La Sociale le nouveau film de Gilles PERRET, est actuellement diffusé en avant- première. Sa sortie nationale aura lieu en octobre. Ce film-documentaire est d’une très grande force, dans la lignée des précédents (Ma mondialisation 2006, De mémoires d’ouvriers 2012, Les jours heureux 2013).
Au travers des yeux de Jolfred FREGONARA, 96 ans, acteur de la mise en place de la sécurité sociale en 1946 et de Michel ETIEVENT, écrivain qui œuvre à faire connaître le rôle décisif d’Ambroise CROIZAT, c’est toute l’épopée glorieuse de l’instauration de la Sécurité Sociale qui est expliquée.
CROIZAT, FREGONARA, ETIEVENT et PERRET ont un commun, outre leur engagement politique, le fait d’être liés à la Savoie.La Sociale :
Le film nous transporte dans les luttes populaires et les avancées sociales extraordinaires qu’elles ont permises. Parmi elles, probablement la plus importante : la Sécurité Sociale. Avec la « sécu » un vieux rêve émanant des peuples à vouloir vivre sans l’angoisse du lendemain voyait enfin le jour.
Son principal bâtisseur se nommait Ambroise CROIZAT, ministre communiste à la Libération.
En moins de huit mois, dans un pays ruiné, 138 caisses sont édifiées par un peuple de militants, essentiellement CGT, sur leur temps de congés ou hors de leur temps de travail. Jolfred FREGONARA se souvient :
« On ne s’imagine pas ce qu’a pu être ce fabuleux moment de la construction. Commençait une nouvelle ère de dignité. Nous montions les caisses dans un enthousiasme incroyable parce que nous savions que nous allions, pour la première fois, pouvoir nous soigner et jouir du repos décent de la retraite et tout cela à travers une institution que nous allions gérer nous-mêmes. ».
L’enseignement principal du film est de montrer comment la création de la sécu s’est appuyée sur la mobilisation militante et sur la classe ouvrière. Ce fut une vraie lutte de classe face au patronat, aux forces réactionnaires qui n’en voulaient pas, voyant s’éloigner un marché prometteur pour le capital. La bourgeoisie dut s’incliner devant le rapport de force créé par une CGT et un PCF puissants et par un peuple avide de justice et d’égalité. Aujourd’hui pour beaucoup de français, la Sécurité Sociale est un acquis, elle fait partie de la vie et semble éternelle. Le film montre qu’il n’en est rien. Des interviews de dirigeants du MEDEF ou de partis de droite, il ressort leur haine de la solidarité et leur rêve de se débarrasser de la Sécu pour la livrer au privé. On sait comment déjà ils l’ont affaiblie et fragilisée.
Le film montre aussi la bataille de mémoire que les ennemis de la Sécu et des travailleurs ont menée et continuent de mener pour que soient oubliés l’origine, le but et les fondements progressistes et démocratiques de la Sécu. Il s’agit de la faire passer pour un simple organisme technique, alors que c’est un outil social de lutte pour une société plus juste et sécurisée. Très parlante à cet effet la séquence tournée à l’Ecole nationale des cadres de la Sécu à Saint-Etienne. Aucun de ces cadres ne connaissait la genèse historique de la Sécu ; aucun ne connaissait Ambroise CROIZAT, pas même la Directrice. Dans le bâtiment, aucune référence à cet homme essentiel. Par contre, plusieurs panneaux mettent en avant Pierre LAROQUE, gaulliste nommé directeur de la Sécu en 1944 et qui était sous les ordres de CROIZAT. LAROQUE déclara d’ailleurs à plusieurs reprises que « sans un homme comme Ambroise CROIZAT, rien n’eut été possible ». On voit bien là comment tout est fait pour manipuler et même effacer la mémoire collective.
« La sociale » n’est pas un film sur le passé, il est parfaitement d’actualité car ce qui s’est joué hier, se joue toujours aujourd’hui.
D’un point de vue technique et esthétique j’ai trouvé ce film plus harmonieux, mieux « fondu », plus aéré que les précédents, ce qui rajoute à sa force. Il n’a aucun moment creux et à la fin on a du mal à croire qu’ 1h25 minutes sont déjà passées.
Un film à voir et à faire voir absolument.
Laurent NARDI
Synopsis du film : Il y a 70 ans, les ordonnances promulguant les champs d’application de la sécurité sociale étaient adoptées. Un vieux rêve séculaire émanant des peuples à vouloir vivre sans l’angoisse du lendemain voyait enfin le jour.
Le principal bâtisseur de cet édifice des plus humaniste qui soit se nommait Ambroise Croizat. Qui le connait aujourd’hui ?70 ans plus tard, il est temps de raconter cette belle histoire de « la sécu ». D’où elle vient, comment elle a pu devenir possible, quels sont ses principes de base, qui en sont ses bâtisseurs et qu’est-elle devenue au fil des décennies ?
Au final, se dresseront en parallèle le portrait d’un homme, l’histoire d’une longue lutte vers la dignité et le portrait d’une institution incarnée par ses acteurs du quotidien.
Plus d’infos sur le film, date des avants premières, projections ect.