose. Je ne suis pas à tiroir. Je suis un être humain. Je voudrais être à part entière et je voudrais que toutes les femmes le soient ».
Ainsi se définissait Gisèle Halimi, sur un plateau de télévision en janvier 1974, face à une militante anti-avortement. Aujourd’hui Madame | ORTF | 08/01/1974
Les féministes françaises n’ont jamais voulu exclure ou liquider les hommes. Leur projet global de société est essentiellement mixte. Les hommes doivent avoir l’«intelligence théorique» de leur libération à travers la nôtre. Nous les convaincrons.
Gisèle Halimi : Le «complot» féministe dans Le Monde Diplomatique – Août 2003
Merci, Gisèle Halimi pour votre courage et votre dévouement à la cause des opprimés … peuples, hommes et femmes !