A quelques heures du vote du premier tour, www.initiative-communiste.fr donne la parole à un jeune progressiste qui appelle, pour briser les chaînes de l’Union Européenne et donner un avenir et la Paix à la jeunesse au vote Mélenchon
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Le vote Mélenchon pour la libération nationale
Le présent article n’a pas pour but de convaincre les lecteurs encore réticents de la nécessité d’une sortie de l’euro et de l’Union Européenne. Il s’adresse avant tout à ceux qui font, à juste titre, de la libération nationale la principale priorité de cette élection présidentielle, et qui refusent de sacrifier un programme économique de progrès et de justice sociale au nom du dogme européiste de la « concurrence libre et non faussée », telle qu’elle est comprise depuis 1957 dans le traité de la CEE. Cet article se veut être un appel à tous ceux qui seraient tentés de ne pas se servir du bulletin Mélenchon pour engager un processus de rupture, non pas avec les seuls traités européens (qu’on ne saurait modifier sans l’accord unanime des 28 États membres, ce qui est arithmétiquement impossible compte tenu des divergences d’intérêts des différentes bourgeoisies nationales), mais avec l’Union Européenne elle-même, dans une aspiration à un « Frexit » progressiste de reconquête de l’indépendance économique et politique du pays, libéré de toute vassalisation impérialiste et colonialiste, étape éminemment nécessaire à une sortie du capitalisme.
Pour sortir de l’UE, pourquoi irons-nous voter Jean-Luc Mélenchon et pourquoi appelons-nous les jeunes à faire de même ?
Depuis quelques jours maintenant, et plus précisément depuis le dernier meeting de J.L Mélenchon à Dijon, le 19 avril, où il s’est dit « sûr » de ne pas avoir à sortir ni de l’euro ni de l’UE, nous entendons caqueter et se pavaner tous ceux qui se présentent comme les champions de la reconquête de la souveraineté populaire : JLM aurait tombé le masque, il ne quittera pas l’Europe. Il se serait lui-même désarmé avant le combat, il aurait abandonné avant même d’avoir lutté selon les mots de Marine Le Pen, écrivant d’avance la conséquence funeste de sa portée au pouvoir : il ne sera rien d’autre que le nouveau Tsipras français, repeint en traître à la patrie, déculotté et vassalisé à l’Europe libérale.
Du point de vue de la simple procédure (nous n’aborderons pas d’autres points, ni même l’idée largement suspecte d’un rassemblement « temporaire » transclivage), le programme de François Asselineau de l’UPR, qui prévoit l’application de l’article 50 et la sortie de l’UE sans négociation aucune, peut sembler plus alléchant, et ce, particulièrement depuis que Mélenchon parait multiplier les déclarations de non-sortie de l’Union Européenne. Et pourtant ! Pourquoi, nous souverainistes, irons-nous voter Jean-Luc Mélenchon et pourquoi appelons-nous les autres à faire de même ?
Pourquoi ne pas nous tourner vers les grands prêtres de l’article 50 et les puristes du Frexit « clair, net, sans fioriture » ? Pourquoi continuer d’apporter un soutien critique, mais forcément dynamique à celui qu’on nous prédit d’avance ( ces gens-là auraient-ils des boules de cristal ?) comme le nouveau François Mitterrand, et le fossoyeur pour les prochaines décennies à venir de toute possibilité de retour des forces de gauche ? Révolutionnaires, nous prendrons la défense, quoique temporaire et relative, du social-démocrate. Mais pour mieux l’attendre au tournant. Certains s’indigneront de cette alliance impure, du soutien apporté par un large front internationaliste et patriotique, allant de simples souverainistes de gauche à des communistes anti-UE, à un candidat déjà compromis par le vote de Maastricht de février 92 par fidélité (ô combien suspecte) à la personne de Mitterrand. Mais ce serait oublier que la politique est, par essence, un jeu impur en ce qu’elle est, selon le mot de Merleau-Ponty, un jeu avec les autres et contre les autres. Du reste, il me semble surprenant qu’il ne soit même pas venu à l’esprit de certains de considérer quelques modalités d’ordre purement stratégiques, pragmatiques, ou, disons-le clairement, électoralistes. Sans doute que ces gens, absorbés par l’analyse positiviste de chaque déclaration, oublient qu’il faut, en période de combat électoral, savoir mesurer la tendance du vent et emprunter les courants d’air chauds capables de porter le plus haut possible.
Gagner cette course de vitesse qui ne cesse d’opposer le camp social aux forces les plus réactionnaires voire fascisantes
Déjà Maurice Thorez parlait de cette course de vitesse qui ne cesse d’opposer le camp social aux forces les plus réactionnaires voire fascisantes pour la conquête des classes moyennes. Qu’il faille avaler du quinoa ou se repeindre en vegan pour attirer certaines franges des classes moyennes ascendantes, où est le problème ? De là même manière, c’est faire preuve, au mieux de naïveté, au pire de mauvaise foi que ne pas (vouloir ?) comprendre qu’une large partie de notre peuple en est encore, malheureusement, à réciter le mantra laminé de l’UE de la liberté, de la paix, et de la fraternité entre les peuples. On l’aura vu, l’infâme meute des loups politico-médiatiques, sauter à la gorge du candidat de la France Insoumise pour ses positions courageuses sur la crise syrienne et sur la question russe, qu’aucun à gauche n’a d’ailleurs eu le courage de formuler, en lui prêtant toute sortes de complaisances prétendument dictatoriales pour ne pas s’être plié aux crachats atlantistes. Et il devrait désormais afficher une position de sortie franche et nette de l’UE ? Ceux qui soutiennent cela feraient bien mieux de se remémorer la recommandation léniniste d’une avant-garde marchant « un pas et un seul au-devant des masses », et de travailler à la diffusion de ces idées en leurs sein, à défaut de se couper définitivement de la dynamique populaire de classe en train de se former (cf l’appel des syndicalistes FSU et CGT au vote Mélenchon). Dans un moment électoral se déroulant au sein d’un climat de confusion généralisée, il est nécessaire de se rassembler et de faire face tous ensemble aux adeptes de la « gouvernance » c’est -à-dire aux apprentis dictateurs pour lesquels « il ne saurait y avoir de choix démocratique contre les traités européens » (Jean-Claude Juncker, président de la Commission Européenne), capables des plus mièvres et des plus inquiétantes manipulations, et disposant d’un appareil d’information aux ordres. Le grand mérite de Mélenchon aura été, à gauche, d’avoir enfin brisé le silence solennel de la sacro-sainte eurobéatitude, dont le candidat Hamon est aujourd’hui le pâle gardien. Ce dernier ne manque d’ailleurs pas de répéter à tout bout de champ, à la suite de Macron, que voter Mélenchon équivaudrait clairement à une sortie de l’Union Européenne. Citoyens qui voulons rester souverains dans une France indépendante, nous l’espérons, et nous disons que dans ce contexte, l’ennemi ment rarement. Par ailleurs, voter pour un candidat comme M. Asselineau qui ne saurait en aucun cas se trouver au second tour, et pour un parti qui mettrait au minimum 15 ans à se hisser à un niveau suffisant, signifierait se couper d’une formidable opportunité d’accélération dans la diffusion de l’idée du Frexit, et d’un Frexit doté cette fois d’un véritable contenu de classe (ce que ne propose pas l’UPR, sous le prétexte pour le moins fallacieux de « ne pas être trop clivant » !).
Nous mettons ici en garde ceux qui n’ont de cesse de moquer le « vote utile » , les partisans d’une scission et de l’enfermement dans la « pureté » des idées : déserter le vote Mélenchon, c’est bel et bien laisser la voie libre à 5 ans de réaction anti-sociale, de casse du Service public, d’ubérisation de pans entiers de l’économie, au maintien de la France dans l’OTAN, dans les interventions illégitimes et impérialistes, et au durcissement sans précédent des traités euro-atlantiques et des lois liberticides. Tout cela au profit d’une gouvernance globale qui pourrait bien donner le coup mortel à toute résistance de type progressiste. Il est évident que le simple clivage droite-gauche a été largement enrichi par l’opposition entre souverainistes et globalisateurs européistes, dans une reconfiguration nouvelle qui met plus que jamais aux prises le camp du travail et celui du capital. Il s’agirait de ne pas diviser nos forces, contre une Union Européenne pensée comme une « assurance tout risque contre le retour du socialisme » en France et en Europe, selon les mots d’Alain Madelin.
Amplifier la dynamique populaire sur des positions de reconquête de la souveraineté populaire et de protection des conquêtes sociales et républicaines avec un front populaire antifasciste pour les 4 sorties : UE, Euro, OTAN et Capitalisme
Nous ne plaidons pas un alignement policé et docile sur les positions de Jean-Luc Mélenchon. Mais bien au contraire, à rejoindre la dynamique de la France insoumise sur des positions de reconquête de la souveraineté populaire et de protection des conquêtes sociales et républicaines.
De larges masses, parmi lesquelles les syndicats, ont répondu à l’appel de JLM, et de son souhait d’une large mobilisation populaire, de la mise en mouvement d’un peuple qui ne devra plus jamais, selon sa propre rhétorique, rester spectateur. Quand bien même JLM trahirait, il se trouvera pris au piège de son propre discours. Quand bien même il sommerait le peuple de s’arrêter net dans sa protestation légitime pour réclamer son dû, ce dernier, au nom duquel on a tant prétendu parler pendant cette campagne, pourra légitimement exiger que l’on applique les conséquences ultimes d’un programme économique de libération sociale et que l’on entame sans tarder le processus de libération nationale, par la sortie franche et sans négociation de la prison libérale des peuples.
En réalité, disons-le franchement, la personne de Mélenchon nous importe peu. Nous n’avons pas le culte ou même le souci de l’homme providentiel. Qu’il ait été trotskyste dans sa jeunesse, tout comme les faquins Cohn-Bendit ou Jospin, formés à la haine de l’esprit national et aujourd’hui chantres du fédéralisme et du néolibéralisme, n’est pas le signe d’une trahison annoncée. Et ceci d’autant plus que sa rhétorique réactive, bien au contraire, avec éclat le grand roman national de la gauche française : la glorification de la République jacobine, les clameurs de Valmy (référence centrale, selon Djordje Kuzmanovic, dans la conception du programme de la Défense de la France Insoumise), ainsi que le souvenir immortel de la Grande Révolution, lorsque l’Europe toute entière fut ébranlée en son cœur au réveil de son volcan français. Enfin, le patriotisme républicain redevient le flambeau nécessaire du camp progressiste. Et cela suffit à placer le candidat de la France Insoumise à mille lieues de Mitterrand, du trotskysme, et même de Tsipras.
N’en déplaise aux oreilles chastes, mais la stratégie populiste a cette grande vertu : en cas de non-respect des engagements fondamentaux, si la dynamique populaire engendrée par la France insoumise et particulièrement par les collectifs les plus cohérents et les plus eurocritiques (le collectif FI « Citoyens souverains » notamment, ou le PRCF qui travaille sur ces questions depuis 2004) est assez forte, elle sera en moyen de faire pression voire de renverser le porte-parole.
Que nous importe les spéculations pour savoir si Mélenchon est ou non sincère, il s’agit d’en faire ici le jouet de l’histoire. Loin de tout fétichisme, en fin de parcours, il s’agira de tuer le père, la dynamique l’emportera sur l’instigateur. À partir du moment où Mélenchon déclare que « L’Europe, on la change ou on la quitte », « dès lors qu’il y a un problème, la solution est le peuple » ou « entre l’Euro et la souveraineté du peuple français, je choisis la souveraineté », ces phrases nous appartiennent, et nous les ferons valoir comme des droits légitimes au sein des instances décisionnelles prévues par la mise en place de la 6ème République (Constituante, notamment) et dans la lutte électorale du référendum pour la sortie de l’UE tel qu’il est prévu par le plan B. Il en va donc de l’intérêt des souverainistes progressistes et des patriotes républicains de construire dès à présent un large front de libération nationale, prévoyant et organisant, au-delà de toutes les ambiguïtés du jeu plan A/ plan B, la sortie immédiate de l’Euro, de l’UE et travaillant par là même à la sortie du capitalisme. Aucune force ne sera de trop dans ce combat de diffusion des idées et d’agitation des esprits et des cœurs, et, disons-le franchement, pour la conduite victorieuse d’un processus aspirant à une fracture historique analogue à celle de la Révolution française. Il s’agira d’être prêt.
Simon Verdun
Les illustrations sont un choix de la rédaction.